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McCrimmon, Abraham Lincoln, professeur et auteur, né le 6 mars 1865 près de Delhi, comté de Norfolk, Haut-Canada, fils de Daniel McCrimmon et de Mary Miller ; le 15 avril 1889, il épousa à Port Royal, Ontario, Florence Beatrice Anderson (1870–1922), et ils eurent deux fils et une fille ; décédé le 16 avril 1935 à Hamilton et inhumé au cimetière de Port Royal.
Abraham Lincoln McCrimmon fréquenta l’école publique à Delhi et la Simcoe High School. Il étudia la philosophie avec George Paxton Young* à la University of Toronto, où il obtint une licence ès arts avec distinction en 1890 et une maîtrise ès arts en 1891. Il entreprendrait des études à la University of Chicago, pionnière dans l’enseignement de l’économie politique et de la sociologie. Il recevrait des doctorats honorifiques de la McMaster University de Toronto en 1904 et de l’Acadia University de Wolfville, en Nouvelle-Écosse, en 1924.
Athlète accompli dans sa jeunesse, McCrimmon pratiqua le baseball, le soccer, le rugby et le cricket. Il fit partie de l’équipe de baseball de son université de 1886 à 1890 ; durant cette période, selon l’Evening Telegram de Toronto, il retira jusqu’à 12 frappeurs d’affilée et participa à deux triples jeux. En outre, le Simcoe Reformer le décrivit comme « l’un des premiers joueurs de l’Ontario à lancer des balles courbes ». Il reçut des offres pour jouer au niveau professionnel, mais sa vraie passion résidait dans la vie scolaire et le service à sa communauté baptiste.
En 1892, McCrimmon entra au Woodstock College, école du sud-ouest de l’Ontario gérée par la Baptist Convention of Ontario and Quebec (BCOQ), pour y enseigner le latin et le grec. Quatre ans plus tard, on le désigna directeur intérimaire, puis, en 1897, on le nomma à titre permanent. Tout en conservant ce poste, il remplit à temps partiel une charge de maître de conférences en économie politique à la McMaster University (autre établissement de la BCOQ) à partir de 1904. McCrimmon quitta le Woodstock College en 1906, quand il devint professeur à temps plein à la McMaster University, où on lui offrit la chaire d’économie, d’éducation et de sociologie. Le 15 mai, le Toronto Daily Star lui souhaita la bienvenue en le décrivant comme « l’un des pédagogues les plus en vue au Canada ». Le Canadian Journal of Economics and Political Science de Toronto rapporterait qu’il s’intéressait « davantage à la philosophie qu’à l’économie », mais qu’il était « un professeur stimulant doté d’un grand talent pour amener [les élèves] à penser par eux-mêmes ». Sa progression rapide à des fonctions de direction à la McMaster University atteignit son apogée en 1911 : il succéda alors à Alexander Charles McKay* à titre de chancelier. Le stress et la maladie le contraignirent à démissionner en 1922. McCrimmon continua toutefois à enseigner à la McMaster University en tant que professeur d’éthique chrétienne, d’éducation et de sociologie. Il continua d’occuper ce poste, même après la réinstallation de l’établissement à Hamilton en 1930, jusqu’à sa mort, survenue cinq ans plus tard à son domicile à la suite d’une crise cardiaque.
Pendant la première partie de son mandat de chancelier, McCrimmon avait surtout répondu aux exigences imposées par la Première Guerre mondiale à l’intérieur du Canada. Durant cette période, ses discours empreints de patriotisme vinrent appuyer l’effort de guerre pour la défense de la justice et de l’Empire britannique ; de plus, il défendit activement l’instauration de la conscription par le gouvernement d’union de sir Robert Laird Borden en 1917. Dans un climat grandissant de sentiments anti-Allemands au Canada, il résista avec succès aux tentatives pour congédier de l’université un professeur allemand. La guerre exerça des pressions économiques et sociales sans précédent sur toutes les organisations, et la McMaster University n’y échappa pas. Il incomba à McCrimmon de faire face à la pénurie de personnel qui s’ensuivit – il se vit obligé de donner lui-même une bonne partie des cours de science politique et de sociologie – et au manque de fonds résultant du déclin des effectifs estudiantins. Même si, depuis la fondation de l’université [V. William McMaster*], tous les chanceliers avaient affronté des difficultés financières, « ces dernières n’[avaient] possiblement jamais été aussi éreintantes à gérer que pendant la guerre et les années de reconstruction subséquentes », affirma le McMaster Graduate en 1922.
Aussitôt la guerre terminée, des bouleversements théologiques exacerbèrent ces problèmes. Le conflit durait depuis longtemps. Elmore Harris, pasteur émérite de l’église baptiste Walmer Road, avait dénoncé en 1908 le fait que le libéralisme théologique s’était insinué dans le programme de la McMaster University et minait les fondements de la foi [V. William James McKay*]. À l’arrivée de McCrimmon comme chancelier, ces reproches se faisaient plus rares ; Thomas Todhunter Shields*, pasteur de l’église baptiste Jarvis Street, les raviva cependant en 1919. McCrimmon dut affronter des débats souvent houleux au sein de la BCOQ sur la doctrine enseignée à l’université. Cette discorde, les besoins engendrés par la guerre et la mort subite de sa femme en 1922 ébranlèrent vraisemblablement sa santé.
