MANNING, EDWARD, ministre baptiste, né le 16 octobre 1766 en Irlande, troisième fils de Peter Manning et de Nancy Carroll ; le 25 juin 1801, il épousa Rébecca Skinner, et ils eurent trois filles ; décédé le 12 janvier 1851 à Upper Canard, Nouvelle-Écosse.
Peter Manning arriva en Nouvelle-Écosse avec sa famille en 1769 ou 1770, venant directement d’Irlande ou, selon la tradition familiale, après avoir fait un séjour à Philadelphie. Le recensement de 1770 l’identifie comme résident du canton de Falmouth et chef d’une famille de neuf personnes. Catholiques à l’origine, tous les Manning semblent être devenus protestants, du moins officiellement, dès les années 1770. En 1776, Peter Manning assassina un voisin, le beau-père du révérend John Payzant*. Il fut jugé, trouvé coupable et pendu.
On sait peu de chose sur la vie que mena la famille Manning dans la région de Falmouth après cette tragédie. Edward devint un jeune homme de grande taille (six pieds quatre pouces) et très fort, bon fermier et excellent bûcheron ; à 16 ans, armé seulement d’une hachette, il tua trois ours. D’après ce qu’il raconta plus tard, il menait une vie « tapageuse » et dissolue, même si elle était probablement assez normale pour l’époque.
Le Grand Réveil, amorcé en 1776 et dirigé par un autre résident du canton de Falmouth, le prédicateur charismatique Henry Alline*, eut un effet considérable sur Manning. Jusqu’à la fin de son existence, il conserverait un souvenir vivace d’Alline, le visage noyé de larmes, qui le suppliait de « fuir la colère à venir ». Cependant, c’est seulement le 27 avril 1789, sous l’influence de Payzant, que Manning se convertit finalement. Cet événement, de toute évidence le plus marquant de sa vie, fut une expérience intense qui survint au faîte d’une période de grande angoisse et allait orienter tout son avenir.
Peu après sa conversion, Manning se joignit à la congrégation de Payzant, la communauté congrégationaliste New Light, dans le canton de Cornwallis, et se sentit bientôt « appelé » à prêcher ses compatriotes de la Nouvelle-Écosse. Malgré son instruction modeste, il entreprit, à la façon d’Alline, une vie itinérante en 1789 et prononça son premier sermon en février 1790 à Onslow. Il s’intégra à un groupe dynamique de jeunes gens « éveillés » par le revivalisme qui balayait les colonies des Maritimes depuis 1776. Pendant 20 ans, ils contribueraient beaucoup à transformer la vie religieuse de la région. Dans les villages de colons d’origine américaine établis en Nouvelle-Écosse avant la guerre d’Indépendance, où Alline avait déjà fait sa marque, comme dans les régions loyalistes, nouvellement peuplées et instables, Manning, son frère James, Harris Harding, Joseph Dimock*, Thomas Handley Chipman et d’autres allaient répandre encore davantage le revivalisme et le pousser, aussi, à de nouveaux excès.
L’antinomisme était peut-être une orientation logique pour certains de ces nouveaux chefs religieux et leurs partisans enthousiastes. Quoi qu’il en soit, le canton de Cornwallis, où le Grand Réveil avait trouvé tôt des adeptes, devint le foyer du mouvement de la « nouvelle loi », qui soulignait que la « renaissance » était le moyen par lequel Dieu s’adressait directement à l’humanité, de sorte que le converti était au-dessus des règles de l’Église, des orientations pastorales et même des commandements des Écritures. En 1791, cette position extrémiste, défendue par les Manning, Harding et Lydia Randall, provoqua une scission au sein de la congrégation du canton de Cornwallis et son influence se mit rapidement à s’étendre. Payzant, affolé, raconta que l’année suivante, les frères Manning se rendirent « à l’assemblée et commencèrent à contester et à condamner les règles de l’Église, à dire que c’en était fini de la discipline et que la Bible était lettre morte, et qu’ils prêcheraient sans elle ». Mais le chaos et le désordre – tant doctrinaux que sociaux – provoqués par ce mouvement, comme les excès incontrôlés auxquels se livraient certains de ses membres, firent voir à Manning et à d’autres chefs religieux potentiels qu’ils avaient déchaîné des forces impossibles à réprimer. En l’espace de quelques années, Manning abandonnerait cette position extrémiste. L’intermède de la « nouvelle loi » influa beaucoup sur la suite de son existence et l’obligea plus tard à chercher de la stabilité et de l’unité au sein d’une Église mieux structurée.
