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BETHUNE, JOHN, pasteur de l’Église d’Angleterre, doyen du diocèse de Montréal, recteur pro tempore de McGill University, né le 5 janvier 1791 à Charlottenburg (Williamstown), dans le Haut-Canada, décédé le 22 août 1872 à Montréal.
John Bethune, frère d’Alexander Neil Bethune, était le troisième fils de Véronique Waddin et du révérend John Bethune*, pasteur de l’Église d’Écosse. Pendant la révolution américaine, son père servit comme aumônier dans le 84e régiment (Royal Highland Emigrants). Après sa démobilisation, il s’établit à Montréal, et, en mars 1786, organisa la première congrégation presbytérienne de Montréal qui devint par la suite la First Presbyterian Church of Montreal. En 1787, il s’établit dans la colonie royaliste américaine et écossaise de Glengarry, à l’ouest du lac Saint-François.
John Bethune fils fut formé par le révérend John Strachan* à Kingston et à Cornwall, et plus tard il enseigna sous sa direction. Après sa réception dans l’Église d’Angleterre, il se prépara à recevoir les ordres, sous la direction de Strachan. Il fut donc le premier bénéficiaire du programme (Experiment in Home Education) de formation que l’Église d’Angleterre offrait sur place aux Canadiens qui se destinaient aux ordres. Il était au service des anglicans de Cornwall en tant que prédicateur laïc depuis 1812, quand, en 1814, il fut ordonné par l’évêque Jacob Mountain* dans la cathédrale Holy Trinity, à Québec. Il fut envoyé en mission dans les cantons d’Augusta et d’Elizabethtown (ce dernier comprenait l’importante colonie de Brockville) et fut « adopté » par la Society for the Propagation of the Gospel. Missionnaire actif, il s’occupait non seulement de sa propre région mais encore il faisait de longs voyages dans les colonies de la rivière Rideau. En même temps, il enseignait à l’école secondaire du district d’Eastern de Cornwall. À cette époque de sa carrière, Bethune, protégé de Strachan, était comme son maître, « plutôt optimiste et partial dans ses vues » sur le statut de l’Église d’Angleterre.
En 1818, Bethune fut nommé ministre de l’église Christ, à Montréal, et premier pasteur de la paroisse anglicane de Montréal que le gouvernement provincial avait fondée cette année-là et dont les limites étaient identiques à celles de la paroisse catholique romaine de Notre-Dame. Ces deux paroisses desservaient toute la ville de Montréal et ses banlieues. Alors qu’il était pasteur, Bethune se fit remarquer. La construction de la nouvelle église Christ, commencée rue Notre-Dame en 1805, fut achevée et sa dette éteinte. Elle fut consacrée en 1830 par l’évêque Charles James Stewart*. Bethune multiplia les œuvres dépendant de l’église Christ ; même si elles étaient dirigées par cette église, la plupart de ces œuvres desservaient tous les Montréalais. Bethune organisa une école du dimanche, qui donnait aussi un enseignement profane aux adultes. En 1819, avec l’aide de la National School Society for the Education of the Poor, il fonda une école (monitorial) où les élèves plus âgés enseignaient aux plus jeunes. La Pastoral Aid Society créa un fonds afin d’assurer les services religieux dans les quartiers périphériques de Montréal. Le Committee of Managers for the Poor fut réorganisé pour secourir la misère. La fin de la guerre de 1812–1814 et des guerres napoléoniennes en 1815 avait sérieusement aggravé la pauvreté ; ces guerres avaient bouleversé l’économie et augmenté le nombre d’immigrants. La gravité de la situation incita Bethune à coopérer activement avec des groupes interconfessionnels : le Montreal Dispensary, la Ladies Benevolent Society et le Montreal General Hospital (1822). En 1828, Bethune fut rédacteur en chef du journal anglican de Montréal : le Christian Sentinel and Anglo-Canadian Churchman’s Magazine. Il fut l’un des fondateurs de la St George’s Society et de la German Society de Montréal ; son intérêt pour cette dernière provenait du fait que sa mère était d’ascendance suisse.
