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BADGLEY, WILLIAM, avocat, juge et homme politique, né le 27 mars 1801 à Montréal, fils de Francis Badgley*, marchand, et d’Elizabeth Lilly ; il était le frère de Francis*, médecin et professeur, et d’Elizabeth, épouse de William Molson* ; décédé à Montréal le 24 décembre 1888.
Après avoir fréquenté des écoles privées, William Badgley fit ses études secondaires à Montréal sous la direction du révérend Alexander Skakel*, puis il travailla durant quatre ans dans les milieux d’affaires. Il étudia ensuite le droit et fut admis au Barreau du Bas-Canada le 20 novembre 1823. Il ouvrit un bureau, Badgley and Abbott, qui devint prospère, et, en 1828, il collabora à la mise sur pied d’un comité chargé d’administrer la bibliothèque du Barreau du Bas-Canada. Il avait vainement tenté, en 1826, de se faire nommer protonotaire à Montréal. En 1830, la maladie l’obligea à se rendre en Europe, où il épousa Elizabeth Wallace Taylor en 1834 ; ils allaient avoir six enfants.
De retour au Canada en 1834, Badgley s’occupa activement de politique. Cette même année, il fut l’un des fondateurs et, en 1837, secrétaire de l’Association constitutionnelle de Montréal, regroupant surtout des marchands de cette ville opposés au parti patriote. Il participa à la rédaction des lois concernant l’établissement de bureaux d’enregistrement semblables à ceux qui existaient en Grande-Bretagne et il écrivit une brochure intitulée Remarks on the registrar’s office (1837). Badgley avait particulièrement à cœur de promouvoir l’union du Haut et du Bas-Canada afin de corriger « le vieux système [...] de proscription selon lequel les intérêts des [gens] d’origine britannique étaient négligés ». Travaillant sans relâche à ce projet, il prépara des articles de journaux et des allocutions. En 1837, Badgley et George Moffatt* se rendirent en Angleterre afin d’exposer les doléances du parti bureaucrate et de faire des pressions en faveur de l’union législative ; ils revinrent au Canada en 1838, après la rébellion.
La compétence de Badgley fut reconnue en Angleterre, où on lui offrit spontanément un poste au ministère des Colonies. En 1840, le nouveau gouverneur général du Canada, lord Sydenham [Thomson*], le nomma commissaire aux faillites ; il résigna ses fonctions en 1844 et devint, le 29 avril, juge de la Cour de circuit du district de Montréal. En avril 1847, il abandonna ce poste et retourna à la pratique privée ; nommé conseiller de la reine, Badgley accepta d’enseigner le droit romain et international au McGill College, institution qui lui avait décerné en 1843 un doctorat honorifique en droit civil. Le 23 avril 1847, il devint procureur général du Bas-Canada dans le gouvernement de William Henry Draper* et de Denis-Benjamin Papineau*. Le mois suivant, Draper démissionna, et Henry Sherwood* prit la direction d’un Conseil exécutif dominé par les tories, au sein duquel Badgley continua d’exercer les fonctions de procureur général. Le 10 juin de cette année-là, Badgley obtint un siège à la législature en défaisant Bartholomew Conrad Augustus Gugy* lors d’une élection partielle tenue dans la circonscription de Missisquoi. En sa qualité de procureur général, il dirigea lui-même les assises criminelles, le dernier, estime-t-on, à avoir agi de la sorte. À la fin de juillet, le parlement fut prorogé, et, au cours de l’automne, Sherwood et ses ministres décidèrent de déclencher des élections générales. Les tories subirent une cinglante défaite au scrutin tenu en décembre – Badgley fut cependant réélu dans la même circonscription – et les réformistes, menés par Robert Baldwin* et Louis-Hippolyte La Fontaine*, prirent triomphalement le pouvoir le 10 mars 1848.
