Richardson, Arthur REMINGTON, menuisier, agriculteur, pilote de port et homme politique, né le 13 mai 1862, 1863 ou 1864 à Sydney, Nouvelle-Écosse, fils de William J. Richardson et de Mary Ann Brown ; le 12 octobre 1892, il épousa Frances Amelia Wyman, et ils eurent quatre filles et cinq fils ; décédé le 7 janvier 1936 à South Bar, Nouvelle-Écosse.
La famille d’Arthur Remington Richardson s’était installée à South Bar, dans l’île du Cap-Breton, en 1842. Son père était menuisier et Richardson entra lui aussi dans le métier. Selon l’histoire familiale, il aurait travaillé en Nouvelle-Angleterre pendant un certain temps ; il s’y rendit probablement en août 1887 (les registres de son église baptiste montrent qu’il demanda son congé à cette époque). Il aurait été l’une des 9 000 personnes qui quittèrent le Cap-Breton au cours de cette décennie. En 1891, il était de retour à South Bar et y exerçait la menuiserie. Richardson construisit de nombreuses maisons dans la région, y compris la sienne, et, en 1907, il participa à la reconstruction de l’église baptiste South Bar, qui avait été détruite par un incendie. Il exploita une ferme mixte, où il éleva des vaches, des poulets et des oies. D’après un témoignage ultérieur, il fut « un des agriculteurs les plus éminents et prospères » du Cap-Breton. South Bar se trouvant à l’entrée est du port de Sydney, il n’est guère étonnant que la famille Richardson ait eu des liens avec la marine. En 1906, Richardson était devenu pilote de port, poste qu’il occuperait plus de dix ans. Son frère Wallace A. serait élu maire de Sydney sept fois ; Richardson montrait lui aussi un intérêt pour la politique.
L’historien Ian McKay écrirait que les quelques années qui précédèrent les années 1920 seraient les « dernières années de grande espérance » pour les Maritimes. Les groupes ouvriers eurent quelque succès dans leur combat pour améliorer les salaires et les conditions de travail des ouvriers ; la Première Guerre mondiale provoqua une augmentation de la demande de ressources, ce qui entraîna la croissance économique et la prospérité. Richardson comptait parmi les optimistes qui croyaient que cette tendance durerait. Il remplaça James Bryson McLachlan à la présidence de l’Independent Labour Party (ILP), fondé au Cap-Breton en 1917, lorsque celui-ci démissionna en juin 1918 pour se concentrer sur l’action syndicale. Le choix de Richardson, agriculteur, pour diriger un parti traditionnellement appuyé par des ouvriers traduisait une volonté de la part de l’ILP d’accroître son attrait. Par la suite, le parti lança une invitation cordiale aux associations agricoles et rurales, ainsi qu’aux syndicats de pêcheurs. L’initiative porta ses fruits. Même si les fermiers et les ouvriers ne s’entendaient pas sur tous les sujets (à son congrès à Truro, en 1920, la United Farmers of Nova Scotia dénoncerait les pressions des travailleurs pour obtenir la journée de huit heures), les deux groupes croyaient que la coopération était souhaitable. Le 12 juin 1920, Richardson, qui avait renoncé à la présidence de l’ILP l’année précédente, fut choisi pour représenter la section du Cap-Breton de la United Farmers of Nova Scotia, fondée depuis peu, aux prochaines élections provinciales ; sa nomination fut appuyée par l’ILP le même jour. Les tiers partis avaient habituellement peu de chance de réussir en Nouvelle-Écosse et l’appui accordé par les fermiers à l’ILP était inégal à la veille de la lutte électorale. Toutefois, la récession avait frappé la province avant le printemps de 1920 et beaucoup d’électeurs étaient prêts pour un changement. Le 27 juillet 1920, Richardson, les candidats de l’ILP Joseph Steele, William Forman Waye et Daniel William Morrison, qui était également membre de la Great War Veterans’ Association of Canada, remportèrent les quatre sièges du comté de Cap-Breton.
