McLEOD, ALEXANDER RODERICK, trafiquant de fourrures et explorateur, né vers 1782 dans la province de Québec ; décédé le 11 juin 1840 dans le Bas-Canada.
Entré au service de la North West Company en 1802, Alexander Roderick McLeod travailla d’abord à la rivière de la Paix et dans la région de l’Athabasca ; il écrivit son journal de l’été de 1806 au fort Dunvegan (sur la rivière de la Paix). D’après l’historien James Nevin Wallace, c’était un homme de forte carrure qui joua un « rôle secondaire » dans la rivalité entre la Hudson’s Bay Company et la North West Company. À la fusion des deux compagnies, en 1821, on le nomma chef de poste dans le district de l’Athabasca. Sa carrière de trafiquant de fourrures entra alors dans une phase nouvelle et controversée. Dès la saison de 1822–1823, l’« usage déraisonnable et humiliant [qu’il faisait] de son autorité » dans le district du Mackenzie lui valut des critiques. En 1825, son affectation dans le district de la Colombie, situé plus au sud, fut le prélude d’une série d’incidents dramatiques qui allaient survenir dans la région de l’Oregon, où trafiquants britanniques et américains avaient des droits égaux et se faisaient concurrence.
Tandis que Peter Skene Ogden* ouvrait l’intérieur du territoire à la Hudson’s Bay Company en exploitant la région de la rivière Snake, à l’ouest McLeod était chargé de mener une série de missions le long de la côte de l’Oregon à partir du fort Vancouver (Vancouver, Washington). De cette façon, l’agent principal John McLoughlin* espérait battre toute la région à la recherche de fourrures et découvrir si, comme on le disait, il existait vraiment, quelque part entre le Columbia et la baie de San Francisco, une rivière qui coulait des Rocheuses jusqu’au Pacifique. Vu la difficulté de parcourir l’aire d’alimentation de la région de la Snake et du Grand Bassin, cette rivière, qu’on appelait par anticipation Buenaventura, aurait donné, si elle avait été navigable, une impulsion considérable au commerce. En fait, elle n’existait pas, mais pendant un certain temps on espéra que le Sacramento était le cours d’eau recherché. Quoi qu’il en soit, McLeod, que le gouverneur George Simpson* qualifia plus tard de personnage autoritaire, tout en reconnaissant qu’il était « excellent tireur, habile canotier et assez bon dans la traite avec les Indiens », ne se révéla pas particulièrement l’homme qui convenait pour cette recherche. Après avoir atteint le Columbia à l’automne de 1825, il se mit en route pour la rivière Umpqua (Oregon) en mai 1826, avec son convoi, pour passer l’été à faire du trappage. Mais, et cette situation se reproduirait par la suite, il rebroussa chemin avant d’être parvenu à destination. Du moins entendit-il dire par des Indiens qu’il y avait un « grand fleuve » au sud de l’Umpqua. En septembre 1826, comme McLoughlin l’avait chargé « de faire de la chasse et de l’exploration » dans cette région, il quitta de nouveau le fort Vancouver. Il dépassa l’Umpqua et atteignit la Tootenez (rivière Rogue) pour constater que cette rivière, qui n’avait rien de remarquable, était partiellement bloquée à son embouchure par un ensablement. En mars 1827, il était de retour au fort Vancouver.
McLeod passa l’hiver de 1827–1828 sur les bords de l’Umpqua, où il trouva peu de fourrures, puis au cours de l’été de 1828 il commanda une expédition punitive contre les Indiens klallams de Hood Canal (Washington), qui avaient tué cinq employés de la Hudson’s Bay Company. La mort de plus de 20 Indiens lui valut un blâme sévère de la part du comité de Londres de la compagnie, mais selon McLoughlin l’expédition avait été « menée très judicieusement ». À son retour, McLeod se vit d’ailleurs confier une tâche plus ambitieuse.
