MACKENZIE, GEORGE, avocat, né en 1795, probablement à Dingwall, Écosse ; le 19 mai 1829, devant le révérend John Machar*, il épousa à Ernestown (Bath, Ontario) Sarah Mackenzie, et ils n’eurent pas d’enfants ; décédé le 4 août 1834 à Kingston, Haut-Canada.
George Mackenzie quitta l’Écosse avant 1823 pour immigrer en Amérique du Nord britannique. Au milieu des années 1820, après un bref séjour au Bas-Canada et à Ernestown, il s’établit à Kingston. En 1828, il fut reçu au barreau de la province et se lança immédiatement dans la pratique privée du droit. En deux ans seulement, il se fit une grosse clientèle et se tailla une place importante dans la société de Kingston.
De concert avec d’autres notables de la ville, Mackenzie critiqua le monopole qu’exerçait la Bank of Upper Canada et souligna la nécessité de fonder une banque indépendante à Kingston. Lors d’une assemblée publique tenue sur place en janvier 1830, un comité fut formé, avec Mackenzie comme secrétaire, pour établir les statuts et règlements de cette banque et demander une charte au gouvernement. Peu de temps après, un projet de loi visant à accorder une charte à la banque de Kingston fut présenté à l’Assemblée, mais il fut rejeté par le Conseil législatif, dont la plupart des membres étaient des administrateurs et des actionnaires de la Bank of Upper Canada. Durant l’année suivante, Mackenzie persévéra et prononça des discours sur les avantages que la création d’une banque à Kingston représenterait pour la région est du Haut-Canada ; il exprimait les doléances du groupe de plus en plus nombreux de gens d’affaires auquel il appartenait et qui, comme lui, n’étaient pas des tories ; en outre, il galvanisait la foule en faveur d’une banque qui ne soit pas régie par le family compact.
En février 1831, un projet de loi semblable au premier fut adopté par l’Assemblée mais de nouveau rejeté par le conseil ; cependant, le mécontentement grandissant que suscitaient d’une part le monopole de la Bank of Upper Canada et, d’autre part, le refus par l’Assemblée de voter une loi autorisant l’accroissement du capital-actions de la banque, fit fléchir les membres du Conseil législatif qui appuyaient cet établissement bancaire. À la session d’automne 1831, un projet de loi accordant une charte à la Commercial Bank of the Midland District fut adopté par l’Assemblée et par le conseil. Les seuls à voter contre le projet furent les extrémistes, que ce soit parmi les radicaux, qui craignaient que la nouvelle banque soit calquée sur le modèle de la Bank of Upper Canada qu’ils détestaient, ou parmi les tories qui affirmaient que la fondation d’une autre banque allait compromettre le crédit de la Bank of Upper Canada. La nouvelle banque eut pour premier président John Solomon Cartwright*, et Mackenzie comme premier conseiller juridique.
Mackenzie n’était évidemment pas un tory, mais il n’était pas pour autant sympathique aux réformistes. En février 1832, il assista à une assemblée réformiste que les députés Peter Perry* et Marshall Spring Bidwell* avaient organisée dans le canton de Fredericksburgh. Il s’opposa ouvertement à une résolution qui dénonçait le Conseil législatif et, tout en faisant des reproches aux députés réformistes, il s’étendit de façon remarquable sur la nécessité de procéder à des réformes modérées sans manquer de loyauté à la couronne. Puis il mit aux voix une proposition d’appui au gouvernement. Mackenzie affirma plus tard que l’on avait adopté sa proposition avant de dissoudre la réunion, mais d’autres participants, notamment le président et le secrétaire, contestèrent sa version des faits.
Quoi qu’il en soit, le sort réservé à la proposition de Mackenzie est moins important que les idées politiques contenues dans son discours qui dura deux heures et demie. Il était contre l’expulsion de William Lyon Mackenzie* de l’Assemblée et il fit un exposé détaillé des prérogatives parlementaires qui ne concordait pas avec la ligne dure qu’adoptaient les tories. En des termes imprégnés de l’esprit tory, il rejeta toutefois Mackenzie qu’il trouvait grossier et indigne de représenter ses électeurs. En ce qui concerne les réserves du clergé, il adopta une position modérée et raisonnable qui se situait exactement à mi-chemin entre les deux camps opposés. À cette époque, la plupart des réformistes recommandaient déjà de vendre les réserves et d’utiliser le montant de la dotation pour subventionner l’enseignement laïque. Par contre, John Strachan* et les tories extrémistes préféraient presque s’en tenir au statu quo. Quant à George Mackenzie, il soutenait, quatre ans avant William Henry Draper*, que les réserves devaient servir à aider les ecclésiastiques de toutes les « confessions respectables ». Mais il contestait les membres plus conservateurs du parti et ne croyait pas que l’Église d’Angleterre était ou avait jamais été l’Église établie du Haut-Canada. Le gouvernement de sir Peregrine Maitland*, ajoutait-il, avait causé beaucoup de tort à plusieurs confessions religieuses, mais il avait l’impression que celui de sir John Colborne* « suivait la voie de la conciliation et de la modération ».