Manning tenta de redevenir fermier à plein temps en 1792, mais il ne pouvait pas se passer de prêcher. Dès 1793, il se rendait au delà des frontières de la Nouvelle-Écosse et prononçait de nombreux sermons, au Nouveau-Brunswick, surtout dans la vallée de la rivière Saint-Jean, établissant ainsi les bases d’un futur mouvement baptiste. Ne détenant pas de permis de prêcher, il y fut arrêté par le gouvernement, mais, raconte la tradition, il fut relâché parce que le juge de paix avait beaucoup été impressionné par son éloquence. Tout au long de sa vie, Manning assisterait à la suppression progressive de ce genre de restrictions et y participerait lui-même de façon importante.
Le 19 octobre 1795, Manning fut ordonné pasteur de la communauté congrégationaliste New Light du canton de Cornwallis, qui regroupait dans une alliance fragile des congrégationalistes et des baptistes « éveillés » par le revivalisme. Pendant quelques années, il baptiserait des adultes et des nouveau-nés par aspersion ou immersion, selon les vœux des personnes concernées.
En 1797, inquiets des excès du mouvement de la « nouvelle loi », de la conduite incohérente et hétérodoxe de Harris Harding et des remous qui secouaient constamment les congrégations évangéliques des Maritimes, Payzant et Manning poussèrent le clergé New Light de la Nouvelle-Écosse à former une association. La première assemblée plénière eut lieu l’année suivante mais, « la nécessité de l’ordre et de la discipline » continuant de paraître primordiale aux ecclésiastiques, sinon aux membres des congrégations, il fallut envisager dès 1799 la création d’une organisation plus rigide. La fin des années 1790 voyait aussi le baptisme, qui prônait le baptême du croyant par immersion, gagner du terrain. Manning était convaincu du bien-fondé de cette position et fut lui-même baptisé par immersion en 1798, même s’il continua de desservir sa congrégation où se retrouvaient baptistes et congrégationalistes.
Lors d’une réunion tenue à Lower Granville en 1800, l’organisation déjà existante devint la Nova Scotia Baptist Association, qui regroupait les membres des deux confessions. Quoique, en général, on attribue à Manning l’initiative de ce regroupement, elle revient plutôt à Chipman ; Manning s’y opposait en effet, car il l’estimait injuste pour les congrégationalistes New Light et pour Payzant en particulier. Au cours des années suivantes, toutefois, la plupart des communautés congrégationalistes New Light, en Nouvelle-Écosse, deviendraient des congrégations baptistes. De même, la plupart des ministres New Light accepteraient le baptême des adultes par immersion, à la façon des baptistes, et iraient jusqu’à modifier leur orientation doctrinale, abandonnant l’approche d’Alline, fondée sur le libre arbitre, pour revenir au calvinisme de leurs prédécesseurs congrégationalistes.
Peu après 1800, Manning comprit à quel point il était difficile de diriger une communauté composée de baptistes et de congrégationalistes. La rupture eut finalement lieu en 1807 et Manning, sa femme et sept fidèles quittèrent la communauté congrégationaliste New Light du canton de Cornwallis, et fondèrent une congrégation baptiste distincte. Manning fut ordonné prédicateur baptiste l’année suivante. En quelques années, la communauté congrégationaliste New Light allait à peu près disparaître car de plus en plus de fidèles l’abandonneraient pour se joindre aux dissidents.
Les archives de la congrégation n’indiquent pas avec précision si Manning fut forcé de partir ou s’il s’en alla de plein gré. Ce n’est peut-être pas un hasard si son départ coïncida avec l’acquisition de « quelque part de biens temporels » (de source non identifiée), ce qui lui permit d’acheter sa propre ferme et de jouir d’une indépendance financière presque complète pour le reste de ses jours. Il pouvait dorénavant obéir à sa conscience sans avoir à compter sur le soutien d’une congrégation nombreuse. Mais quelle qu’ait été la cause ou l’occasion de son départ, Manning demeurerait, sauf pendant une brève période, pasteur de la congrégation baptiste First Cornwallis jusqu’à sa mort, en 1851.
