STRUTHERS, WILLIAM EUGENE, médecin, fonctionnaire et officier, né le 17 novembre 1869 à Kincardine, Ontario, cinquième enfant de John Struthers et d’Anna Christina McLeod ; le 30 juin 1903, il épousa à Toronto Jennie Bennett Brown, et ils eurent un fils et une fille, puis le 9 juillet 1913, dans la même ville, Lina Lavanche Rogers* ; décédé le 20 avril 1928 au même endroit.

Né en Écosse, le père de William Eugene Struthers avait immigré au Cap-Breton en 1847 et épousé une insulaire. En 1855, la famille s’était installée à Bayfield sur le lac Huron, au sud de Kincardine. John Struthers dut bien se débrouiller puisqu’il possédait une fabrique de lainages à Bayfield dans les années 1870. William Eugene fréquenta des écoles locales et l’école secondaire de Goderich. En 1897, il obtint un doctorat en médecine et une maîtrise en chirurgie du Trinity College et une licence de médecine de la University of Toronto. Il alla terminer ses études de médecine en Europe et pendant quelque temps, dans les années 1901 à 1905, il exerça à Lanark, dans l’est de l’Ontario. Ses ambitions universitaires étaient assez grandes pour l’encourager à s’inscrire à des licences ès arts en 1904 au Queen’s College de Kingston et au Trinity College (ad eundem).

À la fin de 1905, Struthers s’établit à Toronto au 558 de la rue Bathurst avec sa femme, Jennie Bennett Brown. Hélas, elle mourut en 1909 et, en 1916, leur fils succomberait au tétanos, qu’il attrapa après s’être coupé un doigt en ramassant des œufs à la ferme de son oncle à Bayfield. En 1910, le Bureau d’éducation de Toronto instaura des visites médicales dans les écoles sous la direction de son inspecteur en chef réformiste, James Laughlin Hughes*. Peu après, les superviseurs de ce programme novateur, les docteurs William Belfry Hendry et Helen MacMurchy*, démissionnèrent à cause d’une divergence d’opinions avec Hughes au sujet de la compétence du bureau en matière d’hygiène publique. En janvier 1911, Struthers leur succéda à titre d’inspecteur médical en chef, ce qui lança sa carrière dans le mouvement d’hygiène publique, alors en plein essor. Sans délai, il prit la tête d’une équipe formée de 18 inspecteurs, de 25 infirmières et d’un inspecteur d’hygiène dentaire [V. John Gennings Curtis Adams].

En plus, la nomination de Struthers inaugura une nouvelle période dans sa vie personnelle, car il rencontra la surintendante des infirmières, Lina Lavanche Rogers. Elle avait mis en place à New York et à Pueblo, au Colorado, des programmes de soins infirmiers en milieu scolaire dont on disait grand bien. En 1910, sur l’invitation de John Ross Robertson*, président de l’Hospital for Sick Children, elle avait accepté de répéter l’expérience à Toronto. À cause de ses relations professionnelles avec Struthers et du fait qu’il était mal vu, pour une femme mariée, d’occuper un emploi, elle démissionna le 30 juin 1913 pour l’épouser. On rapporte que le mariage, célébré le 9 juillet à l’église presbytérienne High Park, fit sensation, Mlle Rogers étant « l’une des infirmières les plus réputées du continent ». Unis par la volonté de propager l’instruction et les inspections sanitaires dans les écoles – Struthers fut un partisan précoce de l’enseignement de l’hygiène sexuelle –, ils donnaient des conférences publiques et publiaient des articles dans des périodiques comme le Canadian Nurse and Hospital Review, dont Lina Lavanche Rogers fut directrice pendant quelque temps, et le Public Health Journal.

Après leur installation dans la maison de Struthers rue Bathurst, les nouveaux mariés adhérèrent à l’église presbytérienne College Street. Réputé dans les cercles maçonniques torontois – il fut membre et, à un moment donné, maître de la St Andrew’s Lodge –, Struthers appartenait en outre à la société des Oddfellows. Peu après le début de la Première Guerre mondiale en août 1914, il entra au service médical de la milice. En mars 1916, il s’enrôla comme capitaine dans le Corps de santé de l’armée canadienne. En 1917–1918, il servit outre-mer. En 1916, donc pendant qu’il était dans l’armée, Lina Lavanche s’opposa vigoureusement à la proposition de transférer au service municipal d’hygiène les responsabilités du Bureau d’éducation en matière de santé. L’année suivante, elle publia à New York un manuel détaillé, The school nurse.