Comme avocat, Mackenzie avait la réputation d’accepter les causes libérales. La plus controversée fut peut-être celle de George Gurnett*, le rédacteur en chef du Courier of Upper Canada de Toronto, accusé d’avoir tenu des propos diffamatoires à l’endroit du tory John Elmsley* au sujet de sa conversion au catholicisme. Le procès fut porté à la Cour du banc du roi en avril 1834. Elmsley réussit à engager cinq des avocats les plus réputés du Haut-Canada : William Henry Draper, Marshall Spring Bidwell, Robert Baldwin Sullivan*, Allan Napier MacNab* et Robert Baldwin*. Avec trois autres avocats, Mackenzie fut le procureur du défendeur et son seul porte-parole. Après son plaidoyer, qui dura quatre heures et demie et que tous les journaux du Haut-Canada considérèrent comme une des apologies les plus éloquentes de la liberté de la presse qui ait jamais été prononcée dans la province, le jury se prononça en faveur de Gurnett. Le vrai vainqueur, cependant, était Mackenzie, dont le cabinet se faisait ainsi connaître dans toute la province.
Mackenzie fut l’un des chefs de la communauté écossaise de Kingston : il était membre de la société de tempérance et de la société biblique de la ville, ainsi que de l’Emigration Society of the Midland District ; il fut également l’un des commissaires laïques à la réunion tenue à Kingston en juin 1831 qui instaura le synode de l’Église presbytérienne du Canada, affiliée à l’Église d’Écosse, et à laquelle il servit souvent de conseiller juridique. Il participa activement à divers comités qui jouaient un rôle important dans les affaires municipales, notamment le comité mis sur pied pour réformer l’administration de la ville et celui qui fut créé en 1832 pour atténuer les effets de l’épidémie de choléra. À l’occasion des élections législatives de 1834, il posa sa candidature dans la circonscription de Frontenac et, au cours de la campagne qui dura tout l’été, il reçut un large appui en tant que candidat modéré et qui n’était pas d’allégeance tory. Il allait être élu, semble-t-il, mais sa carrière politique fut interrompue lorsque, le 4 août 1834, il mourut soudainement du choléra.
Au début du printemps 1830, George Mackenzie accueillit dans son cabinet d’avocat John Alexander Macdonald*, alors âgé de 15 ans, comme stagiaire. Il hébergea le juriste en herbe presque continuellement durant les trois années de formation qu’il passa sous sa direction. Il lui inculqua les rudiments du droit et du commerce et c’est par son entremise que Macdonald rencontra ses premiers clients et établit ses premières relations d’affaires. En 1839, le jeune juriste devint conseiller juridique de la Commercial Bank of the Midland District, à l’instar de Mackenzie ; sur le point d’entreprendre une carrière publique qui avait été refusée à Mackenzie, il allait également devenir un avocat de compagnie, un homme d’affaires et un conservateur modéré dont la réussite et les intérêts seraient liés à Kingston et à l’essor commercial du Haut-Canada. Pendant la période de stage que Macdonald fit chez Mackenzie, la communauté écossaise, de plus en plus nombreuse et imbue d’esprit clanique, s’infiltrait petit à petit dans les postes jusqu’alors réservés aux tories. Elle commençait à avoir la mainmise sur le commerce et posait les jalons d’un mouvement libéral-conservateur qui mettait l’accent sur l’expansion économique ; ce nouveau regroupement allait ainsi offrir une solution de rechange au projet que William Lyon Mackenzie caressait d’établir une société de type plutôt traditionnel et agrarien. Ce fut à peu près le même regroupement social qui se consolida et prit de l’importance pour devenir, à la fin des années 1830 et dans la décennie qui suivit, une classe naissante de capitalistes dont le principal leader politique devait être Macdonald, l’ancien élève de Mackenzie.
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William Teatero, « MACKENZIE, GEORGE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 7 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/mackenzie_george_6F.html.
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Auteur de l'article: | William Teatero |
Titre de l'article: | MACKENZIE, GEORGE |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1987 |
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