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BENNETT, MILDRED MARIANN (Herridge), adjointe et hôtesse politique, née le 26 mars 1889 à Hopewell Cape, Nouveau-Brunswick, benjamine de Henry John Bennett et de Henrietta Stiles ; le 14 avril 1931, elle épousa à Ottawa William Duncan Herridge*, et ils eurent un fils ; décédée le 12 mai 1938 à New York et inhumée six jours plus tard à Vancouver.
La naissance de Mildred Mariann Bennett surprit ses parents : sa mère était alors dans la mi-quarantaine et le plus jeune de ses quatre enfants vivants (elle avait perdu l’un de ses fils en 1876) avait huit ans. La construction de navires en bois, occupation de la famille pendant près de cent ans, avait connu une période difficile à la fin du xixe siècle. Le fils aîné, Richard Bedford Bennett*, s’en sortait cependant bien à Calgary, où il s’était établi en 1897 pour travailler au cabinet d’avocats de James Alexander Lougheed*. Lorsque son père mourut en 1905, Dick, comme on l’appelait, assuma le rôle de chef de famille ; ce fut fort probablement lui qui paya les droits de scolarité de Mildred Mariann qui s’inscrivit, la même année, à l’école de jeunes filles du Mount Allison College de Sackville, au Nouveau-Brunswick. Elle devint une femme intelligente, extravertie, affable et sûre d’elle, et ce, en grande partie grâce à son frère Dick.
Les voyages constituèrent une partie informelle, mais assurément marquante, de l’éducation de Mildred Mariann pendant son adolescence, quand Dick commença à l’inviter à l’accompagner en Grande-Bretagne et en Europe continentale. Malgré une différence d’âge de près de 19 ans (qui alimenta sans doute la rumeur voulant qu’elle soit la fille de Bennett et de Jennie Grahl Hunter Eddy [Shirreff*]), le frère et la sœur nouèrent une relation exceptionnellement affectueuse et toujours parfaitement correcte. Mildred Mariann adorait aider Dick à se procurer des vêtements dans les quartiers chics de Londres, tandis qu’il veillait à ce qu’elle rencontre des gens, voie des endroits et vive des expériences que peu de ses contemporains canadiens ne connaîtraient jamais. Ils furent bons l’un pour l’autre, même s’il lui reprocherait à l’occasion d’avoir pris un verre de champagne ou porté des achats à son compte. Le frère ne pouvait pas en vouloir longtemps à sa sœur. Elle savait calmer son tempérament impulsif, et l’éloignait souvent des confrontations belliqueuses avec ceux dont il aurait besoin de l’appui.
À l’obtention de sa licence, en 1911, Mildred Mariann retourna à Hopewell Cape pour demeurer avec sa mère et sa sœur Evelyn Read, institutrice. Peu après le décès de Henrietta en 1914, Evelyn Read épousa le médecin Horace Weldon Coates ; le couple s’installa à Vancouver, où Horace Weldon avait trouvé un poste. Dick, qui connaissait une double carrière florissante en affaires et en droit, acheta une maison aux jeunes mariés, et Mildred Mariann alla vivre en Colombie-Britannique avec eux. Elle apporta son soutien à sa sœur, dont le mari servit en qualité de médecin militaire durant la guerre, et rendit souvent visite à son grand frère à Calgary, où il lui louait une chambre adjacente à sa suite au Palliser Hotel.
En 1927, le Parti conservateur du Canada tint à Winnipeg son premier congrès à la direction pour sélectionner le successeur d’Arthur Meighen*, qui avait démissionné après la défaite électorale de 1926. Le suppléant de Meighen, Hugh Guthrie, se résoudrait finalement à briguer le poste de manière permanente. Mildred Mariann prit part à l’affaire, d’abord en aidant l’organisateur en chef, le major-général Alexander Duncan McRae*. Puis, son frère décida de se lancer dans la course et, le 13 octobre, on le choisit comme nouveau chef du parti. Il dut sa victoire en bonne partie à sa sœur : elle lui avait servi d’émissaire officieuse auprès des déléguées, qui représentaient environ 15 % du total. Lorsque son frère devint chef du Parti conservateur, Mildred Mariann sembla trouver sa voie. Elle promit de rester travailler avec lui jusqu’à son élection au poste de premier ministre. Partout où il fit campagne durant les trois années suivantes, elle était à ses côtés.
