Titre original :  Joseph Cunard - MyNewBrunswick

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CUNARD, JOSEPH, marchand de bois, constructeur de navires et homme politique, né en 1799 à Halifax, Nouvelle-Écosse, fils d’Abraham Cunard, marchand, et de Margaret Murphy ; il épousa Mary Peters de Bushville, Nouveau-Brunswick, le 12 avril 1833, et ils eurent quatre fils et une fille ; décédé le 16 janvier 1865, à Liverpool, Angleterre.

Après des études à la Halifax Grammar School, Joseph Cunard entra au service de la firme de son père dans cette ville. Vers 1820, Joseph et son frère Henry se rendirent à Chatham, Nouveau-Brunswick, sur la rivière Miramichi où ils ouvrirent une succursale de la compagnie familiale, connue sous le nom de Joseph Cunard and Company, dans laquelle son frère Samuel était aussi associé. Ils achetèrent immédiatement un quai et un magasin, et s’intéressèrent bientôt à l’exploitation forestière, au sciage du bois, et à l’expédition de marchandises sur la rive sud de la rivière.

En 1832, Joseph Cunard était considéré comme l’un des marchands les plus riches et les plus influents de la province. À Chatham, sa compagnie possédait plusieurs scieries, y compris un gros moulin à vapeur qui commença à fonctionner en 1836 et sciait quotidiennement 40 000 pieds de bois de construction. Dans la même ville, la compagnie avait aussi une briqueterie, plusieurs magasins, un bureau de comptabilité qui employait 30 personnes et au moins deux chantiers de construction. On construisit des scieries plus bas sur la rivière et on ouvrit un magasin à Shippagan. En 1830, la compagnie ouvrit des magasins à Kouchibouguac et à Richibouctou dans le comté de Kent, et, en 1841, William Raymond pouvait rapporter que les transactions qu’il avait conclues avec Cunard à Kouchibouguac totalisaient £100 000 et que Cunard avait payé environ le tiers de cette somme en navires. Les activités de Cunard dans le comté de Kent firent de Richibouctou, pendant une brève période, le troisième plus important port d’embarquement du Nouveau-Brunswick. En 1831, la compagnie acheta des magasins, des maisons et d’autres immeubles à Bathurst et commença, l’année suivante, à expédier du bois. L’exportation de bois à partir de Bathurst s’éleva de 1 300 tonnes en 1829 à 26 500 tonnes en 1833.

Cunard joua un rôle important dans la construction navale. Il commanda pour lui un certain nombre de vaisseaux dans les années 1827–1838, mais, en 1839, il possédait deux chantiers de construction à Chatham. Il y construisit au moins 43 navires, y compris le Velocity, premier bateau à vapeur construit sur la Miramichi ; il fut lancé en 1846. Cunard entreprit la construction de bateaux à Bathurst en 1839 et, de 1841 à 1847, il fut le seul constructeur de la région. Entre 1839 et 1847, il construisit au moins 24 bateaux à Bathurst. À ses chantiers de Richibouctou et Kouchibouguac, qui commencèrent leurs activités vers 1840, on construisit au moins neuf bateaux dans les années 1840–1847. En 1841, les frères de Joseph avaient cessé leurs activités dans la firme de la Miramichi et on lui laissa les coudées franches, bien que Samuel continuât d’être associé jusqu’en 1846 et de conseiller son frère dans ses divers projets.

Cunard établit son quartier général à Chatham et s’intéressa aux affaires locales et à la politique. Il fut juge de paix, membre et président du Bureau de santé pour les comtés de Northumberland et de Gloucester, et commissaire des phares. En 1828, il fut élu député du comté de Northumberland à la chambre d’Assemblée, conservant son siège jusqu’à sa nomination au Conseil législatif en 1833. De 1838 jusqu’à sa démission en 1846, il fut aussi membre du Conseil exécutif, bien qu’il n’y fût pas une figure dominante et se laissât rarement entraîner dans une controverse. À titre de président du Bureau de santé, Cunard prit part à la fondation d’un lazaret sur l’île Sheldrake, en 1844 [V. François-Xavier-Stanislas Lafrance]. Quatre ans plus tard, il se joignit aux autres membres du Bureau de santé et aux lépreux qui vivaient sur cette île pour s’opposer au désir du juge local de déménager la station de quarantaine pour les immigrants qui arrivaient, de l’île Middle, qui appartenait à Cunard, à l’île Sheldrake. Néanmoins, les immeubles furent déménagés en 1848, mais, plus tard dans l’année, le gouvernement décida d’établir la station de quarantaine à Chatham.

