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CAVENDISH, VICTOR CHRISTIAN WILLIAM, 9e duc de DEVONSHIRE, gouverneur général, né le 31 mai 1868 à Londres, fils aîné de lord Edward Cavendish et d’Emma Elizabeth Lascelles ; le 30 juillet 1892, il épousa dans cette ville lady Evelyn Emily Mary Petty-Fitzmaurice (décédée en 1960), fille aînée du 5e marquis de Lansdowne [Petty-Fitzmaurice*], et ils eurent deux fils et cinq filles ; décédé le 6 mai 1938 à Chatsworth House, Derbyshire, Angleterre.
Victor Christian William Cavendish fit ses études à l’Eton College et au Trinity College, à Cambridge, où il obtint une licence ès arts en 1891. Il effectua ensuite un stage de plusieurs mois dans un bureau de comptabilité et étudia le droit à l’Inner Temple, à Londres, avant de prendre les rênes d’un certain nombre d’entreprises familiales. Entre-temps, après la mort de son père, ancien député libéral-unioniste de West Derbyshire, en mai 1891, Cavendish fut élu, sans opposition, député de cette circonscription à la Chambre des communes. Le 24 mars 1908, il succéda, comme 9e duc de Devonshire, à son oncle Spencer Compton Cavendish et le remplaça à la Chambre des lords. À la Chambre basse, Victor Christian William avait été trésorier de la maison royale dans le dernier gouvernement de lord Salisbury, de 1900 à 1903, et secrétaire financier auprès de la Trésorerie dans le gouvernement d’Arthur James Balfour, de 1903 à 1905. À la Chambre des lords, il fut actif et influent, contribuant aux débats de façon « simple, directe, substantielle et équilibrée », selon lord Morley. En 1912, Andrew Bonar Law, alors chef de l’opposition, nomma Devonshire membre de son cabinet fantôme. Il fut lord civil de l’Amirauté dans le gouvernement de coalition de Herbert Henry Asquith en 1915–1916, pendant la Première Guerre mondiale.
En tant que détenteur du titre familial, Devonshire assumait la responsabilité d’un immense domaine de plus de 180 000 acres dans le Derbyshire et il devint lord-lieutenant du comté, ainsi que grand intendant du comté de Derby et colonel honoraire du 5th Battalion of the Sherwood Foresters (Nottinghamshire and Derbyshire Regiment). En 1909–1910, il fut maire d’Eastbourne, dans le Sussex (lieu de villégiature au développement duquel son grand-père avait contribué) et, en 1911–1912, maire de Chesterfield, ville près du domaine familial de Chatsworth. En 1908, il avait présidé la British Empire League. Un an plus tard, on le nomma chancelier de la University of Leeds, fondée peu auparavant, puis, en 1912, grand-croix du Royal Victorian Order et, en janvier 1916, chevalier de l’ordre de la Jarretière.
Devonshire apprit qu’il était pressenti pour succéder au duc de Connaught [Arthur*] à titre de gouverneur général du Canada quelques jours seulement avant le déclenchement de la bataille de la Somme, le 1er juillet 1916. Il nota dans son journal que lord Lansdowne, son beau-père et ancien gouverneur général, parla le 21 juin « des très nombreux attraits, mais aussi des nombreuses difficultés » de la position. Devonshire écrivit qu’après en avoir discuté avec la duchesse, il était « tenté de refuser ». Le lendemain, Lansdowne, sa femme et Balfour, devenu secrétaire d’État aux Affaires étrangères, l’incitèrent à accepter. Après une autre longue discussion avec Lansdowne le 23 juin, le duc, probablement aussi motivé par son sens du devoir civique, annonça qu’il « était d’accord pour accepter l’offre du Canada, mais que [ce] serait terriblement difficile ». En novembre, la duchesse et lui naviguèrent vers Halifax, où ils débarquèrent le 11. Sir Louis Henry Davies*, juge de la Cour suprême du Canada, y assermenta le duc. Deux jours plus tard, le couple vice-royal arriva à Ottawa et reçut l’accueil chaleureux du premier ministre, sir Robert Laird Borden.
La façon dont le gouvernement impérial avait procédé à la nomination de Devonshire avait irrité Borden. Depuis le début de la guerre, le prédécesseur de Devonshire, le duc de Connaught, feld-maréchal de l’armée britannique, avait souvent tiré parti de son expérience militaire pour tenter d’influencer la politique de guerre canadienne d’une manière qui outrepassait grandement, selon Borden et à son grand déplaisir, les responsabilités constitutionnelles du gouverneur général. La fierté qu’il tirait de la contribution considérable du Canada sur son sol et sur le front lui donnait une autre raison de croire qu’on aurait dû le consulter avant de nommer le successeur de Connaught. Il espérait surtout que le nouveau gouverneur général « ne soit pas un militaire ». Mais les préoccupations de Borden ne trouvaient aucun écho au gouvernement d’Asquith à Londres, et on nomma Devonshire sans consulter le Canada. Malgré cela, Borden vit exaucée la moitié la plus importante de son souhait : Devonshire n’était pas un militaire. Homme politique aguerri, Devonshire, contrairement à Connaught, préférait, comme l’écrirait un biographe, « écouter plutôt que parler », trait de caractère que Borden finirait par admirer profondément.
