Titre original :  William Ernest Ditchburn

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Ditchburn, William Ernest, imprimeur, joueur de crosse, organisateur politique et fonctionnaire, né le 11 décembre 1862 à Ross (Ross-on-Wye, Angleterre), quatrième des huit enfants de Thomas Lee Ditchburn et d’Eliza Anne Landells ; le 27 octobre 1897, il épousa à Victoria Ann Lilian Stainsby Blackett, et ils eurent trois enfants, dont un mourut jeune ; décédé le 11 novembre 1932 dans cette ville.

En 1868, quand William Ernest Ditchburn, que l’on appelait Billy, était un petit garçon, sa famille quitta l’Angleterre pour l’Ontario. Il fréquenta alors des écoles publiques à Harwood, à Cobourg et à Toronto, villes où son père exerça les métiers de photographe, télégraphiste et chef de gare. En 1875, à l’âge de 13 ans, il devint apprenti imprimeur à Toronto. Cinq ans plus tard, il y obtint son premier emploi dans le domaine, au Ladies’ Journal. Lorsque l’éditeur partit s’installer à Mount Forest l’année d’après, Ditchburn le suivit. Il se découvrit une passion pour la crosse et joua dans l’équipe de la ville. Il vécut ensuite à divers endroits en Ontario : il travailla pour des journaux à Gananoque (1882–1884), à Brockville (1884–1886) et à Ottawa (1887–1889), où il se joignit chaque fois à l’équipe de crosse locale. Durant cette période, il acquit une réputation de joueur étoile.

En 1890, Ditchburn décida de partir dans l’Ouest ; il fit escale à Winnipeg pour l’été, où il aida l’équipe de crosse à remporter le championnat provincial. Plus tard cette année-là, il travailla pour un journal de Tacoma, dans l’État de Washington. Déçu de l’absence d’une équipe de crosse, il s’installa à Victoria, où le Victoria Daily Times puis le Daily Colonist l’embauchèrent comme imprimeur. Il se joignit à l’équipe de crosse de la ville, et éblouit le public avec son énergie, sa vitesse et, comme le dit un journaliste du Daily Colonist, sa « moustache noire ondoyante ». En 1893, il était membre d’une équipe de Victoria qui, en tournée en Ontario et au Québec, ne perdit qu’un match hors concours.

Le 27 octobre 1897, Ditchburn épousa Ann Lilian Stainsby Blackett, résidente de Victoria dont la famille avait émigré d’Angleterre. Après son mariage, il cessa de jouer, mais revint vite à la crosse à titre d’arbitre, jusqu’à ce que la popularité du sport décline, après la Première Guerre mondiale. Au début du xxe siècle, il adhéra à l’ordre maçonnique de Victoria.

En politique, Ditchburn appuyait activement les libéraux de la ville. En 1908, on lui demanda d’être l’organisateur de la Victoria Liberal Association, affiliée au Parti libéral fédéral et provincial ; l’année suivante, il fut élu président de l’association. En 1910, le ministère des Affaires indiennes abolit le poste de surintendant des Affaires indiennes de la Colombie-Britannique et divisa la province en trois districts administratifs. Membre actif du parti fédéral au pouvoir de sir Wilfrid Laurier*, Ditchburn était bien placé pour obtenir une nomination partisane : il fut vite nommé inspecteur des agences indiennes pour le bureau d’inspection du Sud-Ouest, dont le siège se trouvait à Victoria. Il abandonna l’imprimerie. En 1917, il serait promu inspecteur en chef provincial et, en 1923, nommé commissaire des Affaires indiennes de la Colombie-Britannique, poste qu’il occuperait jusqu’à sa retraite.