On espérait toujours trouver au sud un fleuve navigable, et de nouvelles précisions sur la région étaient parvenues au fort Vancouver après le meurtre de l’équipe du trafiquant américain Jedediah Strong Smith en juillet 1828. Deux mois plus tard, on chargeait McLeod d’aller récupérer le matériel de Smith et, à l’aide de la carte que celui-ci avait dressée de la piste qui partait de la baie de San Francisco, de mener la pénétration de la Hudson’s Bay Company dans la Californie mexicaine. Aucune effusion de sang ne marqua la première partie de la mission, mais McLeod laissa ensuite ses hommes près de l’Umpqua, contrairement aux ordres, et remonta au fort Vancouver « pour recevoir des instructions » et, disaient certains, pour y passer Noël et voir sa famille. Envoyé rejoindre son convoi en janvier, il continua vers le sud et, après avoir combattu les Indiens qui se trouvaient sur son chemin, atteignit la vallée de Sacramento en avril. Toutefois, l’hiver surprit son équipe dans les montagnes du nord de la Californie, au moment où elle remontait vers le nord, hors de la zone d’influence mexicaine. McLeod perdit ses chevaux, cacha ses fourrures (que la fonte des neiges allait abîmer) et, après avoir laissé ses compagnons sur l’Umpqua, arriva au fort Vancouver en février 1830.
Beaucoup jugèrent sa conduite incompétente et irresponsable mais quelques-uns, dont son ami John Stuart et, ce qui surprend peut-être davantage, Simpson, virent dans sa mauvaise santé une justification de sa conduite. McLeod lui-même nota combien il avait été difficile de traverser ce territoire accidenté avec des hommes sans enthousiasme. Mais le comité de Londres, pour dénoncer son « manque extrême d’énergie et de zèle », lui refusa en mars la nomination d’agent principal qu’il espérait et le fit muter l’année suivante dans le district du Mackenzie. Même si McLeod n’en rapporta jamais de grandes quantités de fourrures, ses expéditions « dans le sud » contribuèrent quand même nettement à maintenir la présence de la Hudson’s Bay Company dans la région de l’Oregon.
Dès lors, la carrière de McLeod fut sans histoires. En 1833, après avoir quitté le fort Simpson (Fort Simpson, Territoires du Nord-Ouest) pour aller refaire sa santé au Canada, il reçut en cours de route une lettre de Simpson. Il lui disait qu’il « aurait fait un excellent guide » et lui promettait d’appuyer sa promotion au rang d’agent principal s’il acceptait d’accompagner l’expédition arctique de George Back*. McLeod accomplit fidèlement cette tâche jusqu’en 1835, en compagnie de sa femme indienne et de ses trois enfants. Toutefois, par suite d’une entente, il ne descendit pas avec l’explorateur la grande rivière des Poissons (rivière Back) jusqu’à l’océan Arctique, mais il chassa, pêcha et monta des campements pour les membres de l’expédition. La compagnie le récompensa en le nommant agent principal en 1836. Affecté au Grand lac des Esclaves de 1835 à 1837 et au fort Dunvegan de 1837 à 1839, il quitta ensuite le Nord-Ouest.
Alexander Roderick McLeod mourut en juin 1840, pendant un congé. Il légua « quelques modestes biens » et environ £5 000 à la femme sang-mêlé qu’il avait épousée à la façon du pays à l’époque où il travaillait pour la North West Company, ainsi qu’à ses sept enfants survivants, dont Sarah* et Alexander Roderick, qui avait appartenu à l’éphémère armée de libération de James Dickson. À l’encontre de bien des trafiquants pareillement mariés, McLeod considérait sa compagne comme son « épouse légitime ». D’ailleurs en 1841 le Doctors’ Commons d’Angleterre déclara leur mariage légalement valide.
PAM, HBCA, A.6/22 : fo 60 ; A.36/10 : fos 9–18 ; B.39/b/2 : 86 ; D.4/22 : fo 40d ; D.4/123 : fos 58–66.— George Back, Narrative of the Arctic land expedition to the mouth of the Great Fish River, and along the shores of the Arctic Ocean in the years 1833, 1834, and 1835 (Londres, 1836).— HBRS, 3 (Fleming) ; 4 (Rich) ; 23 (Davies et Johnson) ; 30 (Williams).— The Hudson’s Bay Company’s first fur brigade to the Sacramento valley : Alexander McLeod’s 1829 hunt, D. B. Nunis, édit. (Sacramento, Calif., 1968).— Brown, Strangers in blood.— R. H. Dillon, Siskiyou trail : the Hudson’s Bay Company route to California (New York, [1975]), 163–164, 177.— Van Kirk, K « Many tender ties ».— J. N. Wallace, The wintering partners on Peace River from the earliest records to the union in 1821 ; with a summary of the Dunvegan journal, 1806 (Ottawa, 1929), 78, 122–134.
Glyndwr Williams, « McLEOD, ALEXANDER RODERICK », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/mcleod_alexander_roderick_7F.html.
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Auteur de l'article: | Glyndwr Williams |
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1988 |
Année de la révision: | 1988 |
Date de consultation: | 2 déc. 2024 |