CHAZELLE, JEAN-PIERRE, prêtre, jésuite et missionnaire, né le 12 janvier 1789 à Saint-Just-en-Bas, France, fils de Pierre Chazelle, laboureur, et de Blandine Chalette ; décédé le 4 septembre 1845 à La Baye (Green Bay, Wisconsin).
Jean-Pierre Chazelle fait ses études classiques et théologiques au séminaire de Montbrison, près de Lyon, en France. Ordonné prêtre le 14 juin 1812, il œuvre ensuite comme professeur de philosophie, de théologie et de rhétorique dans le même établissement, où il aurait compté parmi ses étudiants le futur curé d’Ars, Jean-Baptiste-Marie Vianney. En 1816, il passe à la cure de Moingt, puis il occupe les charges d’aumônier militaire dans le 28e d’infanterie de la légion du Gard en 1817 et à l’École royale et militaire de La Flèche en 1819.
Désireux de se faire jésuite, Chazelle entre le 1er mars 1822, à l’âge de 33 ans, au noviciat de Montrouge, près de Paris. Les jésuites sont à cette époque sollicités de toutes parts pour des œuvres diverses. Après six mois de probation, Chazelle est nommé professeur de théologie au scolasticat des jésuites à Paris. Désigné pour le collège de Montmorillon, près de Poitiers, en 1823, il va exercer tour à tour les fonctions de ministre, d’assistant et de recteur de cette maison. En 1828, les fameuses Ordonnances excluent les jésuites du domaine de l’enseignement en France, en attendant que la révolution de juillet 1830 ne les expulse complètement de ce pays.
Chazelle, qui est alors à Bordeaux, se voit nommer supérieur des missions jésuites en Amérique du Nord et part pour les États-Unis le 19 novembre 1830 avec deux autres prêtres et un frère jésuites. Les quatre religieux vont ainsi répondre à la demande que Mgr Benoît-Joseph Flaget, évêque du diocèse de Bardstown, dans le Kentucky, a adressée au provincial des jésuites de France, Nicolas Godinot, en 1828. À leur arrivée sur le sol américain en février 1831, Chazelle et ses compagnons sont retenus par la saison hivernale à La Nouvelle-Orléans où ils étudient les propositions de Mgr Léo-Raymond de Neckère de s’établir plutôt dans son diocèse. En avril, au moment de repartir, Chazelle laisse deux de ses compagnons sur place et se rend avec le troisième dans le diocèse de Bardstown. Mgr Flaget les y accueille très favorablement, mais il ne peut plus leur offrir la direction du St Joseph’s College tel que promis dans sa lettre à Godinot car, croyant que les jésuites ne viendraient pas, il a confié l’établissement à des membres de son clergé séculier. Chazelle songe à retourner à La Nouvelle-Orléans, mais finalement Mgr Flaget lui confie le St Mary’s Seminary, fondé par William Byrne vers 1819. Sous sa direction, l’établissement ne tarde pas à donner des cours plus avancés et à prendre un essor remarquable.
En 1839, Chazelle reçoit une lettre de Joseph-Vincent Quiblier*, supérieur du séminaire de Saint-Sulpice à Montréal. Au nom de Mgr Jean-Jacques Lartigue, évêque de Montréal, Quiblier invite Chazelle à venir prêcher en août la première retraite sacerdotale dans ce diocèse. Malgré la période troublée que traverse le Bas-Canada et la discrétion qui s’impose à lui, Chazelle y fait un séjour qui ne passe pas complètement inaperçu. Sa présence réveille le souvenir des jésuites dont l’action passée demeure gravée dans les esprits. Partout leur retour dans la province est vivement souhaité.
Quand Mgr Ignace Bourget* succède à Mgr Lartigue comme évêque de Montréal en 1840, il veut donner suite au désir de son prédécesseur de faire venir des jésuites au Bas-Canada. En 1841, il se rend à Rome où il rencontre le général des jésuites, Jean Roothaan, à qui il demande quelques sujets pour un collège et pour les missions auprès des Indiens. À ce moment-là, Chazelle est également à Rome où l’a délégué Flaget, et il revoit Mgr Bourget qu’il a connu pendant son séjour à Montréal. Il est bientôt nommé supérieur des jésuites du Canada et chargé de recruter le personnel nécessaire.
