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Titre original :  Anne Langton, self-portrait [watercolour miniature on ivory]. 1827. Archives of Ontario.

Provenance : Lien

LANGTON, ANNE, pionnière, artiste, auteure et institutrice, née le 24 juin 1804 à Farfield Hall, Bolton Abbey, Angleterre, deuxième enfant et fille unique de Thomas Langton et d’Ellen Currer ; décédée le 10 mai 1893 à Toronto.

À la naissance d’Anne Langton, sa bonne fortune et son rang dans la société semblaient assurés. Son père, benjamin d’une famille de six, n’espérait pas hériter d’une grande fortune et s’était donc fait commerçant de lin et de chanvre. Avec l’argent ainsi amassé, il avait acheté Blythe Hall, près d’Ormskirk, quelques mois après la naissance de sa fille. Cependant, Anne était destinée à quitter la vie élégante d’Europe pour une existence primitive dans les forêts du Haut-Canada. Son éducation raffinée la prépara beaucoup mieux à l’émigration qu’on ne le croirait de prime abord. Ses parents supervisèrent la restauration de leur maison du Lancashire, qui faisait peine à voir, et en firent un idyllique domaine rural. C’est là qu’ils éduquèrent leurs enfants. Ellen Currer Langton, fille d’un pasteur du Yorkshire, était apparentée aux sœurs Brontë ; selon la petite-fille qui prépara sa correspondance pour la publication, Thomas Langton cachait, sous des allures conventionnelles, des « instincts de voyageur et d’explorateur ».

En 1815, peu après la défaite de Napoléon à Waterloo, Thomas Langton déracina sa famille afin d’élargir les horizons de ses enfants. Leur tournée européenne n’eut rien d’un voyage d’agrément. Durant six ans, ils menèrent une vie nomade, quoique civilisée, et parcoururent plusieurs pays. Leur première destination fut Yverdon, sur le lac de Neuchâtel, en Suisse. Le pédagogue avant-gardiste Johann Heinrich Pestalozzi y dirigeait un institut que le frère cadet d’Anne, John, fréquenta. Quant à celle-ci et à son frère aîné, William, ils eurent pour précepteurs des maîtres de l’institut. Pestalozzi encourageait l’expression des talents individuels au lieu des apprentissages mécaniques compétitifs et favorisait l’expérience et la perception sensorielle comme sources de formation. C’étaient là des principes judicieux pour de futurs pionniers. Les Langton étudièrent les langues, la littérature, la musique, l’art et l’escrime. Les voyages qu’ils firent par la suite leur enseignèrent à supporter les vicissitudes avec philosophie et à mieux apprécier les cultures étrangères – autres atouts d’une valeur inestimable. En Suisse, en Autriche et en Italie, ils visitèrent des galeries d’art, assistèrent à des concerts, à des fêtes ainsi qu’à une audience du pape. Ils habitèrent Francfort-sur-le-Main, Montpellier, Florence, Rome, Venise, Naples et Paris. Anne copiait les grands maîtres, dessinait tantôt des paysages inspirés de la composition « idéale », tantôt des gens en costume du pays, ou alors des croquis de sa mère et de sa tante Alice, de dos, ce qui ne constituait pas un très grand défi. Parmi les voyageurs que les Langton en vinrent à bien connaître en Europe, il y avait Isaac Weld* et sa famille (l’ouvrage de celui-ci Travels through [...] the provinces of Upper and Lower Canada [...], paru à Londres en 1799, inciterait John Langton à immigrer dans le Haut-Canada) ainsi que Mariana Starke, renommée pour ses récits de voyage.

Puis les Langton durent abandonner subitement leur quête presque effrénée de culture et de savoir parce qu’à Liverpool le commerce familial, administré par un neveu, périclitait. En 1820, Thomas revint donc en Angleterre pour inscrire John dans une école et tenter de sauver l’entreprise. Tous deux rejoignirent leur famille sur le continent pour Noël. Au début de 1821, les Langton rentrèrent en toute hâte en Angleterre et s’installèrent dans une petite maison à Liverpool. Ils pensaient n’avoir quitté Blythe Hall que temporairement ; en fait, ils ne retourneraient jamais y vivre. Ils vendirent la maison à ceux qui l’avaient louée durant leur absence à l’étranger.

