YOUNG, sir JOHN, baron LISGAR, deuxième gouverneur général du Canada, né le 31 août 1807, à Bombay, aux Indes, fils aîné de sir William Young, administrateuret gros actionnaire de l’East India Company, et de Lucy Frederick, décédé le 6 octobre 1876 à Bailieborough, en Irlande.

John Young fit ses études à Eton et à Corpus Christi Collège, à Oxford ; il y obtint un diplôme de bachelier ès arts en 1829. En 1834, il fut reçu au Barreau de Lincoln’s Inn, mais il n’exerça jamais le droit. Élu à la chambre des Communes pour la première fois en 1831, pour y représenter le comté de Cavan, d’où sa famille était originaire, il siégea comme député conservateur jusqu’en 1855 ; entre 1841 et 1846, sous le gouvernement de sir Robert Peel, il occupa deux postes importants à la Trésorerie. Il accéda à la dignité de baronnet en 1848 et fut secrétaire d’État pour l’Irlande de 1852 à 1855. En 1855, il fut fait grand-croix de l’ordre de Saint-Michel et Saint-George, et devint, la même année, haut-commissaire britannique aux îles Ioniennes. Dans une dépêche, il recommanda des mesures que le gouvernement des îles jugeait impopulaires. Sa dépêche lui fut volée, puis publiée, et elle amena le rappel de Young, bien qu’en haut lieu on ait approuvé son administration. En sa qualité de gouverneur général de la Nouvelle-Galles du Sud, de 1861 à 1867, Young, à la demande du premier ministre, nomma 15 nouveaux membres à la Chambre haute pour faciliter l’adoption d’une ordonnance, geste pour lequel il fut blâmé par le ministre des Colonies ; il acheva néanmoins son mandat. En 1859, il fut fait chevalier commandeur de l’ordre du Bain et grand-croix du même ordre en 1868.

Le 29 décembre 1868, Young fut nommé gouverneur général du Canada et gouverneur de l’Île-du-Prince-Édouard ; il entra en fonction le 2 février 1869. Peu après son arrivée au Canada, il parla en public de l’indépendance du Canada au sein de l’Empire et de sa liberté « de conserver les liens actuels ou, en temps voulu, [...] de contracter une alliance d’un autre genre ». Selon lui, on trouvait néanmoins une plus grande fidélité et un plus grand respect pour la Grande-Bretagne au Canada qu’en Australie. Toutefois, il trouvait qu’il avait désormais moins d’influence qu’en Australie, car ses ministres canadiens décidaient en conseil des mesures à prendre avant de venir le trouver, alors que, en Nouvelle-Galles du Sud, les ministres venaient le consulter avant les réunions du conseil.

C’est pendant la première année du mandat de Young comme gouverneur général du Canada qu’éclata la rébellion menée par Louis Riel*. Afin de calmer les esprits, il proclama l’amnistie le 6 décembre 1869. Pendant cette période agitée, le gouvernement des États-Unis avait barré la route au navire canadien Chicora qui allait vers l’ouest, en provenance du canal de Sault-Sainte-Marie ; Young protesta officiellement en déclarant que le navire ne transportait aucun équipement militaire alors que des bateaux américains, quelques-uns porteurs d’armes, empruntaient librement le canal de Welland. L’interdiction de passer qui frappait le Chicora fut alors levée.

Au cours de son mandat, Rupert’s Land, territoire de la Hudson’s Bay Company, fut remis au Canada et le Manitoba devint une des provinces de la Confédération. Le transfert de Rupert’s Land, qui devait avoir lieu au début de 1869, fut retardé jusqu’en août 1870 à cause de la rébellion ; d’avril 1869 jusqu’en août 1870, Young occupa le poste clé de lieutenant-gouverneur en titre de Rupert’s Land. En 1870, au cours de l’incursion des Féniens au Canada, Young, d’après ce que raconta plus tard lord Dufferin [Blackwood*], envoya un télégramme énergique mais sage au colonel Patrick Robertson-Ross*, chef de l’état-major, et empêcha ainsi l’exécution sommaire des envahisseurs américains qui avaient été faits prisonniers.

