COWDELL, THOMAS DANIEL, marchand, prédicateur méthodiste laïque, auteur et professeur de musique ; né le 2 octobre 1769 à Londres, fils de Samuel Cowdell ; décédé le 25 ou le 26 mars 1833, peut-être à Halifax.

Thomas Daniel Cowdell était le fils d’une Irlandaise et d’un Anglais, soldat de métier. Il grandit à Londres, où il se convertit au méthodisme en 1784. Il arriva à Halifax cinq ans plus tard et y épousa par la suite une Écossaise prénommée Margaret, avec qui il eut quatre fils et quatre filles. Pendant les années qu’il passa dans cette ville, il tint rue Duke, près du Theatre Royal, un petit magasin de bonbons, d’articles divers et de « curiosités ». Même s’il était marchand de profession, il avait une prédilection pour la religion, la poésie et la musique.

En tant que membre de la congrégation méthodiste de Halifax, Cowdell en vint à assumer les responsabilités de class leader et de prédicateur laïque. Toutefois, on se souvient moins de son travail religieux que de sa querelle avec le révérend William Black, qui était ministre résidant de Halifax depuis 1786 et fondateur du mouvement méthodiste des Maritimes. Du printemps de 1802 jusqu’au début de 1803, Cowdell dirigea une attaque contre Black. Officiellement, on reprochait au ministre de ne pas observer certaines règles méthodistes, dont celle qui exigeait que les prédicateurs changent de circonscription ecclésiastique tous les deux ans. Dans les faits, cependant, il semble que la colère des opposants venait surtout de ce que Black désirait démolir la maison du prédicateur à Halifax, qui était presque entièrement payée, pour en construire une nouvelle, plus vaste. Le 22 mars 1802, sept des class leaders de Halifax lui firent part de leur mécontentement dans une lettre, mais tous se retirèrent bientôt du débat, à l’exception de Cowdell. Celui-ci continua à protester et finit par perdre son « permis de class leader » à cause de « sermons et d’invectives vulgaires ». Sa femme fut aussi expulsée de la congrégation, car on supposait qu’« elle était le principal auteur de la lettre ». Néanmoins, Cowdell fut prédicateur laïque à l’Île-du-Prince-Édouard de décembre 1805 à juin 1806. Sa carrière controversée au sein de l’Église explique peut-être le jugement hostile de Thomas Watson Smith, historien du méthodisme dans les Maritimes, qui décrit Cowdell comme un homme « fréquemment exposé aux remarques en raison de ses larges épaules et de ses courtes jambes ». Smith prétend que le prédicateur devint « la proie d’habitudes d’intempérance qui le menèrent à une profonde dégradation ». On n’a trouvé aucune preuve pour étayer cette accusation.

Il semble que la carrière commerciale de Cowdell n’alla jamais particulièrement bien. Il était constamment affligé de problèmes financiers et, en décembre 1808, ayant appris le décès de son oncle maternel, il décida de se rendre à Dublin pour réclamer un héritage. Le voyage dura presque trois ans, pendant lesquels il visita l’Angleterre, l’Irlande, l’Écosse et le pays de Galles. Apparemment, il n’obtint pas l’héritage qu’il était allé chercher. Afin d’assurer sa subsistance pendant son séjour à l’étranger, il écrivit et publia un livre de poèmes intitulé A poetical journal of a tour from British North America to England, Wales & Ireland [...], qui parut en 1809 à Dublin. En mars 1811, il fit imprimer à Londres une nouvelle version de son livre, sous le titre de The Nova Scotia Minstrel, written while on a tour from North America to Great Britain and Ireland [...], afin d’amasser de l’argent pour rentrer à Halifax.

À son retour, Cowdell se tourna de nouveau vers le commerce, mais il ouvrit en plus une école de « musique vocale ». Il avait depuis longtemps dans les environs la réputation d’être un excellent violoncelliste et il avait même participé à des concerts à Halifax. Pendant son voyage, il aurait aussi étudié le chant ; on disait de lui qu’il avait une « belle voix de basse ». Toutefois, il ne resta pas longtemps à Halifax. En mars 1815, sa maison et sa boutique furent vendues aux enchères, et il projetait « de quitter la province le plus tôt possible ». On lui attribue l’ouvrage A poetical account of the American campaigns of 1812 and 1813 [...], publié sous le pseudonyme de An Acadian à Halifax en septembre 1815. Rien ne permet cependant d’affirmer qu’il en soit l’auteur.

