TOBIN, JAMES WILLIAM, marchand, homme politique et fonctionnaire, baptisé le 11 mai 1808 à Halifax, deuxième fils de James Tobin* et d’Eleanor Lanigan ; le 11 février 1834, il épousa Emily Cecilia, cadette des filles de William Bullen, médecin, à Cork (République d’Irlande), et ils eurent quatre enfants ; décédé le 24 juillet 1881 à Londres.

On entendit parler de James William Tobin pour la première fois en 1828 à Terre-Neuve où son père, marchand à Halifax et membre du Conseil législatif, avait, semble-t-il, des intérêts dans le commerce. En janvier 1831, Tobin s’associa avec John Bayley Bland, de St John’s, pour former la firme Bland and Tobin. Celle-ci s’engagea dans le commerce de marchandises générales auquel se livrait Terre-Neuve avec Halifax, les Antilles, Madère, Liverpool et Québec. Elle exploita un service de navires à voiles entre Halifax et St John’s jusqu’à l’avènement d’un service de bateaux à vapeur en 1844. Après la mort de son père en 1838, Tobin commença de faire de nombreux voyages en Irlande. L’association entre Bland et Tobin fut dissoute le 31 décembre 1839, et Tobin continua de faire des affaires avec James B. Hutton sous le nom de la James Tobin and Company.

Nommé au Conseil exécutif par le gouverneur Henry Prescott* en février 1841, Tobin prit possession de son siège en avril. Lors de l’inauguration de l’Assemblée résultant de la fusion du Conseil législatif et de la chambre d’Assemblée, il en fut nommé membre. Il ne prit cependant pas une part active aux travaux car il s’absenta de St John’s pendant une grande partie des années 1840. Au cours de ces années, la firme James Tobin and Company (vraisemblablement sous la direction de Hutton, représentant à St John’s) s’engagea d’une façon intensive dans la chasse au phoque ; le nombre des bateaux passa de un en 1838 à 15 en 1845 et ceux-ci formaient la plus grande flotte de St John’s. Après 1846, la flotte de St John’s diminua en importance cependant et Tobin fut particulièrement atteint. En 1847, la firme de Laurence O’Brien* possédait la plus grosse flotte de St John’s et, trois ans plus tard, Tobin n’envoyait plus de bateaux faire la chasse.

Parallèlement à la tendance qui se manifestait dans la chasse au phoque, la situation financière de la firme se détériorait dans les années 1840. L’incendie de 1846 à St John’s détruisit les locaux de Tobin, rue Water. L’année suivante, le feu ravagea l’établissement tout entier de la firme, sur la rive sud du port, dont la valeur s’élevait à £3 000 ou £4 000. Ce sinistre lui aurait porté, semble-t-il, un coup fatal, puisqu’il est possible que la Phoenix Assurance Company ait refusé de payer l’assurance sur les immeubles. En décembre 1849, on vendit le dernier établissement de la firme à être situé dans un petit village de pêcheurs, à savoir ses locaux à Seldom-Come-By, dans l’île Fogo.

Ces revers de fortune ramenèrent Tobin à Terre-Neuve. Il réintégra le Conseil exécutif en 1848, année où le gouvernement reprit le système des deux chambres. La législature inaugura sa session le 19 décembre 1848 dans un immeuble neuf, que Tobin possédait, rue Water, et continua de l’occuper jusqu’en 1850. En mars 1849, on envisagea de confier le poste de receveur des douanes à Tobin et, plus tard cette année-là, il fut nommé magistrat « stipendiaire » spécial et receveur des douanes à Saint-Georges, sur la côte française, au salaire annuel de £300. On attribua ces nominations lucratives à l’aide qu’avait apportée Tobin pour assurer l’élection dans Kinsale, Cork (République d’Irlande), du sous-ministre britannique des Colonies, sir Benjamin Hawes. Les nominations de Tobin ne recueillirent pas cependant la faveur populaire, étant donné qu’on le considérait, et à St John’s et à Saint-Georges, comme un intrus. Sa façon d’agir sans consulter personne souleva les colons anglais protestants sur la côte : il y eut des émeutes, des poursuites judiciaires (par exemple, on condamna Tobin, en décembre 1852, à une amende de £150 pour avoir outrepassé ses pouvoirs en arrêtant un patron de pêche (planter) qui protestait contre l’imposition par Tobin d’une taxe non autorisée), et, à une occasion, Tobin se fit bombarder de pierres. En juillet 1851, Robert John Pinsent* et le capitaine George Ramsay avaient été nommés juges de paix et envoyés à Saint-Georges par le gouvernement pour faire enquête sur le mécontentement des habitants. Ils recommandèrent au gouverneur John Gaspard Le Marchant* de remplacer le catholique Tobin par un protestant qui serait mieux en mesure de prendre en main la situation. Le Marchant craignait qu’on pût interpréter une telle décision comme une intrusion fondée sur des motifs sectaires, et ce n’est qu’en 1853 que le gouverneur Ker Baillie Hamilton abolit les postes de Tobin.