Lorsque, en juin 1870, une délégation de la Colombie-Britannique vint à Ottawa pour discuter des termes de l’entrée de cette colonie dans la Confédération, elle fut reçue par Young en personne. Il assura la délégation du désir qu’avaient les Canadiens de voir la colonie se joindre au Canada. En 1871, les accords furent conclus en vue de la prolongation du chemin de fer canadien du Pacifique jusqu’en Colombie-Britannique. C’est également cette même année que le traité de Washington fut rédigé et signé. Le premier ministre, John Alexander Macdonald*, représenta le Canada au sein de la commission siégeant à Washington et déploya tout son zèle pour protéger les intérêts canadiens. L’esprit indépendant de Macdonald agaçait les délégués britanniques et Young, qui depuis le 2 novembre 1870 était devenu le baron Lisgar, ne faisait que les irriter davantage en leur rapportant des remarques indiscrètes puisées dans la correspondance que Macdonald échangeait avec ses ministrès restés à Ottawa. Lisgar se plaignit également au ministre des Colonies de l’esprit indépendant de Macdonald. Finalement, le premier ministre canadien accepta de faire approuver par le pays l’impopulaire traité de Washington, si le gouvernement britannique consentait au Canada un prêt garanti de £4 000 000. De son côté, Lisgar informa le cabinet britannique qu’une somme bien moins importante suffirait. Malgré tout, Macdonald considérait Lisgar comme le plus compétent de tous les gouverneurs généraux avec qui il avait travaillé.

Peu de temps avant de prendre sa retraite, Lisgar laissa passer, par inadvertance, le projet de loi imposant des droits discriminatoires sur le thé et le café en provenance des États-Unis. Les colonies anglaises d’Australie réclamèrent alors des droits semblables ; le ministre des Colonies les leur accorda plutôt que de risquer de déplaire au Canada en désavouant la loi qu’il avait adoptée. Ces tarifs protecteurs mettaient ainsi fin à l’idéal britannique d’un empire libre-échangiste.

Pendant son séjour au Canada, le gouverneur ne jouit pas d’une bonne santé, et il démissionna prématurément en juin 1872. Lisgar était un homme compétent et expérimenté qui fit preuve la plupart du temps d’un jugement sain. Il mourut dans la maison de sa famille. Sa femme, Adelaide Annabella Dalton, fille d’un propriétaire foncier irlandais, qu’il avait épousée le 8 avril 1835, lui survécut. Le couple n’avait pas eu d’enfant.

Charles A. Thompson

Manitoba ; the birth of a province (Morton), 85.— The annual register ; a review of public events at home and abroad for the year 1876 (Londres, 1877), 157.— Appleton’s cyclopædia of American biography, J. G. Wilson et al., édit. (10 vol. New York, 1887–1924), VI : 648.— Boase, Modern English biography, II : 444.— Burke’s peerage (1953), 641.— The complete peerage or a history of the House of Lords and all its members from the earliest times, G. E. C. Kayne, Vicary Gibbs, Howard de Walden et al., édit. (13 vol., Londres, 1932), VIII : 38s.— DNB.— Edward Walford, The county families of the United Kingdom or royal manual of the titled and untitled aristocracy of England, Wales, Scotland and Ireland (Londres, 1875), 604.— British Columbia & Confederation, W. G. Shelton, édit. (Victoria, 1967), 202.— Creighton, Macdonald, old chieftain.— Dent, Canadian portrait gallery, IV : 40 ; Last forty years, II : 487s.— Morton, Critical years, 266 ; Manitoba : a history (1967) 131s., 139, 142.— Joseph Pope, Memoirs of the Right Honourable John Alexander Macdonald G.C.B., first prime minister of the Dominion of Canada (2 vol., Ottawa, [1894]).— R. A. Preston, Canada and « imperial defense » ; a study of the origins of the British Commonwealth’s defense organization, 1867–1919 ([Durham, C.N., et Toronto], 1967), 74.— Stanley, Birth of western Canada, 134, 146.

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Charles A. Thompson, « YOUNG, sir JOHN, baron Lisgar », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 12 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/young_john_1807_1876_10F.html.

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Auteur de l'article:    Charles A. Thompson
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1972
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Date de consultation:    12 déc. 2024