De 1821 à 1837, Anne Langton tint maison, visita des amis intimes et des parents, copia des œuvres d’art de collections particulières et fit de la miniature, qu’elle avait étudiée à Paris. À l’époque, les Langton recevaient peu, mais en 1825 ils accueillirent les membres de l’expédition de John Franklin* avant leur départ pour l’Arctique. La même année, ils s’installèrent non loin de Liverpool, à Bootle, paisible station thermale de la côte. William poursuivait depuis 1826 une belle carrière de banquier, et John étudiait à Cambridge, mais leur père était au bord de la faillite. En 1833, John partit pour le Haut-Canada et s’installa au lac Sturgeon, près d’autres familles de pionniers de bonne bourgeoisie comme celles de Thomas Alexander Stewart*, de Samuel Strickland*, de Thomas Traill et de John Wedderburn Dunbar Moodie*. Anne, ayant enfin convaincu son père de la laisser tirer un revenu de son art, peignait des portraits, mais seulement à la demande de parents et d’intimes. En 1837, les Langton avaient de si maigres ressources qu’ils décidèrent de mettre à exécution ce qu’ils appelaient leur « projet Canada » : aller vivre avec John. Le 24 mai, Thomas, Ellen, Alice et Anne se mirent en route, non sans qu’on les ait prévenus que c’était un « projet plutôt fou » pour trois vieillards souffrants et une célibataire qui, parvenue au milieu de la trentaine, devenait sourde.

À New York, Anne visita une exposition d’« artistes américains », puis elle dessina des scènes du Nouveau Monde, dont certaines rappelaient des paysagistes de l’école de l’Hudson. Devant les chutes du Niagara, qu’elle vit « avant de [s’]enterrer au fond des bois », elle connut un conflit esthétique : incapable d’appréhender leur « magnificence » avec justesse, elle n’en fit, selon ses propres mots, qu’une « présomptueuse représentation ». Comme à la basilique Saint-Pierre de Rome, elle constata qu’il fallait « vagabonder et revenir bien des fois sur [ses] pas » afin de saisir des perspectives différentes ; « les vues elles-mêmes peuvent être partielles ou obscures, disait-elle, mais séparément et ensemble elles nourrissent et élargissent l’imagination ». Poursuivant leur route par Toronto, le lac Rice et Peterborough – « Comme c’est sauvage ! Une vaste étendue de bois » – les Langton atteignirent enfin Blythe, où ils s’entassèrent tous, avec leurs affaires, dans la petite cabane de rondins de John, en attendant que celui-ci ait terminé « la grande maison », c’est-à-dire la première habitation à étage, en rondins elle aussi, de la région. Là, le paysage, les constructions et « surtout les chemins » étaient d’« une grande rudesse » qui choqua la sensibilité raffinée d’Anne. Bientôt cependant, elle nota avec sagesse : « On s’émerveille plutôt que tant de choses aient été accomplies. » Thomas ne survécut que quelques mois à l’immigration. Courageusement, la famille accrut ses terres et son cheptel et aménagea la propriété en une oasis qui rappelait les plus beaux jardins anglais. La rébellion de William Lyon Mackenzie* perturba les fêtes de Noël ; John fut parmi les colons locaux alertés pour empêcher les rebelles de s’enfuir par un chemin détourné.

Préparée, par son éducation, à fleurir comme une « tendre plante exotique » dans l’atmosphère raréfiée des salons anglais, Anne Langton appliquait désormais son intelligence aux aspects pratiques de la vie de pionnier. Elle tenait les comptes, posait des vitres aux fenêtres, cousait d’épais capitonnages ; faire boucherie, préparer des conserves, cuire le pain, fabriquer des bougies et du savon, tout cela n’eut bientôt plus de secrets pour elle. Quelques jours après son arrivée, elle s’était aussi lancée, de sa propre initiative, dans un travail auquel elle consacrait ses temps libres et qu’elle mit des années à terminer dessiner les alentours de sorte que la famille de William et ses autres parents aient « une petite idée du monde où [elle] vi[vait] ». Elle tenait son journal pour la même raison.