En mai 1914, le gouvernement de sir James Pliny Whitney* en Ontario avait fait adopter la loi sur l’indemnisation des accidents du travail, première loi canadienne fondée sur le principe selon lequel le travailleur devait recevoir compensation sans égard à sa responsabilité. Le 14 décembre, Struthers devint le premier médecin chef de la Commission des accidents du travail. Apparemment, ce poste exigeait moins d’investissement personnel de sa part que son travail au Bureau d’éducation, mais il continua d’affirmer l’importance cruciale de la formation en matière de santé et d’insister sur le fait qu’elle pouvait aider employés et employeurs à prévenir les accidents et la maladie. Il exerça cette fonction jusqu’à son décès, survenu au Wellesley Hospital en 1928 pour cause de « troubles internes » et d’influenza. Après un service funèbre chez lui, il eut droit à un enterrement maçonnique au cimetière Mount Pleasant. Selon le Toronto Daily Star, « on tenait le docteur en si haute estime » que, même si Mme Struthers avait demandé que l’on n’envoie pas de fleurs, il y en eut.

Éclipsé sur le plan professionnel par sa seconde femme, William Eugene Struthers n’en fut pas moins un pionnier des services publics de santé et de bien-être en Ontario au début du xxe siècle. Sous sa direction, le programme de visites médicales du Bureau d’éducation devint l’un des plus complets au monde – moins d’un an après l’entrée en fonction de Struthers, 45 000 enfants en bénéficiaient – et l’un des plus copiés. De même, la Commission des accidents du travail servit de modèle à d’autres organismes du genre dans toute l’Amérique du Nord [V. James Leonard Sugrue]. La nomination de Struthers dans ces services montre que les professionnels de la santé jouèrent un rôle primordial dans l’État moderne qui était en train de se constituer.

Cynthia Comacchio

William Eugene Struthers est l’auteur de « Medical inspection of schools in Toronto », Public Health Journal (Toronto), 5 (1914) : 67–78.

AO, RG 80-5-0-309, nº 2372 ; RG 80-8-0-362, nº 6035.— BAC, RG 31, C1, 1901, Lanark (village), Ontario : 8 (mfm aux AO) ; RG 150, Acc. 1992–93/166, boîte 9392-16.— Mount Pleasant Cemetery (Toronto), inscription de pierre tombale.— QUA, Dept. of alumni affairs fonds ; Registrar’s Office fonds, student registers (mfm).— Toronto Dist. School Board, Museum and Arch. Dept., Toronto Board of Education, Hist. Coll., Board minutes, janv. 1911, juin 1913 ; Management committee, minute-book, 14 avril 1910 ; Vert. files, biog., L. L. Rogers ; W. E. Struthers.— UTA, A1973-0026/452(63, 67).— Globe, 1er juill. 1903, 21 avril 1928.— Toronto Daily Star, 9, 16 déc. 1905, 9 juill., 4 oct. 1913, 24 mars 1914, 11 août 1916, 20, 23 avril 1928, 11 juin 1946.— Canadian annual rev., 1914–1916, 1927–1928.— Dianne Dodd, « Helen MacMurchy, md : gender and professional conflict in the medical inspection of Toronto schools, 1910–1911 », OH, 93 (2001) : 127–149.— Heather MacDougall, Activists and advocates : Toronto’s health department, 1883–1983 (Toronto, 1990).— Ontario, Workmen’s Compensation Board, Annual report, 1914–1929.— Ontario medical register (Toronto), 1901.— L. [L.] Rogers Struthers, « Nursing side of medical inspection of schools », Public Health Journal, 4 (1913) : 147s.— James Struthers, The limits of affluence : welfare in Ontario, 1920–1970 (Toronto, 1994).— Neil Sutherland, Children in English-Canadian society : framing the twentieth-century consensus (Toronto, 1976).— Toronto Board of Education, Annual report, 1911, 1912 (« Medical inspector’s reports »).

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Cynthia Comacchio, « STRUTHERS, WILLIAM EUGENE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 9 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/struthers_william_eugene_15F.html.

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Auteur de l'article:    Cynthia Comacchio
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2005
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