CARSON, WILLIAM OLIVER, bibliothécaire et fonctionnaire, né le 8 mars 1874 à London, Ontario, fils de William John Carson, instituteur, et de Flora McDonald ; le 31 octobre 1900, il épousa dans cette ville Elma Pearl Ashwell (décédée le 16 février 1965), et ils eurent deux filles ; décédé le 27 septembre 1929 à Toronto et inhumé au cimetière Mount Pleasant, London.

William Oliver Carson étudia à London, où son père devint directeur d’école et, en 1891, inspecteur des écoles publiques. Dans sa jeunesse, il travailla comme photographe et se fit élire échevin. D’aucuns attribuèrent à l’influence des conservateurs sur la scène municipale sa nomination au poste de bibliothécaire de la London Public Library en décembre 1906, mais Carson ne tarda pas à faire preuve des aptitudes nécessaires en matière d’administration. En 1908, il ouvrit l’accès aux rayons de livres, y compris ceux des œuvres de fiction, et deux ans plus tard il réorganisa la salle de consultation et la salle de lecture. Il préconisa la formation en cours d’emploi pour les assistants prometteurs et fit connaître la bibliothèque en prenant la parole devant des groupes telle la London and Middlesex Historical Society. L’aménagement d’une salle pour les enfants en 1913 fut suivi en 1915 par la nomination d’un bibliothécaire à temps plein pour eux et par l’instauration d’une heure du conte. Le 23 décembre 1915, une succursale ouvrit ses portes à l’angle des rues Dundas et Rectory, dans l’est de la ville. Elle serait relocalisée en 1926 à l’intersection des rues Dufferin et Quebec. En 1961, on lui donnerait le nom de W. O. Carson Branch Library en mémoire de l’ancien bibliothécaire en chef.

Carson se distingua à l’Ontario Library Association. Entré au comité directeur en 1911 à titre de conseiller, il occupa la présidence en 1914–1915 et prit régulièrement la parole aux assemblées annuelles. En 1912, il présenta une communication qui rendait compte d’une réflexion sérieuse sur les bienfaits de l’instruction et de la formation professionnelle chez les bibliothécaires. Dans son discours présidentiel en 1915, il exposa les grandes lignes de sa philosophie : les bibliothèques publiques connaîtraient un essor continu et deviendraient une force réelle sur le plan national si elles avaient un solide financement local, une direction et des services efficaces ainsi que de bonnes relations avec le milieu.

Grâce à l’impression qu’il faisait sur la scène provinciale, Carson se trouva en bonne position lorsqu’il posa sa candidature au poste d’inspecteur des bibliothèques publiques au département de l’Éducation de l’Ontario. Il fut effectivement choisi et assuma ses fonctions en avril 1916. Son bureau veillait au développement des bibliothèques publiques, collaborait avec des établissements connexes, dont la Canadian Free Library for the Blind, et subventionnait plus de 30 sociétés historiques, littéraires et scientifiques. Malgré l’austérité des années de guerre, Carson fit preuve de dynamisme dès son arrivée. La publication de l’Ontario Library Review and Book-Selection Guide fut sa première réforme. Créé en juin 1916, financé par le gouvernement provincial et distribué dans toutes les bibliothèques, ce périodique tenait les lecteurs au courant d’importantes questions relatives aux bibliothèques et servait de guide dans le choix des livres. L’Ontario Library Review connut un succès immédiat ; Carson lui-même y publia de nombreux éditoriaux et articles. En 1917, pour rehausser la compétence des bibliothécaires, il appliqua la décision de porter à deux mois la durée du programme départemental offert en école de formation.

