SWAYNE, HUGH, officier et administrateur colonial, fils aîné de John Swayne, receveur de l’accise à Cork (république d’Irlande) ; décédé le 31 octobre 1836 à Paris.

La carrière militaire de Hugh Swayne débuta en avril 1782 : il devint alors lieutenant en second dans la Royal Irish Artillery. Promu capitaine en août 1793, il servit à Demerara (Guyana) et dans la région de la Berbice en 1797 et 1798. Lieutenant-colonel à partir du 1er septembre 1800, il prit sa retraite avec une solde complète quand la Royal Irish Artillery fusionna avec la Royal Artillery, au début de 1801 ; on le nomma colonel honoraire en 1810. Ses réflexions sur les guerres napoléoniennes le poussèrent à s’intéresser à la préparation des campagnes : il traita ce sujet dans A sketch of the etat major ; or general staff of an army in the field [...] publié à Londres, en 1810. Ce livre révèle un esprit pratique, disposition qui incita probablement les autorités britanniques à nommer Swayne administrateur du Cap-Breton le 26 août 1812 ainsi que général de brigade. Le 4 juin de l’année suivante, il était promu major général.

Swayne débarqua à Sydney, le jour de l’An 1813, pour prendre la relève de Nicholas Nepean* ; plusieurs problèmes l’y attendaient. Le plus urgent était la protection de l’île, dont on avait qualifié les ouvrages de défense, avant la guerre de 1812, d’« indignes de mention ». En 1811, on avait porté à 168 hommes l’effectif de la garnison et Nepean avait mollement tenté d’organiser une milice. Cependant, si l’on en venait à déclencher des hostilités, ces correctifs seraient insuffisants. Les plus graves menaces venaient de la mer ; or seulement deux navires croisaient le long des côtes. Cette faiblesse s’était révélée dès le début de la guerre : des corsaires américains, en attaquant des bateaux de pêche et des navires marchands au large d’Arichat, avaient désorganisé le commerce dans cette région et dans le détroit de Canso.

Comme Swayne ne pouvait compter sur l’aide de Halifax, il s’employa lui-même à réduire la vulnérabilité de l’île. En avril 1813, afin d’éviter que la famine ne frappe si les provisions cessaient d’arriver de l’extérieur, il suspendit pour six mois l’exportation de certains comestibles. Plus tard dans l’année, afin de protéger les mines de charbon, il reconstruisit à proximité une redoute et une caserne où il affecta des soldats, pour offrir au moins un semblant de résistance en cas d’attaque. De plus, Swayne réorganisa la milice en divisant l’île en 20 districts commandés chacun par un capitaine et deux lieutenants. Dans la mesure du possible, il prit pour officiers des hommes qui avaient déjà connu la vie militaire.

Swayne avait aussi à résoudre des problèmes fonciers. L’octroi de concessions en franche tenure était interdit depuis 1789 et, comme beaucoup d’immigrants n’avaient pas les moyens de payer un fermage, ils occupaient tout simplement des lots vacants. En outre, comme la tenure à bail était toujours incertaine, beaucoup de locataires ne cultivaient que ce qui était nécessaire à leur survie. Swayne reconnaissait les tares de ce régime et voulait un rétablissement des concessions, d’autant plus qu’elles existaient en Nouvelle-Écosse. On annula l’ordonnance de restriction seulement après son départ, mais ce fut en partie grâce à son insistance.

Swayne comprenait mal les débats politiques du Cap-Breton, dont le principal objet était l’opportunité, pour la colonie, de se doter ou non d’une chambre d’Assemblée, et il les supportait difficilement. Au printemps de 1812, Nepean s’était rangé du côté des partisans de l’Assemblée, dirigés par le procureur général Richard Collier Bernard DesBarres Marshall Gibbons, et avait renvoyé du Conseil exécutif le juge en chef Archibald Charles Dodd*, qui s’opposait à la création d’une Assemblée. Comme Gibbons, Nepean avait jugé qu’en l’absence d’une Assemblée il fallait suspendre la perception de tous les impôts, et surtout du droit fort profitable sur le rhum d’importation. Cette décision ôtait presque tout revenu à la colonie.