Le territoire de Manning était très vaste : tout le canton de Cornwallis, dans le comté de Kings. De sa maison d’Upper Canard, il tentait de rejoindre une population croissante, originaire surtout de la Nouvelle-Angleterre. En dépit de ce que diraient plus tard les historiens baptistes, les archives de la congrégation et le long journal personnel de Manning révèlent que ses relations avec sa congrégation furent très peu sereines. Manning créait lui-même certaines difficultés parce qu’il était incapable d’oublier complètement ses débuts de prédicateur itinérant. De plus, il fallut de toute évidence beaucoup plus de temps que prévu pour que la congrégation accepte tout à fait un ministre à demeure et adopte la doctrine baptiste. Les années de pastorat de Manning furent remplies de tension et d’acrimonie et se révélèrent quelquefois déprimantes, tant pour lui que pour ses fidèles.
Durant le long ministère de Manning, sa congrégation ne parvint jamais à lui verser un salaire suffisant, problème commun à la plupart des communautés baptistes des Maritimes à l’époque. Même si les fidèles offraient souvent des cadeaux à leur pasteur – ordinairement en nature (des navets, un sac de semences, une charretée de bois), rarement en argent – aucune tentative systématique n’était faite pour assurer un soutien à Manning. Obligé à divers moments de cultiver la terre de manière occasionnelle, d’enseigner et de vendre des livres, il était souvent empêché de consacrer tout son temps et toute son énergie au bien-être spirituel de ses fidèles.
Les questions doctrinales creusaient cependant un fossé plus profond entre Manning et ses fidèles. Lui-même, grâce à des études poussées et à une intelligence vive, comprenait bien la doctrine baptiste. Mais rien n’indique que cette compréhension ait été partagée par la plupart de ceux qui se joignirent à sa congrégation pendant les nombreuses années de son ministère. Chaque fois qu’un orateur populaire, de quelque confession qu’il ait été, traversait le canton, les fidèles de Manning s’empressaient d’aller l’entendre. Il se plaignit un jour de « ce déluge de feu trompeur et de la doctrine qui préva[lait] parmi les gens ». Les prédicateurs Free-will étaient particulièrement bien accueillis, même par les conseillers presbytéraux de Manning, ce qui suggère que l’influence doctrinale d’Alline fut peut-être plus grande et plus durable qu’on ne l’a estimé généralement.
Plus tard, Manning devait écrire qu’il avait passé 35 ans à tenter de « protéger les gens contre les divers genres de doctrine et contre l’adresse rusée d’hommes subtils et intrigants ». Qu’il ait souvent échoué montre que la confusion doctrinale persista dans la secte baptiste longtemps après sa fondation. La promptitude avec laquelle les habitants du canton de Cornwallis suivaient de nouveaux chefs de file – baptistes ou non – et la fréquence à laquelle cela se produisait, surtout pendant les absences ou les maladies de Manning, sembleraient indiquer qu’au fond, la doctrine ne les intéressait pas du tout. Ils étaient baptistes parce que Manning s’était révélé un chef convaincant et dynamique et parce qu’il était baptiste. Leur engagement s’appuyait sur des questions de personnalité et non sur de la conviction. Si Manning n’était pas toujours sur la brèche, ils suivraient quelqu’un d’autre, baptiste ou non, calviniste ou non. Il n’est pas étonnant que, en énumérant ce qui l’ennuyait chez ses fidèles, il ait mentionné en cinquième et sixième lieux : « le peu de temps qu’ils consacrent à lire la Bible et d’autres bons livres, de sorte qu’ils ne savent pas ce que les sermons renferment de vrai et de faux » et « une démangeaison des oreilles [qui les pousse] à écouter d’étranges prédicateurs ».
Ce fut l’instabilité de sa propre congrégation, ajoutée aux leçons que lui avait enseignées l’enthousiasme effréné du mouvement de la « nouvelle loi », qui poussa Manning à rechercher une plus grande stabilité pour toute la secte. C’est là que se retrouvent ses plus importantes contributions à la croissance et à l’évolution du mouvement baptiste, et nulle part son influence ne se manifeste mieux que dans le domaine éducatif.
