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SEAMAN, AMOS PECK, industriel, marchand et agriculteur, né le 14 janvier 1788 à Sackville, Nouveau-Brunswick, fils de Nathan Seaman et de Zena (Zeniah) Thomas ; le 12 mai 1814, il épousa Jane Metcalf qui lui donna sept fils et quatre filles ; décédé le 14 septembre 1864 à sa demeure de Minudie, Nouvelle-Écosse.
« Un jeune vagabond nu-pieds, dans un vieux canot d’écorce de bouleau qui était percé à la proue » : c’est ainsi qu’on pouvait décrire Amos Peck Seaman quand il arriva à Minudie, dans le comté de Cumberland, en 1796. Rusé, turbulent et généreux, il était le fils d’immigrants qui avaient précédé les Loyalistes dans cette région. Sa mère lui avait donné une instruction rudimentaire dans la pauvre cabane qu’ils habitaient à Sackville. Ce n’est qu’à l’âge adulte qu’il réussit, avec l’aide de sa femme, à continuer ses études en suivant des cours du soir. On connaît mal les premières années de sa vie. Dès 1810, en société avec son frère Job, il commença à faire du commerce avec des marchands de Boston. Grâce au boom économique du temps de guerre, il ne tarda pas à transporter des marchandises entre la Nouvelle-Écosse, la Nouvelle-Angleterre et les Antilles, à bord de navires construits dans de petits chantiers dont il était le propriétaire.
En 1823, Seaman devint l’un des locataires, à Minudie, des propriétés qui avaient été concédées en 1765 à l’ancien gouverneur, Joseph Frederic Wallet DesBarres*. En qualité d’agent de la famille DesBarres, il s’occupa de percevoir le loyer des terres durant les années 1825 et 1826. Outre les terrains marécageux, riches et fertiles, qu’on appelait les Elysian Fields, ces propriétés comprenaient d’excellents dépôts de grès pouvant servir à la fabrication de meules ; entre 1826 et 1834, Seaman et son associé, William Fowler, prirent à bail toutes les carrières. Sur ces terres, cependant, les squatters, les locataires et les intrus étaient habitués aux manières d’agir anciennes et fantasques de l’absentéiste DesBarres. En 1834, Seaman acheta les 7 000 acres du bien-fonds, mais il ne put mettre un terme à l’hostilité des concurrents et des locataires, et les disputes se poursuivirent, par voie légale ou autrement, durant de nombreuses années. On contestait principalement la légitimité des droits qu’il prétendait avoir sur les importants gisements de grès situés à Ragged Reef, sur les grèves laissées à découvert parla marée basse. Clairvoyant et obstiné, Seaman porta sa cause devant les plus hautes autorités. Il finit par obtenir la confirmation de ses droits grâce à l’intervention, en 1838, du ministre des Colonies, lord Glenelg.
Chaque année, des milliers de pierres meulières de grand prix étaient expédiées vers les marchés américains par l’Atlantic Grindstone Company, que Seaman dirigeait, et par les entreprises exploitant des carrières sur les terrains qu’il avait cédés à bail. En 1843, les carrières de Seaman et sa fabrique de meules employaient, à elles seules, plus de 100 hommes, sans compter ceux qui travaillaient sur ses navires et dans ses moulins. Cette année-là, il construisit à Minudie le premier moulin à blé actionné à la vapeur en Nouvelle-Écosse. Au début des années 40, on commença également l’exploitation du charbon sur ses propriétés. Dans son remarquable journal, en 1847, Seaman se glorifiait de posséder aussi une « scierie à vapeur en pleine activité qui débitait 150 billes de bois par jour ». Il acheta de nouvelles terres, gagna quelque 1 500 acres de terrain sur la mer en construisant des digues et il amassa ainsi ce qui semble avoir été le bien-fonds le plus vaste de la province.
Depuis son imposant domaine, Seaman veillait sur la communauté – composée surtout d’Acadiens – avec l’attention paternaliste d’un seigneur quasi féodal, si bien qu’il fut surnommé le « roi » de Minudie. Il occupa de nombreux postes à l’échelon municipal, construisit une école et deux églises pour les gens de l’endroit, l’une pour les protestants, l’autre pour les catholiques, et il aida à fonder la première loge maçonnique du comté de Cumberland. En 1850, répondant à une commission d’enquête chargée d’étudier la situation des pêcheries dans la baie de Fundy, il recommanda de construire sans tarder un chemin de fer menant aux deux Canadas afin d’ouvrir un marché jusqu’alors « inaccessible en raison des détours imposés aux navires ».
Dans un geste qui, en vérité, n’était pas pure prétention, Seaman abandonna son second prénom de Peck – en français, picorer – parce qu’il ne rendait pas justice à son talent. La fortune et les loisirs dont il disposait lui permirent de voyager en Grande-Bretagne et aux États-Unis. Ses enfants, après avoir reçu l’instruction d’un précepteur, furent envoyés à King’s College, à Windsor, et dans des écoles d’Angleterre.
Seaman perdit trois de ses enfants, dont l’un était avocat et secrétaire de Charles Tupper*. Accablé par leur décès et par l’évidente cupidité des autres membres de sa famille, il exprimait ainsi sa douleur en 1864 :
Je m’épuise à lutter pour sauver mon navire
Laissé par l’équipage à demi déserté.
[...] Le butin que je donne à ma postérité
Servira, je le crains, à plus d’un pour le pire
Car la route fragile apportera la brouille
Et qui pourrait savoir ce que sera demain ?
Quelques mois plus tard le « vieux roi » décédait. Il laissait un testament compliqué à l’extrême. Rédigées en vue d’assurer la répartition juste et équitable de ses biens, les dernières volontés de Seaman entraînèrent plutôt une longue série de procès qui contribuèrent au déclin de son empire commercial et de la communauté de Minudie.
In re Seaman estate (s.l., 1866) (copie à la N.S. Legislative Library, Halifax).— M. H. Perley, Report upon the fisheries of the Bay of Fundy (Fredericton, 1851).— G. N. D. Evans, Uncommon obdurate : the several public careers of J. F. W. DesBarres (Salem, Mass., et Toronto, 1969).— C. B. Fergusson, « The old king is back » : Amos « King » Seaman and his diary (Halifax, 1972).— The grindstone king, Amherst Daily News (Amherst, N.-É.), 1er mai 1963.— Smokestack on Ragged Reef, Family Herald and Weekly Star (Montréal), 23 mars 1961.
A. A. Mackenzie, « SEAMAN, AMOS PECK », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 4 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/seaman_amos_peck_9F.html.
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Auteur de l'article: | A. A. Mackenzie |
Titre de l'article: | SEAMAN, AMOS PECK |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1977 |
Année de la révision: | 1977 |
Date de consultation: | 4 déc. 2024 |