En avril 1855, James Tobin se présenta comme candidat aux élections à l’Assemblée dans le district de Placentia-St Mary. Il se retira, cependant, lorsqu’il fut nommé membre du Conseil législatif. En août, il devint secrétaire aux Finances dans le gouvernement libéral de Philip Francis Little*, le premier après l’instauration du gouvernement responsable.

En mars 1857, Tobin compta parmi une délégation mixte de conservateurs et de libéraux envoyée à Londres, dont faisaient partie O’Brien, Little et Hugh William Hoyles, afin de protester contre le projet de convention sur les pêcheries, signé par les gouvernements britannique et français en janvier 1857, mais que l’Assemblée de Terre-Neuve avait refusé de ratifier. Le parti de Little en vint à la conclusion que les conditions de cet accord qui avait été conçu pour aplanir les difficultés entre les pêcheurs français et anglais devraient être acceptées. Mais même ce consentement accordé à contrecœur amena Tobin à abandonner son parti pour rallier les conservateurs. Il passa pour avoir écrit des lettres qui parurent dans le Globe de Londres, lettres qui laissaient entendre que le parti libéral faisait le jeu des Français par sa façon d’interpréter les droits de ceux-ci établis en vertu des traités en vigueur et que l’évêque catholique, Mgr John Thomas Mullock*, franciscain irlandais, s’était aussi rangé du côté des Français. À la suite des protestations exprimées au sein du Conseil exécutif et lors d’assemblées publiques à St John’s, le gouverneur sir Alexander Bannerman* suspendit Tobin de ses fonctions en décembre 1858. Tobin tenta en vain pendant un an de se faire réintégrer, mais il semble s’être retiré dans les îles Britanniques peu après.

James Tobin paraît avoir été mêlé aux affaires de Terre-Neuve pour la dernière fois en 1873, pendant le scandale de la préemption. Des spéculateurs à Londres, espérant profiter du tripotage des prix des actions de la New York, Newfoundland and London Telegraph Company, s’employèrent au moyen de la publicité et de pressions exercées dans les coulisses sur le gouvernement terre-neuvien de Charles James Fox Bennett à amener celui-ci à envisager d’exercer son droit de préemption sur la compagnie. L’affaire tourna rapidement à la tragi-comédie, à cause d’intrigues politiques et d’accusations qui mirent aux prises de part et d’autre les partis dirigés par Bennett et Frederic Bowker Terrington Carter*. Tobin y joua essentiellement le rôle d’un propagandiste, d’un représentant des spéculateurs.

Tobin retourna en Angleterre après cette dernière incursion dans la vie de Terre-Neuve et y demeura jusqu’à sa mort.

David J. Davis

PANL, GN 1/3A, 1850–1857, file 3, 7 août 1855 ; 1858–1859, file 1, 22 déc. 1858.— PRO, CO 194/150 ; 194/155 ; 194/167 ; 197/4.— T.-N., Blue book, 1850.— Evening Telegram (St John’s), 1881.— Harbour Grace Standard (Harbour Grace, T.-N.), 1881.— Newfoundlander, 1831, 1849, 1851.— Public Ledger, 1851, 1855, 1858.— Royal Gazette (St John’s), 1836–1837, 1840–1841, 1845, 1847.— T. M. Punch, « Tobin genealogy », Nova Scotia Hist. Quarterly (Halifax), 5 (1975) : 71–81.— Prowse, Hist. of Nfld. (1972).

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David J. Davis, « TOBIN, JAMES WILLIAM », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 8 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/tobin_james_william_11F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1982
Année de la révision:    1982
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