WITHALL, WILLIAM JOHN, homme d’affaires et homme politique, né le 22 novembre 1814 dans l’île de Jersey ; le 8 septembre 1841, il épousa à Québec Elizabeth LeVallée, veuve de Peter Bott, puis le 5 juillet 1883, dans la même ville, Eleanor Pickard, veuve du marchand Richard White Longmuir ; décédé le 24 janvier 1898 à Montréal et inhumé deux jours plus tard au cimetière Mount Hermon, à Sillery, Québec.
William John Withall reçoit une éducation rudimentaire dans son village natal. Le 30 avril 1826, à l’âge de onze ans, il arrive à Gaspé, dans le Bas-Canada, en visite chez son oncle, un pêcheur qui pour subsister doit aussi cultiver un lopin de terre et s’adonner à la coupe du bois durant l’hiver. Le décès de sa mère l’oblige à y demeurer. Le dimanche, il suit les cours de français et de religion que dispense un pasteur méthodiste.
Vers 1832, Withall, qui a commencé à gagner sa vie vers l’âge de 16 ans, décide de se rendre à Québec. Chemin faisant, il s’arrête à Saint-Thomas-de-la-Pointe-à-la-Caille (Montmagny) où il exerce trente-six métiers, notamment ceux d’instituteur, de pêcheur et de commerçant. En 1835, il retourne dans l’île de Jersey et effectue un long voyage sur le continent européen. Il accepte enfin de revenir à Gaspé pour s’occuper de l’établissement de pêche et du commerce d’un marchand jersiais. Deux ans plus tard, il acquiert en société une vaste étendue de terre sur le bras nord-ouest de la baie de Gaspé afin d’y construire un moulin à scier. Craignant de ne pas trouver de débouchés pour son bois, il revend sa part et décide en 1840 de s’établir à Québec.
Cette année-là, Withall ouvre une épicerie au 95, quai de la Reine. Cette activité le met en contact avec James Gibb Ross*, qui est au service de la Gibb and Ross, maison spécialisée dans le commerce d’épicerie de gros et de détail. Withall, dont le commerce prospère, s’intègre graduellement au milieu des affaires de Québec. Il élargit le champ de ses activités et, semble-t-il, commence à spéculer. En 1848, il est l’un des administrateurs de la congrégation méthodiste Wesleyan. Deux ans plus tard, il fait partie du bureau de direction de l’Union Building Society et met sur pied, en société avec Andrew William Hood, une fabrique de chandelles au 73 de la rue Saint-Paul. Les deux hommes possèdent une autre entreprise du même type à Montréal. Trente hommes y fabriquent annuellement 10 000 boîtes de chandelles et 20 000 boîtes de savon. Withall achète en 1851 l’Enterprise qu’il utilise comme traversier et remorqueur. Il prête de l’argent sur hypothèque et s’intéresse de plus en plus à l’activité maritime.
Durant les années 1860, Withall émerge à titre de membre important du milieu des affaires de Québec. À partir de 1861, il compte parmi les administrateurs de la City Building Society. Il représente le quartier Saint-Pierre à l’hôtel de ville en 1865 et 1866 et travaille encore en étroite collaboration avec James Gibb Ross. Ainsi il accède en 1866 à la présidence de la Compagnie d’assurance maritime de Québec, constituée en 1862 par Ross et des associés. Toujours en 1866, il participe à la fondation de la Quebec Leather Manufactory, spécialisée dans la préparation du chevreau. Nommé l’un des administrateurs de la Banque de Québec, il en devient le vice-président en 1869, au moment où Ross accède à la présidence. Tous deux en dirigeront les destinées jusqu’à leur mort. En 1868, Withall est du nombre des actionnaires de la Quebec Rubber Company, manufacture de couvre-chaussures et autres articles en caoutchouc. Dès lors, il appartient au groupe de financiers qui essaie d’asseoir le développement de la ville de Québec sur de nouvelles activités portuaires et manufacturières. Il est vice-président de la Compagnie des remorqueurs du Saint-Laurent en 1867, vice-président de la Compagnie du chemin de fer des rues de Québec de 1868 à 1884, membre de la Commission du havre de Québec de 1869 à 1874, président de la Compagnie des steamers de Québec et des ports du golfe de 1870 à 1880, et de la Compagnie des steamers de Québec, nouveau nom de cette dernière, de 1881 à 1884.