Le 31 mai 1842, Chazelle arrive à Montréal à la tête d’un groupe de neuf jésuites. Il s’installe momentanément à l’évêché puis, en juillet, il accepte de prendre en charge la paroisse Notre-Dame-de-la-Prairie-de-la-Madeleine (paroisse de la Nativité-de-la-Très-Sainte-Vierge), à Laprairie (La Prairie), près de Montréal, dont le curé, Michael Power, vient d’être nommé premier évêque de Toronto et s’apprête à gagner son diocèse. Chazelle s’occupe aussi de prédications, de retraites et assume les fonctions d’aumônier militaire. Toutefois, il refuse de prendre en charge le collège de Chambly, et les sulpiciens se montrent très réticents à lui remettre le petit séminaire de Montréal. De plus, le noviciat ouvert à l’évêché n’amène aucun sujet, si bien qu’on doit le transporter à Laprairie en juillet 1843.
Entre-temps, dès l’été de 1842, Mgr Power et l’archevêque de New York, John Joseph Hughes, ont envisagé de faire venir des jésuites dans leurs diocèses respectifs ; le général Roothaan et le provincial de France, Clément Boulanger*, soupèsent la question. Au début de l’automne, Mgr Power invite Chazelle à venir prêcher une retraite sacerdotale en préparation du synode qui doit marquer l’inauguration de son diocèse. Pendant son séjour dans le Haut-Canada, Chazelle s’éprend des missions indiennes jadis évangélisées par ses prédécesseurs au temps des martyrs canadiens [V. Isaac Jogues*] En novembre, Mgr Power adresse une demande officielle au général Roothaan et, en juillet 1843, deux jésuites français, Pierre Point et Jean-Pierre Choné, arrivent à Toronto où les attend Chazelle. Quelques jours plus tard, ils s’installent dans la paroisse de l’Assomption, à Sandwich (Windsor), point de départ des futures missions que Chazelle ira fonder à l’île Walpole, à l’île Manitoulin, dans la baie Géorgienne, et à Sault-Sainte-Marie (Sault Ste Marie, Ontario). Finalement, le 31 juillet 1844, à la demande de Mgr Power, la mission jésuite du Canada est divisée en deux sections : Chazelle est supérieur de la nouvelle mission du Haut-Canada tandis que Félix Martin* l’est pour celle du Bas-Canada [V. Clément Boulanger].
C’est en pleine activité apostolique, au moment où il tente de se rendre à Sault-Sainte-Marie en passant par les États-Unis, que Jean-Pierre Chazelle meurt à La Baye le 4 septembre 1845. Ses confrères perdent en lui un être totalement engagé que ne rebute aucune tâche. À un tempérament qui ne semble tolérer l’inaction s’ajoute chez Chazelle son obéissance conjuguée à sa grande ouverture de cœur et à sa foi en la Providence. Ainsi s’explique le rendement incroyable de cette vie partagée entre l’enseignement, les fonctions administratives et les retraites sacerdotales.
La documentation relative à Jean-Pierre Chazelle et à ses œuvres se trouve en majeure partie dans les Arch. de la Compagnie de Jésus, prov. du Canada français (Saint-Jérôme, Québec), Fonds général et Sér. A, B, D. Une autre partie de la documentation concernant Chazelle est conservée aux Archivum Romanum Societatis Iesu (Rome), Fonds Missio Kentuckeiensis et Missio Canadensis. L’auteur possède un bon nombre des documents romains sur microfilm dans ses archives privées.
ACAM, 465.103 ; 901.055, 846–13 ; 901.062.— AD, Loire (Saint-Étienne), État civil, Saint-Just-en-Bas, 12 janv. 1789.— Allaire, Dictionnaire.— G.-É. Giguère, « la Restauration de la Compagnie de Jésus au Canada, 1839–1857 » (thèse de
Georges-Émile Giguère, « CHAZELLE, JEAN-PIERRE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 6 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/chazelle_jean_pierre_7F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/chazelle_jean_pierre_7F.html |
Auteur de l'article: | Georges-Émile Giguère |
Titre de l'article: | CHAZELLE, JEAN-PIERRE |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1988 |
Année de la révision: | 1988 |
Date de consultation: | 6 déc. 2024 |