ROCQUE, OVIDE-ARTHUR, homme politique, homme d’affaires et fonctionnaire, né le 19 septembre 1847 à Bytown (Ottawa), fils de Pierre Rocque et de Sophie Normandeau ; le 18 juillet 1876, il épousa à l’église Sainte-Brigide de Montréal Gabrielle Galibert, originaire de Milhaud, France, et ils eurent trois fils et trois filles ; décédé le 15 février 1923 à Orléans, Ontario.

Au moment du décès d’Ovide-Arthur Rocque, le quotidien francophone d’Ottawa le Droit ne tarit pas d’éloges à son égard : « La cause des droits du français en Ontario vient de perdre un de ses plus vaillants défenseurs », annonce alors le journal, en page 8. Pour sa part, le quotidien montréalais le Devoir renchérit quatre jours plus tard et signale le décès de Rocque en première page, en présentant ce dernier comme « un vieux lutteur » de la cause canadienne-française. Entre le souvenir de Rocque laissé par ces quotidiens et les événements de sa vie, il y a cependant une différence marquée.

On ne sait rien de la vie de Rocque avant son élection en 1872 comme échevin de la ville d’Ottawa, poste qu’il conserve jusqu’en 1876. Au cours de son mandat, il est membre de nombreux comités (travaux publics, santé, règlements municipaux, cour de révision, adduction d’eau) et favorise notamment la construction de trottoirs ; il est également un des deux représentants de son quartier au conseil des écoles séparées. En 1874, il achète une ferme située entre la rivière des Outaouais et le village d’Orléans. Il se dit alors entrepreneur à Ottawa. De 1878 à 1880, il se présente dans l’annuaire de la ville comme boulanger et fabricant de biscuits. Rocque revient au conseil municipal en 1880 mais pour quelques mois seulement, car, de 1881 à 1892, il est inspecteur des marchés de la ville d’Ottawa.

De 1888 à 1903, Rocque est également inspecteur des industries de l’est de l’Ontario. Les raisons de sa nomination demeurent obscures. Son appui au Parti libéral provincial, dont font état les articles de journaux publiés à son décès, pourrait l’expliquer. Dans le cadre de ses fonctions, Rocque soumet à l’Assemblée législative un rapport annuel sur les conditions de travail dans les usines et les scieries de l’est de la province, comme le prévoit l’Ontario Factories’ Act de 1884. Il y constate des infractions au chapitre de la ventilation des lieux de travail et des installations sanitaires, y propose des mesures de prévention des incendies et y dresse la liste des accidents de travail.

C’est toutefois la situation des enfants âgés d’à peine 12 et 13 ans dans les usines qui préoccupe le plus l’inspecteur Rocque. Ce dernier juge que le travail des jeunes nuit à leur développement physique et intellectuel et les expose à de graves dangers moraux, tels que la grossièreté de langage et les comportements sexuels répréhensibles, à cause de l’influence néfaste de certains adultes. Il ne se gêne pas pour blâmer les parents qui, selon lui, seraient des fainéants intéressés par l’appât du gain. Rocque dénonce parfois les employeurs, mais il les excuse en mentionnant qu’ils sont induits en erreur par les parents qui produisent de faux certificats pour attester l’âge de leurs enfants. Afin de mettre fin au travail des jeunes, Rocque recommande au législateur de hausser à 14 ans, pour les garçons, et à 16 ans, pour les filles, l’âge minimal pour travailler légalement, mesure qui est adoptée en 1893. Il a moins de chance avec sa suggestion d’exiger une preuve d’alphabétisation des jeunes qui désirent travailler dans les usines.