L’inspecteur Carson entreprit aussi de réexaminer tous les aspects de la loi sur les bibliothèques publiques, et particulièrement ceux qui avaient trait au financement provincial et municipal (resté à peu près inchangé depuis 1882). Dès le début de 1920, il était en mesure de proposer une série de révisions au Public Libraries Act. On y trouvait notamment une hausse de la taxe municipale affectée aux bibliothèques (elle serait au minimum de 50 cents par habitant), une bonification des règlements sur la qualification des bibliothécaires ainsi que l’attribution de pouvoirs supplémentaires au ministre de l’Éducation pour l’amélioration des voitures-bibliothèques, la formation des bibliothécaires et les normes administratives. La nouvelle loi fut bien accueillie et la taxe minimum par habitant – une innovation – serait adoptée ailleurs en Amérique du Nord dans les décennies suivantes.

Persuadé que le succès des bibliothèques reposait sur un personnel qualifié, Carson avait convaincu le département de porter à trois mois la durée de la formation des bibliothécaires en 1919. La Toronto Public Library abrita la Training School for Librarianship (rebaptisée Ontario Library School en 1923) jusqu’en 1927. Dorothy A. Thompson, que Carson avait engagée comme assistante à la direction des bibliothèques publiques, occupa le poste d’instructrice principale de 1920 à 1927. Pour encourager les inscriptions, il n’y avait pas de frais de scolarité, les manuels et le matériel étaient fournis, et une grande partie des frais de déplacement des élèves étaient remboursés.

Bien que cette courte formation ait répondu à la plupart des besoins dans les années 1920, Carson estimait que l’idéal était un cours professionnel d’une année, comme il en existait dans les écoles de bibliothéconomie de diverses universités américaines. Toutefois, un tel programme commença seulement en septembre 1928. Placé sous la direction de Winifred Glen Barnstead*, il se donnait à l’Ontario College of Education, en collaboration avec la University of Toronto. Encore là, le département de l’Éducation participait au financement de l’école. L’université décernait des diplômes aux finissants et le département leur remettait des certificats.

Carson augmenta les attributions de la direction des bibliothèques publiques et offrit à son personnel des locaux plus grands. Le travail de ses employés consistait en bonne partie à assigner des voitures-bibliothèques à des régions rurales et à vérifier plus de 500 rapports annuels de bibliothèques. En outre, la direction fit œuvre de pionnière au Canada en publiant en 1920 Reference work and reference works : containing hints on reference library service […]. L’inspecteur n’était pas toujours à l’abri de la controverse. Bien à contrecœur, après que le ministre de l’Éducation, Robert Henry Grant, lui eut commandé un rapport spécial sur la Hamilton Public Library, au début de 1921, Carson passa au crible les activités de cette bibliothèque. Les mesures correctrices qu’il proposa suscitèrent quelque désaccord, mais permirent en définitive d’améliorer les services.

Dans les années 1920, Carson consacra beaucoup d’énergie à l’American Library Association. Il appartint au conseil de cet organisme durant deux mandats. Nommé au nombre des sept commissaires qui, de 1924 à 1926, réalisèrent pour le compte de l’association une étude remarquée sur l’éducation des adultes, il rédigea un chapitre consacré aux activités canadiennes. À la conférence annuelle de l’association à Seattle en juillet 1925, où Carson présida trois réunions des membres canadiens, puis à l’assemblée tenue par l’association à Toronto en 1927, un intérêt grandissant se manifesta pour la création d’une association canadienne de bibliothèques affiliée à l’American Library Association, mais lui-même refusait de soutenir cette idée. Tout comme le premier ministre de la province et le ministre de l’Éducation, George Howard Ferguson*, il répugnait à sanctionner des initiatives liées de trop près à des organismes américains. De plus, selon lui, une organisation nationale fondée à ce moment-là aurait peu de chances de survie. Inspiré par la collaboration entre l’Ontario Library Association et le département de l’Éducation, il privilégiait une méthode progressive : créer d’un bout à l’autre du pays des associations ou conseils provinciaux qui formeraient la base d’une organisation nationale. Son collègue George Herbert Locke*, bibliothécaire en chef à la Toronto Public Library et président de l’American Library Association en 1926–1927, fut un bien plus fervent partisan de la création d’une organisation pancanadienne et défendit mieux que lui la cause des bibliothèques ontariennes sur le plan national.

