HART, SAMUEL, négociant et homme politique, né vers 1747, probablement en Angleterre ; vers 1780, il épousa Rebecca Byrne, de Philadelphie, et ils eurent quatre enfants ; décédé le 3 octobre 1810 à Preston, Nouvelle-Écosse.

Les origines de Samuel Hart sont obscures. Né apparemment en Angleterre de souche juive, il alla s’installer à Philadelphie, quelque temps avant que n’éclatât la Révolution américaine. Pendant la guerre, il devint manifestement identifié à la cause tory car, arrivé à Halifax aux alentours de 1785, il faisait partie du groupe de colons loyalistes qui avaient quitté la colonie de New York pour la Nouvelle-Écosse. Hart dirigea un commerce général d’import-export dans des locaux situés au coin des rues Hollis et George, qu’il avait acquis pour £900. Ses annonces parues dans la presse faisaient valoir qu’il vendait des marchandises sèches en provenance de Londres. Toutefois, d’après des passages du journal intime tenu par Simeon Perkins, négociant de Liverpool, Hart s’occupait du commerce avec les Antilles et tenait une variété quasi illimitée de produits. Certains des contemporains de Hart, y compris Perkins et William Forsyth, trouvèrent à redire à ses prétendus « procédés peu scrupuleux » ; toutefois, il n’en devint pas moins prospère, surtout après la déclaration de guerre entre la Grande-Bretagne et la France révolutionnaire en 1793. La faillite de son frère Moses Hart, commerçant londonien, embarrassa quelque peu Samuel à la fin des années 1790, parce qu’il s’était porté garant des dettes de Moses. En 1801 cependant, il avait récupéré au point de pouvoir acquitter toutes les hypothèques sur ses propriétés de la Nouvelle-Écosse. À ce moment-là, Hart possédait des biens immobiliers à la ville et à la campagne dont la valeur dépassait £4 000.

Visant au delà de la réussite matérielle, Hart aspirait à être admis dans la bonne société, même si cela voulait dire la suppression de son identité juive. En mars 1793, il se fit baptiser dans l’Église d’Angleterre et, en 1801, il possédait un banc à l’église anglicane St George à Halifax. Il investit aussi £655 dans l’achat d’une grande propriété à la campagne, manoir compris, à Preston, au nord-est de Halifax. Il y « passa ses étés [...] et [y] offrit des réceptions raffinées ». En recevant les officiers de l’armée et de la marine britanniques, Hart et sa femme se firent une réputation de « gens gais et à la mode ». Afin de soigner davantage son image de propriétaire respectable, Hart fit peindre son portrait pendant une visite à Londres en 1795. De plus, usant de l’« influence [que lui conférait] le grand livre » par rapport à ses débiteurs des villages éloignés, Hart parvint à entrer à l’Assemblée provinciale. Député du canton de Liverpool entre 1793 et 1799, il s’unit, comme on pouvait le prévoir, avec d’autres marchands de Halifax contre les intérêts ruraux et prétendument démocratiques que défendait William Cottnam Tonge*. Une fois, Hart rompit avec les marchands pour appuyer une augmentation des taxes à l’importation. Il est probable qu’il agit ainsi uniquement parce que le lieutenant gouverneur Wentworth la préconisait fortement. Or, malgré tous ces efforts, Hart n’arriva à être accepté par l’élite de la société de Halifax qu’à titre précaire. Faits révélateurs, on ne le nomma pas magistrat et on ne l’élit pas non plus au conseil d’administration de la Halifax Commercial Society.

En 1797, Samuel Hart déclara dans un codicille à son testament que « la bénédiction de Dieu » semblait l’accompagner dans les affaires. Cet optimisme s’évanouit entre 1803 et 1805. L’affaissement que connut le commerce de Halifax priva Hart de revenus, juste au moment où son ambition sociale commandait un gros train de vie. Il hypothéqua ses biens et se mit à poursuivre ses débiteurs avec acharnement, les contraignant à le rembourser immédiatement. Hart aurait pu survivre à cette crise car dès 1807 le commerce de Halifax commençait à renaître. Or, la pression des événements s’avéra malheureusement trop forte pour la raison de Hart. En 1809, on le déclara aliéné aux yeux de la loi. Il mourait un an plus tard, figure pathétique qui passa les derniers jours de sa vie enchaîné au parquet d’une pièce de son manoir à Preston. Sa femme Rebecca et leurs trois enfants survivants, deux filles et un garçon, n’héritèrent de presque rien. Les dettes engloutirent les biens de la succession et, en définitive, les créditeurs de Hart durent se contenter de 4 shillings 10 pence par livre. Le destin tragique de Samuel Hart souligne les obstacles auxquels firent face les Juifs qui aspiraient à être acceptés par la société de la jeune Amérique britannique.

David A. Sutherland

Église épiscopale du Canada, Diocese of Nova Scotia Arch. (Halifax), St George’s Anglican Church, Halifax, pew rentals, 17 juill. 1801 (mfm aux PANS).— Halifax County Court of Probate (Halifax), H45 (inventaire des biens de Samuel Hart) (mfm aux PANS).— Halifax County Registry of Deeds (Halifax), Deeds, 24 : ff.10–14 ; 32 : ff.443–445, 484 ; 34 : ff.405–407 ; 38 : ff.185–186 ; 39 : ff.270–273 (mfm aux PANS).— PANS, MG 3, 150, William Forsyth & Co. à George Andrew et à David Colter, 12 nov. 1796.— PRO, AO 13, bundles 80 ; 96, part. ii.— Royal Bank of Canada (Liverpool, N.-É.), Simeon Perkins, diary, 1804 ; corr., Perkins à Messrs. Cochran, 9 févr. 1793 (transcriptions aux PANS).— St Paul’s Anglican Church (Halifax), Reg. of baptisms, 17 mars 1793 (mfm aux PANS).— N.-É., House of Assembly, Journal and proc., 1793–1799.— Perkins, Diary, 1790–96 (Fergusson).

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David A. Sutherland, « HART, SAMUEL », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/hart_samuel_5F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1983
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