ROBSON, JOSEPH, maçon, arpenteur et ingénieur au service de la Hudson’s Bay Company, circa 1733–1763.

Joseph Robson entra au service de la Hudson’s Bay Company en 1733 ; on l’engagea comme maçon pour une période de trois ans, au salaire annuel de £25 ; il devait participer à la construction du fort Prince of Wales (Churchill, Man.), imposant ouvrage en pierre. Il retourna à la baie d’Hudson en 1744, pour une autre période de trois ans, cette fois au salaire de £32, et en qualité « d’arpenteur et de surveillant des constructions » à York (York Factory, Man.), puis de nouveau à Churchill pendant la dernière année. Une des raisons probables de la double nature de sa nouvelle affectation résidait dans la volonté de la compagnie d’obtenir des renseignements plus précis au sujet des régions qui avoisinaient ses postes le long de la baie ; à cause de ce manque de connaissance, elle était la cible des attaques d’Arthur Dobbs et des autres détracteurs. Robson publia des cartes et on trouve dans les archives de la Hudson’s Bay Company la preuve que Robson ne prit pas son travail d’arpentage à la légère. Muni d’une trousse d’instruments d’arpentage, il remonta la rivière Nelson et l’explora sur une longueur de 40 à 50 milles ; il traça des cartes marines et bathymétriques de son parcours et dressa le plan du poste de York. Il fit également un plan du fort Prince of Wales et dressa une carte de la partie inférieure de la rivière Churchill.

La troisième année, il la passa à Churchill, où on l’envoya à la suite de querelles avec les autres employés de York, et cette dernière année fut, elle aussi, fort mouvementée. Il était là depuis seulement quelques jours et déjà il était impliqué dans des dissensions avec l’agent, Robert Pilgrim, au sujet de la construction du fort ; cette mésentente et aussi des bruits qui couraient, selon lesquels « le gouverneur était un homme étrange », incitèrent Robson à tenir un journal dans lequel il consignait les expériences qu’il vivait. Ce journal existe toujours et sa lecture révèle l’existence d’incessantes querelles entre Pilgrim et Robson lesquelles atteignirent leur point culminant juste avant le départ de Robson pour l’Angleterre en août 1747, lorsqu’on l’accusa avec d’autres de quasi-mutinerie. Ce même automne, dans sa lettre au comité de Londres, Pilgrim fit observer que Robson et deux autres hommes « s’étaient déclarés [les] ennemis [de ces] messieurs ».

Étant donné cette histoire sur son compte, il n’est pas étonnant qu’à son retour en Angleterre Robson ait été entraîné dans la campagne que Dobbs avait déclenchée contre la Hudson’s Bay Company ; il témoigna devant le comité parlementaire de 1749 qui enquêtait sur le commerce à la baie d’Hudson. Dans sa déposition, il critiqua modérément la compagnie qui, à son avis, avait adopté avec les Indiens des normes de commerce trop rigides et dont les employés montraient de la répugnance à développer l’intérieur des terres ; il ne s’enflamma que pour fustiger les agents des forts York et Churchill et dénoncer leur ingérence d’amateurs dans la construction des forts ; dans l’ensemble, ce témoignage doit avoir désappointé Dobbs. Robson lui-même vient confirmer cette impression dans son livre, An account of six years residence in Hudson’s-Bay, paru en 1752, lorsqu’il fait allusion à sa déposition devant le comité parlementaire : « Par manque de confiance et d’aptitude à m’exprimer clairement, le compte rendu que j’ai fait alors fut loin d’être aussi exact et aussi complet que celui que je comptais donner. »

