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ALBANEL, CHARLES, prêtre, jésuite, missionnaire et explorateur, né en Auvergne en 1616 (al. 1613), mort au saut Sainte-Marie le 11 janvier 1696.

On a prétendu qu’il était né de parents anglais établis en France, mais cette opinion n’a d’autre fondement qu’une mauvaise lecture d’un texte de Thomas Gorst, garde-magasin et secrétaire du gouverneur de la baie d’Hudson, Charles Bayly. De la jeunesse d’Albanel, on ne connaît rien, sinon qu’il avait terminé deux années d’études philosophiques au moment d’entrer au noviciat des Jésuites de la province de Toulouse, le 16 septembre 1633. À partir de 1635, il enseigna successivement la grammaire, les humanités et la rhétorique aux collèges de Quercy (Cahors), de Carcassonne, de Mauriac et d’Aurillac. En 1636–1637, il professait la cinquième à Montpellier et l’année suivante, il poursuivait une troisième année de philosophie à Billom. Après ses quatre années de théologie à Tournon, il dut attendre jusqu’en 1648–1649 pour terminer sa formation religieuse par le troisième an. C’est en mars de cette dernière année qu’il prenait le bateau à destination de Québec, où le Journal des Jésuites note son arrivée le 23 août. Un mois après être débarqué à Québec, il partait pour Ville-Marie où son nom apparaissait, l’année suivante, au petit registre des baptêmes.

Dans les dix années qui suivirent, il se rendit à Tadoussac presque tous les hivers, revenant à Québec au printemps ou à l’été. Les dates de ses départs nous aideront à le suivre dans ses déplacements. Le 22 octobre 1650, il s’embarquait pour Tadoussac en vue d’hiverner chez les Montagnais ou Algonquins inférieurs et en revenait le 22 avril suivant. Il partait le 2 mai 1651 à bord d’une barque pour Tadoussac et Gaspé. Après un pénible hivernement avec les nomades montagnais, il était de retour à Québec pour repartir dès le 4 mai 1652 avec le père de Quen sur une frégate. Il revenait avec Louis Couillard de Lespinay, le 10 avril 1653. Le Journal des Jésuites mentionne, le 13 novembre 1653, que les pères de Québec ont reçu de ses lettres des mains de M. de Lespinay. Le 24 février 1654, on apprend qu’il passe son quatrième hiver au milieu des Amérindiens. Deux ans après, au témoignage du Journal, on reçoit de ses nouvelles en provenance de Tadoussac, le 31 octobre, par M. de Lespinay, et du Bic, le 17 novembre, par l’Amérindien Kahikohan. Il quitte cet endroit le 3 février 1657, accomplit à pied le voyage de retour par la rive sud en compagnie de Couillard et de quatre Français qui, après un voyage pénible, arrivent à Québec le 8 mars. Entre son départ de Québec, le 13 mai 1658, et son retour, le 8 août, il travaille à la mission de Sainte-Croix, près de Tadoussac où il s’est rendu en même temps que le père Du Peron, le frère Nicolas Charton et deux Français. En 1659, nouveau voyage à Tadoussac. Parti le 10 mai, il revient le 31 août sur le vaisseau de Lespinay, de retour de la chasse au loup marin. L’hiver suivant, il est encore à Tadoussac. Il a quitté Québec le 21 novembre 1659 avec quatre Français pour y revenir en avril 1660. Le 8 juillet 1660, il se rend à Trois-Rivières avec le gouverneur de Voyer* d’Argenson et leur embarcation est attaquée par les Iroquois au moment du retour. Le 14 septembre de la même année, il navigue jusqu’à Montréal pour aller hiverner dans la nation des Bœufs. Durant quelques années, le Journal des Jésuites est silencieux sur le père Albanel, mais on sait qu’il est localisé au Cap-de-la-Madeleine, où il est curé et supérieur. Le père Frémin le remplace à ces postes le 17 août 1665, mais Albanel conserve le soin principal des missions montagnaises ou algonquines alors ravagées par le fléau de l’eau-de-vie. Le Journal des Jésuites indique son départ de Trois-Rivières, le 16 novembre 1665, pour aller remplacer brièvement à la cure du fort Saint-Louis (Chambly) le père Du Peron, décédé six jours plus tôt. Dès le 2 décembre, il est à Trois-Rivières en attendant de monter plus haut, probablement dans le haut Saint-Maurice. En février 1666, peu de temps après avoir été nommé curé au fort Saint-Louis, il est accusé par le gouverneur de Rémy de Courcelle d’avoir dissuadé les Indiens de faire partie de son expédition de cet hiver-là. L’intendant Talon réussit à convaincre Courcelle de laisser tomber une accusation aussi surprenante et injuste. Le 14 octobre suivant, le père Albanel accompagne le régiment de Carignan-Salières à titre d’aumônier avec le père Raffeix* dans une marche contre les Iroquois. M. de Prouville de Tracy et ses militaires ont été très satisfaits de lui. L’année 1668–1669 se passe à la mission de Sillery. Durant le même hiver, on le retrouve parmi les nomades de la mission de Sainte-Croix. Il nous a laissé deux lettres où il a décrit ses travaux pendant cette période. Au cours de ses voyages, il a visité les Papinachois. Le 15 juin 1670, il partait de Tadoussac en mission d’évangélisation vers les Oumamiois (Bersiamites) après avoir obtenu de Nicolas Juchereau de Saint-Denis deux compagnons français.