Mince et de constitution plutôt frêle, William Oliver Carson était un homme résolu et persuasif. Son sens du devoir, son intégrité et son pragmatisme pouvaient lui permettre d’arriver à ses fins, mais sa popularité pouvait en souffrir. Il fréquentait l’église presbytérienne (unie) Bloor Street. Du fait de son instruction, de ses préoccupations administratives, de sa propension à agir lentement ainsi que de ses rôles sur les scènes locale et provinciale, les initiatives d’envergure nationale – la formation d’une association canadienne de bibliothèques, par exemple – ne lui convenaient pas. Par contre, la London Public Library et les bibliothèques gratuites de l’Ontario tirèrent grand profit de ses idées et de son travail durant près d’un quart de siècle. Les éléments les plus durables de son œuvre furent l’Ontario Library Review, qui continua de paraître jusqu’en 1982, le Public Libraries Act de 1920, qui servit de canevas aux lois adoptées jusqu’en 1966, la formation professionnelle et l’accréditation des bibliothécaires de même que l’expansion de la direction des bibliothèques publiques.

Lorne D. Bruce

William Oliver Carson a rédigé de nombreux articles, dont : « Reference work in the library », « The status and training of the public librarian », « The Canadian public library as a social force » et « Libraries in war-time and some factors that require consideration », Ontario Library Assoc., Proc. (Toronto), 1909 : 22–35 ; 1912 : 106–114 ; 1915 : 36–42 ; 1917 : 59–62 ; « The Ontario public library rate », American Library Assoc., Bull. (Chicago), 15 (1921) : 126–128 ; « Canadian considerations », dans Libraries and adult education ; report of a study made by the American Library Association (Chicago, 1926), 93–102 ; et « Public libraries of Ontario », Library Journal (New York), 52 (1927) : 451–456. Son « Report of special inspection of the Hamilton Public Library » (texte dactylographié, 1921) et quelques documents connexes sont conservés à la Hamilton Public Library, Special Coll. Dept. (Hamilton, Ontario), Arch. of the Hamilton Public Library, I-A-3. La documentation à la London Public Library (London, Ontario) comprend des rapports annuels et des procès-verbaux du conseil de la bibliothèque de 1905 à 1930, ainsi qu’un index de coupures de journaux de la bibliothèque et du musée d’art, vol. 1, 1914–1964, et une photographie de Carson (reproduite dans notre ouvrage intitulé Free books for all [...] cité ci-dessous).

AO, F 1195 ; RG 2-43, library inspectors’ records, 1911–1937 ; RG 2-146 ; RG 2-226 ; RG 2-227 ; RG 2-228 ; RG 2-232 ; RG 2-373 ; RG 80-5-0-281, nº 10868 ; RG 80-8-0-1120, nº 7043.— L. [D.] Bruce, Free books for all : the public library movement in Ontario, 1850–1930 (Toronto, 1994).— G. H. Locke et al., « Mr. W. O. Carson », Ontario Library Rev. (Toronto), 14 (1929–1930), nº 2 : 40s.— Ontario, Legislative Assembly, Sessional papers, rapports de l’inspecteur des bibliothèques publiques, dans les rapports du ministre de l’Éducation, 1916–1928.— Standard dict. of Canadian biog. (Roberts et Tunnell), 1.— Basil Stuart-Stubbs, « 1925 : CLA launched... in Seattle ? » ; « 1925 : CLA launched... in Seattle ? part 2 » ; « 1927 : CLA born again... in Toronto ? » et « 1927–30 : the muddle years [CLA] », Feliciter (Ottawa), 44 (1998), nº 5 : 20–25 ; nº 6 : 26–31 ; 45 (1999) : 98–105, 122 ; 46 (2000) : 148s.

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Lorne D. Bruce, « CARSON, WILLIAM OLIVER », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 10 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/carson_william_oliver_15F.html.

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Auteur de l'article:    Lorne D. Bruce
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2005
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