COSTER, GEORGE, ministre de l’Église d’Angleterre et professeur, né le 29 novembre 1794 à Newbury, Angleterre, fils de George Nathaniel Coster, ministre, et d’Anne Allen ; il épousa Eleanor Hansard, et ils eurent neuf filles et un fils ; décédé le 8 janvier 1859 à Fredericton.
George Coster était l’aîné de trois garçons qui servirent comme missionnaires de la Society for the Propagation of the Gospel in Foreign Parts et qui s’installèrent tous par la suite au Nouveau-Brunswick. Il fit ses études à la Charterhouse, à Londres, et au St John’s College, à Cambridge (il obtint une licence en lettres et en mathématiques en 1816, puis une maîtrise en lettres en 1829), et fut ordonné prêtre par l’évêque de Londres en 1819. Malgré son désir de travailler au Canada, il partit la même année pour les Bermudes où il devint directeur d’un collège ; ce fut un échec, et il resta dans les îles comme rector d’une paroisse. En 1822, il devint missionnaire de la Society for the Propagation of the Gospel. Coster était déçu du peu de réactions que suscitaient ses efforts chez les pauvres Noirs de sa paroisse, mais ses dons impressionnèrent apparemment ses supérieurs car, en juin 1825, il fut muté à Terre-Neuve pour y remplir la charge de vicaire général et de premier archidiacre de cette colonie. Il habita Bonavista et desservit en personne cette très grande paroisse regroupant des petits villages de pêcheurs. Il voyagea beaucoup par bateau et on lui attribue le mérite d’avoir poussé ses paroissiens à construire leurs trois premiers milles de route. Cette vie si loin de la capitale lui donna une idée de la vie des pêcheurs, mais rendit difficile l’accomplissement de ses fonctions d’archidiacre. Il avait des idées arrêtées sur les obligations pastorales des missionnaires et sur l’enseignement de la doctrine de l’Église dans les écoles. À cause de ces prises de position, il se trouva en désaccord avec le gouverneur, Thomas John Cochrane*, et avec la Newfoundland School Society. Coster pensait que Cochrane se montrait « trop » libéral et « conciliant » en encourageant « les pasteurs, les prêtres et les « ministres » dissidents » à se rencontrer sur un pied d’égalité à la résidence du gouverneur et en délivrant des autorisations à des personnes non qualifiées afin qu’elles puissent célébrer des mariages. Il s’opposait aussi aux critiques du gouverneur concernant le clergé et il affirmait que les petits villages de pêcheurs avaient besoin d’hommes « de plus modeste condition » que les gentlemen talentueux et instruits, aux manières raffinées, que le gouverneur et le conseil cherchaient. L’opposition de Coster à la Newfoundland School Society se fondait sur la croyance que cette dernière se souciait plus de zèle religieux que des principes de l’Église d’Angleterre.
En octobre 1829, Coster succéda au révérend George Best* à la charge d’archidiacre du Nouveau-Brunswick et de rector de Fredericton. Il arriva dans cette ville en juillet de l’année suivante. En recommandant cette mutation, l’évêque du diocèse de la Nouvelle-Écosse (qui comprenait Terre-Neuve et le Nouveau-Brunswick), John Inglis*, avait évoqué l’« immense bien » que Coster faisait à Terre-Neuve et les « projets d’amélioration qui, par cet arrangement, resteraient peut-être inachevés ». Il eut néanmoins le souci de donner à Coster « un poste plus avantageux et plus confortable », vu sa mauvaise santé. Il désirait aussi vivement avoir un homme à lui au Nouveau-Brunswick, car il considérait l’archidiacre comme « l’homme de confiance et l’œil de l’évêque ». Inglis avait agi avec vigueur pour affirmer son droit de nommer l’archidiacre afin de faire obstacle à la nomination de Benjamin Gerrish Gray, rector de Saint-Jean et candidat favori du lieutenant-gouverneur, sir Howard Douglas*, qui avait le droit de nommer le rector de Fredericton. Gray ne partageait pas les idées de tendance high church qu’avait l’évêque sur l’autorité épiscopale, alors que Coster les approuvait.
En écartant Gray, Inglis divisa sans le savoir l’Église d’Angleterre au Nouveau-Brunswick. Gray refusa de reconnaître l’autorité de Coster et, quand ce dernier intervint effectivement, il attaqua les idées et les amis de l’archidiacre du haut de la chaire et dans les journaux. En conséquence, l’influence de George Coster ne s’étendit pas dans la ville de Saint-Jean, bien que son frère, le combatif Frederick, rector de Carleton, ait exprimé efficacement le point de vue de George de l’autre côté du port.