Homme de forte stature, mesurant plus de six pieds et pesant plus de 200 livres, Cunard aimait galoper à travers Chatham, de ses moulins à son magasin ou à sa demeure, et on le vit souvent criant des ordres à ses hommes alors qu’il dirigeait à cheval leur travail. Il allait à l’église en carrosse accompagné de laquais. Sa résidence somptueuse était meublée princièrement, et des paons se pavanaient dans le parc. À l’occasion de l’inauguration de son moulin à vapeur en 1836, on invita quelque 300 personnes à un grand banquet. Souvent, à son retour d’un voyage en Angleterre, on l’accueillait à Chatham par des salves de canon et par les carillons des églises. Parfois, de Richibouctou, il envoyait un mot pour annoncer qu’il revenait chez lui, afin que la population de Chatham ait le temps d’organiser un accueil convenable. « On l’aimait et le détestait, on l’admirait et le craignait, il était bourru, compatissant à ses heures, cupide, autoritaire-autant de qualités contradictoires qui faisaient partie de cette vie dure, fruste, prodigue à la Miramichi, il y a un siècle. »

En 1839, Joseph Cunard accompagna son frère Samuel en Angleterre, où ce dernier obtint un contrat pour transporter le courrier transatlantique par navire à vapeur. Bien qu’on ne possède pas de preuve pour démontrer que Joseph joua un rôle dans ces négociations, il fut l’objet d’une réception triomphale à sa rentrée à Chatham. On ne s’était pas encore rendu compte que le développement de l’énergie fournie par la vapeur signifierait la disparition des bateaux de bois et la fin de la prospérité dans la région de la Miramichi.

Cunard avait bien des admirateurs mais aussi des ennemis. Lors de son arrivée à Chatham, un âpre conflit l’opposa à la firme Gilmour, Rankin, and Company, qui était déjà solidement établie dans la région de la Miramichi. L’un des premiers conflits entre les deux établissements éclata au sujet des grandes réserves de bois au nord-ouest des rivières Miramichi et Nepisiguit. Dans le cadre des projets de Thomas Baillis pour le développement de l’industrie du bois, Cunard s’était fait concéder plus de 500 milles carrés de ces excellentes réserves en 1830–1832 à la condition qu’il améliorât les cours d’eau en construisant des écluses et en enlevant les obstacles. Aucune autre firme ne s’intéressa à cette région jusqu’à ce que Cunard démontre que les opérations pouvaient y être avantageuses. Cunard ayant négligé d’apporter les améliorations promises, Alexander Rankin* mena une offensive contre ses privilèges. En 1833, par ordre du ministère des Colonies, Cunard fut obligé de renoncer aux réserves. Ce fut la première bataille qu’il perdit aux mains de la firme Rankin.

Les querelles continuèrent au sujet de la propriété du bois, du passage sans autorisation sur les réserves du moulin et de l’élection des candidats à l’Assemblée. La rivalité fut particulièrement âpre au cours des « élections mouvementées » de 1842–1843 dans le comté de Northumberland, alors que Cunard appuya John Thomas Williston et que Rankin soutint John Ambrose Street. De 500 à 1 000 hommes se battirent durant ces campagnes électorales et des troupes furent finalement dépêchées pour rétablir l’ordre. L’élection de Street fut une autre défaite pour Cunard.

L’imprudence de Cunard et la très grande expansion de ses affaires lui valurent des ennuis continuels. En 1842, les Cunard furent menacés de faillite. Au même moment, le gouvernement provincial prit des mesures contre Joseph Cunard pour l’obliger à régler ses comptes avec le gouvernement. Le Conseil exécutif nomma un comité afin d’enquêter sur ses dettes ; il recommanda que Cunard dépose une garantie de £3 000 et qu’on lui remette son bois, qui avait été plus tôt saisi. Il recommanda également qu’une enquête soit menée sur la conduite de l’arpenteur adjoint dans la région, Michael Carruthers, qui semblait avoir agi dans le dessein de nuire aux affaires de Cunard pour le bénéfice de Gilmour, Rankin, and Company. Carruthers fut plus tard éloigné du comté. Cunard réussit à passer à travers les difficultés, mais en 1847 il fut incapable de faire honneur à ses obligations. Les conditions économiques à la baisse, la dure concurrence de Gilmour, Rankin, and Company, et l’expansion imprudente de ses entreprises, jouèrent un rôle dans sa dégringolade. En novembre 1847, il se déclara en faillite. La panique s’ensuivit à Chatham où des centaines d’hommes dépendaient de Cunard pour leur travail. Une foule en colère l’affronta dans les rues au cri de « Tirez sur Cunard » mais, portant deux pistolets à ses bottes, Cunard ne recula pas d’une semelle et il aurait demandé : « Montrez-moi donc celui qui tirera sur Cunard. » Et la foule se dispersa. D’après les journaux, entre 500 et 1 000 personnes tombèrent en chômage par suite de la faillite de Cunard et plusieurs quittèrent la région afin de trouver du travail ailleurs. Un certain nombre de petites entreprises de la région se déclarèrent aussi en faillite. Le commerce du bois de la région de la Miramichi périclita pendant plusieurs années, en partie à cause de la faillite de Cunard, mais la construction navale reprit et connut une expansion considérable dans les années 1850.