Richard Bedford et Mildred Mariann Bennett formaient une équipe formidable. Orateur éloquent, il manquait cependant singulièrement de qualités sociales. Elle compensait très largement cette lacune. Contrairement à son frère, elle respirait le charme et la joie de vivre. L’organisateur du parti chevronné et journaliste Arthur Rutherford Ford* écrirait dans ses mémoires, As the world wags on, publiés à Toronto en 1950, qu’« elle avait tout le tact et la diplomatie, la bienveillance et l’entregent qui faisaient souvent défaut à M. Bennett ». Les stratèges profitèrent judicieusement de son charisme auprès des Canadiens et, en particulier, des électrices. « Je crois qu’on aimerait voir votre sourire », lui conseilla franchement McRae au début de la tournée électorale fédérale de 1930. À l’aide d’une nouvelle technologie, le parti la présenta sur un disque promotionnel pour gramophone à diffuser pendant les « thés d’après-midi et autres activités pratiquées par les dames ». La solide majorité que les conservateurs remportèrent le 28 juillet résulta en bonne partie du travail de Mildred Mariann Bennett.
Richard Bedford Bennett prêta serment à titre de premier ministre le 7 août, et Mildred Mariann figure à ses côtés sur la photographie de presse officielle. Elle s’installa dans une suite adjacente à celle de son frère au château Laurier. Lorsqu’il prit le bateau pour se rendre à Londres en octobre afin d’assister à la Conférence impériale, elle l’accompagna en tant que membre important de son entourage. Toutefois, son rôle de « première dame » officieuse changerait incessamment. Pendant la campagne électorale, Mildred Mariann et le major William Duncan Herridge, héros de guerre et éminent avocat d’Ottawa, s’étaient épris l’un de l’autre. Ancien libéral, celui-ci avait coupé les ponts avec le chef du parti, William Lyon Mackenzie King*, en 1926, au moment de l’affaire King-Byng [V. Julian Hedworth George Byng], et avait par la suite intégré l’équipe conservatrice à titre de rédacteur de discours et de conseiller. On lui doit certains des messages électoraux de Bennett les plus mémorables sur les conséquences de ce qu’on appellerait la grande dépression, comme son engagement à « percer » les marchés internationaux et sa promesse de mettre un terme au chômage, sinon de « périr en essayant de le faire ».
Dans sa jeunesse, Mildred Mariann avait fait le serment à son frère de ne pas se marier avant lui, mais elle avait changé d’idée après avoir atteint la quarantaine. Le premier ministre annonça les fiançailles du couple le 2 avril 1931. Le mariage se déroula à la Chalmers United Church 12 jours plus tard et constitua l’un des grands événements de la vie sociale d’Ottawa. Le Globe du 15 avril 1931 rapporta que le premier ministre avait « semblé profondément ému au moment de donner en mariage sa sœur bien-aimée, qui avait été une compagne quasi inséparable durant de nombreuses années ». Après une lune de miel en Europe, le couple s’installa à Washington, où William Duncan Herridge succéda à Charles Vincent Massey* comme envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire du Canada aux États-Unis. On avait annoncé sa nomination au cours du mois précédant les noces. Des cyniques la ridiculisèrent en disant que ce n’était que le cadeau de mariage de Bennett, que certains députés partisans accusèrent d’avoir prélevé sur les fonds publics les sommes nécessaires à la lune de miel. Herridge se montrerait toutefois un ambassadeur énergique et compétent. Sa femme mit à profit ses talents d’hôtesse chaleureuse dans la capitale américaine ; cependant, elle continua d’accompagner son frère dans de grands événements mondains et des cérémonies à Ottawa, notamment à la Conférence économique impériale en juillet 1932. Sa présence aux côtés du premier ministre cet été-là ne passa pas inaperçue, d’autant plus qu’elle avait donné naissance à un fils seulement deux mois plus tôt, à l’âge de 43 ans.
