Titre original :  Reginald John Godfrey Bateman. From the Canadian Virtual War Memorial.

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BATEMAN, REGINALD JOHN GODFREY, professeur et officier, né le 12 octobre 1883 à Listowel (république d’Irlande), fils du docteur Godfrey Bateman et d’une prénommée Frances Emily ; décédé célibataire le 3 septembre 1918 près de Dury, France.

Reginald John Godfrey Bateman obtint une licence ès arts du Trinity College de Dublin en 1906 après avoir reçu des prix d’anglais, de français et d’histoire moderne. En 1909, la University of Saskatchewan à Saskatoon l’engagea ; il devint ainsi le premier professeur d’anglais et l’un des quatre premiers professeurs de ce nouvel établissement. Le 26 octobre 1914, il s’enrôla comme simple soldat dans le 28th Infantry Battalion et, après 11 mois d’entraînement, il servit 6 mois dans la région d’Ypres (Ieper, Belgique). Invité ensuite par le recteur de la University of Saskatchewan, Walter Charles Murray*, à prendre le commandement de la Saskatchewan Company du 196th (Western Universities) Infantry Battalion, il resta au Canada durant l’été et l’automne de 1916, passa ses examens d’officier et accéda au grade de major. Une fois en Angleterre, le 196th Infantry Battalion fut dissous. Comme Bateman avait demandé à être rétrogradé lieutenant afin de retourner au combat, il fut affecté au 46th Infantry Battalion et arriva sur le front en juin 1917. Au cours de l’avance sur Lens en août, il fut blessé à la tranchée Aconite, mais il retourna au front dans le courant de l’hiver. Il était capitaine intérimaire lorsque, le 3 septembre 1918, au cours de l’attaque de la ligne de Drocourt-Quéant, il fut tué près de Dury par un obus tombé à l’entrée du quartier général de son bataillon.

En 1922, la University of Saskatchewan publia à sa mémoire un recueil intitulé Reginald Bateman, teacher and soldier: On y voit quel type d’homme il était et dans quel esprit il partit pour la guerre en 1914. Bateman était un professeur idéaliste. « C’est par l’Art et par l’Art seulement, croyait-il, que l’Humanité progresse ; le progrès de la Science ou de la simple connaissance ne signifie pas nécessairement un progrès dans l’une ou l’autre de ces choses qui font la suprématie de l’Homme sur le reste de la création, ces qualités spirituelles qui l’élèvent au niveau du Divin. » Sa préférence allait aux étudiants qui pouvaient se mouvoir dans ces sphères éthérées. Quel qu’ait été le nombre de ses élèves en une année (Bateman en eut 220 en 1914), si un professeur inspirait « ne fût-ce qu’à un seul individu un authentique désir de culture, son existence durant cette année-là [était] pleinement justifiée ».

Bateman avait aussi une vision idéaliste de la guerre. Le 25 octobre 1914, avant de s’en aller outremer, il prononça à l’université, devant la Young Men’s Christian Association, une allocution plus belliqueuse que tous les autres discours ou sermons entendus à Saskatoon pendant le premier conflit mondial. La guerre, dit-il, « est l’épreuve suprême, la seule épreuve vraiment décisive de la qualité spirituelle d’une nation » et, parce qu’elle punit la « dépravation nationale », elle est « le principal stimulant du progrès de l’humanité ». Ce qui s’appliquait à la nation s’appliquait également aux individus : « Ne vaut-il pas beaucoup mieux pour eux sentir un frisson de patriotisme au contact brutal de la guerre et mourir en combattant pour la liberté que vivre jusqu’à une vieillesse sans honneur en quêtant des gains dérisoires ? » La guerre seule, disait Bateman, entretient pleinement les vertus tels le courage, l’esprit de sacrifice et l’honneur tandis qu’un monde sans guerre « plairait à une race d’êtres émasculés et veules ».

