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GAGE, sir WILLIAM JAMES, instituteur, homme d’affaires et philanthrope, né le 16 septembre 1849 dans le canton de Toronto, Haut-Canada, fils d’Andrew Albert Gage et de Mary Jane Grafton ; le 4 mai 1880, il épousa à Toronto Ina (Imey) Burnside, et ils eurent cinq filles, dont l’une mourut bébé ; décédé le 14 janvier 1921 dans cette ville.
Dernier d’une famille de sept enfants, William James Gage naquit dans une ferme au sud de Brampton. Son père venait de Stoney Creek ; sa mère, née en Caroline du Sud, était arrivée dans le Haut-Canada en 1812. Formé à Derry West et à la grammar school de Brampton, William James reçut son brevet d’enseignement de la Normal School de Toronto en 1866 et enseigna trois ans à Broddytown (Brampton) avant d’entrer à la Toronto School of Medicine. Incapable de tolérer les aspects sinistres de la salle d’opération, il quitta l’école au bout d’un an. Plus tard cependant, il consacrerait son temps et sa fortune au domaine de la santé.
À compter de 1871, Gage canalisa sa passion de l’efficacité, son dynamisme et ses idéaux méthodistes dans le commerce et les œuvres de bienfaisance. Il se lança d’abord dans l’achat et la vente de bois de corde à Brampton. Ensuite, il devint comptable chez un éditeur torontois, l’Adam Miller and Company. Après le décès de Miller en 1875, il resta à titre d’associé de la maison. En 1879, il en fit l’acquisition et la rebaptisa W. J. Gage and Company. Malgré la concurrence, l’intrusion gouvernementale et les différends sur le droit d’auteur, problèmes qui sévissaient sur le marché des manuels scolaires – sa principale gamme de produits –, Gage remporta un grand succès. En 1893, sa société fut constituée juridiquement. Une brochure de promotion distribuée par la suite affirmait : « il n’y a […] pas une seule localité dans tout le dominion où l’on ne trouve pas de manuels scolaires publiés par notre maison ».
Tout de suite après qu’un incendie eut détruit son immeuble de la rue Front en 1904, Gage bâtit avenue Spadina une manufacture de cinq étages « conçue pour que les opérations se déroulent de la manière la plus systématique et économique possible ». Outre des manuels, il vendait du papier à écrire et des enveloppes, et son exploitation intégrée comprenait aussi une usine de papier à St Catharines et des presses perfectionnées, de type Miehle, pour l’impression en couleurs. Figure imposante, Gage dirigeait ses affaires à partir d’un bureau richement décoré qui reflétait sa minutie et son sens du détail, qualités évidentes aussi dans sa vie personnelle. C’était un mari affectueux mais parfois possessif ; dans les lettres qu’il adressait à sa femme pendant ses voyages d’affaires, il la réprimandait souvent de ne pas lui écrire plus fréquemment.
En 1893, comme Gage disposait de quelque fortune, il avait commencé à s’intéresser à la tuberculose, alors la maladie la plus mortelle au Canada. Il se consacra au mouvement des sanatoriums (des médicaments efficaces ne seraient disponibles qu’à compter des années 1940) et étudia des sanatoriums européens et américains. En 1894, il offrit de financer un hôpital à Toronto. Sa proposition avait l’appui du Bureau de commerce, dont le président, Hugh Blain, l’avait encouragé à s’attaquer à la tuberculose, mais le conseil municipal hésitait. « Aucune […] récompense délicieuse n’attendait celui qui tentait de fonder des sanatoriums, surtout dans les premières années du mouvement », rappellerait Gage. Il reçut même des lettres de menaces. Dans la population, on croyait la tuberculose incurable et contagieuse ; on l’associait à l’indigence, à la misère, à la promiscuité et à des habitudes de vie insalubres. Toutefois, Gage s’entêta et, en 1895, Hart Almerrin Massey* et d’autres éminents citoyens décidèrent de soutenir ses efforts.
En 1896, Gage contribua à la fondation de l’Association sanitaire nationale et, deux ans plus tard, à celle du Toronto Citizens’ Sanatorium Committee, ce qui déboucha en 1900 sur la création de la Toronto Association for the Prevention and Treatment of Consumption and Other Forms of Tuberculosis. De 1897 à 1913, il organisa plusieurs établissements : le Muskoka Cottage Sanatorium et le Muskoka Free Hospital for Consumptives près de Gravenhurst ; le Toronto Free Hospital for Consumptives, le King Edward Sanatorium for Consumptives et le Queen Mary Hospital for Children, tous trois près de Weston (Toronto), ainsi qu’un dispensaire à Toronto. En 1912, il créa le King Edward Memorial Fund for Consumptives. L’année suivante, en récompense de ses initiatives, il fut fait « chevalier de grâce » de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem en Angleterre.
