FRASER, ALEXANDRE (baptisé Joseph-Romuald-Alexandre, il signait aussi Alex. et Romuald-Alexandre), ingénieur civil, fonctionnaire et professeur, né le 8 mai 1881 à Cap-Saint-Ignace, Québec, fils de Samuel Fraser, cultivateur, et d’Emma Fraser ; le 17 juin 1913, il épousa à Outremont (Montréal) Berthe Lamoureux, et deux filles lui survécurent ; décédé le 11 juin 1932 à Laval-sur-le-Lac (Laval, Québec).
D’ascendance écossaise, Alexandre Fraser grandit dans une famille de confession catholique totalement intégrée à la société canadienne-française. Il fait ses études classiques au collège de Sainte-Anne-de-la-Pocatière de 1894 à 1905. Contrairement à la plupart des diplômés des collèges de l’époque, Fraser opte ensuite pour une carrière en génie civil et s’inscrit à l’École polytechnique de Montréal, au moment où cet établissement d’ingénieurs francophones inaugure son nouvel immeuble, rue Saint-Denis [V. Ernest Marceau*]. En 1909, il décroche son diplôme d’ingénieur civil et fait ses premières armes dans la profession au ministère de la Marine et des Pêcheries du gouvernement fédéral. Il participe alors aux travaux de creusage du chenal du fleuve Saint-Laurent, entre Montréal et Pointe-au-Père (Rimouski).
En 1911, Fraser quitte la fonction publique fédérale pour exercer un emploi dans la voirie au sein du gouvernement de la province de Québec. Placée sous la responsabilité du ministère de l’Agriculture [V. Joseph-Édouard Caron*] en 1912, la voirie devient un ministère indépendant en 1914 [V. Joseph-Adolphe Tessier*]. Jusqu’en 1918, Fraser est appelé à diriger les travaux de construction des premières grandes routes pour automobiles de la province de Québec, soit la route Édouard VII – partant de Montréal vers les États-Unis, en passant par la région de la Montérégie –, ainsi que la route Montréal-Québec sur la rive nord du Saint-Laurent. Cette expertise acquise sur le terrain l’amène à occuper, ensuite, le poste d’assistant à l’ingénieur en chef des routes.
En 1923, Fraser accède à un poste important de la fonction publique du gouvernement de la province de Québec, alors en pleine expansion, soit celui d’ingénieur en chef du ministère de la Voirie. Il conservera cet emploi jusqu’à sa mort. À ce titre, il donne la chance à plusieurs diplômés de l’École polytechnique de faire carrière dans la fonction publique et de participer à la construction du Québec moderne. Les travaux de construction, de réfection et d’entretien de la voirie provinciale sont alors en effet réalisés par plusieurs de ces derniers. Or, Fraser, qui, en 1915, a été l’un des membres fondateurs de la section de Québec de l’Association des anciens élèves de l’École polytechnique de Montréal et qui, en 1919, en est devenu le président, enseigne également dans cette école, où il fait profiter les futurs ingénieurs de son expertise dans la construction des routes. Dans ce contexte, on comprend aisément pourquoi il favorise l’embauche, au ministère de la Voirie, des diplômés de son alma mater, à laquelle il reste profondément attaché, apportant du même coup une contribution indéniable à la montée des ingénieurs francophones au Québec.
Fraser a de plus exercé une influence majeure dans la professionnalisation du génie civil au Québec. Membre de la Société canadienne des ingénieurs civils – qui prendra le nom d’Engineering Institute of Canada en mai 1918 –, il s’implique dans cet organisme de représentation des ingénieurs canadiens. Au bureau de la section de Québec, qui est l’une des sections régionales les plus revendicatrices d’un statut professionnel des ingénieurs, il milite ardemment pour que les provinces canadiennes se dotent de lois pour réglementer ce métier. Pendant toutes les années 1910, il joue un rôle important, aux côtés d’autres ingénieurs francophones, tels Albert-Roch Décary, Arthur Surveyer et Ernest Marceau, afin d’acquérir une reconnaissance légale du titre d’ingénieur et de l’exercice de cette fonction. Le 14 février 1920, la Corporation des ingénieurs professionnels de Québec voit le jour [V. Adhémar Mailhiot]. Fraser est l’un des huit ingénieurs qui composent la première équipe de direction de la nouvelle association. Il continue également à participer aux activités de l’Engineering Institute of Canada, notamment en devenant, en 1921, vice-président de la section de la ville de Québec.
Fraser est donc un homme de conviction. Au cours de sa carrière, il a pris part à plusieurs autres clubs, regroupements ou associations professionnelles et universitaires comme le Royal Automobile Club du Canada, l’Association canadienne des bonnes routes, l’Association des constructeurs de voirie de l’Amérique, la Ligue de sécurité de la province de Québec et le Cercle universitaire de Montréal.
À l’aube de ses 51 ans, Alexandre Fraser meurt subitement le 11 juin 1932, pendant une partie de golf au club Laval-sur-le-Lac, en banlieue de Montréal. En somme, son parcours a été typique de la trajectoire professionnelle des ingénieurs de la province de Québec. Fraser a travaillé dans la fonction publique provinciale au moment où celle-ci est devenue un employeur privilégié des diplômés de l’École polytechnique. Or, son poste de direction dans le plus important lieu de recrutement des ingénieurs au sein de cette fonction publique, le ministère de la Voirie, le distinguait de ses collègues. De plus, Fraser a participé activement aux principaux organismes de représentation des ingénieurs, tant sur le plan national que provincial, devenant ainsi l’un des porte-parole majeurs de ce groupe professionnel en formation. En 1934, le gouvernement de la province de Québec l’honorera en donnant son nom à un canton du territoire de la baie James.
Alexandre Fraser est l’auteur de l’article suivant : « Practical advice to road superintendents and municipal councils », Canadian Engineer (Toronto), 36 (1919) : 532–534.
BAnQ-CAM, CE601-S51, 14 juin 1932 ; CE601-S246, 17 juin 1913.— BAnQ-Q, CE302-S1, 4 avril 1864, 8 mai 1881.— Le Devoir, 13–14 juin 1932.— La Presse, 13 juin 1932.— N. R. Ball, « Vision, cœur et raison » : l’ingénierie au Canada de 1887 à 1987 (Ottawa, 1987).— BCF, 1920.— J.-P. Charland, l’Enseignement spécialisé au Québec, 1867 à 1982 (Québec, 1982).— Robert Gagnon et A. J. Ross, Histoire de l’École polytechnique, 1873–1990 : la montée des ingénieurs francophones (Montréal, 1991).— Adhémar Mailhiot, les Succès des anciens de polytechnique (Montréal, 1931).— Robert Mayer, « les Ingénieurs-Entrepreneurs canadiens-français et canadiens-anglais à Montréal » (mémoire de m.a., univ. de Montréal, 1968).
Robert Gagnon et Dany Fougères, « FRASER, ALEXANDRE (baptisé Joseph-Romuald-Alexandre) (Alex., Romuald-Alexandre) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 14 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/fraser_alexandre_16F.html.
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Auteur de l'article: | Robert Gagnon et Dany Fougères |
Titre de l'article: | FRASER, ALEXANDRE (baptisé Joseph-Romuald-Alexandre) (Alex., Romuald-Alexandre) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2019 |
Année de la révision: | 2019 |
Date de consultation: | 14 nov. 2024 |