Selon James Murray Beck*, Richardson « se voyait comme [un] fermier-ouvrier » ; étant donné sa position solide dans l’un et l’autre camp, la description est juste. Il rejoignit six fermiers et quatre ouvriers dans l’opposition officielle. Les deux groupes travaillèrent en harmonie en 1921. Cette année-là, Richardson partagea des tribunes avec des gens comme McLachlan et Thomas Alexander Crerar*, chef du Parti progressiste, pour soutenir des candidats fermiers-ouvriers pendant la campagne fédérale. Des fissures commençaient cependant à apparaître. Tandis que la session législative de 1922 arrivait à son terme, en avril, les fermiers-ouvriers et les conservateurs se rencontrèrent secrètement, en vain, dans l’espoir de s’associer pour battre le gouvernement libéral de George Henry Murray*, tenu en partie responsable des malheurs économiques de la région. Richardson et le député fermier d’Antigonish furent exclus de la rencontre, signe des divisions à venir.
Pendant que le conflit de travail dans les industries houillère et sidérurgique du Cap-Breton s’intensifiait, l’ILP penchait de plus en plus vers la gauche. À son congrès en Nouvelle-Écosse, en juillet 1922, l’ILP appuya la IIIe Internationale (association communiste) et, selon ce que rapporta le Sydney Post, « une grande partie des délégués chantèrent l’hymne rouge avec enthousiasme et saluèrent d’un triple hourra […] la révolution sociale ». Un mois plus tard, les mineurs du Cap-Breton se mirent en grève pour protester contre les réductions de salaire aux houillères de la British Empire Steel Corporation Limited (Besco) [V. Roy Mitchell Wolvin*] et le député libéral du Cap-Breton George William Kyte télégraphia au premier ministre William Lyon Mackenzie King* : « Gens terrifiés par menace de révolution que laissent planer éléments radicaux. Envoyez plus de soldats à toute vitesse. » C’était, et ça continuerait à être, une époque de rhétorique dure, à gauche comme à droite, à laquelle se mêlait la paranoïa (ou l’exploitation de la peur). Richardson se retrouverait pris au milieu. Le gouvernement provincial réagit en autorisant la constitution d’un corps policier provincial temporaire, limité à 1 000 hommes, en service dans le comté de Cap-Breton. Ces derniers n’avaient ni formation ni expérience.
À la fin de mars 1923, Richardson appuya Waye, Steele et d’autres personnes dans une tentative infructueuse d’ouvrir une enquête sur l’administration de certaines mines du Cap-Breton. Pendant deux mois, la police provinciale fut de nouveau dépêchée, en réponse à l’agitation des métallurgistes à la Besco, qui demandaient la reconnaissance syndicale. À la Chambre d’assemblée, Morrison déclara que l’intervention musclée du gouvernement n’avait fait qu’envenimer les choses. Steele prévint qu’il y aurait des « effusions de sang au Cap-Breton ». Le premier ministre Ernest Howard Armstrong*, qui avait remplacé Murray, malade, plus tôt cette année-là, resterait impassible. Contrairement à d’autres députés ouvriers, Richardson refusa de critiquer le gouvernement pour avoir fait appel à la police, ce qui précipita sa rupture définitive avec l’ILP. Le 9 avril, le Halifax Herald nota qu’à la Chambre d’assemblée, Richardson fut accusé d’avoir trahi les ouvriers parce qu’il avait déclaré qu’« il croyait en la journée de huit heures [… et en] de meilleurs salaires. Il ne croyait pas en la révolution ni en la prise en charge des usines par un système de comités. » Le groupe des fermiers-ouvriers se scinda bientôt en factions antagonistes. Richardson fit défection, mais resta à la Chambre d’assemblée en tant qu’indépendant, malgré les ouvriers qui réclamaient qu’il « quitte son siège ou rejoigne les laquais de la Besco de l’autre côté de la Chambre ».