En novembre 1835, Bethune fut nommé recteur pro tempore de McGill University. Aussitôt, il fit pression pour qu’on élevât des bâtiments adéquats et qu’on enseignât d’autres matières que la médecine, la seule faculté qu’ait ouverte l’université lors de sa fondation en 1829. (A cette époque, la médecine avait ses quartiers dans la basse ville.) Les propositions de Bethune le firent entrer en contact avec la Royal Institution for the Advancement of Learning. C’était à elle que James McGill*, en 1813, avait confié ses biens en fidéicommis pour en doter une université ou un collège. L’institution nommait les membres du conseil d’administration de l’université, le recteur et les membres du personnel, et toutes ces nominations devaient être soumises à l’approbation du ministère des Colonies. Bien que plus de 20 années se fussent écoulées depuis la mort de McGill et six depuis l’ouverture de l’université, la plus grande partie de l’argent était encore l’objet de litiges et les administrateurs de l’université devaient toujours en référer à l’institution royale. Malgré la lutte qu’ils devaient soutenir contre l’institution royale au sujet des fonds, les administrateurs réussirent, à l’instigation de Bethune, à faire approuver leurs plans et à entreprendre la construction. En septembre 1843, la partie centrale des bâtiments de la faculté des arts et la résidence du recteur étaient achevées. L’enseignement, principalement les langues classiques et les mathématiques, commença avec trois étudiants : deux d’entre eux étaient les neveux du recteur qui était également professeur de théologie. Ses réalisations furent reconnues puisque McGill University lui décerna un doctorat honorifique en théologie la même année. Il avait reçu une récompense semblable de Columbia University en 1837.
Ironie du sort, le président de l’institution royale était l’évêque même de Bethune, George Jehoshaphat Mountain*. Non seulement partageait-il les craintes de l’institution royale au sujet des dettes croissantes et non autorisées des administrateurs de l’université, mais encore se méfiait-il de la demande de Bethune d’établir un contrôle exclusivement anglican sur McGill. Cette revendication d’exclusivité aliénait les non-anglicans et encourageait les institutions rivales, telles le Canada Baptist College et la High School of Montreal. À l’intérieur même de McGill, une certaine tension se développa entre Bethune et le vice-recteur, le révérend Francis James Lundy. Lundy fut congédié, mais la situation de Bethune était bien compromise. Le 3 avril 1846, Bethune fut également remercié par le ministre des Colonies, William Ewart Gladstone, qui agissait en grande partie sur le conseil de l’évêque Mountain.
Tandis qu’il était recteur de McGill, Bethune eut des activités maçonniques. Il fut un membre éminent de la plus ancienne loge de Montréal, la loge St Paul, et grand maître adjoint de la grande loge provinciale de Montréal et de William Henry (Sorel) de 1824 à 1846. Lundy était aussi, par affiliation, membre de la loge St Paul et, quand l’inimitié se développa entre les deux hommes, il semble que les membres de la loge St Paul aient essayé de jouer le rôle de médiateurs. Cette tentative fut vaine, la loge tendant elle-même à se diviser. La controverse a pu avoir quelque rapport avec la résolution d’établir une grande loge autonome pour le Canada. La grande loge provinciale, qui dépendait de l’United Grand Lodge of England n’était pas en mesure de s’occuper de toutes les questions la concernant. La Grande Loge du Canada fut fondée en 1850.
À la création du diocèse de Montréal en juillet 1850, Bethune eut de nouvelles responsabilités. Il devint pasteur, puis doyen de la cathédrale Christ Church en 1854, le premier au Canada à recevoir cette dignité. Il donna tout son appui à l’évêque Francis Fulford* pour la construction de la deuxième cathédrale Christ Church (1856–1859), et fut son grand vicaire durant les fréquentes absences de l’évêque. Il présida le synode spécial de 1868–1869 qui désigna Ashton Oxenden* comme successeur de Fulford. Le ministère de Bethune à Montréal dura pendant 54 ans et ne se termina qu’à sa mort.
Sa femme, Elizabeth Hallowell, qu’il avait épousée le 28 août 1816, mourut avant lui. Le couple eut onze enfants dont cinq seulement ne moururent pas en bas âge. Leur fils aîné, Strachan Bethune, conseiller de la reine, fut chancelier du diocèse de Montréal de 1868 à 1910.
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John Irwin Cooper, « BETHUNE, JOHN (1791-1872) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 13 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/bethune_john_1791_1872_10F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/bethune_john_1791_1872_10F.html |
Auteur de l'article: | John Irwin Cooper |
Titre de l'article: | BETHUNE, JOHN (1791-1872) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1972 |
Année de la révision: | 1972 |
Date de consultation: | 13 déc. 2024 |