Les positions pédagogiques de McCrimmon, qu’il énonce dans son livre publié en 1920 à Toronto, The educational policy of the Baptists of Ontario and Quebec, consistaient en un mélange d’instruction chrétienne en matière de morale et de doctrine, d’excellence scolaire et d’édification d’une nation. Selon l’historien George Alexander Rawlyk*, McCrimmon adoptait une approche qui reposait sur un « puissant amalgame » d’innovation et d’orthodoxie, et s’appliquait à diriger la McMaster University de façon sûre, en la maintenant entre le Scylla du modernisme et le Charybde du fondamentalisme. Pour contrer la tendance à la laïcisation, il plaida pour une mainmise confessionnelle continue sur l’université. À cet effet, il exhorta la BCOQ, qui s’attendait à l’autonomie de l’établissement, à l’aider financièrement.
Dans son ouvrage majeur, The woman movement, paru à Philadelphie et à Toronto en 1915, McCrimmon passe en revue les droits et les rôles des femmes, de l’Antiquité jusqu’à son époque. Il se montre critique de la maltraitance infligée aux femmes à travers les siècles par diverses sociétés (dont celles de la chrétienté) et insiste sur le fait qu’elles doivent bénéficier d’un accès égal à l’éducation. Tout en soulignant les aspects maternels de leur physiologie, McCrimmon appuie de nouveaux rôles sociétaux pour les femmes et défend leur droit de vote. La BCOQ deviendrait en 1947 l’un des premiers organismes canadiens à ordonner des femmes, et des ouvrages comme The woman movement aidèrent à paver la voie vers une telle décision.
McCrimmon s’identifiait beaucoup à la confession baptiste et assuma des postes de direction dans ses organisations. Il servit à titre de vice-président de la General Convention of Baptists of North America de 1907 à 1911, et de président de 1911 à 1917. On l’élut à la tête de la BCOQ pour trois mandats : 1921–1922, 1930–1931 et 1931–1932. Président intérimaire du comité directeur de l’Alliance baptiste mondiale à son congrès de Berlin en 1934, McCrimmon fut l’un des deux seuls Canadiens à y livrer un discours important. Ces fonctions leur permirent, à lui et à son université, de gagner en prestige et de se faire connaître internationalement. En 1908–1909, il avait occupé la vice-présidence de la Moral and Social Reform League of Toronto, section locale du Moral and Social Reform Council of Ontario.
Au service commémoratif donné par la McMaster University en l’honneur d’Abraham Lincoln McCrimmon, Howard Primrose Whidden*, chancelier de l’université, et John James MacNeill, directeur de la faculté de théologie, firent l’éloge de ses contributions à la vie scolaire et à la vie confessionnelle. À propos de son héritage religieux, un journal baptiste déclara : « Probablement aucun autre homme de notre confession n’a eu une influence aussi grande, pendant une si longue période, sur un aussi grand nombre de nos missionnaires en sol canadien et à l’étranger. » Sur le plan institutionnel, son objectif de garder la McMaster University sous l’autorité baptiste ne se maintiendrait pas, car l’établissement deviendrait un organe provincial non confessionnel en 1957. La plus importante réalisation de McCrimmon au sein de l’université fut sans doute d’avoir réussi à la guider pendant les années tumultueuses de la guerre.
Outre les ouvrages mentionnés dans la biographie, Abraham Lincoln McCrimmon a écrit Baptists and Christian union (Toronto, s.d.), Baptists and denominationalism (Toronto, s.d.), The child in the normal home (Philadelphie, [1910]) et The birth status of a child […] (Toronto, 1925).
La vie de McCrimmon n’avait fait l’objet d’aucune publication. Pour la préparation de notre biographie, nous avons consulté la boîte consacrée à Abraham Lincoln McCrimmon aux Canadian Baptist Arch., situées au McMaster Divinity College (Hamilton, Ontario), qui contient des dossiers, des coupures de journaux, des originaux ou des copies de documents, ainsi que des notes de sermon. De l’information se trouve également dans : Canadian Baptist Arch., Chancellor’s corr., 1911–1922 ; C. M. Johnston et J. G. Greenlee, McMaster University (3 vol. parus, Toronto et Montréal, 1976– ), 1, 2 ; et G. A. Rawlyk, « A. L. McCrimmon, H. P. Whidden, T. T. Shields, Christian education, and McMaster University », Canadian Baptists and Christian higher education, G. A. Rawlyk, édit. (Montréal et Kingston, Ontario, 1988), 31–62.
Canadian Baptist (Toronto), 1911–1935.— « Abraham Lincoln McCrimmon », Link and Visitor (Toronto), juin 1935 : 7–8.— Robert Wright, A world mission : Canadian Protestantism and the quest for a new international order, 1918–1939 (Montréal et Kingston, 1991).
Gordon L. Heath, « MCCRIMMON, ABRAHAM LINCOLN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 7 juill. 2025, https://www.biographi.ca/fr/bio/mccrimmon_abraham_lincoln_16F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/mccrimmon_abraham_lincoln_16F.html |
Auteur de l'article: | Gordon L. Heath |
Titre de l'article: | MCCRIMMON, ABRAHAM LINCOLN |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2025 |
Année de la révision: | 2025 |
Date de consultation: | 7 juill. 2025 |