Titre original :  Les Soeurs Sainte-Jeanne d'Arc et l'évêché

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Staub, MARIE-CLÉMENT (baptisé Joseph), prêtre catholique, membre des Assomptionnistes, prédicateur et fondateur des Sœurs de Jeanne d’Arc, né le 2 juillet 1876 à Kaysersberg (France), fils de Clément Staub, tonnelier, et de Marguerite Hertig, veuve de François-Joseph Weyhaupt ; décédé le 16 mai 1936 à Bergerville (Québec).

Cadet des quatre enfants d’une famille catholique et modeste, Joseph Staub passe son enfance en Alsace-Lorraine, territoire alors annexé à l’Empire allemand. En novembre 1890, il entre à l’alumnat des Assomptionnistes à Mauville (Fresnes-lès-Montauban), en France. Il n’est alors pas doué pour les études, d’autant plus qu’il doit apprendre le français, ce qui l’oblige à accomplir une année supplémentaire. C’est au noviciat de Livry (Livry-Gargan) que, le 6 septembre 1896, Staub prend l’habit assomptionniste et son nouveau nom, Marie-Clément. Il fréquente cet établissement jusqu’en 1898, année où, le 6 septembre, il fait sa profession perpétuelle. Au terme d’études qu’il poursuit aux scolasticats de Louvain, en Belgique, et de Rome, il reçoit notamment deux doctorats, dont l’un en philosophie en 1903 et l’autre, en théologie, en 1904. Le 19 mars 1904, il est ordonné prêtre à la basilique Saint-Jean-de-Latran.

Du 14 août 1904 à la fin de l’année 1906, le père Marie-Clément est sous-maître des novices à Louvain, puis, jusqu’en 1908, maître des novices dans le nouvel établissement réservé aux frères convers, à Gempe (Tielt-Winge). À la fin de l’année 1908, ce meneur naturel et prédicateur de talent est choisi pour fonder le premier alumnat assomptionniste en Angleterre. Le Sacré-Cœur est le thème de prédilection dans les sermons du père Marie-Clément. Sa correspondance avec Édith Royer, mystique et adoratrice du Sacré-Cœur, l’a en effet convaincu de la nécessité de propager l’Archiconfrérie de prière et de pénitence, érigée le 18 avril 1894 et dont les membres, en l’honneur du Sacré-Cœur, s’engagent à prier et à faire pénitence pour obtenir la conversion des pécheurs.

Le 21 novembre 1909, le père Marie-Clément apprend du père Emmanuel-Joseph Bailly, supérieur général des Assomptionnistes, qu’il doit partir en Amérique pour prêcher et pour propager l’archiconfrérie. Bien qu’il écrive dans son journal qu’il éprouve « une répulsion naturelle pour ces pays lointains », il s’installe le mois suivant au collège de l’Assomption à Worcester, au Massachusetts, dans le diocèse de Springfield. L’exercice de son ministère à l’orphelinat Sainte-Anne, administré par les Sœurs de la charité de l’Hôpital Général de Montréal, dites sœurs grises, lui permet de faire connaître l’œuvre assomptionniste et l’archiconfrérie jusque dans la province de Québec. Le père Marie-Clément participe au Congrès eucharistique international de Montréal en 1910. En février et en juillet 1912, il prêche trois retraites aux sœurs grises dans la même ville.

Un an plus tard, le père Marie-Clément fait une rencontre déterminante, celle d’Alice Caron. Cette dernière, née au Québec et ménagère au presbytère d’une paroisse de Springfield, lui suggère de fonder une communauté religieuse vouée au service des prêtres et consacrée à Jeanne d’Arc et au Sacré-Cœur. Le père Marie-Clément établit dans l’intimité les Sœurs de Jeanne d’Arc en 1914, pendant la messe de minuit, en compagnie d’Alice Caron et de deux futures filles spirituelles. Malgré les réticences de son évêque, Mgr Thomas Daniel Beaven, il la fonde publiquement le 31 décembre suivant, au cours de l’heure sainte, en présence de quatre autres filles spirituelles. Dans son journal, il écrit qu’il demande aux sœurs d’être des « victimes donnant leur vie extérieure pour les prêtres : efforts, travaux, fatigues, dévouement » et « donnant leur vie intime : satisfactions, prières, immolations, mortifications, crucifixions ». La désignation des religieuses en tant que « victimes » ne figurera pas dans les textes constitutifs de la communauté, approuvés en 1921.