Dans la polarisation qui s’opéra autour des évangéliques et des adhérents à la high church au sein de l’Église d’Angleterre, Coster se trouvait résolument du côté de ces derniers. Jusqu’à son arrivée, les prêtres les plus importants avaient tous été des évangéliques : Best, le révérend Edwin Jacob*, nouveau directeur du King’s College (qui devint l’University of New Brunswick après 1859) et vice-président du conseil, et l’influent Gray. Aux yeux de Coster, la prédilection des évangéliques pour « la religion vivante », qu’ils partageaient avec les méthodistes et les baptistes, les amenait à prêter trop peu d’attention à certains enseignements importants de l’Église. Il y avait aussi de la négligence dans la surveillance des fonds de la Society for the Propagation of the Gospel destinés à aider financièrement les écoles paroissiales, souvent appelées écoles de Madras ou écoles nationales [V. John Baird]. Dans un certain nombre d’endroits, on employait des maîtres d’école qui n’appartenaient pas à l’Église d’Angleterre. Comme la chambre d’Assemblée du Nouveau-Brunswick mettait généreusement des fonds à la disposition des écoles paroissiales, Coster considérait qu’il était de son devoir de s’assurer que les fonds de la Society for the Propagation of the Gospel ne serviraient qu’à aider les professeurs qui enseignaient le catéchisme intégral et inculquaient les principes de l’Église d’Angleterre. Mais étant un homme conciliant et doux, il procéda graduellement pour faire des changements. Ses longues évaluations approfondies et prudentes, ainsi que ses jugements francs sur le caractère et la compétence des professeurs, montrent son souci d’éliminer l’incompétence et d’améliorer la qualité générale de l’éducation dans la province.
En 1832, Coster présida une réunion au cours de laquelle on suggéra de tenir une assemblée annuelle du clergé, ouverte aux délégués laïques, dans le but d’encourager l’appui de la colonie à l’Église du Nouveau-Brunswick, qui jusque-là dépendait largement des fonds et des prêtres envoyés d’Angleterre. Au début, l’évêque Inglis désapprouva cette idée, mais en 1836 il donna sa permission à condition, précisait-il, que le clergé puisse « mettre en harmonie toutes les parties [de la société projetée] avec les deux grandes sociétés de l’Église [la Society for the Propagation of the Gospel et la Society for Promoting Christian Knowledge], dont les objectifs [devaient] constituer [ses] limites ». Dans le cas contraire, notait-il, l’Église « courr[ait] le risque de [se] trouver dans le chaos ». Selon Ernest Hawkins*, secrétaire de la Society for the Propagation of the Gospel, la création en 1836 de la Church Society of the Archdeaconry of New-Brunswick (qui devint la Diocesan Church Society of New Brunswick) constitua « la première tentative systématique faite dans une colonie britannique pour appuyer plus complètement et plus efficacement l’Église coloniale ». La société accordait une importance particulière à l’attribution de fonds pour l’œuvre missionnaire dans les régions éloignées de la province, à l’assistance pour la construction d’églises, à l’aide à ceux qui se destinaient à la prêtrise et à la formation des maîtres et des maîtresses d’école. Jusqu’à l’arrivée de l’évêque John Medley* en 1845, ses figures centrales furent l’archidiacre Coster et son frère Frederick. La société prit peu à peu une importance tellement essentielle pour les anglicans du Nouveau-Brunswick qu’on finit par l’appeler « le Parlement de l’Église ». Sur la recommandation de Coster, on publia dès le début des rapports annuels, lesquels contribuèrent à donner aux anglicans partout dans la province un nouveau sentiment d’identité et de nouveaux buts.
Même si Coster fit preuve de prudence dans ses innovations, il montra de la persévérance et du savoir-faire en veillant aux intérêts de l’Église – dans ses relations avec le gouvernement de la colonie. Succès particulièrement remarquable, il obtint des titres, au nom d’organismes de l’Église d’Angleterre, sur des terres publiques que l’on avait réservées pour venir en aide aux œuvres religieuses et à l’enseignement. Dans la plupart des cas, le titre allait aux paroisses en tant qu’entités juridiques, mais il était difficile d’avoir la haute main sur celles-ci. Juste avant que l’autorité sur les terres de la couronne ne passe du ministère des Colonies à la chambre d’Assemblée en 1837, Coster s’arrangea pour que les propriétés que l’Église devait encore recevoir soient placées sous l’administration d’un conseil de fidéicommissaires composé de fonctionnaires importants.