Fidèle à ses convictions, Bateman choisit à deux reprises, afin de pouvoir aller se battre, un grade inférieur à celui qu’il aurait pu avoir – une fois en 1917, mais aussi au cours de l’hiver de 1914–1915. Il avait suivi le cours d’officiers à Winnipeg et réussi un examen, mais il refusa de passer l’examen final, car il aurait été obligé de quitter le 28th Infantry Battalion. « Il préféra [...] ne pas perdre sa chance d’arriver au front le plus tôt possible. »

Quand Bateman rentra à Saskatoon après sa première période de service au front, il avait changé : la réalité avait tempéré son idéalisme. Il parla de l’ennemi en termes favorables et résuma ainsi la vie dans les tranchées : « des journées d’une insupportable monotonie et des instants d’une peur indescriptible ». Il évoqua également deux autres aspects de la guerre : le pittoresque (en décrivant une nuit dans les tranchées) et le comique – en notant que le bris d’un pot de rhum avait été une pire calamité pour les hommes que le bombardement de leur tranchée. Il raconta aussi avoir écouté avec ravissement des jurons inventifs. Une nuit, un détachement de ravitaillement en vivres s’était rendu au front « en pataugeant dans la boue, en tombant dans des trous, en trébuchant dans les tranchées sur des caillebotis endommagés, et leur flot de paroles [lui avait] procuré beaucoup de plaisir ; [ce flot] était immense et ne ressemblait à rien de ce qu’ont pu dire d’autres soldats dans l’histoire du monde ». Le professeur idéaliste avait trouvé le tour d’écrire pour les gens ordinaires, sans pour autant abandonner l’hyperbole.

Manifestement, Bateman avait bonne réputation en tant qu’officier. Le fait qu’il commande la compagnie de la University of Saskatchewan répondait à « un très fort désir » des étudiants. Selon les auteurs de The suicide battalion, on le tenait pour « l’un des officiers les plus populaires du 46th [Infantry Battalion] ». L’université lui rendit hommage non seulement en publiant le livre déjà mentionné, mais aussi en instituant une bourse d’études à son nom et en créant la chaire Bateman d’anglais.

Reginald John Godfrey Bateman était un homme sérieux, dans sa vie comme dans ses écrits, mais il aimait aussi l’humour. En passant ses examens d’officier à Winnipeg avant d’assumer le commandement de la Saskatchewan Company, il reçut un nouvel uniforme. « Je viens à peine de recevoir mon uniforme. Il est quelque peu bruyant. Il est en bas, mais je l’entends quand même m’appeler. J’ai posté une sentinelle pour l’empêcher de s’enfuir avant que le préposé au nettoyage vienne le prendre. Je pense qu’il se laissera emporter sans faire de tapage. »

Donald Cameron Kerr

Reginald Bateman, teacher and soldier : a memorial volume of selections from his lectures and other writings a paru à Londres en 1922. Les notes de lecture de Bateman sont conservées dans le fonds Bateman aux Univ. of Sask. Arch. (Saskatoon), MG 5.

AN, RG 150, Acc. 1992–93/166.— Univ. of Sask. Arch., RG 1, sér. 1 (presidential papers, W. C. Murray), 18, dossier B.8 (applications and appointments) ; 60, dossier B.124 (Western Universities Battalion organization). « Memorial service for Capt. Reginald J. G. Bateman », 13 oct. 1918 (exemplaire en possession de l’auteur).— J. L. McWilliams et R. J. Steel, The suicide battalion (Edmonton, 1978).

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Donald Cameron Kerr, « BATEMAN, REGINALD JOHN GODFREY », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 8 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/bateman_reginald_john_godfrey_14F.html.

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Auteur de l'article:    Donald Cameron Kerr
Titre de l'article:    BATEMAN, REGINALD JOHN GODFREY
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1998
Année de la révision:    1998
Date de consultation:    8 déc. 2024