En 1815, Cowdell retourna en Irlande où, deux ans plus, tard, il publia de nouveau, avec d’autres modifications, The Nova Scotia minstrel. En octobre 1824, après avoir passé neuf ans à l’étranger, il revint à Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick, pour voir ses enfants. Apparemment, il les avait confiés à des amis ou à des parents de cette ville avant de partir pour Dublin en 1815. Au début de 1825, il se rendit à Halifax, où il publia l’année suivante une brochure intitulée An awful fact, or narrative of the most extraordinary instance of supernatural vision, or, the appearance of a late wife to her husband, in Halifax. On ignore ce qui arriva à Cowdell entre 1825 et sa mort, en 1833. On raconte, ce qui est probablement faux, que sur son lit de mort il aurait dit au ministre méthodiste qui l’assistait : « Je pleure parce que je suis incapable de pleurer. »

Cowdell mérite une place dans l’histoire des Maritimes au début du xixe siècle à cause de ses œuvres poétiques. Il prétendait que son livre de poèmes était « le premier fruit offert par une colonie éloignée à son île mère ». Il fut en effet le premier poète des Maritimes à publier et à faire circuler un livre de poèmes dans les îles Britanniques, même s’il n’avait pas tout à fait raison de prétendre avoir ouvert la voie. Ainsi il n’était certainement pas le premier poète des Maritimes, ni même le premier poète de la région à publier. En fait, dans l’histoire de la poésie de ces provinces, Cowdell appartient à une période de transition qui le place après des poètes comme Henry Alline*, Jacob Bailey* et Jonathan Odell*, dont les œuvres forment l’essentiel de la poésie écrite au xviiie siècle dans les Maritimes. Les vers de Cowdell, tout comme ceux d’Oliver Goldsmith* et du jeune Joseph Howe*, empruntent parfois à la poésie du xviiie siècle, tandis qu’à d’autres moments on y trouve le sentimentalisme et le lyrisme qui allaient dominer la poésie des Maritimes entre 1830 et 1870. Cette dichotomie se manifeste avec force dans les différentes éditions de son œuvre. Si l’on excepte deux poèmes lyriques, l’édition de 1809 est constituée de vers descriptifs et narratifs relativement longs, inspirés de modèles du xviie siècle. Dans l’édition de 1811, par ailleurs, 24 chansons et poèmes lyriques apparaissent en divers endroits du texte. Quant à l’édition de 1817, elle compte plus de 40 poèmes lyriques. Non seulement Cowdell y expérimente-t-il de nouvelles règles de versification, mais le ton et l’esprit de ces poèmes lyriques diffèrent de ceux de ses vers descriptifs et narratifs. En dépit d’un certain travail de réécriture, l’objectivité didactique des sections descriptives et narratives contraste vivement avec le traitement personnalisé et sentimental du sujet dans les poèmes lyriques.

Il est difficile d’évaluer dans quelle mesure Thomas Daniel Cowdell était conscient de la présence de cette dichotomie dans son œuvre. En tant que poète, il ne tenta jamais sérieusement de réconcilier ces contraires en modifiant sa vision esthétique de la réalité. Et il ne dépassa pas non plus cette opposition sur le plan artistique. Il demeure toutefois un des premiers poètes des Maritimes à l’avoir reflétée.

Thomas B. Vincent

L’Acadian Recorder du 11 mars 1826 annonçait la publication de la brochure de Thomas Daniel Cowdell, mais on n’en a retracé aucun exemplaire. En plus des ouvrages mentionnés dans la biographie, Cowdell a aussi écrit plusieurs poèmes qui ont été publiés dans les journaux locaux : un sous forme d’annonce sans titre pour sa boutique d’Halifax dans la Nova-Scotia Royal Gazette, 15 juill. 1812 ; « The occasional address at the late concert for the benefit of the poor [...] », dans le numéro du 28 avril 1813 ; « An acrostic sonnet » et « The good ship Waterloo », dans le New-Brunswick Courier, 4 déc. 1824.

L’incertitude qui subsiste au sujet de la date exacte du décès de Cowdell est due au fait que la notice nécrologique du New-Brunswick Courier, 6 avril 1833, donne le 25 mars et celle du Novascotian, or Colonial Herald, 28 mars 1833, le 26 mars.

UCC-M, « Address to Mr. William Black, Methodist preacher, Halifax, Nova Scotia, on the subject of deviating from the minutes of the British Methodist Conference ; by Thomas Roby, class leader in Halifax and signed by other leaders ; with notes illustrative of the subject by Thomas Daniel Cowdell [...] » (Halifax, 1802 ; mfm aux PANS).— A checklist of Canadian literature and background materials, 1628–1960, R. E. Watters, compil. (2e éd., Toronto 1972).— R. J. Long, Nova Scotia authors and their work : a bibliography of the province (East Orange, N.J., 1918).— J. T. Mellish, Outlines of the history of Methodism in Charlottetown, Prince Edward Island [...] (Charlottetown, 1888).— T. W. Smith, History of the Methodist Church within the territories embraced in the late conférence of Eastern British America [...] (2 vol., Halifax, 1877–1890).

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Thomas B. Vincent, « COWDELL, THOMAS DANIEL », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 5 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/cowdell_thomas_daniel_6F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1987
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