WELLS, DAVID, objecteur de conscience, né vers 1897 en Angleterre ; décédé le 18 février 1918 à Selkirk, Manitoba.

On connaît peu les antécédents de David Wells. Ses parents étaient anglais ; son père avait servi dans la marine britannique durant 30 ans. En 1918, Wells étudiait la Bible dans une école pentecôtiste de Winnipeg. Sa mère vivait alors en Angleterre et l’un de ses frères combattait en France avec l’armée britannique.

En vertu de la Loi concernant le service militaire, adoptée en 1917 par le Parlement du Canada, un homme normalement assujetti à la conscription pouvait obtenir un certificat d’exemption si sa conscience lui interdisait de se battre et si « les dogmes et articles de foi, en vigueur le sixième jour de juillet 1917, de toute confession religieuse organisée, existante et bien reconnue en Canada à telle date et à laquelle il appart[enait] de bonne foi » lui interdisaient de faire la guerre. Cependant, selon le gouvernement fédéral, les Disciples du Christ, l’International Bible Students Association, les Assemblées pentecôtistes et les Frères de Plymouth, même s’ils défendaient tous des principes pacifistes, n’étaient pas des confessions religieuses organisées ou reconnues au sens de cette loi. C’est pourquoi, le 23 janvier 1918, sir Hugh John Macdonald*, magistrat du tribunal de police de Winnipeg, condamna Wells, pentecôtiste, et un autre objecteur de conscience à deux ans de prison pour refus de s’enrôler.

Après avoir entendu sa sentence, Wells fut conduit au pénitencier de Stony Mountain. À peine quatre jours plus tard, les autorités de la prison rapportèrent qu’il était devenu fou. Le 11 février, on le transféra à l’asile de Selkirk pour le faire soigner, mais il ne se remit jamais. Selon le docteur A. T. Rice, surintendant intérimaire de l’asile, Wells avait succombé à un état maniacodépressif probablement engendré par un sentiment de honte. Rice affirma aussi que, si Wells était entré à l’asile plus tôt, on aurait probablement pu le sauver.

Bien que l’autopsie n’ait révélé aucune autre cause de décès à part la dépression, bien des gens eurent la conviction que Wells était mort parce qu’on l’avait brutalisé en prison. C’était un homme robuste, en parfaite santé. Avant sa mort, on avait beaucoup parlé de deux membres de l’International Bible Students Association et d’un pentecôtiste qui avaient été torturés au moyen de douches froides par les autorités militaires à la caserne de la rue Minto à Winnipeg au cours de l’hiver de 1917–1918. Des amis pentecôtistes de Wells protestèrent donc contre le traitement qu’il avait reçu en prison et, avec des Frères de Plymouth, ils adressèrent une requête au gouvernement afin que leurs sectes soient reconnues comme pacifistes. William Ivens*, ministre de l’église méthodiste McDougall de Winnipeg et pacifiste lui-même, écrivit au ministre de l’Agriculture, Thomas Alexander Crerar*, que des fonctionnaires civils » avaient « littéralement brutalisé [Wells] jusqu’à ce que mort s’ensuive ». « Peut-être, notait Ivens, sa mort était-elle nécessaire pour convaincre le gouvernement qu’il y a[vait] au pays, en dehors des Églises et organisations pacifistes, des objecteurs de conscience qui [étaient] prêts à mourir pour leurs convictions plutôt que de se soumettre en acceptant le service militaire. » Le Trades and Labor Council de Winnipeg adressa au gouvernement fédéral une pétition réclamant une enquête sur les circonstances de la mort de Wells, la publication des conclusions de cette enquête et la fin de la discrimination envers les objecteurs de conscience qui ne faisaient pas partie des sectes reconnues.

Bien que Crerar ait accepté l’opinion d’Ivens sur le cas de Wells et ait transmis sa lettre au premier ministre sir Robert Laird Borden*, le gouvernement du Canada ne fit rien. En plus, de toute évidence, les pétitions suscitées par la mort de Wells n’eurent jamais de suite. On n’a donc jamais établi si, oui ou non, Wells était mort parce qu’il avait été attaqué lâchement.

L’exemple de David Wells illustre l’hostilité dont étaient victimes les objecteurs de conscience pendant la Première Guerre mondiale, surtout s’ils appartenaient à des groupes religieux pacifistes non traditionnels. S’il y eut malfaisance, il s’agirait du pire cas de torture d’un objecteur de conscience, mais ce ne fut pas le seul. Les événements de ce genre causèrent un tollé et obligèrent les autorités à harceler les pacifistes de façon moins brutale, mais non à cesser de le faire.

M. James Penton

AN, MG 26, H, sér. RLB, 238, dossier 2309, doc. 132780, 132789, 132799 ; RG 24, 2028–2029, dossier HQ 1064-30-67, 1re–2e partie.— Manitoba Free Press, 25 janv. 1918.—Winnipeg Evening Telegram, 23, 24 janv., 27 févr. 1918.—Winnipeg Tribune, 24 janv. 1918.— Canada, Statuts, 1917, c.19.— M. J. Penton, Jehovah’s Witnesses in Canada champions of freedom of speech and worship (Toronto, 1976).— T. P. Socknat, Witness against war : pacifism in Canada, 1900–1945 (Toronto, 1987).

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M. James Penton, « WELLS, DAVID », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 7 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/wells_david_14F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1998
Année de la révision:    1998
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