GRANT, PETER, trafiquant de fourrures, né vers 1764 en Écosse, probablement à Glen Moriston ; décédé le 20 juillet 1848 à Lachine, Bas-Canada.

Peter Grant entra au service de la North West Company en 1784, à titre de commis, probablement grâce à l’influence de John Grant, affréteur et transitaire de Lachine qui, semble-t-il, était son frère. Selon Alexander Henry* le jeune, Grant, d’abord affecté dans le bas de la rivière Rouge, établit le tout premier poste de Pembina (Dakota du Nord). En 1789, la North West Company l’envoya au lac Rouge (probablement le lac Red, Minnesota) avec un trafiquant nommé Desmarais ; l’année suivante, la compagnie leur confia temporairement le poste du lac à la Pluie (près de Fort Frances, Ontario), en remplacement du trafiquant de cet important dépôt, qui était tombé malade.

Après qu’on lui eut refusé une promotion au profit d’un autre, Grant se joignit à une entreprise indépendante qu’avait lancée en 1792 David Grant, avec qui ses liens ne sont pas déterminés. En 1790, ce dernier avait signé avec la North West Company un contrat de commis valable pour deux ans qui, à son expiration, lui donnait le choix de toucher £200 de salaire ou de prendre « pour lui-même un canot de marchandises » qu’il mènerait de Grand Portage (près de Grand Portage, Minnesota) à n’importe quel poste inoccupé. C’est sans aucun doute en raison du revenu insuffisant que lui avait rapporté ce contrat qu’il s’associa à Peter Grant et à une maison montréalaise, l’Alexander and James Robertson ; chacun d’eux détenait une part d’un tiers.

Une fois devenus trafiquants indépendants, les deux Grant commencèrent, en 1793, par délimiter à Grand Portage un terrain pour leur propre dépôt. Cependant, aucun bâtiment ne s’y élevait encore lorsqu’ils partirent vers l’ouest, où Peter établit son camp sur la rivière Qu’Appelle, à quelque cinq lieues du poste de John McDonell. En 1794, il commit l’imprudence d’envoyer quatre canots dans la région déjà surexploitée de la rivière Rouge : la Hudson’s Bay Company, la Michilimackinac Company et lui-même y comptaient 14 postes, tandis que la North West Company n’en avait que 7. Mal préparée, la campagne des Grant ne tarda pas à échouer. Les Robertson récoltèrent la totalité des recettes de 1795 mais, dès l’année suivante, ils essuyèrent eux aussi une défaite au terme des poursuites qu’engagea la North West Company. Par suite de transactions ultérieures, ils acquirent les parts que détenaient les Grant mais durent transférer l’actif de la société à la North West Company. En vertu de la même entente, celle-ci offrit une place à Peter Grant et £200 par an en attendant qu’une part d’association devienne disponible, mais elle n’offrit rien à David. On ne sait trop pourquoi elle passa l’éponge dans le cas de Peter et ne le fit pas pour David, qui retourna à Montréal « ruiné ».

Réintégré à la North West Company avec une demi-part, Peter devint en 1797 associé à part entière et propriétaire du département du lac à la Pluie, alors menacé par les empiétements de la Hudson’s Bay Company. L’influence de Grant sur les Indiens de la région contribua à chasser les intrus, qu’une autre concurrente eut tôt fait de remplacer, la New North West Company (appelée parfois la XY Company). Après le rendez-vous de 1801 de la North West Company, Grant quitta ce terrain de lutte pour faire son tour de service à Montréal, mais il dut interrompre son congé vers la fin de 1802 pour remplacer, sur l’ordre de la compagnie, le représentant de celle-ci à Sault-Sainte-Marie (Sault Ste Marie, Ontario), qui s’était noyé. En 1803, il assista au premier rendez-vous tenu à Kaministiquia (Thunder Bay, Ontario). L’année suivante, il rédigea sur les Sauteux un exposé qui, selon Louis-François-Roderick Masson*, est le « plus complet et [le] plus élaboré » des comptes rendus que remirent les associés de la North West Company à Roderick Mackenzie pour le livre qu’il projetait de publier sur les Indiens d’Amérique du Nord. Cette étude, conclut Masson, place Grant « au nombre des plus fins observateurs que la North West Company ait comptés ».