En 1917, le père Marie-Clément demande au cardinal Louis-Nazaire Bégin* et à Mgr Paul-Eugène Roy* l’autorisation d’implanter dans l’archidiocèse de Québec les Sœurs de Jeanne d’Arc, les Assomptionnistes et l’Archiconfrérie de prière et de pénitence, devenue depuis la publication en 1914 d’une lettre circulaire du père Emmanuel-Joseph Bailly « une des œuvres de [l’]apostolat [des Assomptionnistes] aux États-Unis et au Canada ». Le cardinal accepte les œuvres le 2 mars 1917, mais exige qu’elles s’installent à l’extérieur de la ville de Québec.

Le 2 juillet suivant, un terrain situé à Bergerville, lieu-dit en bordure du fleuve Saint-Laurent, est acheté à l’archidiocèse au nom des Sœurs de Jeanne d’Arc pour 36 000 $. Les sept premières religieuses – en provenance de Worcester – arrivent à Québec le 21 septembre et reçoivent l’habit de la communauté huit jours plus tard. Elles demeurent dans la paroisse Saint-Jean-Baptiste, où se trouve l’Archiconfrérie de prière et de pénitence, dont le centre canadien est inauguré le 25 décembre par le cardinal et qui est, dès lors, agrégé à l’archiconfrérie de Montmartre à Paris. Les Sœurs de Jeanne d’Arc entrent le 28 août 1918 dans leur maison mère ; construite à Bergerville selon le style français des vieux châteaux forts, au coût de 48 000 $, elle abrite aussi le secrétariat de l’archiconfrérie. Les religieuses élisent le premier conseil des Sœurs de Jeanne d’Arc le 13 août 1920. Le cardinal Bégin érige canoniquement la communauté le 15 août suivant et approuve les textes constitutifs le 16 mai 1921.

Au nom des Assomptionnistes, le père Marie-Clément, établi à Québec, achète aux rédemptoristes un terrain adjacent à celui des Sœurs de Jeanne d’Arc pour 50 000 $ le 13 août 1921. Il participe à la préparation des plans et supervise la construction du noviciat des Assomptionnistes et du Montmartre canadien (la chapelle de l’archiconfrérie) sur le nouveau terrain ; les coûts sont évalués à 100 000 $. À ces deux édifices, qui seront inaugurés respectivement le 3 septembre 1926 et le 6 janvier 1927, le père Marie-Clément rêve d’ajouter une basilique. Ces réalisations seront toutefois ses dernières pour les Assomptionnistes et l’archiconfrérie. En 1924, le père Tranquille Pessoz est nommé supérieur de la communauté assomptionniste de Bergerville et, en mai 1925, le père Gervais Quénard, supérieur général des Assomptionnistes, demande au père Marie-Clément de se retirer de l’archiconfrérie. Bien que le père Marie-Clément témoigne régulièrement de sa bonne volonté et de son intention de se soumettre à l’autorité, comme il l’a fait en 1919 dans une lettre adressée au père Joseph Maubon, vicaire général des Assomptionnistes, ses supérieurs lui reprochent, entre autres choses, son manque d’humilité, son incapacité à admettre ses erreurs et le manque de transparence dans l’administration des différentes œuvres. De 1926 à 1936, le nombre annuel d’inscriptions à l’archiconfrérie chutera de 6 046 à 1 667.

