CHADWICK, CHARLES ELI, fermier, fonctionnaire, homme d’affaires, officier de milice et homme politique, né le 13 août 1818 à Preston, Lancashire, Angleterre, fils du révérend Eli Chadwick et de Margaret Weal ; le 7 septembre 1843, il épousa à Ingersoll, Haut-Canada, Jane McCartney, et ils eurent neuf enfants ; décédé le 22 février 1896 au même endroit.

Charles Eli Chadwick immigra dans le Haut-Canada avec sa famille en 1826. Instruit par son père, qui était devenu agriculteur et instituteur à Vittoria, dans le comté de Norfolk, il possédait une solide formation classique quand il quitta l’école à l’âge de 16 ans pour travailler à la ferme familiale. À l’exception des deux années qu’il passa au service de son oncle Benjamin Chadwick, marchand à Drummondville (Niagara Falls), il demeura à la ferme jusqu’à son mariage en 1843, après quoi il s’établit dans une ferme de 500 acres dans le canton de Dereham (Southwest Oxford), dans le comté d’Oxford. Il commença à s’occuper des affaires locales et devint membre du conseil scolaire et inspecteur d’écoles, conseiller de district et greffier du canton, postes qui aiguisèrent son intérêt pour la vie publique. Fatigué de l’agriculture et peut-être encouragé par certains amis politiques comme Francis Hincks*, il alla se fixer à Ingersoll en 1853.

Chadwick allait y mener une carrière florissante. Maître de poste de 1853 à 1861, directeur de la succursale de la Niagara District Bank de 1854 à 1877, membre et, à certains moments, président du conseil scolaire entre 1866 et 1877, il fut également président de la Reform Association d’Oxford South et officier dans la milice d’Oxford, dont il devint lieutenant-colonel en 1860. Toutes ces occupations n’empêchèrent pas cet homme d’une intarissable énergie de diriger aussi une agence d’assurances tout en faisant partie du conseil d’administration de plusieurs entreprises locales.

Chadwick fut l’un des premiers à préconiser la fabrication industrielle du fromage au Canada et il exerça en ce domaine une grande influence. Depuis les débuts de la colonie, les fermiers ou, le plus souvent, les fermières produisaient le fromage en faibles quantités, et cette activité n’occupait qu’une petite place dans l’ensemble des activités agricoles. En 1864, un immigrant américain, Harvey Farrington, fonda à Oxford la première fabrique de fromage de l’Amérique du Nord britannique ; il y centralisa la production, ce qui eut pour effets d’augmenter le rendement et d’assurer tant un meilleur contrôle de la qualité qu’un revenu plus stable aux agriculteurs. Cette formule attira l’attention de Chadwick ; en avril 1865, il convoqua à une assemblée les fermiers et hommes d’affaires de la région d’Ingersoll, qui formèrent alors la West Oxford Cheese Association. En collaboration avec James Harris, fromager local, Chadwick et l’association ouvrirent la première fabrique d’Ingersoll. La croissance de l’industrie fromagère amena la formation d’associations industrielles et de groupes de pression. Chadwick participa à la mise sur pied du premier de ces groupes, la Canadian Dairymen’s Association, fondée à Ingersoll en 1867 ; plus tard, il devint secrétaire de la Dairymen’s Association of Western Ontario, poste qu’il occuperait durant de nombreuses années.

En 1878 et en 1879, on proclama Chadwick maire d’Ingersoll. Malgré les éloges que lui valut le fait d’avoir attiré à Ingersoll le Credit Valley Railway, il perdit son poste l’année suivante, au terme d’une campagne pendant laquelle on lui reprocha de ne pas avoir réussi à percevoir les 15 000 $ de taxes non payées par les habitants de la ville. Chadwick n’en conserva pas moins sa popularité, et même ses adversaires politiques signèrent la pétition qui demandait au gouvernement ontarien de le nommer magistrat de police pour Ingersoll. On annonça cette nomination en novembre 1880 et Chadwick occupa la fonction jusqu’à ce que son état de santé l’oblige à prendre sa retraite, à l’âge de 77 ans, quelques mois avant sa mort en 1896.

Grand voyageur, Chadwick avait, dit-on, traversé l’Atlantique sept fois. Enchanté par l’Exposition internationale de Vienne en 1873, il s’était quand même plaint des « tentatives systématiques d’extorsion [subies] dès [son] entrée dans ce satané pays d’Allemagne ». « Dégoûté de Vienne », il était retourné en Grande-Bretagne en remerciant Dieu de se trouver « encore une fois sur le sol britannique, dans un pays qui a quelque chose de chrétien ». Plus tard, ses visites à l’Exposition universelle de Philadelphie en 1876 et à l’Exposition universelle de Paris en 1878 ne susciteraient pas de tels commentaires, et l’on peut supposer qu’il tolérait mieux désormais les us et coutumes qui n’étaient pas ceux de son patelin.

Dans la région d’Ingersoll, Chadwick était connu comme orateur et auteur de fréquents articles dans la presse locale. Ses discours étaient ceux d’un impérialiste et nationaliste pour qui le Canada devait maintenir son « lien intime avec le trône britannique ». Néanmoins, malgré ses vues impérialistes, Chadwick soutint en 1880 dans l’Ingersoll Chronicle and County of Oxford Intelligencer que l’avenir du dominion appartenait aux immigrants des nombreux groupes ethniques qui, grâce « aux institutions libres et aux écoles gratuites [du Canada] de même qu’à la [mise en pratique des préceptes de la] Bible », pourraient se fondre en « une nouvelle race, qui ne le céderait en rien à aucune autre au monde ».

Aux yeux de ses contemporains, Charles Eli Chadwick fut un fonctionnaire dévoué et efficace, un magistrat sévère mais impartial, et un gentilhomme cultivé et courtois. Travailleur infatigable, consciencieux dans l’exécution de toutes sortes de fonctions, il ne franchit jamais, sur le plan public, les frontières du comté d’Oxford, peut-être parce qu’il dispersait son énergie dans tant d’occupations diverses, probablement surtout parce qu’il était satisfait de la gloire locale et n’avait aucune envie de quitter Ingersoll. Dans l’Ontario du xixe siècle, il n’était pas rare que l’on exerce trente-six métiers, mais Chadwick fut exceptionnellement polyvalent, même pour son époque.

Ian M. Stewart

AO, MS 451, Oxford County, Oxford (North) Township, Ingersoll Rural Cemetery : 210 ; MS 747, Council minutes, 1878–1880.— UWOL, Regional Coll., C. E. Chadwick papers.— Farmer’s Advocate and Home Magazine (London, Ontario), juill. 1867.— Ingersoll Chronicle and Canadian Dairyman (Ingersoll, Ontario), 2 janv., 3 juill. 1879, 8–15 janv., 8 juill. 1880, 20 janv. 1881, 14 nov. 1895.— Canadian biog. dict.— Cyclopædia of Canadian biog. (Rose et Charlesworth), 1.— The dairy industry in Canada, H. A. Innis, édit. (Toronto, 1937).— E. [S.] Moore, When cheese was king : a history of the cheese factories in Oxford County ([Norwich, Ontario], 1987).

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Ian M. Stewart, « CHADWICK, CHARLES ELI », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/chadwick_charles_eli_12F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
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