Titre original :  Arthur Ellis (crop). Source: Star-Phoenix - Saskatoon, Saskatchewan, Canada. 22 Jul 1938, page 7.

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ENGLISH, ALEXANDER ARMSTRONG (connu sous les noms d’Arthur Bartholomew English et d’Arthur Bartholomew Alexander English, il utilisa le pseudonyme d’Arthur Ellis), soldat et bourreau, né le 11 ou le 12 mars 1865, peut-être à Newcastle upon Tyne, Angleterre ; le 20 mai 1916, il épousa à Montréal Edythe (Edith) Grimsdale (1877−1960), et ils adoptèrent peut-être une fille ; décédé le 21 ou le 22 juillet 1938 dans la même ville.

Plusieurs aspects de la vie d’Alexander Armstrong English demeurent mystérieux. Fils d’un officier de l’armée britannique, selon certaines sources, il suivit d’abord les traces de son père et devint soldat : il aurait servi dans les Northumberland Fusiliers en Inde et au Moyen-Orient, remporté le championnat de boxe de l’armée dans la catégorie des poids légers et participé à la guerre des Boers. À son retour en Angleterre, au début des années 1900, il apprit à effectuer des exécutions, peut-être sous la tutelle du bourreau John Ellis, qui était apparemment son oncle. Il exerça alors son nouveau métier en Angleterre et au Moyen-Orient jusqu’en 1910. Cette année-là, John Robert Radclive (Radcliffe), bourreau national non officiel du Canada, prit sa retraite et English lui succéda. Suivant une tradition qui avait cours dans le métier, il adopta un pseudonyme : Arthur Ellis.

Les exécutions relevant de la compétence provinciale en vertu du droit canadien, Ellis n’était pas réellement employé par le gouvernement fédéral, mais plutôt par les shérifs des endroits où l’on requérait ses services. Pendant la majeure partie de ses 25 années de carrière, son point d’attache se trouvait près de la prison de Bordeaux, à Montréal, mais il voyagea beaucoup, de la Colombie-Britannique aux Maritimes, pour procéder à des pendaisons. Il appartenait à la nouvelle génération de bourreaux qui, à cette époque, abordaient sous un angle scientifique leur travail, qu’ils considéraient comme un art macabre. L’objectif d’Ellis consistait à s’assurer que chaque pendaison se déroule rapidement et sans heurt. Il avoua un jour : « Ma seule crainte est que je puisse faire un jour ou l’autre une erreur et infliger au prisonnier une torture inutile. » Les bourreaux devaient calculer correctement la hauteur de chute du condamné afin que son cou se brise de façon nette : une corde trop courte entraînait une mort lente par strangulation, tandis qu’une corde trop longue pouvait occasionner la décapitation. Par conséquent, le soir précédant une exécution, Ellis mesurait et pesait toujours le prisonnier vêtu des habits qu’il porterait pour se rendre à la potence. Il consultait ensuite les tableaux statistiques pour déterminer la longueur de corde requise. Le lendemain, il accompagnait le condamné à la potence et lui passait le nœud coulant autour du cou. Après la prière de l’aumônier, Ellis claquait des talons, puis actionnait le levier d’ouverture de la trappe, donnant ainsi le coup de grâce au condamné.

Ellis, que le Toronto Star décrivit comme un « petit Anglais soigné », faisait de son mieux pour conférer une dignité aux pendaisons dont il se chargeait. Toujours habillé avec élégance, il insistait pour que l’événement se déroule le plus possible dans la confidentialité et la solennité. Contrairement à certains de ses homologues, il refusait de vendre des bouts de la corde utilisée ou les effets personnels des prisonniers en guise de souvenirs. Pour son déplacement et ses services, Ellis recevait de 150 $ à 200 $ et le remboursement de ses dépenses, rémunération généreuse comparativement aux honoraires de ses confrères anglais et américains : pour chaque pendaison, John Ellis ne gagnait, en plus du remboursement de ses dépenses, que 2 livres et 10 shillings (et la même somme pour bonne conduite dans la collectivité), tandis que l’Américain John W. Hulbert était payé 50 $, rétribution qui passa plus tard à 150 $ pour chaque contrat.