On sait peu de chose à propos du militantisme de Rocque en faveur des droits des Canadiens français de l’Ontario. Depuis le début du xxe siècle, des conflits croissants entre Canadiens anglais et Canadiens français de la province sur des questions religieuses et éducatives surtout ont amené ces derniers à se regrouper pour défendre leurs droits. C’est ainsi qu’est née l’idée d’une association qui réunirait tous les Canadiens français de l’Ontario. Rocque participe, sans toutefois y jouer un rôle prédominant, à l’organisation du congrès de janvier 1910 qui doit en jeter les bases. Il manifeste un vif enthousiasme pour l’événement et confie même, dans sa réponse au secrétaire du comité d’organisation, qu’il tentait depuis plusieurs années de créer une association provinciale. Il signale alors que la question la plus importante pour les francophones est celle de l’éducation, notamment l’obtention d’un financement adéquat pour les écoles fréquentées par les Canadiens français, et la création d’un établissement de formation du personnel enseignant francophone en Ontario.

Comme il est l’un des 25 responsables de l’organisation, Rocque effectue des tournées de promotion dans l’est de l’Ontario afin de susciter l’enthousiasme des Canadiens français pour l’événement. Les organisateurs espèrent bien entendu que cet enthousiasme se traduira par un généreux appui financier. Rocque devient aussi membre du comité des statistiques. C’est à lui qu’incombe la préparation d’un rapport quantitatif sur les Canadiens français des comtés de Glengarry et de Stormont qui sera soumis à cette occasion.

Au congrès, tenu du 18 au 20 janvier 1910 à Ottawa, Rocque et 1 200 délégués appuient la création de l’Association canadienne-française d’éducation d’Ontario (ACFEO). Outre la défense et la promotion des droits des Canadiens français, les dirigeants de l’ACFEO se voient confier la tâche de s’occuper du système scolaire. Rocque fait partie du comité directeur en 1910–1911, puis du comité administratif, qui est en fait le comité de direction de l’association. Celle-ci est le porte-parole des Canadiens français de l’Ontario pendant la crise scolaire provoquée par la promulgation du Règlement 17 en 1912, lequel limite l’enseignement en français aux deux premières années du primaire ; à cette occasion, Rocque ne joue pas un rôle majeur, contrairement à Philippe Landry*, Napoléon-Antoine Belcourt*, Charles Charlebois et Samuel McCallum Genest*. Toutefois, sa fille Marie-Louise, qui enseigne dans la région d’Ottawa, figure parmi les résistantes pendant le conflit.

Après 1916, on perd la trace d’Ovide-Arthur Rocque, car il n’occupe pas de responsabilités administratives particulières au sein de l’ACFEO, probablement à cause de son état de santé. Il meurt en 1923, « après une longue maladie » selon le journal le Devoir.

Marcel Martel

Les renseignements sur Ovide-Arthur Rocque proviennent de différentes sources, faute de fonds d’archives qui lui soit consacré. [m. m.]

ANQ-M, CE601-S15, 18 juill. 1876.— Arch. paroissiales, Notre-Dame (Ottawa), RBMS, 19 sept. 1847.— BAC, RG 31, C1, 1901, Gloucester Township, Ontario, div. 1 : 1 (mfm aux AO).— Centre de recherche en civilisation canadienne-française (Ottawa), C 2 (Assoc. canadienne-française de l’Ontario, auparavant l’Assoc. canadienne-française d’éducation de l’Ontario).— Le Devoir, 19 févr. 1923.— Le Droit (Ottawa), 15 févr. 1923.— Ottawa Evening Journal, 15 févr. 1923.— Annuaire, Ottawa, 1866–1922.— Historical sketch of the county of Carleton, C. C. J. Bond, édit. (Belleville, Ontario, 1971), 176s. [réimpression seulement du texte d’Illustrated historical atlas of the county of Carleton (including city of Ottawa), Ont. (Toronto, 1879)].— Ontario, Legislature, Sessional papers (rapport du ministre de l’Agriculture, 1888–1903).— Ottawa, City Council, Minutes, 1872–1876, 1880.

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Marcel Martel, « ROCQUE, OVIDE-ARTHUR », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 6 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/rocque_ovide_arthur_15F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2005
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