Gage se servit aussi de son argent pour promouvoir ses idées politiques et ses valeurs religieuses. En 1893, il avait été à la tête du groupe qui avait acheté l’Evening Star de Toronto en vue de combattre le gouvernement libéral de la province, car celui-ci, en s’assurant la mainmise sur le droit d’auteur de beaucoup de manuels, avait miné le quasi-monopole de sa maison d’édition. Gage voulait ce journal pour une autre raison : il souhaitait avoir un organe pour soutenir l’interdiction qui était faite aux tramways de Toronto de circuler le jour du Seigneur. À titre de président de la Citizens’ Anti-Sunday Car Association, il défia le maire Warring Kennedy de résister aux pressions croissantes en faveur de la levée de cette interdiction, signe d’une « époque dégénérée » selon le Star. Les campagnes de Gage prirent fin en 1895 parce qu’Edmund Ernest Sheppard, agissant pour le compte de Frederic Thomas Nicholls et de la Toronto Street Railway Company, acheta le journal.
Après le débat sur les tramways, qui se conclut en 1897 par l’autorisation de circuler le dimanche, Gage continua de participer à la vie de son milieu. Membre actif du Bureau de commerce, il fut délégué en 1909 au congrès des chambres de commerce de l’Empire, où il fit valoir que les colonies devaient avoir leurs propres lois sur le droit d’auteur. Élu président du bureau l’année suivante, il exerça des pressions en faveur de l’aménagement des berges torontoises du lac Ontario, de la création d’un conseil des commissaires du port et de l’amélioration des routes entre Toronto et le comté d’York. « Nous devons planifier en fonction [du jour où] la ville [comptera] un million d’habitants », déclara-t-il en janvier 1910. En novembre, il fut l’instigateur de l’Ontario Associated Boards of Trade, où il fut le premier à occuper la présidence.
Pendant les années de guerre, Gage continua de s’occuper des sanatoriums. À un coût de plus de 100 000 $, il finança la construction du nouveau siège social et dispensaire de l’Association sanitaire nationale (le Gage Institute), qui ouvrit ses portes le 10 février 1915. L’année suivante, il participa aux négociations en vue de l’admission de soldats tuberculeux au sanatorium de Muskoka ; on eut alors un exemple de son style autocratique et de son aptitude à soutirer le maximum de l’autre partie. En 1917, lui-même et sa femme mirent de côté 110 000 $ pour l’Ina Grafton Homes Corporation, dont le but était de fournir des logements loués aux veuves et orphelins de guerre. La même année, il reçut un doctorat honorifique en droit du Mount Allison College de Sackville, au Nouveau-Brunswick. En 1918, il obtint le titre de chevalier.
Sir William James Gage était très recherché par les conseils d’administration d’autres œuvres de bienfaisance et entreprises. Il fut président de la section torontoise du Victorian Order of Nurses et appartint au conseil d’administration de la Banque impériale du Canada, de la Traders’ Bank of Canada, de l’Ontario Sugar Company et de l’Anglo-American Fire Insurance Company. À la suite de l’incendie qui ravagea le Muskoka Free Hospital la veille du jour de l’An 1920, il fit une crise d’apoplexie et mourut à son domaine de Wychwood Park. La congrégation méthodiste Trinity, dont il était membre, tint deux services en son honneur. Le Toronto Daily Star déclara que, en Gage, « un esprit aimable et compréhensif s’alliait à une grande ténacité ». Gage représentait une génération d’hommes d’affaires qui consacrèrent leurs bénéfices à des causes humanitaires en vue de voir se concrétiser leur idée d’une société meilleure.
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Molly Pulver Ungar et Vicky Bach, « GAGE, sir WILLIAM JAMES », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 12 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/gage_william_james_15F.html.
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Auteur de l'article: | Molly Pulver Ungar et Vicky Bach |
Titre de l'article: | GAGE, sir WILLIAM JAMES |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2005 |
Année de la révision: | 2005 |
Date de consultation: | 12 déc. 2024 |