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WILLSON, JOHN, homme politique, fonctionnaire, juge de paix et juge, né le 5 août 1776 au New Jersey, fils d’une prénommée Ann ; le 28 février 1799, il épousa Elizabeth Bowlby (Boultby, Bowlsby), et ils eurent neuf enfants ; décédé le 26 mai 1860 dans le canton de Saltfleet, Haut-Canada.
Dans un document daté du 16 juin 1806, John Willson demandait une concession de terre et affirmait qu’il habitait le Haut-Canada « depuis plus de treize ans ». Selon d’autres sources, il serait arrivé au pays en 1790. Il s’était d’abord fixé à Newark (Niagara-on-the-Lake) avant de s’installer dans le canton de Saltfleet en 1797. Willson se fit rapidement connaître comme un fermier prospère et un chef de file dans les milieux méthodistes de la région. Son principal titre à la renommée fut sa carrière politique qui débuta en 1809 lorsqu’une délégation de ses concitoyens l’incita à se présenter à l’élection partielle tenue dans la circonscription d’York West. Ainsi que Willson l’expliqua plus tard, les « partis politiques connus à cette époque étaient le « gouvernement » et l’« opposition ». Il fut pressenti par l’opposition « qui se composait principalement de non-conformistes religieux ». Il est probable aussi que Willson reçut l’appui de petits fermiers frustrés par les pratiques monopolistiques de certains marchands, tel Richard Hatt*. L’élection de Willson fut contestée, mais sans succès, par Hatt, Richard Beasley* et d’autres qui prétendaient que le nouvel élu, étant « instituteur et prédicateur » méthodiste, était un candidat inéligible.
Durant les dernières sessions de la cinquième législature, Willson se fit une solide réputation de défenseur des libertés civiles et religieuses. Le relevé de ses votes pendant les années 1810 et 1811 témoigne de son appui total à Joseph Willcocks*, le plus important adversaire du régime du lieutenant-gouverneur Francis Gore. Willson fut élu en 1812 à la sixième législature (1812–1816). Au cours des dernières années de la guerre de 1812, il critiqua vertement le changement survenu dans les courants de l’opinion, changement qui se reflétait surtout dans les mesures rigides adoptées par les gouvernements successifs. Il qualifia ces mesures d’actes de despotisme militaire. Le 26 février 1814, il fut le seul à s’opposer au projet de loi qui suspendait l’habeas corpus [V. sir Gordon Drummond]. En 1816, il se prononça en faveur d’un projet de loi plus libéral sur le mariage. Mais plus important encore, il rédigea avec le concours de James Durand* le Common Schools Bill, qui prévoyait l’aide financière du gouvernement à l’instruction élémentaire, et c’est lui qui présenta ce projet de loi.
Il existe une certaine confusion historique en ce qui a trait au rôle joué par Willson au cours de la septième législature (1817–1820), mais ce qui se passa alors est très simple. À l’ouverture de la première session, en février 1817, Gore demanda que le nouveau district de Gore soit représenté avant que l’on n’aborde quelque débat que ce soit. L’Assemblée accepta, le projet de loi fut voté, et la session fut ajournée. Willson fit alors la lutte à Durand dans la nouvelle circonscription de Wentworth. Dans une note imprimée par Bartemas Ferguson* et publiée dans le Niagara Spectator par Richard Cockrell*, Durand accusa Willson de duplicité, de lâcheté et de corruption, affirmant que l’ancien champion de la liberté était devenu un instrument du pouvoir en échange d’un poste de juge de paix dans le nouveau district. L’élection partielle eut lieu vers le 18 février, et Willson imputa la victoire de Durand à l’« esprit de radicalisme » qui avait commencé à « se répandre d’une façon plus générale ». De fait, cet esprit se manifesta encore plus ouvertement dans le fort appui régional apporté à Robert Gourlay* à l’occasion de la convention de 1818. Cependant, le vent tournait contre Gourlay et ses partisans à Head of the Lake (dans le voisinage du port actuel de Hamilton). À la mort de Richard Hatt en 1819, Willson remporta l’élection partielle tenue pour remplacer le député décédé de la circonscription de Halton.