Même si Manning n’avait guère fréquenté l’école, il avait certainement l’esprit fin et pénétrant et n’était absolument pas ignare. Durant toute sa vie, ses lectures furent aussi vastes qu’éclectiques. À mesure que les fidèles et les membres du clergé se multipliaient, il s’inquiétait de plus en plus de voir un jour la diversité des doctrines faire éclater la secte. L’éducation, pressentait-il, était ce qui la cimenterait et rendrait plus utiles les ministres de la génération montante. Il était vraiment à l’avant-garde du mouvement qui, en cette première moitié du xixe siècle, était en train de transformer la société des Maritimes. On ne pouvait pas abandonner facilement et rapidement l’anti-intellectualisme du Grand Réveil et de ses suites pour faire naître un zèle nouveau à l’égard de l’éducation, mais ce changement se produisait. Dès 1819, son intérêt pour l’éducation et ses efforts dans ce domaine firent qu’on lui offrit de s’installer à Waterville, dans le Maine, où il aurait participé à la consolidation d’un établissement baptiste, le Colby College.
En 1828, pressée par la solide influence de Manning et par l’enthousiasme débordant de baptistes de Halifax comme Edmund Albern Crawley* et John Pryor*, la Nova Scotia Baptist Association dut accepter la fondation d’une école baptiste, première étape d’un processus qui assurerait aux chefs de file baptistes éventuels l’éducation que Manning estimait si nécessaire pour eux. Lui-même fut élu président de la nouvelle Nova Scotia Baptist Education Society, poste qu’il conserva jusqu’à la fin de sa vie. Sans plus tarder, on fonda aussi à Wolfville la Horton Academy, école de garçons qui devait dès le début être ouverte à toutes les confessions. Le 15 juillet 1830, Manning posa fièrement la première pierre de ce nouvel établissement (la Horton Academy demeura ouverte jusqu’en 1959).
En 1838, réagissant au caractère exclusif du King’s College de Windsor et du Dalhousie College de Halifax, la Nova Scotia Baptist Education Society, présidée par Manning, vota en faveur du passage à l’étape suivante, la fondation d’un collège. Dès janvier 1839, des cours commencèrent à se donner au Queen’s College. Le 16 juillet 1843, Manning, malgré ses quelques années d’instruction, présidait les premiers exercices d’obtention du diplôme devant une classe de quatre étudiants. Il vécut assez longtemps pour voir quelle influence très réelle la Horton Academy et l’Acadia College (l’ancien Queen’s College) auraient sur l’ensemble de la secte. Grâce à son influence sur les jeunes membres du clergé et à son rôle dans l’établissement de ces deux institutions, il contribua plus que tout autre à la création d’une orthodoxie baptiste dans les Maritimes.
Par ailleurs, Manning était vivement intéressé à renforcer la secte en cherchant à faire lever certaines des restrictions légales imposées aux non-conformistes des Maritimes. Le droit de célébrer légalement les mariages et le droit de se constituer en société étaient deux « droits » importants recherchés par Manning et d’autres. À compter de 1819, il travailla de concert avec d’autres baptistes et avec les presbytériens dirigés par Thomas McCulloch* afin d’obtenir l’égalité avec l’Église d’Angleterre, but qui fut finalement atteint dans le cours de son existence.
Manning participa aussi à l’expansion de la secte, avec des résultats peut-être mitigés, en parvenant à attirer plusieurs dissidents de l’église anglicane St Paul de Halifax, au milieu des années 1820. C’est en effet Manning, par l’entremise du mari de sa nièce, John Ferguson, qui, plus que tout autre, fit entrer ce groupe important dans l’Église baptiste. James William Johnston*, Edmund Crawley, John Pryor et d’autres apporteraient à la secte une note nouvelle, et parfois discordante, ce qui aurait des répercussions politiques, sociales, théologiques et éducatives d’une grande portée.
Avec Charles Tupper*, Manning fut l’un des premiers pasteurs baptistes à sentir l’importance du mouvement de tempérance qui, venu du Maine, balaya les Maritimes en 1829. Immédiatement convaincu du bien-fondé de l’abstinence, il dirigea la formation d’une société de tempérance dans le canton de Cornwallis et aida à articuler la position qui devint à toutes fins utiles un article de foi pour beaucoup de congrégations baptistes et le demeura pendant près d’un siècle et demi.
Manning fut aussi le premier chef baptiste à prendre un intérêt évident à l’histoire de la secte. Dès 1812, il rédigea une petite histoire des baptistes des Maritimes en réponse à des questions que lui avait posées le révérend David Benedict, du Rhode Island, qui souhaitait publier une histoire des baptistes d’Amérique du Nord. C’est probablement parce qu’il avait conscience de la valeur des données historiques qu’il conserva avec tant de soin sa volumineuse correspondance et tint son journal avec tant de minutie. On ne peut se passer aujourd’hui de ces documents pour comprendre la vie de la secte baptiste à cette époque.
