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MICHEL, sir JOHN, militaire, né le 1er septembre 1804 dans le Dorsetshire, Angleterre, fils du lieutenant général John Michel et de sa seconde épouse, Anne Fane, décédé le 23 mai 1886 au manoir familial, Dewlish House, à Dorchester, Dorsetshire.
John Michel fit ses études à Eton, Angleterre, et, en 1823, il entra dans l’armée en qualité d’enseigne. À ses débuts, il servit surtout dans le 64e d’infanterie. Il est clair que sa carrière bénéficia des relations et de la richesse familiales, mais le fait qu’il fréquenta, en 1832–1833, la section la plus avancée (devenue par la suite l’école supérieure de guerre) du Royal Military College de Sandhurst laisse croire qu’il portait un intérêt véritable à sa profession. De 1835 à 1840, il fut aide de camp de son oncle, le général sir Henry Fane, commandant en chef en Inde. Le 15 mai 1838, Michel épousa Louise Anne, une des filles du colonel Chatam Horace Churchill, quartier-maître général en Inde ; ils allaient avoir au moins deux fils et trois filles. En 1840, il acheta le grade de major et, deux ans plus tard, celui de lieutenant-colonel dans le 6e d’infanterie. Ce régiment fut envoyé en Afrique du Sud en août 1846 et Michel l’y commanda pendant les guerres des Cafres de 1846–1847 et de 1851–1853, prenant, à l’occasion, la tête de colonnes indépendantes. Pendant cette première expérience de service actif, il se révéla un chef énergique. James McKay, sergent dans le 74e d’infanterie, qui le vit à l’œuvre (il l’appelait Mitchell), le décrivit comme « le type achevé d’un habile commandant de campagne » et « un père et un ami » pour ses hommes. Après avoir servi quelque temps dans son pays avec le grade honoraire de colonel, Michel prit part, au grade temporaire de major général, à la guerre de Crimée à titre de chef d’état-major du contingent turc pour lequel le gouvernement britannique versait les soldes.
Après une courte période de service à la colonie du Cap (maintenant partie de la République d’Afrique du Sud), Michel reçut en 1857 l’ordre de se rendre en Chine ; son bateau ayant fait naufrage en cours de route, il fut par la suite détourné vers l’Inde, où la révolte des cipayes avait éclaté. Dans les derniers temps de la révolte, en 1858–1859, Michel, jouissant alors du grade effectif de major général, mena avec succès la poursuite du chef rebelle Tantia Topi, défaisant ses troupes dans une série d’engagements et le réduisant à l’état de fugitif ; ce dernier fut rapidement capturé et pendu. À la fin de 1859, Michel fut envoyé commander une division qui participait à la guerre contre la Chine. Sa division prit part aux combats victorieux d’août 1860 et, en octobre, il revint à cette dernière d’incendier le palais d’Été de Pékin, en représailles de la torture et du meurtre de prisonniers britanniques. Créé chevalier commandeur de l’ordre du Bain pour son action pendant la révolte, Michel fut alors promu grand-croix du même ordre.
En juin 1865, Michel succéda au major sir William Fenwick Williams à la tête des forces britanniques en Amérique du Nord britannique (son titre officiel était lieutenant général à l’état-major). Il demeura à ce poste jusqu’en octobre 1867 et dut ainsi faire face à la première et la plus difficile période des troubles féniens. Chaque fois que la menace fénienne incitait le gouvernement de la province du Canada à mobiliser des unités de la force volontaire, un arrêté ministériel les plaçait sous les ordres de Michel qui exerça son commandement tant sur les réguliers que sur les volontaires. Neuf compagnies formées de ces derniers furent ainsi appelées pour servir à la frontière en novembre 1865 ; à la même époque, Michel renforça la garnison régulière de London, Haut-Canada, et prit des mesures pour améliorer le réseau télégraphique dans l’est de cette province. En mars 1866, 10 000 volontaires furent appelés sous les drapeaux (en fait, 14 000 se présentèrent), et, lors de la crise causée par les raids de juin 1866 [V. Alfred Booker*], on mobilisa toutes les forces volontaires du Canada, soit quelque 20 000 hommes, qui furent mis sous l’autorité de Michel. Celui-ci avait réclamé et obtenu, en mars 1866, deux autres bataillons réguliers du Royaume-Uni et, en août, la panique provoquée dans le Haut-Canada par les menaces répétées des Féniens amena Michel, de concert avec le gouverneur général, le vicomte Monck*, à solliciter des renforts encore plus grands du gouvernement britannique. On en envoya en nombre à peine plus petit que ce qui avait été demandé et, au printemps de 1867, plus de 15 000 réguliers se trouvaient sous le commandement de Michel. Monck en vint bientôt à penser que les forces pouvaient être réduites quelque peu, mais Michel s’y opposa catégoriquement.
