Titre original :  Frances Lovering - Catholic Women's League in Hamilton Diocese

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MAHONY, FRANCES (Jeffers ; Lovering), agente de changements sociaux, née vers 1863 ou le 1er novembre 1868 à New York, fille de Daniel Mahony et de Frances Higgins ; le 22 novembre 1886, elle épousa à Toronto Charles Jeffers, puis le 21 octobre 1896, dans la même ville, William Henry Lovering ; elle n’eut pas d’enfants ; décédée le 26 mars 1926 à Hamilton, Ontario.

Immigrante irlandaise arrivée aux États-Unis en 1837, Frances Higgins épousa Daniel Mahony, avec qui elle eut quatre enfants. Leur fille unique, Frances (Fannie), naquit peu avant la mort de Daniel. En 1874, la fillette et sa mère vivaient à Toronto chez un oncle, Patrick Higgins, cordonnier de son état. La jeune Frances fréquenta une école catholique pour filles qui offrait un programme à la fois en anglais et en français, la Loretto Abbey. À la fin de ses études, en 1884, elle reçut une médaille d’or. Deux ans plus tard, elle épousa un employé de bureau, Charles Jeffers, qui succomba à une pneumonie en 1889. Au sortir d’un collège commercial de Toronto, elle travailla pour une pépinière, la Brown Brothers Company, où elle accéda finalement au poste de chef de bureau. En 1896, elle épousa l’avocat William Henry Lovering et s’installa avec lui à Hamilton. Membre active des églises paroissiales St Joseph et St Mary, elle cultivait des intérêts liés à sa formation scolaire : elle appartenait à l’Alliance française de Hamilton et jouait du piano au Duet Club.

L’engagement public de Frances Lovering commença à cause de la Première Guerre mondiale. Dès lors, elle se consacrerait surtout à des œuvres patriotiques, sociales et catholiques. À l’aise en anglais et en français, elle dirigea en 1915 un comité local de Canadiens français et de membres de l’Alliance française qui forma une section du Secours national à Hamilton. Présidente de cette section jusqu’en 1923, elle anima de vastes campagnes en vue d’« aider les nécessiteux de France ». Les Hamiltoniens pouvaient verser des souscriptions pour adopter de jeunes Français à titre de « filleuls » ou envoyer de l’aide à Mont-Saint-Éloi, la ville de France adoptée par Hamilton. Dans le cadre des levées de fonds, le « spectacle » présenté à Niagara Falls en 1916, où parut Sarah Bernhardt, généra en une soirée des recettes nettes de 300 $. À la fin de 1919, le Secours national de Hamilton aurait expédié en France un total de 42 839 $, plus 10 camions et 3 097 caisses de nourriture, de vêtements et de fournitures d’hôpital.

Pendant les hostilités, Frances Lovering travailla pour le Fonds patriotique canadien avec son mari et, par l’intermédiaire de la St Mary’s Benevolent Society, elle mobilisa les paroissiennes pour envoyer de l’aide aux soldats canadiens outre-mer. En 1917, peut-être parce qu’on percevait la nécessité de créer un organisme catholique pour les femmes désireuses de contribuer non seulement à des œuvres patriotiques, mais aussi à des œuvres religieuses, elle participa à la fondation de la Catholic Women’s Guild of Hamilton. Trois ans plus tard, une association nationale, la Ligue des femmes catholiques du Canada, vit le jour ; Bellelle Guerin en était présidente et Frances Lovering, trésorière honoraire. Vice-présidente affectée à l’assistance sociale en 1922, cette dernière fut élue présidente aux congrès de la ligue à Halifax en 1923 et à Edmonton en 1924. Lorsqu’elle se retira de la ligue, l’année suivante, le nombre de membres s’élevait à 40 000.

Pour Frances Lovering, la Ligue des femmes catholiques était un moyen de se prononcer publiquement, de manière concertée, sur les questions qui touchaient toutes les femmes, en particulier les catholiques. Ces dernières, prévoyait-elle, useraient de leur tout nouveau droit de vote pour encourager l’adoption de lois favorables à la société en général et décourager l’adoption de lois contraires à leur religion. Par exemple, elle accueillit avec enthousiasme les mesures prises par l’Ontario pour modifier la loi sur les écoles séparées de manière à permettre que des élèves reçoivent un traitement chirurgical aux frais de l’État (les inspecteurs de la santé des écoles publiques étaient déjà habilités à agir dans les cas d’amygdalite et d’autres affections). Par contre, lorsque le gouvernement fédéral proposa d’assouplir la loi sur le divorce, elle recommanda aux membres de la ligue d’user du pouvoir de l’opinion publique pour retarder encore ce projet. En 1921, au premier congrès annuel de la ligue, elle loua plusieurs initiatives du gouvernement d’Ernest Charles Drury*, en Ontario, notamment la loi sur les allocations aux mères, l’établissement de la Commission du salaire minimum et la nouvelle réglementation sur la censure cinématographique. En matière de bien-être social, la ligue s’occupait aussi du soin et de la formation des « déficients mentaux », de la condition des détenues enceintes et des maladies vénériennes. À l’échelle locale, les membres visitaient les hôpitaux, les refuges et les foyers pour vieillards en y apportant de la nourriture, des magazines et des objets de piété. Chaque année, au mois d’octobre, elles sollicitaient les familles catholiques au nom de l’Orphanage Guild de Hamilton.

