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NISSOWAQUET (Nosawaguet, Sosawaket, La Fourche, Fork), chef outaouais, dont le nom, apparemment, vient de Nassauaketon, qui signifie rivière fourchue, et qui servait à désigner l’une des quatre bandes outaouaises, né vers 1715, décédé en 1797.
Nissowaquet naquit au sein d’une bande de Nassauaketons dont le village était situé à côté du fort Michillimakinac (Mackinaw City, Michigan). En 1741, le sol étant épuisé en cet endroit, les Outaouais déménagèrent à L’Arbre Croche (Cross Village, Michigan), à 20 milles de là. Leur nouvel établissement, qui comptait environ 180 guerriers, s’étendait sur plusieurs milles le long du lac Michigan. Ses habitants y vivaient du printemps à l’automne, cultivant du maïs pour leurs propres besoins et pour la traite avec les Français qui pouvaient ainsi s’approvisionner sur place. À l’automne, ils se divisaient en groupes de familles et partaient en direction sud, vers les vallées de la St Joseph et d’autres rivières, pour chasser les animaux à fourrure pendant l’hiver et pour faire le sirop d’érable au printemps.
Vivant à proximité du fort Michillimakinac, la bande se lia avec les Français. L’attachement de Nissowaquet pour le fils de sa sœur, Charles-Michel Mouet de Langlade, encouragea son amitié à l’égard des Français et, plus tard, son association avec les Britanniques. En 1739, les Français levèrent un parti d’Outaouais pour appuyer Pierre-Joseph Céloron* de Blainville dans une expédition contre les Chicachas qui vivaient dans la vallée du bas Mississippi. Nissowaquet y participa avec d’autres chefs.
Il y avait beaucoup d’insatisfaction chez les Indiens des pays d’en haut pendant les années 1740 ; Nissowaquet et sa bande maintinrent néanmoins leur alliance avec les Français. On dit que cette bande fit avorter le projet d’un soulèvement des Indiens de l’Ouest, en 1744, par la révélation qu’ils en firent à Paul-Joseph Le Moyne de Longueuil. Quand la guerre éclata entre les Français et les Anglais dans les années 1750, Nissowaquet et ses guerriers partirent avec Langlade pour combattre à l’est. En août 1757, un parti de 70 guerriers apporta son aide à Montcalm* dans la prise du fort William Henry (aussi appelé fort George ; aujourd’hui Lake George, New York). À leur retour à L’Arbre Croche, ils rapportaient non seulement leur part de butin, mais la redoutable petite vérole. Les conséquences furent désastreuses. La tradition outaouaise rapporte que, « l’une après l’autre, les cabanes furent complètement évacuées – seuls des cadavres y gisant ici et là – des familles entières étant emportées par cette terrible maladie ».
Les Britanniques occupèrent le fort Michillimakinac en 1761 ; Nissowaquet et les Nassauaketons, tout comme Langlade, acceptèrent le nouveau régime. En juin 1763, lorsque les Sauteux de Michillimakinac, organisés par Minweweh*, s’emparèrent du fort, les Indiens de Nissowaquet sauvèrent la plupart des survivants, soldats et trafiquants, qu’ils amenèrent à L’Arbre Croche et qu’ils protégèrent pendant plus d’un mois. En reconnaissance de ses services, Nissowaquet obtint des réfugiés une grande quantité de marchandises de traite et un esclave personnel. Il utilisa une partie de ces marchandises pour la rançon des prisonniers aux mains des Sauteux, mais une bonne quantité resta dans sa cabane. Un groupe d’Outaouais escortèrent les réfugiés à Montréal et promirent au général Gage, gouverneur militaire du district de Montréal, d’être aussi bons amis des Anglais qu’ils l’avaient été des Français. L’année suivante, assistant à la conférence de paix de sir William Johnson, au fort Niagara (près de Youngstown, New York), Nissowaquet promit allégeance aux Britanniques et reçut en retour une commission de chef et une médaille.
Les années suivantes, Nissowaquet utilisa ces témoignages d’amitié pour obtenir en cadeaux du rhum, du tabac et des vêtements. Affirmant que les chefs des Outaouais « passent la plus grande partie de leur temps à servir les Anglais et à garder la paix parmi toutes les nations », il obtint des approvisionnements des commandants de Michillimakinac et en particulier de Robert Rogers. Il était, selon un agent des Affaires indiennes, Benjamin Roberts, « l’Indien le plus riche qu’il ait jamais vu ». Toute cette richesse, la précieuse commission et une ceinture de porcelaine reçue de Gage furent consumées dans l’incendie de sa maison en 1767, mais Nissowaquet chercha immédiatement à réparer ses pertes.
En 1767–1768, alors que Nissowaquet hivernait sur les bords de la rivière Grand (Michigan), Rogers fut accusé de trahison et emprisonné à Michillimakinac. Des rumeurs circulèrent, à l’effet que Nissowaquet, « le grand chef des Outaouais », aiderait Rogers à s’enfuir. À son retour, au printemps, avec 40 de ses guerriers, Nissowaquet fut bouleversé par l’emprisonnement de Rogers, mais, bien que les chefs sauteux aient manifesté leur peine en lançant leurs drapeaux britanniques dans le lac, lui et sa bande rentrèrent paisiblement à L’Arbre Croche. Il entretint une certaine tension, toutefois, en rapportant au commandant du fort la découverte de traces laissées par un grand nombre d’Indiens munis de canots de guerre. Nissowaquet, une fois encore, tira habilement parti de la menace d’une attaque de la part d’autres Indiens pour bien asseoir sa propre valeur aux yeux des Britanniques, proclamant, au cours d’une conférence, en août 1768 : « tant que vous resterez ici, vous et votre garnison pourrez toujours dormir en sécurité, nous veillerons sur vous, et, si l’on apprend quelque mauvaise nouvelle au sein de n’importe lequel de nos villages, vous en serez immédiatement informés, car nous faisons échec à toutes les nations dont les cœurs ne sont pas fidèles envers les Anglais ».
Quand éclata la Révolution américaine, Nissowaquet se rangea du côté des Britanniques, et ses guerriers participèrent à plusieurs expéditions. Dans les années 1780, sa carrière active approchait de sa fin, bien qu’il restât le chef le plus important de L’Arbre Croche. Accompagné de sa bande, il faisait habituellement, pendant l’été, plusieurs visites à Michillimakinac pour y recevoir des présents et y faire réparer, par le forgeron du fort, leurs binettes et leurs fusils ; il s’y rendit en 1791, 1792 et 1793. Il décéda en 1797.
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David A. Armour, « NISSOWAQUET (Nosawaguet, Sosawaket) (La Fourche, Fork) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 3 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/nissowaquet_4F.html.
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Auteur de l'article: | David A. Armour |
Titre de l'article: | NISSOWAQUET (Nosawaguet, Sosawaket) (La Fourche, Fork) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1980 |
Année de la révision: | 1980 |
Date de consultation: | 3 déc. 2024 |