L’univers qu’Anne Langton avait laissé derrière elle connaissait d’énormes changements culturels ; on peut étudier ses dessins et son journal dans ce contexte. En Grande-Bretagne, Edmund Burke avait produit des écrits marquants sur l’idée du sublime, et William Gilpin avait influencé le pittoresque ; l’aquarelle avait supplanté en partie la peinture à l’huile, surtout pour les paysages ; la miniature était florissante. C’était aussi l’époque des premiers écrits féministes d’auteures comme Mme de Staël, Mary Wollstonecraft et Harriet Martineau. Cependant, Anne Langton n’embrassait les idées féministes que dans la mesure où les circonstances l’exigeaient. Plus elle apprenait à se débrouiller dans les bois, plus elle était fière d’elle-même mais, encore sous l’emprise des idéaux traditionnels de comportement « féminin » passif, elle minait le développement de son autonomie en se demandant constamment si elle manifestait assez les « vertus » passives féminines. Par la suite, elle admit qu’elle aurait bien pu gagner sa vie comme artiste si elle avait appartenu à une famille où les filles étaient nombreuses, comme c’était le cas d’Anna Brownell Jameson [Murphy*] et des sœurs pionnières Susanna Moodie [Strickland*] et Catharine Parr Traill [Strickland]. Tout de même, son influence débordait la sphère domestique. À Blythe, elle fonda la première école de voisinage et la première bibliothèque de prêt de la région (la collection des Langton comptait au delà de 1 200 volumes). Dans les environs, on comptait beaucoup sur ses conseils médicaux, surtout pendant les épidémies de fièvre. En outre, elle était « ministre » subrogée quand John s’absentait pour affaires. (Comme un ministre ordonné ne fut nommé en permanence dans le district qu’en 1838, John, qui était le colon dont les qualités s’en rapprochaient le plus, célébrait des offices à la ferme.)

Le journal d’Anne Langton, édité après sa mort par son neveu Hugh Hornby Langton* et publié sous le titre A gentlewoman in Upper Canada [...], présente un intérêt indéniable. Vivant et personnel, il permet de suivre jour après jour, saison après saison, année après année, la vie domestique, agricole et communautaire. Il rapporte les épreuves et les triomphes des pionniers : comment, peu à peu, ils vainquirent la forêt et fondèrent une colonie nouvelle ; comment ils acquirent des techniques essentielles à leur survie ; combien les mauvaises récoltes les décevaient ; combien la sécheresse, le feu, la maladie causaient des ravages. Avec bon sens, l’artiste qu’était Anne Langton investissait ses impulsions « créatrices » dans le travail quotidien : « Faire bouillir du savon se rapproche plus de la création que tout ce que je connais. On met dans un chaudron les pires déchets qui soient et on en tire l’article le plus utile. »

Contrairement à Anna Jameson, Susanna Moodie ou Catharine Parr Traill, Anne Langton n’écrivit et ne dessina jamais en vue de la publication. Sans mener une existence luxueuse, elle avait de quoi vivre, et l’épithète désobligeante de « bas-bleu » que s’attiraient les femmes qui montraient leur savoir en public avait peut-être un effet inhibiteur sur son esprit. Le journal de Mary Sophia O’Brien, mère de l’artiste Lucius Richard O’Brien, qui ne devait pas non plus être publié, est banal à côté du sien. Il est aussi plus prosaïque, tout comme les lettres de Frances Stewart [Browne*]. Les réactions de Mary O’Brien et d’Anne Langton devant les chutes du Niagara permettent de saisir à quel point leur vision des choses différait. Des deux, Mary O’Brien se montre la plus conformiste : « Les eaux arrivaient gaiement, emportées dans le tumulte par le simple caprice de leur joie. » Par contre, Anne Langton étudie la perspective, l’échelle, les circonstances, et se place à divers points de vue avant de noter ses conclusions, qui sont pleines de discernement. Le récit d’accouchement que Mary O’Brien fait à partir de sa propre expérience fait écho à ce qu’Anne Langton écrit, à partir de témoignages, sur la résistance des pionnières. Le journal d’Anna Jameson est celui d’une voyageuse de passage, douée, il est vrai, d’un sens aigu de l’observation. Ceux d’Elizabeth Posthuma Simcoe [Gwillim*], de lady Durham et de lady Dufferin, visiteuses officielles et privilégiées, sont relativement superficiels.