Mildred Mariann Herridge se sentit à l’occasion tiraillée entre les deux hommes de sa vie. À l’époque de son mariage, elle avait révélé ses sentiments contradictoires dans un bref message adressé à « Dick, [son] très cher frère » : « Parfois, je songe à quel point j’aime Bill – je t’ai aimé et apprécié encore plus. » Cette double loyauté devint une source croissante de tension en 1935, lorsque son mari et son frère se disputèrent au sujet de la stratégie à adopter à l’approche des élections fédérales. Le premier ministre avait alors banni son beau-frère du cercle intime de ses conseillers. Avec la défaite décisive du gouvernement conservateur en octobre 1935, Bennett retourna sur les bancs de l’opposition, et les Herridge revinrent à Ottawa. Mme Herridge accompagna son frère en Angleterre en 1937 à l’occasion du couronnement de George VI. Ils ne voyageraient désormais plus ensemble, car elle avait eu un diagnostic de cancer. Après la cérémonie, ils se rendirent dans une station thermale en Allemagne ; Richard Bedford souffrait de problèmes cardiaques, et son médecin lui avait recommandé du repos. Mildred Mariann recevrait des traitements dans un hôpital de New York. Le printemps suivant, peu après que son frère eut annoncé sa démission, sa santé se détériora, et elle retourna à l’hôpital. Une lettre qu’elle envoya à son frère à la suite de sa visite témoigne de la profondeur de son affection pour lui : « Que c’était merveilleux de ta part de venir me voir hier, et que cela m’a fait du bien de voir mon cher grand frère, qui m’a toujours précédée dans la vie et parsemé de roses mon chemin. » Cinq semaines plus tard, elle succomba, laissant un énorme vide dans l’existence de son mari, de son jeune fils et de son frère. Conformément à ses souhaits, après ses obsèques à Ottawa, on l’inhuma aux côtés de sa sœur au cimetière Mountain View, à Vancouver.
La vie de Mildred Mariann Bennett (Herridge) symbolise à certains égards l’évolution des attentes relatives au rôle des femmes au début du xxe siècle. Malgré son instruction, elle n’eut pas de carrière proprement dite. Cependant, peu d’hommes pouvaient gérer une foule aussi bien qu’elle, talent qui aida son frère à devenir premier ministre et son mari à réussir comme diplomate. Elle montra le potentiel des femmes et leur capacité de sortir de la sphère privée pour participer à la vie publique. Morte prématurément, à l’âge de 49 ans, elle n’en a pas moins influencé la politique nationale. D’autres femmes suivraient ses traces.
Globe and Mail, 13, 16 mai 1938.— Ottawa Citizen, 2 avril 1931.— Ottawa Evening Journal, 14 avril 1931.— L. A. Glassford, Reaction and reform : the politics of the Conservative Party under R. B. Bennett, 1927–1938 (Toronto, 1992).— J. H. Gray, R. B. Bennett : the Calgary years (Toronto, 1991).— P. B. Waite, In search of R. B. Bennett (Montréal et Kingston, Ontario, 2012) ; The loner : three sketches of the personal life and ideas of R. B. Bennett, 1870–1947 (Toronto, 1992).
Larry A. Glassford, « BENNETT, MILDRED MARIANN (Herridge) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 11 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/bennett_mildred_mariann_16F.html.
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Auteur de l'article: | Larry A. Glassford |
Titre de l'article: | BENNETT, MILDRED MARIANN (Herridge) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2023 |
Année de la révision: | 2023 |
Date de consultation: | 11 déc. 2024 |