En 1849, Cunard quitta le Nouveau-Brunswick mais y revint peu après dans une vaine tentative de régler ses affaires. Le remboursement de ses dettes ne se fit pas avant 1871 et, apparemment, Samuel Cunard assuma le gros de la responsabilité de la faillite de son frère. Joseph quitta finalement Chatham en 1850 pour Liverpool, où il se fit inscrire à la commission des affaires maritimes à titre d’associé dans la firme Cunard, Munn, and Company. En 1855, il fonda une nouvelle compagnie, Cunard, Brett, and Austin, qui devint Cunard, Wilson, and Company, en 1857. Ces firmes, fonctionnant sur la base de commission pour le compte de négociants et de marchands de bois aux colonies, vendaient des navires et du bois et achetaient des marchandises. La dernière de ces firmes fonctionnait encore quand Joseph mourut en 1865.

Cunard fut un personnage pittoresque, qui joua un rôle de premier plan dans les activités commerciales des comtés de Northumberland, Restigouche, Kent et Gloucester. Sa faillite vers la fin des années 1840 devait affecter sérieusement l’économie de la région durant plusieurs années.

W. A. Spray

Mariners’ Museum (Newport News, Va.), Indenture between Samuel, Joseph, and Edward Cunard, and Charles Walton, W. G. Driscoll, and Robert Carter, 11 avril 1842 (copie au N.B. Muséum).— N.B. Muséum, One of the noted sons of Kent Co., N.B. : Honourable Joseph Cunard, industrialist and member of Legislative Council (copie dactylographiée) ; Webster coll., Sir Howard Douglas, letterbook (copie dactylographiée), p.221.— PANB, Cunard-Raymond letterbooks and diary, 1840–1853 (mfm) ; J. C. et H. B. Graves, New Brunswick political biography, XI : 24s. ; REX/le/l-g, Head, letterbook, 1848–1850, p.153 ; REX/pa/Register of appointments and commissions, 1785–1840, pp.31, 48, 99, 101, 140s. ; REX/pa/Surveyor general’s correspondence, 1843, I(a), 3 ; II(a), 2 ; REX/px, 20, pp. 1 886–1 891 ; 24, files 5–6 ; 65 ; 116, file 2 ; RLE/555/pe/202 ; RLE/S63/pe/218 ; RNA/c/9/3/22 ; RPS, Letterbook, 1842–1845, pp.15, 25 ; 1845–1847, pp.214, 225, 341, 367 ; 1847–1850, pp.135, 163, 201s., 209s., 227s., 253 ; Samuel Merchandising family papers, M. Samuel to Messrs Moses, Son, and Davis, 26 mars 1842.— PRO, CO 188/42, 30 nov. 1831 ; 188/43, 16 janv. 1832 ; 188/46, 14 oct. 1833 ; 188/99, 26 févr. 1847 ; 188/106, 23 oct. 1848 ; 188/108, 20 févr. 1846, 29 mars 1849.— Gleaner (Chatham, N.-B.), 13 août 1833, 8 déc. 1835, 16 févr., 12 juill., 4 oct. 1836, 30 avril, 7 mai 1839, 6 juin 1846, 15 févr. 1848, 29 juin 1850, 27 janv. 1851, 17 nov. 1855, 21 janv., 4, 11 févr. 1865.— Miramichi Advance (Chatham, N.-B.), 10 juin 1880.— Esther Clark Wright, The Miramichi : a study of the New Brunswick river and of the people who settled along it (Sackville, N.-B., 1944), 44–51.— Hannay, History of N.B., II : 19.— MacNutt, New Brunswick, 216, 230, 240, 275s., 288, 321.— Louise Manny, Shipbuilding in Bathurst (Fredericton, 1965), 3–7 ; Ships of Miramichi : a history of shipbuilding on the Miramichi River, New Brunswick, Canada, 1773–1919 (Saint-Jean, N.-B., 1961), 24–33 ; Colossus of Miramichi, Atlantic Advocate (Fredericton), 55 (1964–1965), no 3 : 37–41.

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W. A. Spray, « CUNARD, JOSEPH », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 3 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/cunard_joseph_9F.html.

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Auteur de l'article:    W. A. Spray
Titre de l'article:    CUNARD, JOSEPH
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1977
Année de la révision:    1977
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