PANET, JEAN-CLAUDE, notaire, avocat et juge, né dans la paroisse Saint-Germain-l’Auxerrois à Paris, probablement à la fin de décembre 1719, fils aîné de Jean-Nicolas Panet, commis des trésoriers généraux de la Marine, et de Marie-Madeleine-Françoise Foucher ; décédé à Québec le 28 février 1778.
Jean-Claude Panet eut sept frères et sœurs. L’un d’eux, Nicolas-Gabriel, devint greffier au parlement de Paris ; Pierre-Méru*, émigré en Nouvelle-France quelques années après son frère, fit aussi une carrière de notaire, d’avocat et de juge et devint l’ancêtre des Panet de Montréal pendant que Jean-Claude faisait souche à Québec.
C’est en tant que soldat dans les troupes de la Marine que Jean-Claude Panet, âgé de 20 ans, arriva au Canada. Parti de La Rochelle le 10 juin 1740 sur le Rubis, il débarqua à Québec le 12 août suivant, échappant à l’épidémie qui causa la mort d’une bonne partie de l’équipage et des passagers, dont l’évêque François-Louis de Pourroy* de Lauberivière. Panet avait sûrement reçu une instruction assez poussée, puisque, huit mois après son arrivée dans la colonie, il faisait fonction de praticien et, peu après, de procureur. Il fut apprécié : l’intendant Hocquart le trouvait « intelligent et sage », tandis que le gouverneur Beauharnois* vantait sa « bonne conduite ». En dépit d’une demande faite par son père, à Paris, il ne put obtenir la charge de notaire à Québec laissée vacante par le retour en France à l’automne de 1741 de Jean de Latour. Cependant, la nomination de Nicolas Boisseau au poste de greffier en chef du Conseil supérieur causa la vacance qui lui permit de devenir, le 22 décembre 1744, notaire royal dans la Prévôté de Québec. Jean-Claude Panet avait obtenu son congé des troupes au début de l’année précédente, son père ayant versé les 150 » nécessaires. Bien qu’il ait, au cours des années, exercé plusieurs autres fonctions, Panet devait pratiquer le notariat de façon continue de 1745 à 1775 et son greffe compte plus de 5 860 actes.
Pendant le siège de Québec, le 8 août 1759, un « pôt à feu » tiré par les Anglais tomba sur la maison de Jean-Claude Panet, dans la basse ville, provoquant un incendie qui détruisit 166 autres maisons. Panet relate tout ceci dans son journal, intitulé « Précis de ce qui s’est passé au Canada depuis la nouvelle de la flotte de M. Canon [Jacques Kanon*] ». Couvrant la période du 10 mai au 8 septembre 1759, le journal raconte les événements dans le détail et avec une grande précision. La dernière partie de ce manuscrit, qui contenait la relation des derniers jours du siège, a malheureusement disparu. Le 25 juillet, Panet fut nommé greffier d’une commission chargée de réprimer le pillage auquel se livraient certains matelots, soldats et miliciens. L’ordonnance du 19 juillet, qui créait la commission, autorisait François Daine*, lieutenant général civil et criminel de la Prévôté de Québec, à condamner à mort et à faire exécuter le jour même les pillards pris sur le fait. Panet aurait recommandé la sévérité à Daine et il rapporte que celui-ci fit arrêter et pendre deux hommes le 31 juillet. Après la défaite des plaines d’Abraham, le 13 septembre, Panet fut, en qualité de substitut du procureur du roi Jean-Baptiste-Ignace Perthuis*, un des 25 notables signataires de la demande de capitulation adressée au lieutenant de roi, Jean-Baptiste-Nicolas-Roch de Ramezay.
Le Régime militaire, en vigueur de 1760 à 1763, changea peu de chose dans la vie quotidienne des habitants de la Nouvelle-France. Pour être efficace, l’administration britannique se devait d’être en mesure de comprendre et d’être comprise des Canadiens et l’on fit appel à des francophones tels Jacques de Lafontaine* de Belcour et François-Joseph Cugnet. Lorsque Murray, le nouveau gouverneur du district de Québec, créa un tribunal de dernière instance qu’il baptisa Conseil supérieur, il nomma, le 2 novembre 1760, Jean-Claude Panet greffier en chef de cette cour. À la même époque, son frère Pierre-Méru était également nommé à des fonctions de greffier dans le district de Montréal. Lors du retour au régime civil, ces Canadiens compétents dans le domaine judiciaire ne furent pas affectés par l’obligation théorique faite aux hauts fonctionnaires de prêter le serment du Test et conservèrent leurs postes. En 1765, Murray chargea Jean-Claude Panet d’examiner les registres du Conseil supérieur de la Nouvelle-France pour inventorier les terres qui, sous le Régime français, avaient été réunies au Domaine d’Occident. Le gouverneur précisait que seul un juriste de langue française pourrait y parvenir et que Panet devait avoir libre accès aux documents.
La Cour des plaids communs ayant remplacé le Conseil supérieur, Jean-Claude Panet en devint greffier, avec William Kluck, en février de cette même année 1765. Les deux hommes étaient en même temps nommés dépositaires des minutes des notaires décédés du district de Québec. Mais Panet quitta ce poste l’année suivante et passa en France dans l’espoir d’obtenir une récompense pour les services rendus sous le Régime français et de trouver une meilleure situation. Il présenta un mémoire au ministre de la Marine, le duc de Choiseul, qui le transmit avec avis favorable au contrôleur général des Finances. Il semble que la demande de Panet ait été rejetée puisqu’il revint à Québec où il obtint, le 6 octobre 1767, une commission d’avocat. Ayant été praticien pendant plusieurs années, assesseur au Conseil supérieur de la Nouvelle-France en 1751, substitut du procureur du roi entre 1755 et 1759 et ayant même signé comme avocat en 1764, il était préparé depuis longtemps à cette profession. Sa nomination obtenue, Panet rentra dans l’ombre d’une carrière privée de notaire et d’avocat jusqu’en 1775.