Durant les deux décennies qui précédèrent 1837, le ministère des Colonies avait utilisé une partie des revenus publics placés sous son autorité pour aider financièrement un système d’éducation anglican. Coster craignait que, lors de la remise de ces revenus à la province, l’influence de l’Église ne soit ébranlée. En 1838, cependant, les réformistes de l’Assemblée ne purent faire adopter des propositions visant à modifier la charte du King’s College, ni apporter des changements au Madras School Board. La chambre adopta bien un crédit budgétaire pour la création d’un séminaire baptiste à Fredericton, mais le Conseil législatif le rejeta avec une forte majorité. Le 6 mars 1838, Coster écrivit dans un rapport aux bureaux de la Society for the Propagation of the Gospel : « le seul point qu’ils [les membres du groupe opposé à l’Église d’Angleterre] ont gagné contre nous est une extension au droit de célébrer les mariages entre des personnes n’appartenant pas à leur propre confession ; célébration qu’auparavant ils n’hésitaient pas à faire chaque fois qu’ils en avaient l’occasion ». Pour le moment du moins, il se sentait encouragé et nota : « Nos fidèles sont évidemment conscients de la nécessité de se dépenser pour la défense de l’Église et pour son appui. »
Les attaques contre le King’s College, qui persistèrent jusqu’en 1859, inquiétaient particulièrement Coster. En effet, de 1829 à 1845, l’archidiacre de la province occupa le poste non rétribué de président du collège en vertu de la charte royale. L’administration quotidienne était entre les mains du vice-président, Edwin Jacob, avec qui les relations de Coster ne furent jamais cordiales ; les fonctions officielles de ce dernier se limitaient à la présidence des réunions du conseil. En 1841–1842, durant le séjour de Jacob en Angleterre, Coster se rendit au collège chaque jour pour surveiller son fonctionnement et donner les cours de théologie à la place de Jacob. Après le retour de celui-ci, Coster continua de donner un cours hebdomadaire à un groupe restreint de futurs prêtres, où il soulignait « la position particulière de l’Église et son enseignement dogmatique positif ». William Quintard Ketchum, un ancien étudiant, écrivit bien des années plus tard que ce cours « était loin d’être populaire, le courant allant dans le sens contraire ».
Les espoirs des évangéliques atteignirent leur point culminant au Nouveau-Brunswick durant le régime du lieutenant-gouverneur sir John Harvey. Ils devaient décliner avec la nomination en 1844 de l’un des plus grands adhérents à la high church, John Medley, comme premier évêque de Fredericton. Coster écrivit le commentaire suivant au sujet de cette nomination : « Nous voulons un homme exactement conforme à la description qu’on fait de lui. » Auparavant, lorsque Harvey avait recommandé avec insistance la nomination de Jacob, qui était de tendance low church, Coster avait lui-même accepté à contrecœur d’être candidat dans l’éventualité où un ministre résidant déjà dans la colonie devait être nommé. Medley apportait sa jeunesse, sa vigueur et des idées neuves à l’Église du Nouveau-Brunswick ; cependant, les ressources financières et l’appui de ses amis tractariens en Angleterre étaient encore plus essentiels à son succès. Avec la présence de cette puissante figure, Coster disparut à l’arrière-plan.
Les quatre années qui précédèrent l’arrivée de Medley furent probablement les plus heureuses que connut Coster. Le lieutenant-gouverneur sir William MacBean George Colebrooke* était son ami, et les Coster allaient « souvent faire de la musique à la résidence du gouverneur » : l’archidiacre était un excellent musicien tandis que sa femme, leur fils et plusieurs de leurs filles connaissaient le chant. Autant les lettres qu’il avait adressées à la Society for the Propagation of the Gospel à la fin des années 1830 étaient pessimistes quant à l’avenir de l’Église dans la colonie, autant elles étaient maintenant pleines d’espoir, fournissant des comptes rendus sur l’excellence des candidats au ministère, sur les écoles nationales dont l’état s’était considérablement amélioré et sur le succès de ses idées au sein de l’Église et de l’Église au sein de la population, même si certains journaux et certaines personnalités politiques semblaient souvent se montrer « favorables à la dissidence ».
