MŌSŌMIN (Moosomin, qui désigne la viorne comestible aussi appelée « pembina »), chef d’une bande de Cris et de Sauteux, né probablement dans ce qui est aujourd’hui la Saskatchewan ; décédé le 24 mars 1902 à la réserve Moosomin (Saskatchewan).

Mōsōmin appartenait à une bande qui hivernait au nord de la rivière Saskatchewan-du-Nord, aux environs des lacs Jackfish et Turtle (Saskatchewan). Comme sa proche voisine, la bande de Gros Ours [Mistahimaskwa*], elle s’appuyait à la fois sur une économie de forêt et une économie de plaine : l’hiver, elle faisait du trappage, de la chasse et de la pêche dans les zones boisées, et l’été, elle chassait le bison dans la grande prairie. Lorsque le traité n° 6 fut négocié au fort Pitt (Fort Pitt), en 1876, le chef de cette bande était Yellow Sky, mais il refusa de signer le document.

En 1879, Mōsōmin et 124 de ses gens, des Cris pour la plupart, demandèrent d’être partie au traité et d’avoir leur propre réserve. En 1881, on arpenta pour eux une terre à 12 milles au nord-ouest de Battleford. La bande fut parmi ceux qui répondirent à l’appel de Faiseur d’Enclos [Pītikwahanapiwīyin*] et qui, pour protester contre le non-respect de certains engagements des traités, refusèrent de semer au printemps de 1881. Par la suite, leurs travaux agricoles engendrèrent un excédent, et ils fabriquaient de la chaux et du charbon de bois pour les vendre. Ces résultats sont particulièrement remarquables, car on a estimé qu’au début des années 1880, sur les 70 résidents de la réserve, il n’y avait que 12 hommes valides.

En juin 1884, dans les réserves de Faiseur d’Enclos et de Petit Pin [Minahikosis*], Mōsōmin et son peuple participèrent avec près de 2 000 personnes à une danse de la Soif et à un grand conseil où l’on discuta de griefs communs. Néanmoins, les autorités gouvernementales ne craignaient pas que la bande de Mōsōmin prenne part à une protestation armée. En février 1885, le commissaire des Affaires indiennes Edgar Dewdney* se fit dire que « la majorité de ces hommes [étaient] parmi les Indiens les plus pacifiques et les plus dignes de confiance du district ». Pendant la résistance de 1885 [V. Louis Riel*], Mōsōmin et sa bande quittèrent leur réserve parce qu’ils manquaient de vivres et qu’ils voulaient aussi se tenir à l’écart du conflit. Ils coururent de grands dangers en traversant la Saskatchewan-du-Nord avec tout leur équipement et leurs bêtes avant que la glace ne soit totalement disparue. Plus tard, un instructeur agricole d’une réserve voisine expliqua que, contrairement aux Cris des Plaines, les habitants de la réserve Moosomin, principalement originaires des bois, n’avaient aucune expérience du combat et préféraient éviter l’engagement.

Ils n’échappèrent cependant pas à l’affrontement. Des porte-parole du gouvernement déclarèrent par la suite que, poussés par la faim, Mōsōmin et sa bande s’approchèrent de Battleford, puis, « jugeant que les colons furieux ne feraient pas de distinction entre les Indiens loyaux et déloyaux », ils firent encore quelques milles vers l’ouest pour se rendre au campement de Faiseur d’Enclos et se nourrir enfin. Néanmoins, la population de Battleford et du district, dont Patrick Gammie Laurie, se crut assiégée et se réfugia derrière la palissade du fort de la Police à cheval du Nord-Ouest, en bordure du village. À un moment donné, les autorités militaires donnèrent l’ordre à Mōsōmin de « se tenir en relation » avec le fort, mais « des personnes à l’intérieur firent feu sur lui, et il dut battre en retraite ».

Ce fut peut-être cet incident qui poussa Mōsōmin à s’envelopper ensuite dans le drapeau de la Grande-Bretagne. Des années après, la femme d’un policier parla « du vieux « Moosomin », chef cri qui allait et venait avec un Union Jack en lambeaux sur les épaules pour montrer que lui et les siens n’avaient aucune sympathie pour les partisans de Louis Riel ». Les autorités ne doutèrent jamais de ses intentions pacifiques, même si, au début de mai, des membres de sa bande se battirent aux côtés de Faiseur d’Enclos contre le lieutenant-colonel William Dillon Otter* au mont Cut Knife. À la fin de mai, une fois que l’agitation eut cessé, le chef fut « bien reçu » à Battleford. Le major-général Frederick Dobson Middleton* lui serra la main ; apparemment, ce fut le seul Indien à qui il accepta de faire cette politesse.

Dans son rapport de 1885, Dewdney cita la bande de Mōsōmin en exemple des autochtones de l’Ouest satisfaits de leur sort, dont la plupart ne s’étaient pas « rebellés ». Il notait aussi qu’elle avait accumulé assez d’argent dans son compte pour acheter 100 moutons, ce qu’il attribuait à la politique départementale suivant laquelle on ne distribuait de rations que lorsque le travail était fait. Mōsōmin et son peuple continuèrent d’obtenir d’assez bons résultats en agriculture et en élevage. Dès la fin des années 1880, ils avaient acheté de la machinerie – des moissonneuses-lieuses et des faucheuses. Cependant, les mesures que le gouvernement appliqua dans les années 1890 afin d’empêcher que les fermiers des réserves accumulent assez de surplus pour faire concurrence aux colons des environs nuisit au développement agricole de la réserve. Mōsōmin mourut le 24 mars 1902.

Sarah A. Carter

Nous remercions le professeur H. C. Wolfart pour l’aide apportée dans la détermination de l’orthographe correcte du nom du sujet en langue crie.  [s. a. c.]

AN, RG 10, 3584, dossier 1130 ; 3598, dossier 1364 ; 3746, dossier 29548.— GA, M4379.— B. W. Antrobus, « Reminiscences of Fort Macleod in 1885 », Canadian Magazine, 8 (nov. 1896–avril 1897) : 2–9.— Canada, Dép. des Affaires indiennes, The facts respecting Indian administration in the north-west (Ottawa, [1886]) ; Parl., Doc. de la session, 1884, n° 4 : 123 ; 1886, n° 6 : 141.— S. [A.] Carter, Lost harvests : prairie Indian reserve farmers and government policy (Montréal et Kingston, Ontario, 1990), chap. 6.— H. A. Dempsey, Big Bear : the end of freedom (Vancouver, 1984).— Walter Hildebrandt, « Battleford 1885 : the siege mentality », NeWest Rev. (Saskatoon), 10 (1984–1985), n° 9 : 20s.— Robert Jefferson, Fifty years on the Saskatchewan [...] (Battleford, Saskatchewan, 1929).—D. [W.] Light, Footprints in the dust (North Battleford, Saskatchewan, 1985).— A. E. McPherson, The Battlefords : a history (Saskatoon, 1967).— Reminiscences of a bungle, by one of the bunglers, and two other Northwest rebellion diaries, R. C. Macleod, éd. (Edmonton, 1983), 186.—Stanley, Birth of western Canada.

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Sarah A. Carter, « MŌSŌMIN (Moosomin) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/mosomin_13F.html.

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Auteur de l'article:    Sarah A. Carter
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1994
Année de la révision:    1994
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