Ce n’est en effet qu’à l’entrée en vigueur de l’Acte de Québec, qui allait établir une nouvelle organisation judiciaire, que Jean-Claude Panet occupa à nouveau des fonctions officielles. Le 26 avril 1775, le gouverneur Guy Carleton* renouvela la nomination des juges Thomas Dunn*, John Fraser, Adam Mabane et John Marteilhe, et nomma René-Ovide Hertel de Rouville et Panet « gardiens de la paix » et commissaires, le premier, pour le district de Montréal, le second, pour le district de Québec, ce qui équivalait à une nomination de juge. Ils devenaient ainsi les deux premiers juges de langue française et catholiques sous le Régime anglais. Après le départ des troupes américaines, Dunn, Mabane et Panet furent nommés, le 13 juillet 1776, commissaires chargés d’étudier les dommages et les destructions causés lors de l’invasion de la province. Dix jours plus tard, Carleton les nommait « juges d’une cour de juridiction civile dans les limites du district de Québec ». En août, Panet devenait juge de paix et, le 6 mars 1777, obtenait le titre de juge de la Cour des plaids communs.
Jean-Claude Panet n’occupa pas longtemps ces différentes fonctions. Il mourut dans l’après-midi du 28 février 1778, à l’âge de 58 ans. Sa mort était-elle due à l’alcoolisme ? Une lettre anonyme écrite à Québec le 9 novembre 1775 permet d’émettre cette hypothèse : « la nomination comme juges, de Mr. de Rouville à Montréal, et à Québec, de Claude Panet (qui a sa dose tous les jours avant midi) avec des salaires, dit-on, de sept cents louis par année ; en un mot la profusion et l’audace qu’on mit dans la création des places pour les familiers et les sycophantes dont le gouverneur est continuellement entouré : tout cela a inspiré le plus grand dégoût à tout le monde ».
Jean-Claude Panet avait épousé, le 23 octobre 1747 à Québec, Marie-Louise, fille du notaire Claude Barolet*. En 1796, Carleton, devenu lord Dorchester, fit obtenir à Mme Panet une pension annuelle de £80, soit les quatre cinquièmes du salaire de son mari lorsqu’il était greffier de la Cour des plaids communs. Elle toucha cette rente jusqu’à sa mort en 1803. Quatorze enfants étaient nés entre 1749 et 1764, et 12 vivaient à la mort de leur père. Trois filles entrèrent chez les ursulines ; l’une d’elles en sortit deux ans plus tard, tandis que les deux autres passèrent chacune plus de 50 ans dans les ordres. Deux fils choisirent la prêtrise : Bernard-Claude*, qui devint évêque de Québec, et Jacques*, qui fut curé de la paroisse Notre-Dame-de-Bon-Secours de L’ Islet de 1779 à 1829. Jean-Baptiste se fit notaire et décéda en 1808. Notaire, avocat et juge comme son père, Jean-Antoine* fut orateur (président) de la chambre d’Assemblée et l’une des figures politiques marquantes de son époque.
Le greffe de Jean-Claude Panet, 1745–1775, est déposé aux ANQ-Q.
AMA, SHA, A1, 3 540, ff.84–842, 90–906 (mfm aux APC).— AN, Col., B, 76–1, pp.233–235 ; 77, p.15 ; 97, p.138 ; 125, pp.20s. (copies aux APC) ; C11A, 73, pp.3–7, 46–49 ; 76 ; 77, pp.312–317.— ANQ-Q, AP-P-1 565.— APC, RG 4, A1, pp.4 659s., 5 726 ; RG 68, 89, pp.59s. ; 90, pp.11s., 22–24, 36–40, 51s., 84s.— ASQ, Doc. Faribault, no 149 ; Lettres, M, 98 ; Polygraphie, II : 3 ; XXVII : 25 ; Séminaire, 14/5, no 41 ; Université, carton 96, no 71.— APC Rapport, 1905, I, vie partie.— Doc. relatifs à la monnaie sous le Régime français (Shortt), II : 978.— Doc. relatifs à l’hist. constitutionnelle, 1759–1791 (Shortt et Doughty ; 1921).— Invasion du Canada (Verreau).— J.-C. Panet, Siège de Québec en 1759, Literary and Hist. Soc. of Quebec, Hist. Docs., 4e sér. (1875) : 1–31.— La Gazette de Québec, 5 mars 1778.— P.-G. Roy, Les avocats de la région de Québec ; Inv. jug. et délib., 1717–1760, IV ; V ; VI ; Inv. ord. int., III : 65 ; Les juges de la prov. de Québec.— Tanguay, Dictionnaire.— Vachon, Inv. critique des notaires royaux, RHAF, IX : 551s. ; XI : 405.— Lanctot, Le Canada et la Révolution américaine.— J.-E. Roy, Hist. du notariat, I ; II.— P.-G. Roy, La famille Panet (Lévis, Québec, 1906).— Wade, Les Canadiens français (1966), I.
André Frenière, « PANET, JEAN-CLAUDE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 4 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/panet_jean_claude_4F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/panet_jean_claude_4F.html |
Auteur de l'article: | André Frenière |
Titre de l'article: | PANET, JEAN-CLAUDE |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1980 |
Année de la révision: | 1980 |
Date de consultation: | 4 déc. 2024 |