John Harris (1739–1802), agent foncier et médecin, est né en Pennsylvanie quand celle-ci était encore une colonie britannique. Il s’installe en Nouvelle-Écosse, à Pictou, où il devient l’un des hommes les plus actifs et prospères parmi les premiers colons. Lors de la Révolution américaine, sa solidarité avec certains rebelles nuit à ses affaires commerciales et suscite une animosité considérable à son égard ; il part alors s’installer à Truro.

HARRIS, JOHN, agent foncier, juge, marchand, fonctionnaire et homme politique, né le 16 juillet 1739 à Elizabethtown, Pennsylvanie, troisième fils de Thomas Harris et de Mary McKinney ; en 1766, il épousa Elizabeth Scott et ils eurent quatre fils et trois filles ; décédé le 9 avril 1802 à Truro, Nouvelle-Écosse.

La possibilité pour les Britanniques de venir s’établir en Nouvelle-Écosse à partir de 1759 [V. Charles Lawrence*] entraîna la création d’un grand nombre de sociétés foncières désireuses d’obtenir des concessions de terre dans cette province. L’un de ces organismes, la Philadelphia Company, obtint en octobre 1765 du gouverneur Montagu Wilmot* une concession de 200 000 acres sur la côte septentrionale de la Nouvelle-Écosse. Thomas Harris ainsi que ses trois fils Matthew, Robert et John prirent une part active dans cette compagnie et, par conséquent, aux tentatives de celle-ci visant à mettre la concession en valeur. John, le plus jeune, était diplômé du College of New Jersey, où il avait reçu sa licence ès lettres en 1763 ; il avait ensuite fait des études de médecine et était devenu médecin. C’était lui qui, dans l’ensemble, s’occupait des affaires de la compagnie en Nouvelle-Écosse et qui y amena le premier groupe des colons de 1767 à bord du brigantin Betsey. Ce groupe, qui comptait 10 adultes, parmi lesquels Robert Patterson, et 15 à 19 enfants, arriva dans le havre de Pictou le 10 juin. Au cours de la première nuit à bord du navire mouillé dans le havre, la femme de Harris mit au monde un fils, Thomas.

À ces premiers colons de langue anglaise, la région parut assez sévère. Les terres étaient presque entièrement boisées et la partie concédée, qui donnait sur le havre, marécageuse ; les meilleurs terrains qui entouraient ce havre avaient été accordés à Alexander McNutt. En outre, Truro, l’établissement le plus proche, se trouvait à 40 milles dans les terres. Néanmoins, les nouveaux colons se mirent à défricher et, au cours des deux années suivantes, d’autres, originaires de la Pennsylvanie et du Maryland, se joignirent à eux. En janvier 1770, Pictou, ainsi qu’on appelait ce village, comptait 176 habitants et avait acquis un air de permanence. Harris était l’un des habitants les plus prospères : il avait 6 domestiques ou manœuvres qui vivaient chez lui, dont au moins un était un esclave identifié dans un acte de vente uniquement sous le nom de « Sambo ». Il possédait également 11 têtes de bétail, et sa terre avait donné 50 boisseaux de blé et d’avoine l’année précédente. L’arrivée du premier gros contingent de colons en provenance d’Écosse à bord du Hector en 1773 puis, l’année suivante, celle d’un autre groupe d’Écossais, qui s’étaient originellement établis à l’île Saint-Jean (Île-du-Prince-Édouard), accentuèrent la stabilité de l’agglomération.

Pendant les premières années, Harris, à titre de représentant de la Philadelphia Company, fut chargé de vendre des lots à ceux qui en faisaient la demande, et s’occupa beaucoup des besoins des colons établis sur les terres de la colonie. En plus de ces responsabilités, il avait été nommé juge de paix en octobre 1767 et magistrat en 1771. Par ailleurs, sa formation médicale s’avéra certainement utile, bien qu’il ne subsiste aucune preuve de son activité. Avec son frère Matthew, John s’adonna aussi au commerce côtier ; le Dolphin, dont il était propriétaire, fit naufrage lors d’une tempête au large du cap George en novembre 1771.