Au sortir de la longue dépression des années 1870 qui a durement touché l’économie de Québec, les gens d’affaires s’efforcent d’aller plus loin dans l’arrière-pays et de consolider le secteur manufacturier. Withall devient en 1876 l’un des administrateurs de la Compagnie du chemin de fer de Québec et du lac Saint-Jean dont il est, avec les frères Ross, le plus gros actionnaire ; il en sera le président de 1881 à 1885. Avec John Ross il achète en janvier 1877 la Quebec Rubber Company, qu’ils rebaptisent la North American Works. Il en préside le conseil d’administration, devient son seul propriétaire, puis la vend en 1879 à des Montréalais déjà associés dans la Compagnie canadienne de caoutchouc de Montréal. En 1881, il figure parmi les actionnaires de la Canada Worsted Company, manufacture de tissus de laine et de coton, et en 1883 parmi ceux de la Riverside Worsted Company, une autre entreprise de fabrication d’étoffes.
Comme Withall n’a pas de fils pour l’assister dans ses activités, il fait venir de Londres un neveu, Thomas Angelo Piddington, qu’il fait instruire à la Thom’s Private Business Academy et qu’il initie aux affaires. Vers 1870, il lui cède sa fabrique de chandelles. Piddington devient son fondé de pouvoir et le représente au sein de divers conseils d’administration. Tous deux s’associent en certaines occasions, notamment pour mettre sur pied une tannerie dans le canton de Bulstrode. Confiant la surveillance de ses intérêts à son neveu, Withall s’établit à Montréal en 1884. Il y supervise l’activité des deux sociétés dont il est le vice-président : la Banque de Québec et la Compagnie des steamers de Québec. Désormais, il évolue dans l’univers clos de la haute finance : membre du conseil d’administration de la Compagnie canadienne d’assurance sur la vie, dite du Soleil, de la Compagnie canadienne de caoutchouc de Montréal, de la Compagnie royale d’électricité, de la Mount Royal Incline Railway et de diverses autres entreprises, il investit même aux États-Unis et dans les mines d’or de la Colombie-Britannique.
William John Withall meurt à Montréal le 24 janvier 1898 et ses funérailles sont célébrées deux jours plus tard dans l’église méthodiste de Québec. Sa carrière revêt plusieurs significations. On peut y voir, sur le plan individuel, l’ascension d’un self-made-man, sur le plan socio-économique l’illustration du passage du capitalisme commercial au capitalisme industriel et financier, et enfin, sur le plan régional, l’incapacité du milieu des affaires de Québec de contrer efficacement la montée fulgurante de Montréal.
ANQ-Q, CE1-68, 8 sept. 1841, 5 juill. 1883, 26 janv. 1898.— AVQ, Finances, bureau des cotiseurs, rôles d’évaluation et d’imposition.— L’Événement, 26 janv. 1898.— Montreal Daily Star, 25 janv. 1898.— Annuaire du commerce et de l’industrie de Québec [...] pour 1873, J.-C. Langelier, compil. (Québec, 1873), 65.— Cyclopædia of Canadian biog. (Rose et Charlesworth), 1 : 520–521.— Montreal directory, 1884–1898.— Quebec directory, 1847–1884.— Marcel Plouffe, « Quelques particularités sociales et politiques de la charte, du système administratif et du personnel politique de la cité de Québec, 1833–1867 » (thèse de m.a., univ. Laval, 1971).
Michèle Brassard et Jean Hamelin, « WITHALL, WILLIAM JOHN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/withall_william_john_12F.html.
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Auteur de l'article: | Michèle Brassard et Jean Hamelin |
Titre de l'article: | WITHALL, WILLIAM JOHN |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1990 |
Année de la révision: | 1990 |
Date de consultation: | 2 oct. 2024 |