Le nouveau gouverneur général apprit rapidement que le gouvernement de Borden vivait des heures difficiles. On reprochait au premier ministre de ne pas être un « chef inspirant ». Sir Samuel Hughes*, ministre de la Milice et de la Défense, avait dû démissionner ; on confia en partie ses fonctions à sir George Halsey Perley, haut-commissaire intérimaire à Londres, à titre de ministre des Forces militaires d’outre-mer, puis on le remplaça bientôt par un nouveau ministre au Canada, Albert Edward Kemp*. Le recrutement de volontaires, qui allait bon train au printemps de 1916, avait chuté dramatiquement à l’automne, tandis que le nombre des victimes canadiennes à la Somme avait dépassé les 24 000. En outre, les pressions en faveur de la conscription se multipliaient, une entente entre Borden et sir Wilfrid Laurier*, chef de l’opposition, visant à reporter les élections générales semblait de plus en plus précaire, et les « risques associés à des élections générales » devenaient plus évidents pour Borden et, par conséquent, pour Devonshire.
La session parlementaire de 1917, brève, s’ouvrit en janvier et fut ajournée le mois suivant pour permettre à Borden de prendre part aux premières réunions du cabinet de guerre impérial à Londres, en mars. En l’absence du premier ministre, Devonshire s’acquitta des responsabilités habituelles du gouverneur général. Il effectua des visites officielles dans de grandes et de petites villes, voyagea plus longuement dans différentes régions du pays, prononça des discours et soutint des bonnes causes ici et là. Devonshire prit au sérieux son rôle de président d’honneur de nombreuses organisations, dont le Fonds patriotique canadien, la Société canadienne de la Croix-Rouge et les Boy Scouts du Canada (il fut nommé chef scout). Lui-même propriétaire de vastes domaines, il s’intéressait vivement aux activités agricoles. Les foires avaient pour lui un attrait de prédilection et, dans son horaire chargé, il intégrait en priorité son appui au réseau de fermes expérimentales du dominion [V. William Saunders*], notamment la ferme centrale à la limite sud d’Ottawa. En hiver, Rideau Hall, la résidence officielle du gouverneur général dans la capitale, accueillait fréquemment des patineurs et des amateurs de traîne sauvage, ainsi que des représentations théâtrales. En été, Devonshire et sa famille aimaient tout particulièrement séjourner à la citadelle de Québec.
Impossible, cependant, d’échapper à la guerre ou aux demandes croissantes que devait affronter le gouvernement à Ottawa. Borden revint en mai, convaincu de la fin de l’époque du recrutement volontaire. Sur la crête de Vimy, le lundi de Pâques de 1917, plus de 10 000 Canadiens avaient été tués ou blessés. Ce chiffre avait plus que doublé à la fin de mai, alors que le nombre de nouveaux enrôlés pour les deux mois précédents ne s’élevait qu’à un peu plus de 11 000. Borden voulut prolonger la session parlementaire encore une fois, pour inviter Laurier à former un gouvernement de coalition et pour imposer la conscription. Ce dernier écouta et souleva des objections, puis, le 6 juin, il dit à Borden qu’il refusait de se joindre à un gouvernement en faveur de la conscription ou d’allonger la session en cours. À la fin de juillet, le gouverneur général proposa la tenue d’une conférence à Rideau Hall ; Borden s’empressa d’accepter, et celle-ci fut convoquée le 9 août. En plus du premier ministre et de Laurier, le premier ministre de la province de Québec sir Lomer Gouin*, l’administrateur de chemins de fer lord Shaughnessy*, l’éditeur de journaux lord Atholstan [Graham], l’éminent libéral sir Clifford Sifton*, alors président de la Commission de la conservation, et le ministre du Commerce sir George Eulas Foster y assistèrent. Devonshire ouvrit la réunion en parlant de la « gravité de la situation » en général avant d’offrir de se retirer. Tous le prièrent de rester. Cependant, les parties ne parvinrent pas à trouver un terrain d’entente. Borden approuvait la conscription, mais Laurier s’y opposait. Néanmoins, Devonshire conclut qu’« aucun mal n’avait été fait, et [que] l’atmosphère était, dans une certaine mesure, moins lourde ».