Frances Lovering prônait une reviviscence du catholicisme, tout comme la Catholic Truth Society, dont elle fut vice-présidente de 1923 à 1925. Au cours d’un congrès de la Ligue des femmes catholiques à Montréal en 1924, elle invita les femmes de foi catholique à « ramener les hommes à la discipline et à la maîtrise de soi et à réconcilier les femmes avec le foyer et ses devoirs ». D’après elle, la société semblait « insatisfaite de la vie et affolée par l’amour immodéré du plaisir ». Son discours d’adieu au congrès annuel de la ligue à Hamilton, le 11 juin 1925, s’inspirait de la Bible. Les femmes, fit-elle valoir, n’avaient aucune place dans la société avant que cette parole, dite à un disciple par le Christ, ne les émancipe : « Voici ta mère ». Le christianisme avait donc libéré les femmes en faisant d’elles les « partenaires » de leur mari, et non plus leurs « jouets et [leurs] esclaves ». Le mariage était le fondement de la société et les femmes de religion catholique devaient résister à l’extension du divorce, à la régulation des naissances, au désir d’occuper des fonctions politiques et aux théories de l’« ultraféminisme » qui « rend[raient] la femme asexuée en la dépouillant de tous les charmes naturels de la féminité ».

Au cours des années 1920, dans le cadre des activités liées à la ligue, Frances Lovering fut vice-présidente du National Travellers’ Aid Committee for Ontario, qui s’occupait – non sans leur faire la leçon – des femmes catholiques en transit ou loin de leur foyer. En outre, elle fut l’une des administratrices du Central Bureau of Social Agencies, appartint au Conseil canadien pour la sauvegarde de l’enfance avec Charlotte Elizabeth Hazeltyne Whitton* et d’autres pionnières dans ce domaine, et œuvra au Social Hygiene Council for Canada et à la Big Sisters Association of Canada.

Frances Lovering tomba malade et mourut au début de 1926, en revenant d’un congrès de Big Brothers et de Big Sisters auquel elle avait assisté avec son mari à Chicago. On l’inhuma au cimetière Holy Sepulchre de Burlington, en Ontario. Elle avait reçu plusieurs distinctions : du gouvernement français, pour son travail au Secours national, la médaille d’Honneur en 1917 et la médaille de la Reconnaissance française en 1921 ; pour son action religieuse, du Saint-Siège, la croix Pro Ecclesia et Pontifice en 1925 et la médaille Benemerenti en 1926. Peu après sa mort, la France lui décerna le titre de chevalier de la Légion d’honneur ; elle était la seule femme au Canada à avoir reçu cette récompense.

Les interventions de Frances Mahony Lovering et d’autres militantes d’organismes telle la Ligue des femmes catholiques du Canada, dans les premières années du xxe siècle, témoignent de l’existence d’une vague de nationalisme et de l’affirmation des féministes et des adeptes du suffrage féminin. Plus précisément, ces femmes s’attachèrent à redéfinir et à réaffirmer la place du catholicisme dans une société de plus en plus laïcisée.

Molly Pulver Ungar et Vicky Bach

AN, RG 31, C1, 1901, Hamilton, Ward 1, div. 2 : 5.— AO, RG 80-5-0-156, no 13781 ; RG 80-5-0-241, no 15755 ; RG 80-8-0-136, no 16301.— Hamilton Public Library, Special Coll. Dept. (Hamilton, Ontario), Clipping files, Hamilton biog. ; Hamilton – organizations and societies – Secours national ; Scrapbooks, Herald, W2.— Institute of the Blessed Virgin Mary North America Arch., Loretto Abbey (Toronto), « Memorandum re : Frances Mahony Lovering » ; Student reg.— TRL, SC, Biog. scrapbooks, 16.— Hamilton Spectator, 24 mai 1915, 8 nov. 1916, 20, 27 oct. 1917, 20 nov. 1918, 2, 4 juill. 1921, 27 mars 1926.— News (Toronto), 24 nov. 1886.— World (Toronto), 3 mai 1889.— Annuaires, Hamilton, 1900–1901 ; Toronto, 1866–1895.— Canadian League (Toronto), 4 (août 1924) ; 5 (juill. 1925).— Cathedral Magazine (Hamilton), mars 1917, oct. 1919, juill., sept. 1920, nov. 1921, janv. 1922, déc. 1925, févr., mai 1926 (exemplaires aux Cathedral of Christ the King Arch., Hamilton).— DHB, 3.— Hamilton Local Council of Women, Fifty years of activity, 1893–1943 ; commemorating the golden anniversary of Hamilton Local Council of Women ([Hamilton, 1944]).— J. E. Middleton et Fred Landon, The province of Ontario : a history, 1615–1927 (5 vol., Toronto, 1927–[1928]), 4 : 347s.

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Molly Pulver Ungar et Vicky Bach, « MAHONY, FRANCES (Jeffers ; Lovering) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 6 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/mahony_frances_15F.html.

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Auteur de l'article:    Molly Pulver Ungar et Vicky Bach
Titre de l'article:    MAHONY, FRANCES (Jeffers ; Lovering)
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2005
Année de la révision:    2005
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