En 1671, l’intendant Talon décida d’envoyer des « hommes de résolutions » vers la baie d’Hudson. « On jeta donc les yeux sur le père Charles Albanel, ancien Missionnaire de Tadoussac, nous rapporte le père Dablon, parce que depuis longtemps, il a beaucoup pratiqué les Sauvages, qui ont connaissance de cette mer, et qui seuls peuvent estre les conducteurs par ces routes, jusqu’à présent inconnuës ». Le voyage d’Albanel (1671–1672) avait pour but de découvrir si la mer du Nord était bien la baie d’Hudson et de vérifier la présence d’Européens qu’on disait français. Il s’agissait en effet de Chouart Des Groseilliers et de Radisson*, passés au service de l’Angleterre.

Le père Albanel a été amené à faire ses voyages vers la mer du Nord parce qu’il y avait longtemps que la Nouvelle-France ressentait le mystérieux attrait d’une région généralement considérée comme une frontière naturelle à compléter, en même temps que comme un riche territoire où les Amérindiens étaient pour les missionnaires des sujets à convertir et, pour les traiteurs, des alliés profitables au commerce des pelleteries. On savait déjà que la baie d’Hudson servait de passage aux explorateurs anglais dans leurs recherches de la mer de l’Ouest. Les Français aussi avaient quelques hypothèses à vérifier quant à ce passage. Ainsi, Jean Bourdon fit une première tentative par mer en 1657, mais dut rebrousser chemin au 55e degré. La même année, fut faite la prise de possession du bassin de la mer du Nord au nom du roi de France. En 1661, ces essais furent complétés par l’expédition terrestre accomplie sur l’ordre du gouverneur d’Argenson. Le groupe dont faisaient partie les jésuites Dablon et Druillettes, s’était rendu un peu au delà de la ligne du partage des eaux. Ce n’était que partie remise, car on comprenait en Nouvelle-France que le pays détenteur de cette région posséderait du même coup l’entrée de la mer de l’Ouest et l’inépuisable richesse du castor.