À titre de simple inspecteur, Ditchburn était responsable des agences de Cowichan, de Kwahkewlth, de Lytton, de New Westminster et de la côte Ouest. Il devait donc fournir à Ottawa des rapports sur les conditions de vie des communautés autochtones, sur des questions telles que la santé, les activités économiques, la conduite morale (notamment la consommation d’alcool et les coutumes matrimoniales) et l’éducation. Il s’intéressait particulièrement à la qualité des demeures ; c’était là, selon lui, le meilleur outil pour évaluer leur progrès vers ce qu’il considérait comme la civilisation. Par exemple, il déplorait le fait qu’on fabriquait beaucoup d’excellents canots à l’agence de Kwahkewlth, mais qu’on faisait peu pour améliorer le logement. À l’inverse, les Songhees, qui, sous son autorité, quittèrent une réserve près de Victoria pour s’installer en 1911 dans une autre au havre d’Esquimalt, profitèrent de l’occasion pour y construire de bonnes maisons. Dans son rapport annuel pour l’année 1914–1915, Ditchburn commenta le résultat de leurs efforts : « Un étranger traversant cette réserve n’imaginerait pas un instant que ces maisons appartiennent à des Indiens. »

Au fil des ans, Ditchburn critiqua la faible fréquentation des écoles de jour dans les réserves. Il en imputa la faute aux migrations saisonnières des Autochtones pour la pêche et la cueillette, et à la tenue de potlatchs pendant les mois d’hiver. Pour remédier à cette situation, il proposa d’accroître l’hébergement dans les écoles industrielles et les pensionnats, stratégie que les Affaires indiennes adoptèrent après la Première Guerre mondiale. Cependant, au fur et à mesure que le nombre d’établissements résidentiels augmentait, il en constata les lacunes [V. Peter Henderson Bryce]. En 1920, il rédigerait un rapport où il attribuerait la santé déclinante des élèves à la mauvaise qualité de la nourriture, au travail excessif et aux trop nombreux exercices religieux dans les écoles catholiques.

Ditchburn considérait le potlatch comme une « coutume déplorable » qui nuisait à la fréquentation scolaire, faisait perdre temps et argent, et rassemblait de larges foules dans des conditions d’hygiène douteuses. En 1913, après une visite à Alert Bay, où se tenait souvent cette cérémonie, il écrivit au siège du ministère pour recommander vivement l’application de l’article 149 de la Loi sur les Indiens, qui interdisait le potlatch [V. Israel Wood Powell*]. Le nouveau surintendant adjoint des Affaires indiennes, Duncan Campbell Scott*, était du même avis, et des poursuites furent immédiatement engagées ; cette répression découragea les potlatchs pour un temps, sans pour autant les faire disparaître. Beaucoup d’Autochtones défièrent ouvertement la loi, en particulier les Kwakiutls (Kwakwaka’wakws). Leurs chefs Ned Harris et Johnny Bagwany, qui se sacrifia en « martyr » pour la cause, subirent un procès et furent reconnus coupables en 1914, mais leur peine fut suspendue. D’autres prirent l’habitude de contourner la loi et réclamèrent l’abrogation de l’article 149. Un certain nombre d’anthropologues (comme Franz Boas* et Charles Frederic Newcombe*) et d’hommes politiques (notamment le député conservateur Herbert Sylvester Clements) appuyèrent publiquement les Autochtones qui revendiquaient le droit de tenir des potlatchs. Ditchburn, avec le soutien total du ministère, demeura malgré tout intraitable. En 1931, il écrivit que le ministère visait explicitement à « éradiquer complètement cette pratique, puisqu’aucune mesure intermédiaire ne semblait pouvoir être mise en œuvre ».

En 1912, Ditchburn avait appris que les propriétaires de phoquiers avaient droit à une indemnité en vertu du traité pour la protection des phoques de 1911 qui interdisait la chasse au phoque dans le Pacifique Nord. Ce traité privant beaucoup d’Autochtones d’un emploi saisonnier lucratif, il commença à faire pression sur l’administration centrale du ministère pour qu’on les dédommage eux aussi. Principalement grâce à ses efforts, on prit des dispositions pour que les chasseurs de phoque puissent préparer et soumettre leurs demandes. Certains fonctionnaires craignaient que les frais juridiques et de déplacement nécessaires à la distribution des indemnités n’en dépassent le montant même ; Ditchburn dut dissiper leurs inquiétudes. Après beaucoup de discussion, il reçut 13 295,25 $ en 1916, à diviser entre 902 chasseurs de phoque autochtones, sur un total de 200 000 $ versés en indemnités au Canada par les États-Unis.