Leader reconnu de l’opposition à la nouvelle législature, Badgley, de concert avec George Moffatt, persuada les autorités de Montréal de prendre les mesures nécessaires pour contenir la violence qui éclata en 1849 dans cette ville lors de l’adoption de la loi visant à indemniser les personnes qui avaient subi des pertes pendant la rébellion [V. James Bruce*]. Aux élections de 1851, il fut élu, ainsi que le réformiste John Young*, dans la circonscription de la ville de Montréal. Durant quelques années, il s’opposa vivement aux plans financiers de l’inspecteur général Francis Hincks, fit campagne pour l’abolition de la tenure seigneuriale et présida le comité des bills privés ; il s’efforça de « faire tout ce qu’il pouvait pour rendre semblables les lois du Haut et du Bas-Canada », et, malgré ses vues on ne peut plus conservatrices, il mérita l’admiration du gouverneur général, lord Elgin.
En 1854, le réalignement des vieux partis et la fusion des libéraux et des conservateurs incitèrent Badgley à se retirer, mais il se laissa convaincre de revenir sur sa décision. Il fut alors défait dans la circonscription de Montréal par le candidat libéral Luther Hamilton Holton*. Son départ de la scène politique lui donna l’occasion de faire une remarquable carrière d’avocat et de juge. Bâtonnier du Barreau de Montréal de 1853 à 1855, il enseigna le droit au McGill College, de 1855 à 1857, et y devint également le premier doyen de la faculté de droit. Le 27 janvier 1855, il fut nommé à la Cour supérieure du Bas-Canada et, en septembre 1863, il accéda à la Cour du banc de la reine où il occupa le poste de juge adjoint pro tempore ; il remit sa démission le 31 décembre 1864. Badgley obtint sa plus importante nomination le 17 août 1866, date à laquelle il devint juge puîné de la Cour du banc de la reine. À ce poste, il se distingua autant qu’il avait su le faire en qualité d’avocat, particulièrement dans les causes commerciales. C’était « un homme systématique et méthodique, prudent et tempéré dans ses jugements, calme de nature, diligent dans ses recherches, consciencieux [...] poli et aimable, et inflexiblement juste ». Atteint de surdité, Badgley quitta à regret la magistrature le 2 mars 1874, année où il perdit sa femme. Cependant, il continua de mener une vie active et ouvrit un cabinet de conseiller juridique.
Badgley fit partie de la milice et atteignit le grade de major. Éminent franc-maçon, il fut grand maître de la Grande Loge provinciale du district de Montréal et William Henry en janvier 1850. En 1855, il reçut un second doctorat honorifique, cette fois du Bishop’s College. Badgley s’intéressa également aux organismes scientifiques et aux œuvres de charité, et il fut à deux ou trois reprises président de la Société d’histoire naturelle et de la Société St George, et membre actif de la Church Society. Pendant sa retraite, il collectionna les fougères et autres spécimens botaniques.
Badgley fut l’un des derniers conservateurs à l’ancienne mode dans le Bas-Canada, et son attachement à la culture britannique, à la préservation d’un lien constitutionnel avec la Grande-Bretagne et au protestantisme se traduisit d’abord par la préoccupation de réaliser l’union des Canadas, et plus tard par celle d’angliciser le Bas-Canada en réformant certaines institutions françaises, telles que l’enregistrement des terres et la tenure seigneuriale. Il se consacra également au progrès du protestant McGill College et de l’ordre des francs-maçons. C’est ainsi qu’une notice nécrologique le décrivit comme un « conservateur inflexible » et, du même souffle, comme un « ardent partisan de la réforme ».
William Badgley est l’auteur de deux brochures intitulées : Remarks on the registrar’s office (Montréal, 1837) et Representation against the title of the seminary to the seigniory of Montreal ; and objections to the proposed ordinance for the extinction of seigniorial dues in the City and the Island of Montreal (Montréal, 1839).
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Elizabeth Gibbs, « BADGLEY, WILLIAM », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 11 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/badgley_william_11F.html.
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Auteur de l'article: | Elizabeth Gibbs |
Titre de l'article: | BADGLEY, WILLIAM |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1982 |
Année de la révision: | 1982 |
Date de consultation: | 11 déc. 2024 |