À la fin de juin, les métallurgistes de Sydney décidèrent de se mettre en grève et on fit encore une fois appel à l’armée canadienne. La police provinciale revint aussi et, le dimanche 1er juillet 1923, elle mena une attaque dans la rue Victoria jusqu’au quartier Whitney Pier, à Sydney, et blessa indifféremment des grévistes et des gens qui se rendaient à la messe. Poussés par McLachlan, 8 500 mineurs syndiqués du Cap-Breton firent une grève de solidarité deux jours plus tard. Leurs meneurs seraient destitués peu après pour avoir entrepris cette action [V. James Bryson McLachlan]. Les mineurs reprirent le travail sans avoir atteint leurs objectifs et les métallurgistes seraient, pour finir, vaincus à leur tour. À la Chambre d’assemblée, Richardson continua d’exercer des pressions afin de faire augmenter les tarifs douaniers du charbon américain et d’obtenir « du travail plus régulier et de meilleurs salaires » pour les mineurs, mais sans résultat. Le mécontentement grandirait et aboutirait à l’âpre lutte de 1925 [V. William Davis*].
Arthur Remington Richardson ne disputa pas les élections provinciales de 1925 dans la circonscription nouvellement et arbitrairement remaniée. Aucun fermier ne se présenta et aucun ouvrier ne fut réélu. Richardson retourna à South Bar et passa son temps à entretenir des conversations animées avec ses frères, à enseigner les rudiments de l’astronomie à la nouvelle génération de Richardson et à s’occuper d’agriculture, en attachant une attention particulière à ses oies. Richardson était un homme progressiste et, durant l’époque de grande tension que furent les années 1920, il s’en tint fermement à ses opinions politiques. Il mourut chez lui de problèmes cardiaques. Le Sydney Post-Record nota qu’il avait été « un personnage étroitement associé à la vie agricole et politique » du comté de Cap-Breton.
Nous remercions tout particulièrement Merritt Richardson, de South Bar, en Nouvelle-Écosse, pour son intérêt et son aide.
L’année de naissance d’Arthur Remington Richardson est incertaine. Selon le recensement de 1901, Richardson serait né en 1864 ; les recensements de 1881 et 1891, ainsi que son témoignage au cours de la commission d’enquête de 1918 sur les zones de pilotage, laissent croire que cette année serait correcte. Cependant, selon le recensement de 1911, il serait né en 1863, alors qu’un certain nombre de sources secondaires indiquent plutôt l’année 1862.
BAC, Déclarations de recensement du Canada de 1911, Cape Breton South, South Bar, Ward 12 : 16 ; R233-35-2, Cape Breton, Sydney, P, Ward 1 : 61 ; R233-36-4, Cape Breton, Victoria, roll T-6310 ; R233-37-6, Cape Breton, South Bar, Ward X-1 : 4 ; R1191-30-9.— Halifax Chronicle, 5, 7 avril 1923.— Halifax Mail, 7 avril 1923.— Sydney Post (Sydney, N.-É.), 31 mars 1923.— J. M. Beck, Politics of Nova Scotia (2 vol., Tantallon, N.-É., 1985–1988), 2.— Canada, Parl., Doc. de la session, 1906–1907 (rapports des commissaires du port, 1906).— David Frank, J. B. McLachlan : a biography (Toronto, 1999).— Don MacGillivray, « Military aid to the civil power : the Cape Breton experience in the 1920’s », Acadiensis (Fredericton), 3 (1973–1974), no 2 : 45–64.— N.-É., House of Assembly, Journal and proc., 29 mars 1923 : 98.— G. A. Rawlyk, « The Farmer-Labour movement and the failure of socialism in Nova Scotia », dans Essays on the left : essays in honour of T. C. Douglas, Laurier LaPierre et al., édit. (Toronto et Montréal, 1971), 31–41.
Don MacGillivray, « RICHARDSON, ARTHUR REMINGTON », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 7 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/richardson_arthur_remington_16F.html.
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Auteur de l'article: | Don MacGillivray |
Titre de l'article: | RICHARDSON, ARTHUR REMINGTON |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2015 |
Année de la révision: | 2015 |
Date de consultation: | 7 déc. 2024 |