RATTIER, JEAN, quatrième maître officiel des hautes œuvres du Canada, né en France vers 1650, décédé à l’Hôtel-Dieu de Québec le 21 mai 1703.
Dès 1666, il était domestique à Trois-Rivières. Il épousa, en cette ville, le 6 février 1672, Marie Rivière, originaire du bourg du Cause, province de Saintonge, et ils eurent cinq enfants.
Le 28 janvier 1676, il s’installa à Saint-François-du-Lac où il cultiva la terre. Le 23 octobre 1679, il fut mêlé à une querelle au cours de laquelle une jeune fille fut mortellement blessée. Tenu criminellement responsable de cette mort, et condamné à la pendaison, il alla en appel devant le Conseil souverain qui, le 31 décembre 1680, confirma la première sentence. Or, l’exécuteur Jacques Daigre venait de mourir, le 26 mars 1680, et personne ne l’avait encore remplacé ; d’ailleurs il fut toujours difficile, au Canada, de trouver quelqu’un qui voulût exercer la fonction de maître des hautes œuvres. Les conseillers offrirent au criminel ou d’attendre en prison qu’on ait trouvé un exécuteur pour le pendre, ou d’accepter l’office de bourreau. Rattier s’empressa de choisir l’emploi de maître des hautes œuvres.
À l’époque, la société canadienne avait en horreur la personne qui exerçait cette ignoble fonction et tenait pour avilissantes toutes relations, quelles qu’elles fussent, avec le bourreau et sa famille ; cela explique pourquoi le nouvel exécuteur eut bien des difficultés à loger sa famille à Québec. Mais à peine l’avait-il installée dans une maison située hors de l’enceinte de la ville (car on ne lui permettait pas de demeurer à l’intérieur des murs) que des Québécois prirent plaisir à se rendre près de sa demeure pour insulter sa femme et ses enfants. Le Conseil souverain dut intervenir. Le 5 juillet 1695, il eut, sur la place publique de la basse ville de Québec, à mettre au carcan sa propre femme, trouvée coupable de recel. Il continua jusqu’à sa mort, en 1703, à exercer la fonction de bourreau.
Son fils cadet, Pierre, baptisé le 9 juillet 1680, à Trois-Rivières, après avoir songé, en 1703, à quitter le pays pour la Nouvelle-Angleterre, se fixa définitivement au Canada. L’année suivante, il épousa Catherine Rousseau, originaire de Sables d’Olonne en Poitou. Ils eurent sept enfants. Pierre Rattier réussit à faire vivre sa famille en s’engageant comme journalier chez différents employeurs de la région de Québec. Cependant, ne se contentant pas du salaire que lui donnaient ses, patrons, il leur dérobait divers outils et matériaux. C’est pourquoi, en 1710, il se trouvait en prison, accusé, avec sa femme, de ces vols et de quelques autres qu’il avait commis en compagnie du bourreau Jacques Élie. Le Conseil souverain lui offrit alors, comme à son père, de le décharger des accusations portées contre lui et sa femme, s’il acceptait de remplir l’office de maître des hautes œuvres, le bourreau précédent, Jacques Élie, venant d’être assassiné. Il accepta, devenant le sixième exécuteur officiel du Canada, poste qu’il occupa, jusqu’à sa mort, à l’Hôtel-Dieu de Québec, le 21 août 1723.
AHDQ, Registres des malades, 1698–1709 ; 1709–1722 ; 1723–1739.— AJQ, Registre d’état civil de Notre-Dame de Québec.— AJTR, Registre d’état civil de Trois-Rivières.— AQ, NF, Coll. de pièces jud. et net., 251 ; NF, Dossiers du Cons. sup., Mat. crim., III : 193ss ; NF, Registres de la Prévôté de Québec, 43, 1ss.— Jug. et délib., II, III, IV, VI, passim.— Recensements du Canada, 1666, 1681 (Sulte).— André Lachance, Le bourreau au Canada sous le régime français (« SHQ, Cahiers d’histoire », XVIII, 1966), 63–66, 72–75.— P.-G. Roy, Les bourreaux de Québec sous le régime français, BRH, XXIX (1923) : 3–12.
André Lachance, « RATTIER, JEAN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 2, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 11 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/rattier_jean_2F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/rattier_jean_2F.html |
Auteur de l'article: | André Lachance |
Titre de l'article: | RATTIER, JEAN |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 2 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1969 |
Année de la révision: | 1991 |
Date de consultation: | 11 déc. 2024 |