Swayne n’avait aucun goût pour ces arguties qui privaient d’argent la colonie en pleine guerre. À l’instar de Dodd, il attribuait les problèmes politiques du Cap-Breton à une poignée d’individus vindicatifs et assoiffés de pouvoir. En avril 1813, après avoir dissous le conseil, il y renomma des adversaires de l’Assemblée, tels Dodd et Richard Stout*. Ensuite, il consulta les « habitants influents », comme il les appelait, et découvrit qu’ils approuvaient la taxe sur le rhum. Il la rétablit donc. Gibbons protesta ; on le pressa de quitter son poste de procureur général mais celui-ci refusa de se laisser intimider et se mit à contester ouvertement la légalité de la taxe. Swayne fit alors venir de Halifax Richard John Uniacke* fils pour qu’il agisse en qualité de procureur général et il intenta une poursuite à Gibbons, en qui il voyait un agent ennemi. Ces mesures énergiques, et le départ de Gibbons (en mars 1814) pour l’Angleterre, où il allait tenter de ravoir son poste, mirent temporairement fin au débat et permirent à Swayne de consacrer la dernière année de son mandat à la défense et aux mines de charbon.

Sous les prédécesseurs de Swayne, le plus souvent on avait loué les mines à des exploitants privés qui versaient au gouvernement des redevances sur chaque tonne de charbon exporté. Cependant, à l’arrivée de Swayne, comme on avait négocié aucun bail, elles étaient presque à l’abandon. Afin d’éviter que l’inflation du temps de guerre ne fasse grimper les prix, Swayne dut, à la fin de 1813, accepter comme locataire la Ritchie and Leaver, qui avait déjà exploité les mines mais n’offrait cette fois qu’une maigre redevance. En dépit des efforts de Swayne, le Parlement de la Nouvelle-Écosse se plaignit que le prix du charbon du Cap-Breton était excessif et revendiqua avec succès, en 1815, le droit d’ouvrir des mines dans sa propre province. Néanmoins, Swayne continua de traiter avec la Ritchie and Leaver, et la Nouvelle-Écosse, d’acheter toutes les expéditions de charbon du Cap-Breton.

En 1814, les efforts de Swayne avaient apparemment porté des fruits, et le ministère des Colonies se montrait satisfait de ses réalisations. Cette année-là cependant, sa santé commença à décliner ; il demanda donc un congé en juillet 1815, et retourna en Angleterre en septembre. Même si, semble-t-il, il n’eut jamais d’autre affectation, son ancienneté lui valut le 27 mai 1825 une promotion au grade de lieutenant général. Selon toute apparence, il ne se maria jamais.

À la fin du mandat de Hugh Swayne, le Cap-Breton semblait avoir atteint un équilibre propice à la croissance. La milice était armée et organisée ; un calme relatif régnait sur la scène politique ; de nouveau la production de charbon allait bon train. De plus, la colonie bénéficiait de la prospérité qu’avait engendrée dans le reste des Maritimes la guerre de 1812 : son charbon, son poisson et ses produits agricoles faisaient l’objet d’une demande accrue. Bien sûr, ce contexte n’était pas uniquement l’œuvre de Swayne, mais par son attitude libérale en matière de concessions foncières, par sa réorganisation de la milice et par l’apaisement politique qu’il sut apporter durant quelque temps, il avait du moins créé un climat de stabilité.

R. J. Morgan

Hugh Swayne est l’auteur de : A sketch of the etat major ; or general staff of an army in the field, as applicable to the British service ; illustrated by the practice in other countries (Londres, 1810).

APC, MG 11, [CO 217] Cape Breton A, 34 ; MG 24, A5 ; RG 8, I (C sér.), 229, 679, 722, 1706.— PANS, MG 1, 262B.— PRO, CO 217/132 ; 220/15 ; WO 1/96.— Le Jeune, Dictionnaire.The royal military calendar, or army service and commission book [...], John Philippart, édit. (3e éd., 5 vol., Londres, 1820), 3.— W. S. MacNutt, The Atlantic provinces : the emergence of colonial society, 1712–1857 (Toronto, 1965).

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R. J. Morgan, « SWAYNE, HUGH », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/swayne_hugh_7F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1988
Année de la révision:    1988
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