Pendant deux longues périodes, du 30 septembre 1865 au 12 février 1866 et du 10 décembre 1866 au 25 juin 1867, Michel, en l’absence de Monck, administra les affaires courantes du gouvernement, sans toutefois quitter son quartier général de Montréal. Dans un billet adressé à John Alexander Macdonald* en février 1866 mentionnant qu’il s’attendait à des raids et aurait aimé voir d’autres compagnies de volontaires appelées pour le service, il précisa malicieusement : « Tandis que j’écris ce mot, je consulte mon ministre de la Guerre, lui faisant connaître les vues du commandant des forces qu’en tant qu’administrateur je crois désirables de mettre en application. » D’une façon générale, Michel chercha à obtenir des coloniaux qu’ils assument une plus grande partie du fardeau de la défense, alors que les ministres canadiens, qui ne voulaient pas engager de dépenses, préféraient s’en tenir aux réguliers. Au début de 1867, Alexander Campbell*, ministre intérimaire de la Milice, écrivit à Macdonald en Angleterre, lui racontant comment Michel, sur la base de renseignements qu’on lui avait transmis, avait envoyé « de son propre chef, bien entendu », le colonel Gamet Joseph Wolseley* négocier avec le général George Gordon Meade de l’armée américaine, et qu’il lui avait aussi demandé d’appeler « les volontaires ». Campbell avait poliment refusé. Il écrivit en conclusion : « Nos volontaires sont encore au lit avec leurs épouses, à leur grand bien-être à [tous], et au grand bienfait à venir du pays. »
L’insuffisance et la précarité des voies de communication militaires du pays préoccupaient Michel. En août et septembre 1865, peu après son arrivée au Canada, il avait fait, en compagnie de l’amiral sir James Hope, commandant de la station américaine de la marine royale, un voyage de reconnaissance en canot de la route entre le Saint-Laurent et le lac Huron via la rivière French, le lac Nipissing et les rivières Mattawa et Ottawa. Il conseilla prudemment de ne pas fonder de colonie de la couronne à la Rivière-Rouge ni d’unir les territoires de la Hudson’s Bay Company avec le Canada tant qu’« une voie de communication sûre pour des fins militaires » ne serait pas établie avec l’Upper Fort Garry (Winnipeg). En octobre 1865, il donna à l’ingénieur Casimir Stanislaus Gzowski* une lettre pour le ministre des Colonies expliquant qu’il considérait vitale pour la sécurité du pays la voie navigable empruntant les rivières Outaouais et French, que Gzowski préconisait d’ouvrir. Dans un message d’adieu au peuple canadien, Michel insista sur l’importance de ce projet. Au cours de ses derniers mois au Canada, il exprima l’opinion que le mouvement fénien était devenu « apathique » et il affirma aussi qu’il regardait d’un œil optimiste les perspectives d’une paix anglo-américaine. La préoccupation de Michel pour la santé de sa femme coupa court à ses fonctions de commandant au Canada. Lorsqu’il quitta Montréal pour l’Angleterre le 15 octobre 1867 (Charles Ash Windham* lui succéda), le conseil municipal et les volontaires de Montréal lui adressèrent des allocutions faisant l’éloge chaleureux de son travail de commandant et d’administrateur.
En 1873, Michel eut la responsabilité des premières « manœuvres d’automne » à avoir lieu en Angleterre, activité qui remontait à la guerre franco-prussienne. De 1875 à 1880, il fut commandant en chef en Irlande où sa « sociabilité et sa grosse fortune » l’auraient rendu populaire ; il devint aussi membre du Conseil privé d’Irlande et, par conséquent, porta le titre de « très honorable ». En mars 1885, un peu plus d’un an avant sa mort, il fut fait maréchal.
Le maréchal sir Henry Evelyn Wood, qui fit du service en Inde sous les ordres de Michel, le décrivit comme « un officier intelligent, de belle apparence et bien éduqué, un excellent cavalier et [un homme] actif et d’une grande volonté ». Michel fut en fonction au Canada à une période difficile et critique et semble avoir accompli son travail avec compétence. La lettre de Campbell à Macdonald en 1867 laissait entendre que les ministres canadiens le trouvaient plutôt tatillon, mais Macdonald avait écrit l’année précédente : « Il n’y a pas d’officier plus actif ou zélé que sir John Michel. »
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C. P. Stacey, « MICHEL, sir JOHN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 7 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/michel_john_11F.html.
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Auteur de l'article: | C. P. Stacey |
Titre de l'article: | MICHEL, sir JOHN |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1982 |
Année de la révision: | 1982 |
Date de consultation: | 7 nov. 2024 |