MALIE, JOSEPH (il signait aussi Malli ou Mally et était parfois appelé Tkobeitch), chef micmac ; circa 1841–1846.

Selon la tradition véhiculée dans sa bande, Joseph Malie était arrivé à la réserve indienne de Restigouche en provenance de la Nouvelle-Écosse. Son surnom, Tkobeitch, venait du mot micmac tgôpetj, qui signifie jumeau, et Malie, du nom de sa sœur jumelle Marie, qu’on avait ajouté à son prénom pour plus de précision. Ses descendants s’appellent Malley ou Molley.

Malie était le membre le plus important de la « délégation de trois chefs » qui se rendit à Londres au début de 1842 en vue d’obtenir de l’assistance pour les Micmacs de Restigouche. Les deux autres étaient Pierre Basquet* et François Labauve. La délégation avait deux grands griefs à faire valoir : l’habitude des Blancs d’attraper au filet tous les saumons qui pénétraient dans la Restigouche, ce qui empêchait le frai, et un litige vieux de 50 ans concernant les limites des terres micmaques. Un levé erroné, fait par William Vondenvelden* en 1787 (un comité du Conseil exécutif laissa entendre plus tard que l’erreur avait été voulue), avait donné une partie de ces terres à des Blancs. En 1824, par suite d’une protestation présentée par le chef Francis Condo, le gouvernement du Bas-Canada avait retiré à ces Blancs une portion des terres, mais les Micmacs voulaient une restitution totale. Ils adressèrent une requête à lord Durham [Lambton] en 1838, après quoi la question fut confiée pour examen à un comité du Conseil exécutif, puis à John Wilkie, greffier de la paix à New Carlisle, dans le Bas-Canada. En juin 1840, Wilkie rapporta qu’une partie des terres faisait l’objet d’un litige entre deux Blancs et émit l’avis que, si le gouvernement voulait acheter une superficie aux colons pour la rendre aux Indiens, il devait attendre le règlement de ce litige. À bout de patience, les Micmacs exposèrent leurs problèmes à un officier britannique compréhensif affecté au Nouveau-Brunswick, le capitaine Henry Dunn O’Halloran, qui visita la réserve en 1841. Ce dernier les encouragea à porter directement leur cas à l’attention de Londres et remit à Malie une lettre d’introduction pour le secrétaire d’État aux Colonies, lord Stanley.

Partie de Dalhousie, au Nouveau-Brunswick, en novembre 1841, la délégation indienne eut une entrevue avec Stanley au ministère des Colonies en janvier. Malie jouait le rôle de porte-parole. Il déclara à Stanley qu’il fallait adopter de nouvelles lois pour préserver la pêche au saumon, et recueillir des fonds pour achever la construction d’une église. Les membres de la délégation avaient apporté un présent pour la reine Victoria, qui l’accepta « avec satisfaction » (mais non en personne), exprima « un chaleureux intérêt » pour leur situation et ordonna qu’on remette des médailles à chacun d’eux. Au cours d’une série d’entrevues tenues à l’extérieur du ministère des Colonies, Malie fit connaître l’histoire des terres qu’on avait volées à son peuple. Les Micmacs avaient déjà eu un titre de propriété, mais le prêtre l’avait égaré ; puis les Blancs occupèrent les terres, ce qui lui faisait dire : « les Blancs semblent avoir une conception du bien et du mal que les Indiens ne peuvent pas comprendre ». Il précisa quels présents il voulait, soit une vaste gamme d’objets allant des couvertures aux charrues en fer, et demanda finalement pour lui-même une bande de terre en franche tenure.

Stanley maintenait que tous ces griefs ressortissaient aux autorités coloniales. Il organisa le retour rapide des Indiens à bord du Warspite, qui mit les voiles pour New York en février. Là, le consul de Grande-Bretagne assura leur transport jusqu’à Saint-Jean, où ils arrivèrent le 22 avril 1842. Stanley alla cependant jusqu’à exposer les plaintes des Indiens au gouverneur général sir Charles Bagot et à ordonner des enquêtes sur les lois de pêche et les droits fonciers. Entre-temps, les Micmacs s’empressèrent d’adresser à l’Assemblée de la province du Canada une pétition contre les méthodes de pêche des Blancs ; le nom de Malie venait en tête de la liste des signataires.

De toute évidence, Joseph Malie avait une forte personnalité. En 1846, il était encore actif à Restigouche ; le missionnaire local l’appelait son « bras droit ». Des générations plus tard, on disait dans la réserve : « Il n’y a plus eu de chef depuis Joseph Malli. »

L. F. S. Upton

APC, RG 10, CII, 469–470.— Canada, prov. du, Assemblée législative, App. des journaux, 1847, 1 : app. T, no 96.— Source materials relating to N.B. Indian (Hamilton et Spray), 110–113.— New-Brunswick Courier, 23 avril 1842.— Upton, Micmacs and colonists.— Père Pacifique [de Valigny] [H.-J.-L. Buisson], « Ristigouche, métropole des Micmacs, théâtre du « dernier effort de la France au Canada », Soc. de géographie de Québec, Bull. (Québec), 20 (1926) : 171–185.

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L. F. S. Upton, « MALIE (Malli, Mally), JOSEPH (Tkobeitch) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 6 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/malie_joseph_7F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1988
Année de la révision:    1988
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