SWIFT, HENRY, mineur, directeur de mine et juge de paix, né le 1er novembre 1848 à Bickerstaffe, Angleterre, fils d’Edward Swift et d’Alice Culshaw ; le 16 mars 1872, il épousa à Stellarton, Nouvelle-Écosse, Sarah McLeod, et ils eurent cinq enfants ; décédé le 21 février 1891 à Springhill, Nouvelle-Écosse.
Comme de nombreux mineurs, Henry Swift suivait les traces de son père quand, à l’âge de 12 ans, il descendit pour la première fois dans l’une des mines de charbon du Lancashire exploitée par la Rainford Coal Company. En 1869, il émigra aux États-Unis, où il trouva du travail dans les bassins houillers de la Pennsylvanie et du Maryland. Environ deux ans plus tard, il vint s’établir en Nouvelle-Écosse ; il travailla d’abord dans les mines de Stellarton jusqu’en 1874, puis dans celles du village minier en pleine expansion de Springhill. Employé ambitieux et laborieux, il s’éleva graduellement dans la hiérarchie jusqu’à ce qu’il devienne, le 5 mars 1890, directeur général des grandes mines de Springhill. Swift était membre actif de l’Église presbytérienne et de la franc-maçonnerie, juge de paix, vice-président du Nova Scotia Institute of Mine Officials et président de la caisse locale destinée à venir en aide aux mineurs malades et blessés. Le 21 février 1891, une violente explosion du côté ouest de l’East Slope causa la mort de Swift et de 124 des quelque mille hommes et garçons qu’il surveillait. Une enquête révéla que la déflagration avait été provoquée par une flamme inhabituelle provenant de l’explosion de la charge utilisée par les mineurs pour abattre le minerai ; la direction n’encourut aucun blâme.
Swift était considéré par ses collègues ingénieurs et par les commentateurs de la publication locale, Trades and Labour Journal, comme le modèle parfait de l’homme qui avait atteint le sommet grâce à sa détermination et à sa discipline personnelle. D’autres trouvaient toutefois qu’il était un patron autocratique et inconséquent. On commença à le critiquer sérieusement en 1888 ; il était alors responsable des travaux effectués sous terre, et la nouvelle direction était résolue à procéder à des changements radicaux dans les mines. Ses détracteurs se firent particulièrement entendre au cours d’un âpre conflit de travail dont les mineurs sortirent vainqueurs grâce à un débrayage général, ce qui causa l’inondation des étages inférieurs de la mine. Ces deux perceptions de la personnalité de Swift sont corroborées par ses remarquables cahiers de correspondance ; les lettres sont le plus souvent adressées à son supérieur, John R. Cowans, et concernent les activités quotidiennes de la mine. La grande préoccupation de Swift était de rendre le travail souterrain de la mine systématique et scientifique. Le 20 janvier 1890, il écrivit : « Ce que nous voulons au sujet de la houillère est un bon code de règles et de règlements pour guider toutes les parties, et [qu’ils soient] appliqués strictement. » Ses lettres indiquent qu’il exigeait aussi la rationalisation de la tenue des registres dans la mine, et il constitua un dossier impressionnant sur les biens matériels de sa propriétaire, la Cumberland Railway and Coal Company, qu’il accompagna d’une note sur les problèmes qu’il entrevoyait. Il fit un suivi méticuleux des « commandes permanentes » de la mine, tenta de mettre en place un système de primes et de déductions afin d’inciter les mineurs à produire davantage de charbon de meilleure qualité et, dans ses rapports avec l’intransigeante section syndicale locale qu’était la Pioneer Lodge de la Provincial Workmen’s Association, il appliqua sa philosophie voulant que « la direction se réserve le droit d’employer et de congédier qui elle juge à propos ».
Ses admirateurs et détracteurs saisirent les deux aspects de la personnalité de Henry Swift : d’un côté, l’homme consciencieux et engagé qui parcourait à pied de grandes distances chaque jour et qui, le soir venu, trouvait le temps de compiler ses lettres détaillées et de négocier avec les mineurs et galibots souvent rebelles ; de l’autre, l’innovateur impitoyable qui sapa des traditions vénérables, contribua à créer à Springhill une polarisation des classes qui entraînerait le déclenchement d’une grève de 22 mois en 1909–1911, et omit d’agir malgré l’accumulation des preuves du danger des méthodes utilisées pour faire sauter les explosifs dans les mines qu’il supervisait. Les cahiers de correspondance de Swift font non seulement ressortir ces deux aspects, mais révèlent aussi les tensions et l’anxiété auxquelles furent soumis ceux qui participèrent à la montée du capitalisme industriel. « Mon esprit est constamment et entièrement occupé par des pensées sur la réussite du travail assez inquiétantes pour tuer un homme », écrivait Swift à son supérieur en novembre 1890. Dans un autre milieu, son programme capitaliste de gestion scientifique aurait pu réussir. À la mine, il était exposé à l’antagonisme des travailleurs, aux difficultés que posait l’intégration des divers procédés de l’exploitation minière souterraine et à l’incertitude absolue dont les lettres de Swift sont un témoignage éloquent. « Tout est en ordre, d’après ce que je sais », écrivit Swift à Cowans le 20 février 1891. Ces mots furent les derniers qu’il écrivit ; il mourut le lendemain dans la grande explosion de Springhill.
PANS, RG 21, A, 32 ; 35 (Henry Swift, letter-books).— The great colliery explosion at Springhill, Nova Scotia, February 21, 1891 : full particulars of the greatest mining disaster in Canada, with a brief description and historical sketch of the Springhill collieries (Springhill, 1891).— R. A. H. Morrow, Story of the Springhill disaster : comprising a full and authentic account of the great coal mining explosion at Springhill mines, Nova Scotia, February 21st, 1891 [...] (Saint-Jean, N.–B., [1891]).— Trades and Labour Journal (Springhill ; Stellarton, N.–É.), 1880–1891.— Ian McKay, « Industry, work and community in the Cumberland coalfields, 1848–1927 » (thèse de ph.d., Dalhousie Univ., Halifax, 1983).— Donald Macleod, « Miners, mining men and mining reform : changing the technology of Nova Scotian gold mines and collieries, 1858 to 1910 » (thèse de ph.d., Univ. of Toronto, 1981).
Ian McKay, « SWIFT, HENRY », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 9 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/swift_henry_12F.html.
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Auteur de l'article: | Ian McKay |
Titre de l'article: | SWIFT, HENRY |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1990 |
Année de la révision: | 1990 |
Date de consultation: | 9 déc. 2024 |