Entre 1913 et 1916, une commission royale, connue sous le nom de commission McKenna-McBride [V. James Andrew Joseph McKenna*], s’était penchée sur l’état des réserves en Colombie-Britannique. Censée résoudre un conflit de longue date entre Ottawa et Victoria au sujet de territoires autochtones, elle avait recommandé certaines modifications à leurs frontières. Le gouvernement fédéral souhaitait approuver les modifications proposées par la commission, et Ditchburn devait convaincre le gouvernement provincial, peu enthousiaste, d’en faire autant. Victoria jugeait les recommandations trop généreuses à l’égard des Autochtones. L’affaire resta en suspens jusqu’en 1920, année où on accepta de revoir le rapport de la commission. Cette révision fut menée par Ditchburn, représentant Ottawa, J. W. Clark, représentant la province, et James Alexander Teit*, ethnographe et militant politique de la Colombie-Britannique, représentant les peuples autochtones. Durant ce qu’on appellerait l’enquête Ditchburn, les nations autochtones firent plusieurs demandes de terres supplémentaires ; Ditchburn rejeta la plupart d’entre elles, et celles qu’il estimait raisonnables essuyèrent le refus de Clark. En effet, ce dernier s’avéra intransigeant et parcimonieux aux yeux de Ditchburn, et le rapport final proposa principalement une réduction encore plus draconienne des réserves. Victoria et Ottawa approuvèrent le rapport de la commission royale modifié par Ditchburn en 1923 et par Clark en 1924. L’accord fédéral-provincial était inacceptable pour bon nombre d’Autochtones, qui, depuis la fondation en 1909 de l’Allied Indian Tribes of British Columbia, avaient maintenu une agitation permanente – notamment par l’action des militants amérindiens Peter Reginald Kelly* et Andrew Paull – dans l’espoir que les deux ordres de gouvernement reconnaissent leurs revendications territoriales, en vain.

Le surintendant adjoint Scott avait pleinement confiance en Ditchburn. Il savait qu’on pouvait compter sur lui pour appliquer avec force les politiques du ministère. Ditchburn fit honneur à cette confiance : il se dévoua sans relâche à son travail, refusant même de prendre les vacances auxquelles il avait droit. Au début des années 1930, cependant, sa santé était déclinante, et, en juin 1932, il partit à la retraite. Il mourut le 11 novembre chez lui, sur l’avenue Linden, à Victoria, et fut enseveli au cimetière Ross Bay, après un service funèbre conduit par l’ordre maçonnique.

William Ernest Ditchburn joua un rôle important dans la gestion du ministère des Affaires indiennes en Colombie-Britannique durant près de 20 ans. Même s’il se montra à l’occasion sensible aux droits et aux besoins des Autochtones, il mit surtout en œuvre une politique de conception et d’application répressives.

E. Brian Titley

BAC, RG10, vol. 3629, dossier no 6244-2.— C.-B., Ministry of Forests, Lands and Natural Resource Operations (Victoria), file 026076, sect. 3.— Daily Colonist (Victoria), 1897–1932.— Victoria Daily Times, 1911–1932.— Canada, Parl., Doc. de la session, 1912, 1914, 1916 (rapports du dép. des Affaires indiennes, 1911, 1913, 1915).— Douglas Cole et Ira Chaikin, An iron hand upon the people : the law against the potlatch on the northwest coast (Vancouver, 1990).— J. S. Milloy, A national crime : the Canadian government and the residential school system, 1879 to 1986 (Winnipeg, 1999).— D. G. Paterson, « The North Pacific seal hunt, 1886–1910 : rights and regulations », dans British Columbia : historical readings, W. P. Ward et R. A. J. McDonald, édit. (Vancouver, 1981), 343–366.— E. O. S. Scholefield et F. W. Howay, British Columbia from the earliest times to the present (4 vol., Vancouver, 1914).— E. B. Titley, A narrow vision : Duncan Campbell Scott and the administration of Indian Affairs in Canada (Vancouver, 1986).

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E. Brian Titley, « DITCHBURN, WILLIAM ERNEST », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 7 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/ditchburn_william_ernest_16F.html.

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Auteur de l'article:    E. Brian Titley
Titre de l'article:    DITCHBURN, WILLIAM ERNEST
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2019
Année de la révision:    2019
Date de consultation:    7 déc. 2024