ROBICHAUX, OTHO (il signait aussi Robichaud), fermier, marchand, juge de paix, officier de milice et fonctionnaire, né le 29 avril 1742 à Annapolis Royal, Nouvelle-Écosse, fils de Louis Robichaux* et de Jeanne Bourgeois ; décédé le 19 décembre 1824 à Neguac, Nouveau-Brunswick.
Même si le père d’Otho Robichaux était bien vu des autorités britanniques d’Annapolis Royal, sa famille fut douloureusement victime de la Déportation en 1755. Les Robichaux purent cependant choisir leur lieu d’exil ; envoyés au Massachusetts, ils vécurent d’abord à Boston, puis à Cambridge. Plus tard, Otho Robichaux devait compter parmi ceux dont Andrew Brown s’inspirerait pour écrire son étude sur la Déportation. Pendant son séjour en Nouvelle-Angleterre, il fréquenta des écoles anglaises. Sa famille évoluait dans des cercles distingués ; parmi ses relations, elle comptait notamment Edward Winslow* et la grande famille Vassall, de Cambridge.
Quand la Révolution américaine éclata en 1775, la famille Robichaux, qui favorisait les loyalistes, se remit en route, cette fois pour Québec. Otho Robichaux y entra en relation avec plusieurs Acadiens de la région de Miramichi, qui fait aujourd’hui partie du Nouveau-Brunswick ; ce furent sans doute eux qui le persuadèrent d’aller s’établir là-bas. Le 28 mai 1781, grâce à ses économies personnelles et à l’héritage que lui avait laissé son père, il put acheter de Pierre Loubert (Loubère) les droits sur une terre située à Neguac et les bâtiments qui s’y élevaient. Loubert commerçait depuis de nombreuses années avec les Indiens et les Acadiens de la région ; il avait fait construire sur sa terre une maison, une grange, un magasin et un fournil. Robichaux se lança dans l’exploitation agricole et les affaires, notamment dans la vente au détail, et il se mit à faire le commerce des produits locaux et devint aussi marchand de bois. Parmi les marchands de la région avec qui il faisait affaire se trouvaient entre autres James Fraser, Francis Peabody* et Richard Simonds*. Il faisait également du négoce avec Charles Robin de Paspébiac, dont il était aussi, semble-t-il, le représentant. Au fil des ans, il allait acquérir plusieurs propriétés dans la région de Miramichi.
Le 18 août 1789, Robichaux, jusque-là célibataire, épousa Marie-Louise Thibodeau (Thibaudeau) devant l’abbé Antoine Girouard. Fille d’Alexis Thibodeau et de Marguerite Dupuis, de Bay du Vin, la mariée avait alors 15 ans. Le couple devait par la suite avoir 12 enfants, soit 8 filles et 4 garçons. Pour une raison quelconque, ce mariage créa des dissensions entre Robichaux et sa propre famille. « Mes peines et mes chagrins ont commencé quand vous vous êtes marié », lui écrivait un jour sa sœur Vénérande*. « Vous avez des gens autour de vous qui vous accable, notait-elle en une autre occasion. Je croyais que quand vous vous êtes marié que vous n’aviez pris qu’une femme mais il se trouve que vous avez épousé toute une famille. » Robichaux maintenait néanmoins des relations assez amicales avec ses sœurs de Québec, Vénérande surtout, avec qui il correspondait régulièrement. Agissant souvent comme mandataire de son frère, elle réglait des factures, poursuivait des débiteurs et lui faisait suivre des marchandises.
Avec le temps, Robichaux se tailla une place au soleil dans la région de Miramichi. En 1788, James Fraser lui demanda de se joindre à un groupe qui réclamait la création de cours de justice dans le comté de Northumberland. Six ans plus tard, sans doute sur la recommandation de Winslow, Robichaux devint juge de paix, comme un autre Acadien, Joseph Gueguen, de Cocagne. À l’échelle du comté ou de la paroisse, il exerça aussi les fonctions de responsable de l’aide aux pauvres, de commissaire d’écoles et de commissaire de la voirie. Il fut également cotiseur municipal ; ainsi, lorsqu’on commença à construire une prison et un palais de justice dans le comté en 1791, ce fut à lui qu’il incomba de déterminer la participation de chacun des habitants du district de Neguac. Actif dans la milice, il détint le grade de capitaine à compter du 1er janvier 1799. Il fut aussi marguillier et, selon la tradition orale, devenait en quelque sorte un prêtre laïque quand il n’y avait pas de missionnaire : il présidait les réunions de prières, baptisait les enfants et recevait le consentement des futurs époux.
De nature entêtée, Otho Robichaux se disputa plus d’une fois avec des voisins à propos de titres fonciers et affronta à l’occasion le clergé, dont il désapprouvait souvent les opinions sur les questions temporelles. Dans les cercles gouvernementaux, on reconnaissait son influence et on tenait compte de ses avis. C’était par son entremise que le gouvernement communiquait avec les résidents acadiens de la région de Miramichi, et peu de mesures les touchant étaient prises sans qu’il ait été consulté.
APNB, RG 1, RS559, E10–11 ; RG 2, RS8, oaths, 2/1 ; Otho Robichaux et al. à Thomas Peters, 22 août 1819 ; RG 18, RS153, A1–4.— Arch. de l’évêché de Bathurst (Bathurst, N.-B.), Papiers Robichaud.— Centre d’études acadiennes, univ. de Moncton (Moncton, N.-B.), Fonds Placide Gaudet, 1.31-13A, 1.87-1–5.— Collection de documents inédits sur le Canada et l’Amérique, [H.-R. Casgrain, édit.] (3 vol., Québec, 1888–1890), 2 : 94–95.— Placide Gaudet, « Acadian genealogy and notes », APC Report, 1905, 2, part.
Cedric L. Haines, « ROBICHAUX (Robichaud), OTHO », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 11 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/robichaux_otho_6F.html.
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Auteur de l'article: | Cedric L. Haines |
Titre de l'article: | ROBICHAUX (Robichaud), OTHO |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1987 |
Année de la révision: | 1987 |
Date de consultation: | 11 déc. 2024 |