Lors de la Révolution américaine, les Écossais, qui constituaient la majorité des colons de Pictou, se révélèrent de loyaux sujets, mais plutôt passifs ; l’établissement comprenait aussi une faction américaine. Harris, qui comptait des amis et des parents appartenant au camp rebelle, se rattachait à la faction américaine malgré ses nominations par la couronne britannique. Il trouva un moyen de continuer à commercer avec les colonies américaines ; une fois, le lieutenant-gouverneur Michael Francklin* confisqua même un chargement qui lui appartenait ainsi qu’à son frère Matthew, persuadé qu’ils faisaient du commerce avec les rebelles. Harris ne fut pas inculpé, cependant sa solidarité reconnue avec la cause américaine souleva une animosité considérable contre lui à Pictou. C’est peut-être cet antagonisme, mais aussi, peut-on penser, des raisons commerciales qui l’amenèrent à aller s’installer à Truro en 1777.

John Harris participa à Truro aux affaires locales et provinciales. Il devint greffier du canton en 1779, receveur de l’enregistrement et juge de paix. Entre 1781 et 1785, il siégea à la chambre d’Assemblée comme député de cet endroit et, en 1793, il devint juge de la Cour inférieure des plaids communs. Harris continua d’occuper des postes influents, malgré ses opinions sur la Révolution américaine. Selon toute vraisemblance, ses positions politiques avaient quelque peu évolué puisqu’il était resté en Nouvelle-Écosse. Harris a joué un rôle important dans les débuts de la colonisation à Pictou et sa carrière illustre bien le dilemme qu’affrontèrent les colons américains venus s’établir en Nouvelle-Écosse avant la révolution.

R. A. MacLean

PANS, MG 9, n° 170 ; MG 100, 161, n° 53 ; 207, n° 6 (copies dactylographiées) ; 228, n° 13 ; RG 1, 212 ; RG 46, folder 3.— « A direct road between Annapolis Royal and Halifax», PANS, Board of Trustees, Report (Halifax), 1937 : 37–44.— Acadian Recorder, 26 oct. 1816.— Directory of N.S. MLAs. Robert Stewart, Colonel George Steuart and his wife Margaret Harris : their ancestors and descendants [...] (Lahore, Inde, 1907).— J. M. Cameron, Political Pictonians : the men of the Legislative Council, Senate, House of Commons, House of Assembly, 1767–1967 (Ottawa, [1967]).— George MacLaren, The Pictou book : stories of our past (New Glasgow, N.-É., [1954]).— G. G. Patterson, Studies in Nova Scotian history (Halifax, 1940).— George Patterson, A history of the county of Pictou, Nova Scotia (Montréal, 1877).— R. F. Harris, « A pioneer Harris family and the pre-loyalist settlement of Pictou », N.S. Hist. Soc., Coll., 33 (1961) : 103–135.— Alexander Mackenzie, « First Highland emigration to Nova Scotia : arrival of the ship Hector », Celtic Magazine (Inverness, Écosse), 8 (1883) : 140–144.— Pictou Advocate (Pictou, N.-É.), 2 oct., 18 déc. 1947.

Bibliographie de la version modifiée :
N.S. Arch.,
« African Nova Scotians in the age of slavery and abolition : bill of sale for slave Sambo, recorded at the Pictou County registry of deeds » : archives.novascotia.ca/africanns/archives/?ID=17 (consulté le 12 sept. 2025).Thomas Miller, Historical and genealogical record of the first settlers of Colchester County [...] (Halifax, 1873 ; réimpr. Belleville, Ontario, 1972).

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

R. A. MacLean, « HARRIS, JOHN (1739-1802) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 30 déc. 2025, https://www.biographi.ca/fr/bio/harris_john_1739_1802_5F.html.

Information à utiliser pour d'autres types de référence bibliographique


Permalien: https://www.biographi.ca/fr/bio/harris_john_1739_1802_5F.html
Auteur de l'article:    R. A. MacLean
Titre de l'article:    HARRIS, JOHN (1739-1802)
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1983
Année de la révision:    2025
Date de consultation:    30 déc. 2025