Le père Marie-Clément demeure entreprenant et, au fil des ans, il assure la réalisation d’autres constructions pour les Sœurs de Jeanne d’Arc sur le terrain de Bergerville, soit une aile supplémentaire pour la maison mère (1928), un monument à Jeanne d’Arc (1931), une grotte de Lourdes (1933) et un calvaire (1934). Ces monuments sont surtout financés par des bienfaiteurs et par les revenus de quêtes aux États-Unis et au Canada, ce qui fait craindre à certains de ses supérieurs, comme le père Armanet Crescent, vicaire provincial d’Amérique du Nord, que le père Marie-Clément utilise son appartenance aux Assomptionnistes pour obtenir de l’argent et nuise ainsi à leurs propres quêtes. De plus, ils critiquent sévèrement ces sollicitations dans un contexte de crise économique, laquelle mettra d’ailleurs un frein à la réalisation de la chapelle conventuelle Sainte-Jeanne d’Arc, qui ne sera achevée qu’en 1955–1956. Le père Marie-Clément a aussi fondé trois œuvres liées aux Sœurs de Jeanne d’Arc, soit les Associés (1921), laïques qui vivent dans l’esprit de la communauté, les Orantes (1924), religieuses qui, en raison de leur âge ou de leur condition physique, prennent un rôle contemplatif, et les Auxiliatrices (1931), religieuses qui prononcent leurs vœux une année à la fois. Il a également établi la Communion pour les prêtres en 1924.

Au début de l’année 1936, le père Marie-Clément ressent une fatigue généralisée et doit ralentir ses activités. Le 16 mai, il meurt d’un infarctus. Les Sœurs de Sainte-Jeanne d’Arc (désignées ainsi depuis le 6 janvier 1931) comptent alors 239 religieuses qui œuvrent dans 32 fondations dispersées au Québec, aux États-Unis et en France. Le corps du père Marie-Clément repose dans le sous-sol de la maison mère, qui deviendra un lieu de dévotion. Le 6 janvier 1966, le cardinal Maurice Roy*, archevêque de Québec, annoncera l’ouverture de la cause de béatification du père Marie-Clément.

Le père Marie-Clément était doué d’une capacité d’adaptation remarquable, d’une grande détermination, d’une nature forte et enthousiaste doublée de charisme et d’une certaine extravagance. Il avait généralement de meilleures relations avec les archevêques de Québec qu’avec ses supérieurs assomptionnistes. Ces derniers ont désapprouvé sévèrement sa trop grande activité, son incapacité à accepter des remarques et à faire preuve d’humilité. Ils lui ont refusé de prendre ses propres décisions, exigeant plutôt qu’il se soumette à l’autorité de ses supérieurs. Reconnaissant toutefois sa piété et son dévouement, ils lui ont permis d’établir ses œuvres et lui ont demandé, à deux reprises, de changer de pays et d’établir de nouvelles fondations, ce qu’il a réussi.

En collaboration avec Gilberte Paquet

Des documents officiels ainsi que des extraits du journal personnel et de la correspondance du père Marie-Clément, entre autres, sont reproduits dans : Yves Garon et Yvon Beaudoin, Béatification et canonisation du serviteur de Dieu Joseph Staub, en religion père Marie-Clément Staub des Augustins de l’Assomption (1876–1936), fondateur de la congrégation des Sœurs de Sainte-Jeanne d’Arc : positio sur les vertus et la renommée de sainteté (2 vol., Rome, 2001–2002).

Le Devoir (18 mai 1936).— W. J. Dufault, Marie Clément Staub, A.A., 1876–1936, apostle and founder (Sillery [Québec], 1990).— Yvon Le Floc’h, Origine de la congrégation des Sœurs de Sainte-Jeanne d’Arc (Québec, 1964) ; P. Marie-Clément Staub, A.A., apôtre et fondateur, 1876–1936 (2 vol., [Québec ?], 1967–1968).— Claire Quintal, Héraut de l’amour : biographie du père Marie-Clément Staub, A.A., apôtre du Sacré-Cœur et fondateur des Sœurs de sainte Jeanne d’Arc, 1876–1936 (Sainte-Foy [Québec], 1989).— Xavier Vandermeerschen, Marie-Clément Staub, A.A., 1876–1936, apôtre et fondateur (Sillery, 1991).

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

En collaboration avec Gilberte Paquet, « STAUB, MARIE-CLÉMENT (baptisé Joseph) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 13 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/staub_marie_clement_16F.html.

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Auteur de l'article:    En collaboration avec Gilberte Paquet
Titre de l'article:    STAUB, MARIE-CLÉMENT (baptisé Joseph)
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2014
Année de la révision:    2014
Date de consultation:    13 déc. 2024