LAMB, HENRY, fermier et homme d’affaires, né probablement en Pennsylvanie ; il se maria et eut quatre fils et une fille ; décédé le 22 janvier 1841 dans le canton de Beverly, Haut-Canada.
D’ascendance écossaise, Henry Lamb était considéré comme un loyaliste par l’historien Robert Kirkland Kernighan, mais on ignore quelle part il prit à la Révolution américaine, s’il en prit une. Selon Richard Beasley, juge de paix du canton de Barton, il arriva dans le Haut-Canada en 1799 et se fixa à l’extrémité ouest du lac Ontario. En juin 1803, il demanda une concession foncière, mais on la lui refusa l’année suivante à cause d’un séjour aux États-Unis pendant l’hiver. À son retour, Lamb vécut dans les cantons de Beverly et de Flamborough ainsi que dans la région de la rivière Grand. Apparemment, il acheta des terres, les défricha et les mit en valeur, puis les revendit à des colons assez à l’aise pour payer comptant. Il amassa ainsi du capital et s’établit en permanence dans le canton de Beverly, au plus tard en 1821.
La terre de Lamb jouxtait un grand marécage, le Beverley Swamp, situé le long du chemin qui menait de Shade’s Mills (Cambridge) à Dundas. Ce marécage était tout à fait sinistre : il y avait là des Indiens hostiles, des loups et des sables mouvants. Lamb, malgré tout, ouvrit une taverne tout près. Son succès fut considérable. En 1821–1822, il se construisit une grande maison à charpente de bois de deux étages, de 20 pieds sur 40, et l’entoura d’une palissade à l’intérieur de laquelle il gardait des vaches et des cochons. Dès 1825, il avait construit une scierie et était le plus riche propriétaire foncier du canton, ce qu’il demeura jusqu’à sa mort.
Lamb avait le tempérament d’un promoteur. En 1829, il écrivit au commissaire des Terres de la couronne, Peter Robinson, pour proposer d’ouvrir un chemin qui relierait Guelph à la route qu’on voulait construire dans les cantons de Waterloo et de Beverly, ce qui réduirait de 11 milles la distance entre Shade’s Mills et Guelph. Il n’obtint pas le contrat (on avait déjà ouvert un chemin, expliqua Robinson), mais il continua d’écrire au gouvernement. Il souligna alors avoir encouragé des colons plus distingués à s’établir dans le canton de Beverly et demanda qu’on l’informe des réserves de la couronne et du clergé qui pouvaient devenir disponibles.
Au début des années 1830, Lamb lança son projet le plus grandiose, une cité modèle du nom de Romulus. Le centre en serait sa terre du rang 6 dans le canton de Beverly, à l’ouest de l’emplacement actuel du village de Rockton. Romulus aurait deux cathédrales, l’une anglicane et l’autre catholique. On offrirait gracieusement des terres et des matériaux de construction aux membres de toute autre confession. Il y aurait aussi un marché, un terrain de cricket, une piste de courses, et même un théâtre, une salle de concert et une salle de bal. Par le truchement des journaux anglais, Lamb invita ouvriers et artisans à venir ; il promettait le logement gratuit, le bois de chauffage et l’exonération d’impôt municipal pendant 25 ans. Une carte qui montrait sa ville au cœur du monde civilisé faisait partie de sa campagne de promotion. Toutefois, Romulus fut un échec total. Seuls deux colons se présentèrent, en 1834 : l’un pour ouvrir un magasin, l’autre pour cultiver la terre. Jamais on ne construisit aucun des édifices publics projetés. Néanmoins, pour les résidents du voisinage, Lamb était « le maire Lamb », une autorité dans la région. Sa scierie et sa taverne continuèrent de prospérer, semble-t-il ; en 1837, il édifia un moulin à farine. Un an plus tard (il possédait alors 1 250 acres dans le canton), il exhibait la seule « voiture de plaisance » du lieu.
Henry Lamb était quelque peu mystérieux pour ses contemporains. Sa femme prétendait descendre de l’aristocratie française. On racontait qu’il aurait eu dans sa taverne une chambre secrète où des étrangers à l’allure distinguée se réunissaient pour des cérémonies maçonniques. Aujourd’hui, on le tient pour un Haut-Canadien enthousiaste qui considérait le canton de Beverly comme une terre d’avenir et tenta de fonder une ville dans le Nouveau Monde. Il fut malgré tout un pragmatiste. Sa seule remarque connue sur l’existence, prononcée après qu’il eut repoussé une attaque indienne, est entrée dans le folklore du canton de Beverly : « Mieux vaut perdre la vie que perdre son cochon. »
AO, RG 1, A-I-6 : 7662–7665 ; C-IV, Beverly Township, concession 5, lot 12 ; RG 21, Wentworth County, Beverly Township, assessment rolls, 1821–1834, 1837–1839 ; RG 22, sér. 204, reg. F (1840–1843) : 149–152.— APC, RG 1, L1, 26 : 32 ; L3, 286 : L9/1.— Wentworth Land Registry Office (Hamilton, Ontario), Abstract index to deeds, Beverly Township (mfm aux AO).— « Index to The pioneers of Beverly by John A. Cornell », Faye West, compil. (copie dactylographiée, Edmonton, 1980 ; photocopie aux AO).— J. A. Cornell, The pioneers of Beverly ; series of sketches [...] (Dundas, Ontario, 1889 ; réimpr., [Galt (Cambridge), Ontario, 1967]).— Johnston, Head of the Lake (1958).— The Khan [R. K. Kemighan], « A city that was not built » et « Legends of Romulus », Pen and pencil sketches of Wentworth landmarks [...] (Hamilton, 1897), 118–120, 121–123.— M. F. Campbell, « Romulus recalled : wolves integral part of Beverly’s history », Hamilton Spectator, 7 déc. 1954 : 25.— « Mouldering ruins only vestige of Beverly dream city [...] », Hamilton Spectator, 15 juill. 1946.— Passerby, « Here and there in Wentworth », Hamilton Spectator, 28 août 1933 : 18.
Philip Creighton, « LAMB, HENRY », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/lamb_henry_7F.html.
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Auteur de l'article: | Philip Creighton |
Titre de l'article: | LAMB, HENRY |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1988 |
Année de la révision: | 1988 |
Date de consultation: | 1 déc. 2024 |