LEE, GEORGE HERBERT, avocat et auteur, né le 8 avril 1854 à Portland (Saint-Jean, Nouveau-Brunswick), fils du révérend Charles Lee et de Sarah Elizabeth Smith ; le 8 septembre 1885, il épousa dans cette ville Frances Elizabeth DeVeber, et ils eurent deux enfants ; décédé le 25 août 1905 à Boston.
George Herbert Lee passa la plupart de ses jeunes années à Fredericton, où son père devint rector vers 1860. Il étudia au collège et à la University of New Brunswick, où il reçut une licence ès arts en 1872. L’année suivante, son père se noya et lui-même commença son stage de droit chez son oncle George Sidney Smith, avocat de Saint-Jean. Reçu attorney en 1876 et admis au barreau en 1877, il fit ensuite beaucoup de petits travaux pour Smith jusqu’en 1880, mais les deux hommes ne furent jamais associés.
Jeune avocat, fils de rector, apparenté aux Odell, aux Chipman et aux Hazen, Lee faisait bonne figure dans le monde. Il ne buvait ni ne fumait. Il était secrétaire du conseil paroissial de l’église St Paul (Valley) et trésorier du Wiggins Orphan Asylum. En 1880, il avait fait paraître à Saint-Jean un ouvrage sans prétention mais utile, composé surtout à partir des rapports publiés par la Society for the Propagation of the Gospel in Foreign Parts : Historical sketch of the first fifty years of the Church of England in the province of New Brunswick. Naturellement, donc, on le tenait pour « un homme très doué ».
Cependant, Lee ne faisait pas fortune, et sa situation financière se compliqua singulièrement après son mariage en 1885, car il devait entretenir « une très bonne maison et [...] trois domestiques ». Sa pratique d’avocat n’était pas lucrative. Il plaidait rarement au tribunal et n’était le solicitor d’aucune entreprise ou banque. Il disait se spécialiser dans la « perception » et jouait également le rôle de prêteur et de courtier hypothécaire.
Pris à la gorge, Lee commença en 1889 à spéculer sur les livraisons à terme de céréales et de porc à la Bourse de Chicago. Chaque jour, il attendait nerveusement l’arrivée du Boston Herald pour en dépouiller les pages financières et télégraphier ses instructions à son courtier à Boston. Désavantagé par son éloignement du marché, il se rendait encore plus vulnérable en vendant à découvert. En deux ans seulement, près de 10 000 $ s’ajoutèrent à ses dettes déjà lourdes.
Pour combler ses pertes, Lee se mit à détourner des titres de placement qu’il détenait en tant qu’administrateur de plusieurs successions. La plus riche d’entre elles comportait le legs que l’ancien juge en chef Ward Chipman* avait laissé à Ward Chipman Drury (tous deux étaient cousins de la grand-mère maternelle de Lee). En fait, Lee volait sa propre famille ; en plus, dans l’affaire Drury, il abusait de la confiance d’un autre administrateur de la succession, le juge en chef sir John Campbell Allen* (dont la femme était cousine de la grand-mère de Lee). Cependant, quand Lee abandonna sa famille et s’enfuit à Boston, en août 1892, on découvrit qu’il avait fraudé aussi bien des pauvres que des riches : des veuves, l’orphelinat, des ministres du culte à la retraite, des tailleurs de pierres tombales, de vieux domestiques de la famille et la Natural History Society of New Brunswick. Curieusement, toutefois, ses principales victimes (les membres de sa famille) firent obstacle à son extradition. Il resta donc à Boston, et vendit des livres de droit pendant un certain temps ; à sa mort, il était courtier d’assurances.
L’affaire Lee fut qualifiée de « pire cas de détournement de fonds jamais survenu dans la province ». On ne peut cependant pas déterminer si le total en question était de 30 000 $, comme le prétendait Lee, ou de 100 000 $, comme le disait la presse. Vivant dans une société qui avait encore de la déférence pour les bonnes relations, le fraudeur George Herbert Lee bénéficiait d’un grand avantage : sa « respectabilité ». Lorsque ses contemporains se demandaient comment un tel homme avait pu s’égarer à ce point (et c’était une question obsédante pour eux), ils mentionnaient le désespoir engendré par le surpeuplement d’« une profession pratiquée par près de quatre cents hommes alors qu’il n’y a[vait] de la place que pour cent ». « Le cas de Lee n’est pas unique », prévint le Progress de Saint-Jean. En outre, comme les avocats faisaient couramment du courtage financier et comme, dans la profession juridique, la notion d’« éthique » ne se distinguait pas encore de la notion d’« étiquette », voir un homme de loi s’occuper des biens de ses clients comme s’ils avaient été les siens n’était pas encore perçu comme un cas flagrant de manquement aux devoirs professionnels, contrairement à ce que ce serait 30 ans plus tard. Fort à propos toutefois, seulement trois jours après que la Barristers’ Society eut entrepris une procédure de radiation contre Lee, la Saint John Law School (aujourd’hui la faculté de droit de la University of New Brunswick) ouvrait ses portes. Au fil du temps, cette école allait révolutionner la profession juridique au Nouveau-Brunswick en resserrant les normes de qualité et en instaurant le contingentement.
APNB, MC 288, MS1/B2, MS7/H ; RS32, C, 13.— Daily Telegraph (Saint-Jean, N.-B.), 7 juill. 1873, 23–25 août 1892.— New Brunswick Courier (Saint-Jean), 9 juill. 1853.— Progress (Saint-Jean), 27 août, 10 sept. 1892.— Saint John Globe, 14 févr. 1884, 26 août 1905.— St. John Daily Sun (Saint-Jean), 29 août 1892.— In the Supreme Court, in Equity, between Sir John C. Allen [...], plaintiff ; and James Coll and Michael Coll and G. Herbert Lee [...], defendants [...] (s.l., [1895]), exemplaire conservé au Musée du N.-B., J. D. Hazen coll., boîte 4a, dossier 2.— University Monthly (Fredericton), 10 (1890–1891) : 56.
D. G. Bell, « LEE, GEORGE HERBERT », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 6 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/lee_george_herbert_13F.html.
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Auteur de l'article: | D. G. Bell |
Titre de l'article: | LEE, GEORGE HERBERT |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1994 |
Année de la révision: | 1994 |
Date de consultation: | 6 déc. 2024 |