Manning dirigea aussi le mouvement qui devait déboucher sur une participation active aux missions étrangères. En 1814, exprimant dans une lettre circulaire aux congrégations de la Nova Scotia Baptist Association son souci des « païens des pays étrangers », il écrivait le premier plaidoyer important en faveur de l’engagement des baptistes dans les missions étrangères. En cela, sa lecture de périodiques baptistes venant des États-Unis et de Grande-Bretagne l’influençait beaucoup. Il revenait régulièrement sur ce thème, souhaitant de toute évidence pouvoir partir lui-même. En 1845, par suite de ses efforts, le premier missionnaire baptiste, Richard E. Burpee, s’embarquait pour la Birmanie, inaugurant plus de 140 ans de travail en terre étrangère.
Dans cette même circulaire importante, Manning se montrait également préoccupé des missions des Maritimes. Ce serait au moins en partie grâce à son influence et à ses efforts que le mouvement baptiste y connaîtrait une expansion aussi rapide pendant la première moitié du xixe siècle. Encourageant les autres, il parcourait lui-même toute la région des Maritimes et se rendait dans le Maine, fondant de nouvelles congrégations et en faisant revivre d’anciennes. En plus de faire des tournées, il étendait son autorité dans toutes les Maritimes par une vigoureuse correspondance. Lorsque des individus ou des congrégations éprouvaient des difficultés, c’était vers Manning qu’ils se tournaient. De plus, il renseignait la Nova Scotia Baptist Association sur les progrès du baptisme aux États-Unis. Dans tous ces domaines, il tentait de donner une orientation modérée à la secte et de lui faire éviter autant l’écueil d’un enthousiasme excessif que celui d’un « formalisme mort ». Au milieu du xixe siècle, la secte devrait une bonne partie de sa stabilité à Manning.
Ironiquement, le travail de Manning comme chef de file auprès de la secte fut plus fructueux que ses relations avec sa congrégation et sa famille. La communauté du canton de Cornwallis lui créa des problèmes constants et, du côté familial, ce ne fut guère mieux. Sa femme, qui détestait de toute évidence le voir si souvent absent, tomba « malade » vers 1815 et souffrit presque constamment de « palpitations du cœur » et de « mélancolie », selon les termes de Manning. Néanmoins, 36 ans plus tard, elle était encore en assez bonne santé pour marcher dans le cortège funèbre de son mari. La peur constante qu’il avait de voir sa femme mourir, la mort lente de deux de ses trois filles et les fréquentes maladies que lui causait la vie de pasteur installèrent en lui un souci morbide de sa santé. Son journal est rempli d’allusions à sa condition physique et à sa mort prochaine. Parfois, sa mauvaise santé (réelle ou imaginaire) et celle de sa femme nuisirent sérieusement à son efficacité comme ministre et dirigeant de la secte.
La mort d’Edward Manning, au début de 1851, marqua la fin des années de formation du mouvement baptiste. Dans les Maritimes, les hommes de sa génération avaient vu le mouvement émerger de la confusion et de l’incertitude générées par le Grand Réveil et la Révolution américaine, puis devenir une secte importante et stable. Personne ne contribua plus que Manning à ce progrès. Le journal baptiste Christian Messenger rendit hommage à ce remarquable chef de file dans les lettres, articles et éditoriaux qui accompagnèrent l’annonce de son décès. Le respect qu’il commandait devint plus que jamais évident lorsque ce journal, soulignant que « l’histoire de sa vie constitu[ait] l’histoire de l’émergence et de l’avancement du mouvement baptiste » dans les Maritimes, annonça que personne n’était prêt, conformément à la tradition, à entreprendre la tâche terrifiante d’écrire le « récit » de sa vie.
Un portrait à l’huile représentant Edward Manning se trouve dans le hall de l’Acadia Univ. (Wolfville, N.-É.).
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Barry M. Moody, « MANNING, EDWARD », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/manning_edward_8F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/manning_edward_8F.html |
Auteur de l'article: | Barry M. Moody |
Titre de l'article: | MANNING, EDWARD |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1985 |
Année de la révision: | 1985 |
Date de consultation: | 1 déc. 2024 |