Au moment de sa retraite, en 1805, Peter Grant s’installa à Sainte-Anne-du-Bout-de-l’Île (Sainte-Anne-de-Bellevue, Québec), dans une grande maison de pierre connue aujourd’hui sous le nom de maison Thomas Moore. Vers 1820, il s’établit à Lachine, où il mourut en 1848. Durant ces longues années apparemment calmes, il s’occupa presque exclusivement de sa famille ; bien que membre du Beaver Club à compter de 1807, il ne le fréquenta guère. Grant était le père d’au moins trois enfants sang-mêlé, deux filles et un fils. Sa fille Mary et un autre fils ou neveu, Peter, vécurent avec lui durant ses dernières décennies. Son autre fille et sa femme indienne demeurèrent au lac à la Pluie (lac Rainy, Ontario) et demandèrent une aide financière en 1816. Pendant qu’il était encore en territoire indien, Grant avait reçu des appels semblables de parents appauvris des Highlands, où la plupart des fermiers « [allaient] être bientôt bergers ». La sensibilité qu’il manifeste dans sa correspondance familiale et dans ses écrits sur les Indiens suggère qu’il dut répondre aux appels de ses parents écossais et indiens.

Jean Morrison

L’auteur tient à remercier Raymond Dumais, W. Kaye Lamb, Hugh MacMillan et Victoria Stewart pour leur précieuse assistance.  [j. m.]

L’étude sur les Indiens sauteux de Peter Grant a paru à la suite de plusieurs changements éditoriaux sous le titre de « The Sauteux Indians about 1804 », les Bourgeois de la Compagnie du Nord-Ouest (Masson), 2 : 303–366. Le manuscrit intitulé « An account of the Sauteux Indians » ([1804]) se trouve à la MTRL.

ANQ-M, CE1-124, 22 juill. 1848 ; CN1-29, 29 janv. 1790, 5 mars 1796.— AO, MU 572.— APC, MG 19, B1, 1 : 21, 41, 115, 160 ; B3 : 7, 76 ; E1, sér. 1 : 8612 ; RG 8, I (C sér.), 363 : 18.— Presbyterian Church in Canada Arch. (Toronto), St Gabriel Street Church (Montréal), reg. of baptisms, 1798, 1804–1806 (mfm aux AO).— UTFL, ms coll. 31, box 24, file 7.— Les Bourgeois de la Compagnie du Nord-Ouest (Masson), 1 : 32, 66, 284.— Docs. relating to NWC (Wallace).— Five fur traders of the northwest [...], C. M. Gates, édit. ([2e éd.], St Paul, Minn., 1965).— Simon Fraser, The letters and journals of Simon Fraser, 1806–1808, W. K. Lamb, édit. (Toronto, 1960).— Duncan McGillivray, The journal of’ Duncan M’Gillivray of the North West Company at Fort George on the Saskatchewan, 1794–5, introd. de A. S. Morton, édit. (Toronto, 1929).— Alexander Mackenzie, The journals and letters of Sir Alexander Mackenzie, W. K. Lamb, édit. (Toronto, 1970).— New light on the early history of the greater northwest : the manuscript journals of Alexander Henry [...] and of David Thompson [...], Elliott Coues, édit. (3 vol., New York, 1897 ; réimpr., 3 vol. en 2, Minneapolis, Minn., [1965]), 1 : 80–81.— Campbell, Hist. of Scotch Presbyterian Church.— W. S. Wallace, The pedlars from Quebec and other papers on the Nor’Westers (Toronto, 1954).— E. A. Mitchell, « The North West Company agreement of 1795 », CHR, 36 (1955) : 126–145.

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Jean Morrison, « GRANT, PETER », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 11 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/grant_peter_7F.html.

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Auteur de l'article:    Jean Morrison
Titre de l'article:    GRANT, PETER
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1988
Année de la révision:    1988
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