Le père Albanel quitta Québec le 6 août 1671 pour Tadoussac où il donna rendez-vous à ses deux compagnons Paul Denys* de Saint-Simon et un nommé Sébastien Provencher. Arrivé le 8 août, il s’assura les services de guides montagnais. Le groupe était à Chicoutimi le 26 et quitta l’endroit le 29 pour atteindre l’extrémité du lac le 7 septembre. Dix jours plus tard, Albanel rencontra cinq canots d’Attikamègues et de Mistassins et apprit la présence à la baie de deux navires anglais qui y faisaient la traite. Il crut alors préférable de se munir de passeports qu’il envoya chercher à Québec chez le gouverneur, l’intendant et l’évêque. Les messagers ne revinrent que le 10 octobre, trop tard pour entreprendre immédiatement le reste du voyage. On décida d’hiverner sur place et le père en profita pour évangéliser les Mistassins et baptiser leurs enfants. La saison fut plutôt rude, au dire du père Albanel qui la considéra comme le plus dur « des dix hivernements [qu’il avait] faits dans les bois avec les Sauvages » Il n’avait alors que 55 ans, même si Thomas Gorst le croit « a little old man ». Ses guides l’abandonnèrent et il ne dut qu’à sa diplomatie d’en trouver d’autres.

Le 1er juin 1672, nouveau départ de 3 canots portant 3 Français et 16 Amérindiens. Le 9, ils sont à la hauteur des terres, soit aux environs du point atteint par le père Dablon en 1661. Les Mistassins veulent leur interdire d’aller plus loin. Mais le père Albanel, par des présents et de bonnes paroles, réussit à les convaincre que les Français les protégeront contre leurs ennemis iroquois. Le 18 juin, l’expédition touche le lac Mistassini puis se trouve au lac Nemiskau le 25, descend la rivière Rupert, dont elle atteint l’embouchure le 28. Il y a là un navire anglais et deux maisons désertes. Avant de partir pour l’Angleterre, tout le monde est allé à la chasse. Le père profite de cette absence pour lier connaissance avec les Amérindiens, les instruire et baptiser quelques-uns d’entre eux. Après quelques jours de navigation et de recherches dans la baie James, Albanel confie une lettre aux Amérindiens pour Radisson et prend le chemin du retour le 6 juillet sans avoir rencontré ni Anglais, ni déserteur français. Trois jours plus tard, le groupe arbore les armes du roi de France au lac Nemiskau. Le 23 juillet, les voyageurs sont au lac Saint-Jean, puis, le 1er août, à Chicoutimi où les attend le capitaine qui doit les ramener à Tadoussac puis à Québec.

Dans le récit de son voyage, Albanel rapporte qu’il a effectué 200 baptêmes, 100 d’adultes et autant d’enfants. Il a identifié la baie d’Hudson, vu un navire anglais, établi de solides relations avec les Amérindiens. Mais il n’a rencontré aucun Blanc. Le voyage, rapporte-t-il, comporte de nombreuses difficultés : trajet de 880 lieues, 200 portages, sauts et passes dangereuses, méfiance des indigènes, etc. Il s’attribue enfin à lui-même l’idée d’une telle entreprise. « Jusqu’icy on avait estimé ce voyage impossible aux Français, qui après l’avoir entrepris déjà par trois fois, et n’en ayant pu vaincre les obstacles s’estoient veu obligez de l’abandonner dans le désespoir du succès. Ce qui paroist impossible, se trouve aisé quand il plaist à Dieu. La conduite m’en estoit deue après dix-huit ans de poursuites que j’en avois faites & j’avois des preuves assez sensibles que Dieu m’en réservoit l’exécution ».

« Beaux commencements », conclut-il d’une façon qui laisse prévoir une reprise prochaine. En effet, Frontenac [V. Buade] nous l’apprend dans une lettre à Colbert (13 novembre 1673) : « Je me suis servi du zèle que témoignait le Père Albanel, jésuite, d’aller faire une mission dans ces quartiers là pour tâcher de détourner les Sauvages, parmi lesquels il a beaucoup de créance, de prendre cette route du commerce anglais [...] Le dit Père Albanel doit pressentir Des Groseilliers s’il le rencontre et essayer de voir s’il pourra le faire rentrer dans nos intérêts ».