Dans sa propre paroisse, Coster agissait avec une grande prudence. Il insistait pour s’en tenir rigoureusement aux règles du Book of Common Prayer quant à la célébration de la Cène et des Jours saints ; la seule innovation importante fut l’institution en 1835 de services du soir, selon les instructions de l’évêque Inglis. Le conseil paroissial était un organisme traditionaliste qui maintenait l’Église comme le bastion des privilèges et décourageait la présence des pauvres en refusant de fournir des sièges gratuits. La venue de Medley dérangea cette situation de tout repos. Celui-ci décida que l’emplacement de l’église paroissiale conviendrait à merveille pour l’érection de sa nouvelle cathédrale. Cette décision signifiait le déplacement de la vieille église ou sa démolition. En 1846, le conseil décida par vote de coopérer avec l’évêque, mais il y eut de l’agitation parmi le peuple contre l’incorporation de l’église dans la cathédrale ; puis, en 1853, il fut convenu de séparer les biens de la paroisse et ceux de la cathédrale. Plus que toute autre chose, le bouleversement des anciennes coutumes sociales et la proposition de rendre gratuits les sièges de la cathédrale avaient probablement fait naître le sentiment populaire contre l’union. Durant toute cette controverse, Coster adhéra strictement au vieux principe de l’Église d’Angleterre : « Rien sans l’évêque », obéissant même quand il reçut l’ordre de célébrer les services dans la cathédrale plutôt que dans l’église paroissiale. Finalement, au grand soulagement de Coster, ses fidèles se regroupèrent à la chapelle St Anne, un bel édifice en pierre de style néo-gothique, que Medley avait fait construire comme chapelle succursale. Les collectes dans la nouvelle église s’avérèrent insuffisantes, et Coster paya lui-même la majeure partie des coûts du secours aux pauvres, auparavant supportés par les paroissiens : la somme s’élevait à plus de £70 par an. Un autre acte de l’évêque vint assombrir les derniers mois de Coster : son frère Nathaniel, rector de Gagetown, reçut selon l’archidiacre une condamnation sévère pour avoir frappé un paroissien.
En 1831, l’année suivant leur arrivée à Fredericton, les Coster avaient perdu la plupart de leurs biens, ayant subi deux incendies à leur maison en cinq mois. Le conseil paroissial leur construisit alors un beau presbytère en brique. Les pauvres y étaient reçus avec charité chrétienne. On y organisait aussi des réunions agréables où Eleanor Coster se montrait « toujours prête pour une vive discussion ». Et on y jouait de la musique, sacrée et populaire. Le soir, il y avait des lectures : « [Coster] connaissait par cœur les meilleures pièces de Shakespeare. Personne n’aimait plus [que lui] la drôlerie et l’esprit de Dickens et de Thackeray ou ressentait plus profondément leur beauté et leur pathétique. »
La maison des Coster devint un centre pour la colonie britannique de Fredericton. James Robb*, jeune médecin écossais qui était professeur de chimie et d’histoire naturelle au collège, fut converti à l’anglicanisme par Coster et épousa sa fille aînée. Parmi ses autres gendres, on retrouvait le juge en chef James Carter*, Edward Barron Chandler*, membre d’une famille d’hommes politiques très en vue, et Frank Wills, architecte de la cathédrale Christ Church de Fredericton et pionnier du néo-gothique en Amérique du Nord. Le fils de Coster, le révérend Charles, devint professeur à l’école d’études supérieures de Fredericton.
L’archidiacre était « un bon tory loyal » qui défendait les privilèges de l’Église et s’opposait en particulier aux efforts pour faire du King’s College une institution plus séculière. Il prisait peu l’émergence de la politique populaire et s’inquiétait de l’arrivée d’un gouvernement responsable, accompagnée du déclin des familles dont la fortune dépendait des hauts salaires et de l’occupation à vie des fonctions publiques. Pendant ses dernières années, il souffrit beaucoup de l’asthme, et de fréquentes maladies réduisirent son activité publique. De toute façon, il fut essentiellement un homme d’étude et un prédicateur, non un homme du monde politique actif.
Les quelques sermons publiés de George Coster sont des exemples de clarté. L’évêque Medley les qualifiait de remarquables en raison de leur concision, de la pureté de leur style et de leur grande force d’expression. À la mort de Coster, l’évêque écrivit : « L’Église a perdu en lui un érudit compétent et consciencieux [...] les pauvres ressentiront la perte d’un ami très bon. »
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D. Murray Young, « COSTER, GEORGE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 12 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/coster_george_8F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/coster_george_8F.html |
Auteur de l'article: | D. Murray Young |
Titre de l'article: | COSTER, GEORGE |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1985 |
Année de la révision: | 1985 |
Date de consultation: | 12 déc. 2024 |