BRENTON, JAMES, avocat, officier de milice, homme politique, fonctionnaire et juge, né le 2 novembre 1736 à Newport, Rhode Island, treizième enfant de Jahleel Brenton et de sa première femme, Frances Cranston, fille aînée du gouverneur Samuel Cranston ; le 30 mai 1762, il épousa à Newport Rebecca Scott, et ils eurent un fils, Edward Brabazon*, qui devint juge de la Cour suprême de Terre-Neuve, puis le 28 avril 1766, à Halifax, Elizabeth Russell, et de ce mariage naquirent neuf enfants ; décédé à Halifax le 3 décembre 1806.

Membre puîné du barreau du Rhode Island, James Brenton arriva en Nouvelle-Écosse alors qu’il n’était encore qu’un jeune homme ; il fut admis au barreau de cette province le 9 décembre 1760. Il s’enrôla par la suite dans une compagnie de miliciens volontaires, et, en 1764, il avait atteint le grade de lieutenant-capitaine. De 1765 à 1770, il fut député du canton d’Onslow à la chambre d’Assemblée, puis, de 1776 à 1785, il représenta la circonscription de Halifax. Le 31 octobre 1778, il succéda à Richard Gibbons* comme solliciteur général et, le 12 octobre 1779, à William Nesbitt* comme procureur général. À la mort de Charles Morris* (1711–1781), il accéda à la magistrature en qualité de juge adjoint de la Cour suprême, le 8 décembre 1781. Le 10 décembre 1799, il fut nommé membre du Conseil de la Nouvelle-Écosse. Il assura l’intérim de Richard Bulkeley* à la Cour de vice-amirauté à partir du 17 novembre 1798 ; après la mort de Bulkeley, en décembre 1800, il devint juge de cette cour, mais il fut destitué l’année suivante au bénéfice d’Alexander Croke*.

La carrière juridique de Brenton semble avoir été marquée de conflits continuels. Jeune avocat, il dut présenter des excuses pour avoir mis en doute l’impartialité de la magistrature, en avril 1762. Au sein de l’Assemblée, il exerça constamment ses talents à récrire et à réviser les lois tant nouvelles qu’existantes, alors que l’Assemblée et le conseil se disputaient le pouvoir durant les décennies 1760 et 1770. Puis, au cours de son mandat à la Cour suprême, Brenton fut mêlé avec son collègue Isaac Deschamps à ce qu’on a appelé l’affaire des Juges.

À la suite du décès du juge en chef Bryan Finucane, en août 1785, il ne restait plus que deux juges à la Cour suprême : Brenton et Deschamps. Insatisfaite de leur rendement, l’Assemblée, lors d’une session secrète tenue en 1787, formula une demande au lieutenant-gouverneur John Parr* et au conseil en vue d’enquêter sur la conduite des deux juges. La réponse de Parr indiquait que ni le conseil ni lui n’étaient favorables à une telle enquête. Cette question domina l’élection partielle au siège de Halifax, à l’Assemblée, en 1788 ; après la victoire du candidat appuyé par le conseil, Charles Morris* (1759–1831), la tension monta à tel point qu’on dut faire appel à la garnison de Halifax pour réprimer des émeutes qui durèrent trois jours. Peu après cette élection, le conseil publia, sur un ton acerbe, une défense de Brenton et de Deschamps. Ce document suscita la publication de lettres, tout aussi peu modérées, condamnant les juges et le conseil, de la part de deux avocats loyalistes, Jonathan Stems et William Taylor, que Deschamps radia du barreau pour outrage au tribunal. En mars 1789, l’Assemblée reçut la réponse de Parr à la demande d’enquête. Quoique rédigée en termes diplomatiques, cette réponse appuyait encore les deux juges, ce qui n’empêcha pas l’Assemblée, l’année suivante, de mettre Brenton et Deschamps en accusation devant la chambre. Parr en référa à la métropole, mais il fallut deux ans au Conseil privé pour se prononcer en faveur des juges. Si les premières accusations portées contre Brenton lui furent préjudiciables, la défense qu’élabora le Conseil privé le fut peut-être davantage, puisque celui-ci reconnaissait que les juges avaient pu se tromper, attribuant leur faute à la « fragilité de la nature humaine ». En dernière analyse, Brenton fut victime des Loyalistes résolus à ne pas se laisser exclure des postes qui, dans la hiérarchie de la Nouvelle-Écosse, assuraient le pouvoir et l’influence. Brenton avait vu venir le choc entre les Loyalistes et les habitants d’origine américaine établis en Nouvelle-Écosse avant la guerre d’Indépendance, et il avait essayé de le prévenir ; il abandonna toute idée de chercher à se faire réélire en 1785, car il comprit que la lutte serait menée avec « la violence et la chaleur des rivalités partisanes ». Mais il n’échappa pas pour autant aux séquelles de la controverse. L’impopularité des décisions qu’il rendit à la Cour de vice-amirauté et le désir de voir s’instaurer des relations harmonieuses entre la Grande-Bretagne et les États-Unis amenèrent sa destitution comme juge de cette cour, au bénéfice de Croke, « gentilhomme moins lié aux États-Unis ».

Ironie des choses, bien que James Brenton fût au centre d’un family compact en formation, et malgré l’épithète d’« ambitieux » que lui décerna John Bartlet Brebner, il était, au moment de sa mort, bien loin d’être riche : sa succession s’élevait à £200 seulement. Son salaire de juge à la Cour suprême avait été rogné de pas moins de 35 p. cent, du fait que l’autorisation de paiement devait être négociée avec la Trésorerie. À la vérité, n’eût été la période lucrative qu’il passa à la Cour de vice-amirauté en 1800–1801, à l’époque où les guerres de la Révolution française provoquaient une grosse augmentation des affaires et des revenus, bon nombre des dettes de Brenton n’eussent peut-être pas été remboursées. Sa femme dut, effectivement, adresser une requête à l’Assemblée pour obtenir du secours, en faisant valoir que la maison familiale devrait être vendue pour éteindre les dettes restantes évaluées à £600. Personnage mineur sur la scène de la Nouvelle-Écosse, Brenton mérite peut-être d’être tiré de l’oubli à cause de ses liens de parenté avec les Joseph Gerrish*, John et sir Brenton* Halliburton, et Charles Inglis.

Allan C. Dunlop

PANS, MG 9, no 109: 49s. ; RG 1, 302.— PRO, CO 217/60 (mfm aux PANS).— Extracts from the proceedings of his majesty’s council Feb. 21 and 28, 1788, in reference to complaints of improper and irregular administration of justice in the Supreme Court of Nova Scotia [...] ([Halifax, 1788]).— W. E. Boggs, The genealogical record of the Boggs family, the descendants of Ezekiel Boggs (Halifax, 1916), 73s.— B. [C. U.] Cuthbertson, The old attorney general: a biography of Richard John Uniacke (Halifax, [1980]), 19–21.— John Doull, Sketches of attorney generals of Nova Scotia (Halifax, 1964).— Margaret Ells, « Nova Scotian Sparks of liberty », Dalhousie Rev., 16 (1936–1937) : 475–492.— L. H. Laing, « Nova Scotia’s Admiralty Court as a problem of colonial administration », CHR, 16 (1935) : 151–161.

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Allan C. Dunlop, « BRENTON, JAMES », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/brenton_james_5F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1983
Année de la révision:    1983
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