Muni d’une lettre de Frontenac du 8 octobre 1673 au gouverneur Bayly, Albanel part pour Tadoussac et il est en route vers la mer du Nord le 13 janvier 1674. Chemin faisant, un fardeau lui tombe sur les reins, l’immobilise et le contraint à hiverner dans les alentours du lac Saint-Jean. Il y reçoit la visite du père de Crespieul*, au cours de janvier, puis le 2 février et le 3 mars. La suite du voyage ne nous est connue que par les sources anglaises. Oldmixon, qui résume Gorst, nous dit qu’Albanel est parvenu à la rivière Rupert le 30 août 1674 en compagnie d’un jeune Amérindien et d’un Français né de parents anglais, probablement le neveu de Des Groseilliers. Albanel portait une lettre destinée à Des Groseilliers. Gorst prétend qu’Albanel aurait demandé refuge auprès de lui pour échapper aux mauvais traitements des Amérindiens et pour ne pas refaire le voyage si pénible du retour. Les Anglais de la baie d’Hudson ont considéré Albanel un peu comme un traître, un ennemi venu divertir les Amérindiens de leur alliance pour les gagner à l’amitié et au commerce des Français, en dépit de la lettre plutôt bienveillante de Frontenac. Retenus par Bayly, Albanel et son compagnon ont été expédiés en Angleterre après avoir reçu l’hospitalité, des vêtements et de l’argent. À Londres, Albanel aurait obtenu une lettre d’exonération pour ses supérieurs dont il redoutait les accusations pour avoir déserté les missions. Passé en France, le jésuite reprit le bateau pour le Canada et débarqua à Québec le 22 juillet 1676. Sur le vaisseau, il refusa de parler de son voyage et, plus tard, son compagnon promit de ne répondre aux questions qu’après la mort du père. Et ainsi la postérité fut à jamais privée de renseignements importants et précieux sur le détail de cette expédition. Trois jours après son retour à Québec, un concours de circonstances le fit nommer pour les missions des pays d’en haut. Il devient supérieur au saut Sainte-Marie, même s’il était « vieux et cassé », nous dit l’auteur de la Relation de 1679. Son extraordinaire don des langues lui a alors valu de recommencer une nouvelle expérience missionnaire. Il passa le reste de sa vie dans ces régions. Nommé supérieur des missions de Saint-François-Xavier (baie des Puants, aujourd’hui De Pere, Wisconsin), le 25 juillet 1676, il a été remplacé à ce poste par le père Henri Nouvel* en 1679. L’année de sa nomination, « il a remplacé la chapelle primitive par une jolie église », nous assure Gérard Malchelosse. En 1683, écrit le père Beschefer*, le père Albanel, pris de tremblements, vieilli, conserve tout le soin de la mission du saut Sainte-Marie depuis quelques années avec le père Louis André*. Le 11 janvier 1696, il meurt à cet endroit à l’âge de 80 ans.

Georges-Émile Giguère

ACSM, f. 802.— JR (Thwaites) LIII : 58–92 ; LVI : 148–217.— Nellis M. Crouse, Contributions of the Canadian Jesuits to the geographical knowledge of New France ([Ithaca, N.Y.], 1924).— Découvertes et Établissements des Français (Margry), I : 92–96.— Séraphin Marion, Relation des voyageurs français en Nouvelle-France au XVIIe siècle (Paris, 1923), 168–178.— Jacques Rousseau, Les Voyages du père Albanel au lac Mistassini et à la baie James, dans RHAF, III (1949–1950) : 556–586.— BRH, IX, 216s. ; XVIII : 160, 192 ; XXII : 226 ; XXV : 111.— HBRS (Rich), XXI (1958).— V. aussi la bibliographie de Thomas Gorst.

Bibliographie générale

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Georges-Émile Giguère, « ALBANEL, CHARLES », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 1, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 mars 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/albanel_charles_1F.html.

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Auteur de l'article:    Georges-Émile Giguère
Titre de l'article:    ALBANEL, CHARLES
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 1
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1966
Année de la révision:    2014
Date de consultation:    28 mars 2024