DAGNEAU DOUVILLE, ALEXANDRE, officier dans les troupes de la Marine, interprète et trafiquant de fourrures, né en avril ou en mai 1698 à Sorel (Québec), fils de Michel Dagneau Douville et de Marie Lamy, décédé à Verchères (Québec) en 1774.

Alexandre Dagneau Douville était âgé de 18 ans quand il débuta dans la traite des fourrures. Au cours des 15 années qui suivirent, il allait mener un trafic considérable chez les Miamis, tout en faisant du service comme cadet dans les troupes de la Marine et en effectuant quelques voyages de traite occasionnels au fort des Sables (Irondequoit, New York), à Baie-des-Puants (Green Bay, Wisconsin) et à Michillimakinac (Mackinaw City, Michigan). Le 7 août 1730, à Montréal, il s’alliait à une famille en vue dans la traite des fourrures en épousant Marie, fille de Nicolas-Antoine Coulon* de Villiers, père. Trois ans plus tard, il était présent à un affrontement entre les Sauks et les Renards, près de Baie-des-Puants, et fut témoin de la mort de son beau-père et d’autres membres de sa parenté [V. Nicolas-Antoine Coulon* de Villiers, fils].

On se proposait de nommer Dagneau enseigne en second en 1734, mais le ministre de la Marine le confondit avec son frère, Philippe Dagneau Douville de La Saussaye, et une commission corrigée ne fut émise qu’en 1736. Cette année-là, Dagneau servait à titre d’officier et d’interprète au fort Frontenac (Kingston, Ontario) ; en 1739, il fut chargé de porter à Détroit des présents destinés aux Outaouais. Deux ans plus tard, il était promu enseigne en pied. Après avoir de nouveau servi au fort Frontenac en 1743, Dagneau fut envoyé au fort des Miamis (probablement Fort Wayne, Indiana, ou tout près) au printemps de 1746, afin d’escorter jusqu’à Montréal des représentants miamis. La menace d’un soulèvement général des Indiens dans l’Ouest [V. Orontony*] et la nouvelle qu’un parti de guerre agnier était au portage du Niagara l’empêchèrent de conduire la délégation au delà de Détroit, et, en son absence, les Miamis pillèrent le poste. L’intendant Bigot lui obtint par la suite 300# en compensation pour les marchandises qu’il y avait perdues.

Lors d’une importante conférence, à Québec, en novembre 1748, Dagneau servit d’interprète entre les autorités françaises et quelques chefs iroquois. Il fut fait lieutenant en 1750 et commanda à Sault-Saint-Louis (Caughnawaga, Québec). En juin 1754, il remplaça Jacques-François Legardeur de Courtemanche au commandement du fort de la Presqu’île (Erie, Pennsylvanie). C’était un poste stratégique, le premier d’une ligne de forts qu’on était à construire dans la vallée de l’Ohio, au moyen desquels les Français souhaitaient bloquer l’avance britannique, et Dagneau y commandait environ 100 hommes tant des troupes de la Marine que de la milice. L’année suivante, il fut remplacé par Antoine-Gabriel-François Benoist. Le 17 mars 1756, il se retira comme capitaine réformé et, depuis lors, vécut sur les terres de sa famille, à Verchères. S’il ne s’était pas distingué d’une façon particulière, Dagneau avait néanmoins connu une bonne carrière militaire. Il ne participa à aucune bataille d’importance, mais sa contribution, il l’apporta grâce à sa connaissance des langues et des coutumes des Indiens, en particulier celles des Iroquois et des Miamis.

En 1763, Dagneau fut l’une des 55 personnes accusées de mauvaise administration dans l’Affaire du Canada. Bien qu’il fût sommé, à Paris, de comparaître devant le Châtelet, il ne s’y rendit pas. La cour décida d’attendre de plus amples renseignements à son sujet, et l’issue de ce procès n’est pas connue avec certitude. Ce cas de mauvaise gestion différait fort peu, sans aucun doute, de ceux qui mettaient en cause des officiers de la « frontière » ; leur situation militaire leur donnait l’occasion de s’adonner au commerce, très souvent illicite. Le réseau de traite de Dagneau Douville était parmi les plus considérables de la Nouvelle-France. Louis-Césaire Dagneau* Douville de Quindre, Guillaume Dagneau Douville de Lamothe et Philippe Dagneau Douville de La Saussaye furent aussi des trafiquants éminents dans l’Ouest, et, comme leur frère, ils s’allièrent à des familles qui poursuivaient les mêmes intérêts qu’eux.

Alexandre eut au moins cinq enfants ; deux furent tués pendant la guerre de Sept Ans. Un troisième fils, Alexandre-René, fit une carrière d’officier aux Antilles ; à sa mort, en 1789, il était à la retraite comme lieutenant-colonel d’infanterie et il avait été créé chevalier de Saint-Louis.

Donald Chaput

AN, Col., D2C, 57, p.167 ; 59, p.63 ; 61, p.26 ; E, 103 (dossier Dagneau Douville) (copies aux APC).— ANQ-M, État civil, Catholiques, Notre-Dame de Montréal, 16 févr. 1734, 13 sept. 1740, 12 nov. 1744, 15 août 1748.— APC Rapport, 1904, app.K, 215, 228.— [G.-J. Chaussegros de Léry], Journal de Joseph-Gaspard Chaussegros de Léry, lieutenant des troupes, 1754–1755, ANQ Rapport, 1927–1928, 366, 376.— The French régime in Wisconsin–II, R. G. Thwaites, édit., Wis., State Hist. Soc., Coll., XVII (1906) : 188s., 278–287, 432.— NYCD (O’Callaghan et Fernow), X.— Papiers Contrecœur (Grenier), passim. Godbout, Nos ancêtres, ANQ Rapport, 1951–1953, 466.— Massicotte, Répertoire des engagements pour l’Ouest, ANQ Rapport, 1929–1930, 218, 245, 257, 298.— P.-G. Roy et al., Inv. greffes not., XVI : 99.— Tanguay, Dictionnaire. L’auteur fait erreur en indiquant qu’Alexandre Dagneau Douville épousa en secondes noces Marie Legardeur de Courtemanche ; tous les enfants de Dagneau sont issus de son mariage avec Marie Coulon de Villiers en 1730  [d. c.].— Hunter, Forts on Pafronder, 70–89, 122s.— Cameron Nish, Les bourgeois-gentilshommes de la Nouvelle-France, 1729–1748 (Montréal et Paris, 1968), 87, 161s.— P. J. Robinson, Toronto during the French régime [...] (2e éd., Toronto, 1965).— P.-G. Roy, Bigot et sa bande, 225s.— R. de Hertel, Michel d’Agneau d’Ouville et sa famille, Nova Francia (Paris), IV (1929) : 218–229.— Une conférence de M. de la Galissonnière avec les chefs iroquois, BRH, XXII (1916) : 347–349.

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Donald Chaput, « DAGNEAU DOUVILLE, ALEXANDRE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 3 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/dagneau_douville_alexandre_4F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1980
Année de la révision:    1980
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