Le livre de Robson est de première importance, puisqu’il est le premier ouvrage à refléter une connaissance de première main du service pour le compte de la Hudson’s Bay Company et qu’il est l’œuvre d’un homme qui a passé six ans à la baie d’Hudson. (D’autres auteurs, tel Henry Ellis, n’y ont vécu qu’un hiver.) L’ouvrage de Robson, qui reproduit des cartes des rivières Nelson, Hayes et Churchill, la table des vents et marées, des données sur le coût de la construction du fort Prince of Wales, a un accent d’authenticité ; il est « honnête et juste », comme l’a qualifié l’auteur d’une recension. Ses critiques à l’endroit de la Hudson’s Bay Company n’en ont donc que plus de poids tout comme ses accusations touchant la conduite despotique des agents de la compagnie, leur refus d’explorer le continent et leur incompétence en matière de construction. Robson résume la cause des adversaires de la compagnie par une phrase vigoureuse : « La Compagnie dort depuis quatre-vingts ans sur le littoral d’une mer de glace ; elle n’a nullement manifesté la curiosité d’aller elle-même plus avant et a employé tout son art et son pouvoir à anéantir cet esprit de curiosité chez d’autres. » Ce jugement d’ensemble est appuyé par un appendice de 64 pages qui scrute l’histoire de la compagnie et les dépositions produites par ses porte-parole devant le comité parlementaire de 1749. Des recherches récentes ont révélé que c’est Dobbs, et non Robson, qui a rédigé ce long appendice à caractère polémique, qu’il a, de plus, revu le texte de Robson et qu’il visait à ce que le livre « expose plus en détail l’administration de la Compagnie ». Bref, même si sur certaines questions techniques qui se rapportent à la construction des forts, le témoignage de Robson est probablement digne de foi, on doit néanmoins considérer comme partiaux et manquant d’objectivité ses commentaires plus généraux sur la ligne de conduite de la compagnie.

Après 1752, on n’entend plus parler de Robson jusqu’en 1763, alors qu’il fait une brève apparition à l’occasion de la publication de son second livre, The British Mars. Cet ouvrage est surtout consacré aux techniques de la guerre côtière et à l’art des fortifications, mais il contient un passage dans lequel il reprend les accusations qu’il avait portées, bien des années plus tôt, contre la Hudson’s Bay Company et suggère que la recherche d’un passage au nord-ouest par la baie d’Hudson soit tentée à nouveau. Dans la préface, Robson parle de sa « pratique et de son expérience de plus de trente ans dans tous les genres de fondations et de murs, tant sur mer que sur terre » ; on n’a pu mettre à jour d’autres documents touchant cette dernière partie de la carrière de Robson.

Glyndwr Williams

Il est question de la carrière de Robson dans la compagnie aux HBC Arch. A.1/36, p. 145 ; A.1/122, p. 83 ; A.6/7, ff.92d, 95 ; A.11/13, ff.24d, 101, 102 ; A.11/114, f.121. Son journal du fort Churchill pour 1746–1747 se retrouve sous la cote B.42/a/30 ; sa déposition devant le comité parlementaire de 1749 est publiée dans Report from the committee on Hudson’s Bay, 215–217. La preuve que Dobbs est le coauteur de An account of six years residence in Hudson’s Bay, from 1733 to 1736, and 1744 to 1747 [...] (Londres, 1752) se trouve au Public Record Office de l’Irlande du Nord, D.162/62, et a été analysée par Glyndwr Williams dans Arthur Dobbs and Joseph Robson : new light on the relationship between two early critics of the Hudson’s Bay Company, CHR, XL (1959) : 132–136. On trouvera des commentaires de l’époque sur le livre de Robson dans Gentleman’s Magazine, 1752, 290 ; Monthly Review (or Literary Journal) (Londres), VII (1752) : 75s. ; Jacques Savary Des Bruslons, The universal dictionary of trade and commerce, by Malachy Postlethwayt (2 vol., Londres, 1751–1755), I : 961. Le deuxième livre de Robson s’intitule : The British Mars : containing several schemes and inventions, to be practised by land or sea against the enemies of Great-Britain [...] (Londres, 1763).  [g. w.]

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Glyndwr Williams, « ROBSON, JOSEPH », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 4 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/robson_joseph_3F.html.

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Auteur de l'article:    Glyndwr Williams
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1974
Année de la révision:    1974
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