Au cours de sa carrière, y compris la période pendant laquelle il exerça en Angleterre et au Moyen-Orient, Ellis pourrait avoir réalisé jusqu’à 550 ou 600 exécutions. La plupart se déroulèrent relativement bien, mais le métier qui consistait à pendre des gens n’avait rien d’une science exacte. Deux épisodes notoires ternirent la réputation d’Ellis. Le 25 août 1926, Daniel Prockiw (Proceiv), Winnipegois de 240 livres reconnu coupable de l’assassinat de sa femme, plongea dans la trappe avec une force telle qu’il en fut décapité. Près de neuf ans plus tard, le 29 mars 1935, Thomassina Sarao, condamnée à mort pour avoir orchestré le meurtre de son mari, connut le même sort funeste à Montréal. Qu’une prisonnière ait subi une telle atrocité choqua particulièrement les Canadiens et on accusa Ellis d’avoir mal calculé la longueur de corde nécessaire. Celui-ci soutint qu’on l’avait empêché de mesurer et de peser la condamnée avant l’exécution, et affirma catégoriquement qu’on lui avait donné un poids incorrect. Il menaça de poursuivre les journalistes qui le blâmaient pour cette fin tragique. Néanmoins, l’opinion publique y percevait une bavure de la part d’Ellis, ce qui mit fin à sa carrière.

Même si les bourreaux avaient tendance à rester impassibles en public, ils souffraient souvent, sur le plan émotionnel, des séquelles de l’ambiguïté morale de leur profession et de la stigmatisation sociale inhérente : par exemple, Radclive mourut d’alcoolisme, tandis que John Ellis et Hulbert se suicidèrent. Arthur Ellis considérait son travail comme un « devoir humanitaire » qui ne le troublait pas. Il déclara un jour : « Quand j’ouvre la trappe, j’ai l’esprit tranquille et j’ai le sentiment d’avoir dix ans de moins. » Cependant, son métier pesa sans nul doute sur sa vie personnelle. Ellis épousa Edythe Grimsdale en 1916 (on le qualifie de « veuf » dans le registre des mariages, mais on ne sait rien de sa femme précédente). Elle le quitta en 1922, après avoir découvert son vrai métier – il lui avait dit qu’il exerçait celui de vendeur – et l’avoir accusé de violence conjugale. Six ans plus tard, il déclara qu’ils vivaient de nouveau ensemble, mais, s’il y eut réconciliation, elle ne dura apparemment pas longtemps. Après la pendaison de Thomassina Sarao, Ellis eut peine à trouver un emploi en raison de ses activités antérieures ; il travailla quelque temps dans un grand magasin de Montréal, mais on dut le licencier parce que des clients refusaient de recevoir les services d’un ancien bourreau.

Alexander Armstrong English vécut ses dernières années dans la solitude et la pauvreté ; il résidait dans une pension près du poste de police central de Montréal et subsistait grâce à de menus prêts d’amis. Il mourut le 21 ou le 22 juillet 1938, à l’hôpital Sainte-Jeanne-d’Arc, peut-être après avoir souffert de malnutrition, et fut inhumé au cimetière Mont-Royal. Arthur Ellis connaîtrait une certaine immortalité de deux façons. Premièrement, jusqu’à l’abolition de la peine de mort, en 1976, les bourreaux canadiens-français adopteraient le pseudonyme d’Ellis. Deuxièmement, et plus durablement, l’association Crime Writers of Canada donna, en 1984, le nom d’Arthur Ellis à ses prix d’excellence littéraire annuels.

Marc Patenaude et Allan Patenaude

Nous souhaitons remercier le personnel du cimetière Mont Royal de Montréal pour les renseignements fournis sur l’inhumation et la sépulture d’Alexander Armstrong English et d’Edythe Grimsdale.

FD, Presbyterian Saint Giles (Montréal), 20 mai 1916 ; United Church Saint Georges (Montréal), 23 juill. 1938.— Gazette (Montréal), 21–22 juill. 1938.— Globe, 8 oct. 1913.— Saskatoon Star-Phoenix, 22 juill. 1938.— Toronto Daily Star, 22 déc. 1928, 21–22 juill. 1938.— F. W. Anderson, A concise history of capital punishment in Canada ([Calgary, 1973]).— Ken Leyton-Brown, The practice of execution in Canada (Vancouver, 2010).— Jeffrey Pfeifer et Ken Leyton-Brown, Death by rope : an anthology of Canadian executions (1 vol. paru, Regina, 2007–    ), 1.— G. D. Robin, « The executioner : his place in English society », British Journal of Sociology (Londres), 15 (1964) : 234–253.

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Marc Patenaude et Allan Patenaude, « ENGLISH, ARTHUR BARTHOLOMEW », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 4 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/english_alexander_armstrong_16F.html.

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Auteur de l'article:    Marc Patenaude et Allan Patenaude
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2020
Année de la révision:    2020
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