La perception que les gens de Head of the Lake avaient de la politique suivie par Willson s’était modifiée depuis la victoire de Durand. Comme Willson le dirait plus tard, il passait maintenant pour « un parfait tory ». Élu en même temps que George Hamilton* dans la circonscription de Wentworth en 1820, il jouissait du soutien des « intérêts conservateurs » qu’il ait été député ou non. Willson fut réélu député des neuvième (1825–1828), dixième (1829–1830) et onzième (1830–1834) législatures, devenant ainsi le premier homme politique important de Head of the Lake. « L’honnête John », comme on l’appelait habituellement, s’était bâti une réputation à Head of the Lake en raison de sa lutte incessante en faveur des fermiers, de son appui à la cause de l’éducation universelle et de ses implacables diatribes contre les injustices des cours civiles. Fort d’un appui régional, il s’éleva aux premiers rangs de la chambre d’Assemblée. En 1824, le premier numéro du Colonial Advocate de William Lyon Mackenzie* avait fait son éloge : « Plusieurs membres de notre Assemblée deviennent moins utiles à mesure qu’ils passent du temps au Parlement ; mais plus il [Willson] y est, plus ses talents s’affirment et plus ses connaissances sont solides et étendues. »
C’est entre 1825 et 1834 que Willson fut au sommet de sa puissance politique et qu’il eut le plus d’influence, et son élection au poste de président de l’Assemblée lors de la neuvième législature vint confirmer l’importance qu’il avait acquise. Durant son mandat, l’Assemblée s’occupa des affaires les plus importantes et les plus litigieuses de la colonie : le projet de loi sur les non-naturalisés, la partialité du système judiciaire et l’aide financière de la province, sur une grande échelle, nécessaire pour effectuer des travaux publics (par exemple, le canal Welland). Willson s’associa de plus en plus à des hommes, tels John Beverley Robinson* et John Strachan*, qui étaient les plus proches conseillers du lieutenant-gouverneur sir Peregrine Maitland. L’image que donnait Willson dans l’opposition se transformait lentement mais sûrement, jusqu’à devenir l’image même du transfuge et de l’homme à deux visages. En 1828, Mackenzie, qui décrivit Willson comme étant « indéniablement du côté du gouvernement » et qui le plaça bien haut sur sa « liste noire » des députés, écrivit : « Plus j’analysais sa conduite passée en tant que député, plus j’étais convaincu qu’il jouait un double rôle et [qu’il faisait preuve de] fourberie en tant qu’homme politique. » Évoquant l’histoire politique de la province et cherchant dans l’Assemblée des modèles de collusion avec des administrations impopulaires, Mackenzie choisit la session de 1816 comme cible d’un blâme particulièrement sévère. Le rôle qu’avait joué Willson au cours de cette session avait laissé une impression indélébile chez les réformistes des années 1830 et de la décennie qui suivit. En 1831, John Rolph* soutint que la « faction Maitland » rivalisait avec « le Parlement à jamais mémorable de 1816 [...] et [que] John Willson sembl[ait] incarner de nouveau le même personnage qui, à cette époque, avait attiré sur lui la réprobation de la population ».
Durant la dernière moitié des années 1820 et jusque dans la décennie suivante, les journaux de l’opposition associèrent le monde politique de Hamilton aux abus en matière de libertés civiles : le traitement au goudron et aux plumes que subit George Rolph, ardent réformiste et frère de John, suivi de son renvoi comme greffier de la paix ; les prétendues violations des principes de loi par le juge Christopher Alexander Hagerman* au cours du procès de Michael Vincent, accusé de meurtre ; le défaut des juges de paix de la ville d’intervenir contre un attroupement tory à l’occasion du soi-disant « outrage de Hamilton » en 1829 [V. James Gordon Strobridge*] ; et la raclée infligée à Mackenzie. Dans la ville, une mentalité politique distincte se faisait jour, en partie en réaction aux attaques des réformistes à York (Toronto), tels Mackenzie et Francis Collins*. L’événement qui mit le feu aux poudres fut la décision de Mackenzie et de Collins, en 1825, d’appuyer la proposition de Peter Desjardins* en vue de construire un canal reliant Dundas et la baie de Burlington (port de Hamilton). Le projet fut tourné en dérision par Willson. Celui-ci voyait dans le projet rival de Hamilton, le canal de la baie de Burlington, « la vie et l’âme de toute prospérité pour les districts de Gore, de Wellington et de Brock ». Les réformistes d’York, Mackenzie en particulier, non seulement appuyaient le projet du canal de Desjardins, mais partageaient le désir ambitieux des gens de Dundas, plutôt que celui des gens de Hamilton, de voir leur ville devenir la capitale commerciale et administrative de cette partie du lac Ontario. À Hamilton, la cause réformiste perdait du terrain au fur et à mesure que les citoyens issus de divers milieux ethniques, religieux et politiques joignaient leurs efforts pour assurer l’essor économique de la ville. Afin de défendre ses ambitions dans le domaine économique, la ville de Hamilton commença à se tourner vers les leaders politiques susceptibles de défendre ses intérêts, et d’abord vers Willson. Le premier journal de la ville, le Gore Balance, lancé en 1829 par Bartemas Ferguson se montra hostile au radicalisme (celui d’York en particulier), se fit le champion du développement et exalta les mérites de Willson.