Le gouverneur général, avec l’accord de tous les participants à la réunion, avait tenté de résoudre un problème politique difficile. À l’été de 1920, Borden lui demanda de le faire une nouvelle fois. Le premier ministre, épuisé en raison des contraintes imposées par la guerre et le rétablissement de la paix, s’apprêtait à démissionner. Son gouvernement d’union, formé en octobre 1917 avec l’appui d’un certain nombre de libéraux favorables à la conscription et vainqueur des élections générales de décembre suivant, frisait l’éclatement. Il avait la tâche ardue de choisir un nouveau chef qui aurait la confiance de son caucus divisé. On convint que chaque membre indiquerait ses premier et deuxième choix à Borden, qui désignerait ensuite son successeur. D’après le journal de Devonshire, le 1er juillet, Borden lui dit que sir William Thomas White* avait « reçu beaucoup plus d’appuis que tous les autres ». Il ajouta cependant que ses longues années comme ministre des Finances l’avaient épuisé et qu’il était « très peu probable » qu’il accepte le poste. Borden avait déjà abordé le sujet avec White, qui lui avait demandé de « ne pas le presser ». Toutefois, considérant l’appui massif dont il bénéficiait, le premier ministre pria Devonshire de sommer White, absent d’Ottawa, de « venir immédiatement ». On envoya un assistant militaire du gouverneur général à la recherche de White, qu’on trouva le 6 juillet et qui conduisit en toute hâte à Ottawa. Tout cela en vain. Le lendemain, White dit à Devonshire que « sa santé n’était pas assez bonne pour entreprendre de grands travaux ». Le soir même, à dix heures du soir, Borden vint à Rideau Hall avec Arthur Meighen* qui, au départ, avait probablement joui de l’appui de plus de membres à l’extérieur du cabinet que White. Meighen avait accepté de succéder à Borden et annonça que tous les membres du cabinet, à l’exception de deux personnes, resteraient en poste « pour l’instant ». Meighen devint chef du parti et du gouvernement le samedi 10 juillet, à onze heures du matin ; la passation officielle des pouvoirs eut lieu dans le bureau du duc sur la colline du Parlement.
Le gouverneur général connaissait bien Meighen, membre-clé du gouvernement de Borden en temps de guerre. Il commença à entretenir avec lui le même genre de rapports professionnels cordiaux qu’avec Borden. Leur relation ne dura toutefois pas longtemps, puisque le mandat de cinq ans de Devonshire arriva à échéance au début de l’été de 1921. En mai, Borden l’avait exhorté à rester pour un autre mandat, car Devonshire incarnait selon lui le gouverneur général idéal. Ce dernier avait appris à connaître le Canada et son peuple en parcourant le pays et en défendant partout de nobles causes. Les Canadiens l’appréciaient. Durant la période difficile de la guerre et des premières années de la reprise, il écouta attentivement et s’exprima avec prudence. « Aucun gouverneur général avant lui ne fut l’héritier d’une plus grande tradition de service collectif ou plus en mesure de comprendre les grandes questions qui intéressent non seulement notre pays et le Royaume-Uni, mais l’Empire tout entier », avait écrit Borden en janvier 1917. Il n’y aurait toutefois pas d’autre mandat. « [J’ai] peur que ce soit impossible », nota Devonshire dans son journal. Après une ultime tournée dans l’Ouest et une série de discours d’adieu, le duc et sa famille quittèrent la citadelle le mardi 19 juillet 1921, en après-midi. Après avoir passé une dernière fois en revue sa garde d’honneur, il prit le bateau avec les siens pour rentrer en Grande-Bretagne. Le nouveau gouverneur général, lord Byng, arriva au Canada avec sa femme en août.
Réinstallé dans son pays, Victor Christian William Cavendish, 9e duc de Devonshire, refusa, en mars 1922, le poste de secrétaire d’État aux affaires de l’Inde dans le cabinet de David Lloyd George, mais, en octobre, il devint secrétaire colonial dans le nouveau gouvernement de Law. Ce mandat, qui dura jusqu’en janvier 1924, fut surtout marqué par la déclaration qui porte son nom ; l’année d’avant, il avait déclaré que, dans la colonie du Kenya, les intérêts des Africains autochtones devaient primer ceux des colons. Le 12 avril 1925, une attaque de paralysie le transforma ; selon son biographe, « [cet] homme calme, impassible et patient [devint] au mieux un infirme grincheux et morose, et au pire un tyran féroce ». Il mourut à son domaine de Chatsworth en mai 1938.
BAC, R4694-0-8.— Times (Londres), 7 mai 1938.— R. L. Borden, Robert Laird Borden : his memoirs, Henry Borden, édit. (2 vol., Toronto, 1938), 2.— R. C. Brown, Robert Laird Borden : a biography (2 vol., Toronto, 1975–1980), 2.— Roger Graham, Arthur Meighen : a biography (3 vol., Toronto, 1960–1965), 2.— ODNB.
Robert Craig Brown, « CAVENDISH, VICTOR CHRISTIAN WILLIAM, 9e duc de DEVONSHIRE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 11 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/cavendish_victor_christian_william_16F.html.
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Auteur de l'article: | Robert Craig Brown |
Titre de l'article: | CAVENDISH, VICTOR CHRISTIAN WILLIAM, 9e duc de DEVONSHIRE |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2019 |
Année de la révision: | 2019 |
Date de consultation: | 11 oct. 2024 |