Willson, quant à lui, se considérait comme un conservateur indépendant et un porte-parole des intérêts des petits fermiers. En 1819, il avait offert ses services pour remplir la fonction de juge de la Cour de district, afin d’empêcher le « mal » qui pourrait résulter si cette charge était confiée à un homme d’affaires. Huit ans plus tard, pendant qu’il occupait le fauteuil de président de l’Assemblée et qu’il était dénigré par les réformistes, il critiqua l’Assemblée « composée de fonctionnaires, d’hommes en place et de pensionnés ». Comme remède, il recommandait que le gouvernement compte plus de fermiers et moins d’avocats, en d’autres mots, des gens simples et ordinaires qui feraient œuvre utile au lieu de perdre leur temps « en réceptions, bals et dîners, avec l’arrière-pensée d’obtenir des emplois et des pensions ». Par exemple, en 1832, alors que Marshall Spring Bidwell* s’en prenait violemment à Willson pour son « opposition à des mesures populaires », ce dernier appuyait le projet de loi de Peter Perry visant à disposer des réserves du clergé. En fait, Willson alla encore plus loin, et il proposa que tous les bénéfices soient affectés à l’éducation et, au grand déplaisir de Bidwell, que toutes les religions, y compris l’Église catholique, aient un droit sur ces réserves. Willson avait quelques réticences vis-à-vis de la tentative de Perry de réformer les lois sur le jury, mais il ne s’opposait pas au but visé. « Je n’aime pas laisser au shérif le choix des jurés » déclara Willson à l’Assemblée. Enfin, il se prononça en faveur d’un projet de loi visant à interdire le douaire. Même si les femmes « ne [pouvaient], en fait, être employées pour défricher la terre, disait-il, [...] elles étaient souvent appelées à aider et elles avaient, par conséquent, le même droit à posséder une terre et devaient avoir le droit de disposer de ce bien », ce que ne leur permettait pas le douaire.
Willson ne se présenta pas aux élections générales de 1834, année qui marqua la montée d’Allan Napier MacNab* comme principal défenseur des intérêts de la ville de Hamilton. Néanmoins, il continua d’être une force avec laquelle il fallait compter. Le 11 décembre 1839, il fut nommé au Conseil législatif, à temps pour participer au débat décisif sur la proposition d’union avec le Bas-Canada. Willson qui s’était opposé à ce projet la première fois qu’il avait été mis de l’avant en 1822, en raison des différences entre les deux colonies en matière de lois, de langue et de religion, vota avec la minorité contre l’union. Cette prise de position l’empêcha d’être de nouveau nommé au conseil après la déclaration de l’Union le 10 février 1841. Fatigué de la politique, il dénigra la montée de partis, « pouvoir cupide exercé pour monopoliser [...] tout le favoritisme du gouvernement ». Par la suite, il abandonna la vie publique et se retira dans sa ferme, dans le canton de Saltfleet.
Dans le district de Gore, Willson servit plusieurs années en qualité de juge de paix, juge de la Cour de surrogate, commissaire de la voirie, inspecteur des licences et des permis d’alambic, commissaire de la grammar school du district de Gore, commissaire du canal de la baie de Burlington et membre du bureau sanitaire de district. Il remplit également les fonctions de commissaire du canal Welland, mais il fut révoqué en 1840 par le lieutenant-gouverneur sir George Arthur parce qu’il insistait pour que les travaux soient complétés selon « un tableau des dépenses » qui, de l’avis d’Arthur, était « tout à fait incorrect ». En outre, Willson participa aux activités de la Gore District Emigrant Society et de l’Agricultural Society of the Gore District.
John Willson mourut dans sa ferme en 1860 et fut inhumé au cimetière de l’église St Andrew, à Grimsby. Il laissait une modeste succession d’environ 6 000 $ ; il avait vendu à ses fils la plupart de ses terrains au début des années 1850. Méthodiste, puis partisan de Henry Ryan*, il semble que Willson se fit anglican dans les dernières années de sa vie. Le langage politique d’aujourd’hui n’est d’aucune utilité lorsqu’il s’agit d’expliquer « l’honnête John ». Il y avait une certaine continuité dans sa politique et c’est cette continuité qui caractérise le mieux l’homme. Pour lui, c’était l’époque qui avait changé, tandis qu’il était demeuré le même. Il était, selon ses propres mots, un « simple fermier » autodidacte et toujours soucieux « de profiter des avantages du pays » ; ces avantages se traduisaient par un juste traitement pour le fermier, une réforme constitutionnelle modérée, des lois libérales sur le mariage, une justice peu coûteuse, l’instruction élémentaire universelle et décentralisée, et l’essor économique. C’est dans un conservatisme modéré allié à un soutien inébranlable à la cause du progrès que l’on trouve les particularités qui ont caractérisé la pensée politique des habitants de Hamilton jusqu’à nos jours. Et Willson fut le premier porte-parole de cette ville.
John Willson est l’auteur de : Address to the inhabitants of the district of Gore, and speeches upon the Trade Act, upon the bill for compensating the losses of sufferers by the late rebellion, upon the Bank Restriction Bill, and an extract from a speech upon the union of the provinces (Hamilton, Ontario, 1840).
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Robert Lochiel Fraser, « WILLSON, JOHN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 15 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/willson_john_8F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/willson_john_8F.html |
Auteur de l'article: | Robert Lochiel Fraser |
Titre de l'article: | WILLSON, JOHN |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1985 |
Année de la révision: | 1985 |
Date de consultation: | 15 oct. 2024 |