Le journal d’Anne Langton est la chronique à la fois sobre et résolument enjouée de quelqu’un qui est venu au pays, s’y est établi et y a connu des épreuves. À propos du sort des pionnières, elle écrit : « Elles ont la part la plus difficile ; leurs tâches sont plus uniformément ternes, et aucune romance ne vient y ajouter un peu de brillant. » De la vie des pionniers en général, elle dit avec réalisme : « Il ne saurait y avoir d’existence aussi peu poétique et aussi peu romanesque que la nôtre. » On imagine sans peine cette vieille fille dure d’oreille, assise le soir au « petit salon », comme Jane Austen, consignant tranquillement ses impressions. Moins pratiques que ceux de Catharine Parr Traill, beaucoup moins négatifs que ceux de Susanna Moodie, ses commentaires parfois défavorables ne s’inspirent « nullement d’un désir de se plaindre » ; elle veut simplement permettre à ses lecteurs d’« imaginer plus précisément le type de civilisation [qu’elle et son entourage ont] atteint ». En femme de la bonne société, elle fait montre d’un esprit délicat, mais son humour est acéré et doucement ironique : « Je pense que les Dunsford nous éclipseront tout à fait car, dit-on, ils apportent une voiture avec eux. J’espère qu’ils n’oublieront pas d’apporter aussi un bon chemin. » Son contemporain Thomas Need, qui a publié l’un des seuls comptes rendus de la vie pionnière écrits d’un point de vue masculin, a inspiré à Anne Langton, qui n’écrivait que pour ses proches, ce commentaire froid, assez exceptionnel de sa part : « C’est une bien petite chose pour avoir tant attiré l’attention [...] des périodiques [...] Je pense qu’il a été bien payé pour le mal qu’il s’est donné afin de rassembler cela – c’est assez vide. » Et ce l’était certainement, en comparaison de ses propres écrits, minutieux et réfléchis.

Les années 1845 à 1847 constituèrent une période critique dans la vie d’Anne Langton. En 1845, John se maria. Pendant l’épidémie de fièvre de 1846, Ellen Langton et Alice Currer moururent à quelques semaines d’intervalle. En 1847, Anne accompagna John et sa femme Lydia en Angleterre ; elle y resta trois ans. En 1849, elle se trouva encore à un tournant. Devait-elle rester dans la famille de William et « perdre [sa] vie » en faisant office d’ornement ? prendre un poste de gouvernante à l’école de jeunes filles qu’une amie tenait près de Londres ? ou retourner pour aider à élever la nouvelle génération « canadienne » de Langton ? Pas plus qu’auparavant, les circonstances ne la forcèrent à choisir l’indépendance. En décidant de retourner, en 1850, dans la famille de John, elle optait pour le soutien mutuel et la réalisation partielle de soi. Les Langton abandonnèrent la vie de pionniers en 1851, car John avait été élu cette année-là député de la circonscription de Peterborough. Après avoir habité cette ville, ils vécurent là où siégeait le gouvernement : à Toronto de 1855 à 1860, à Québec de 1860 à 1865 puis à Ottawa de 1865 à 1878. À Peterborough, Anne remplit les fonctions d’organiste et de directrice de la musique à l’église St John ; on présume que son problème auditif n’était pas assez grave pour l’empêcher de diriger les chants de la congrégation. Quand John prit sa retraite, en 1878, les Langton retournèrent vivre à Toronto. Anne avait fait d’autres séjours prolongés en Grande-Bretagne : de 1860 à 1862, de 1868 à 1870, et de 1873 à 1875. À sa dernière visite, en 1880, elle était encore assez en forme pour faire du tourisme.

Les œuvres picturales d’Anne Langton sont nombreuses et variées : essais de jeunesse réalisés en Europe ; croquis pris sur le vif pour des scènes forestières ; délicieuses miniatures captant des traits de personnalité et d’époque ; plus tardivement, aquarelles très réussies de paysages du Canada, d’Angleterre, d’Irlande, d’Écosse et du nord du pays de Galles. Ses voyages enrichirent son répertoire de sujets et sa connaissance des nouvelles tendances artistiques, mais des années 1820 aux années 1840 elle rata les grandes expositions qui se tinrent en Europe et dans le Haut-Canada. Bien qu’elle n’ait jamais consacré tout son temps à l’art, elle fut plus habile que la plupart des peintres amateurs, surtout les femmes. Après avoir immigré, elle abandonna la miniature : ni elle-même ni ses sujets n’avaient assez d’heures de loisir. Pragmatique, elle se concentrait sur les scènes forestières, tout en admettant : « Je souhaiterais que nos paysages soient plus beaux et l’artiste, plus habile. » Elle risquait sa réputation artistique en dessinant son univers quotidien : cabanes de rondins, souches, clôtures en treillis, forêts denses. Ses paysages ne sont pas académiques comme les premières études topographiques que peignirent au Canada des artistes comme sir Richard Henry Bonnycastle* et Charles Fothergill*. En voyant ses arbres, rendus à la manière de l’artiste anglais Thomas Girtin, on perçoit davantage la masse du feuillage que les détails. Jamais simplement pittoresques ni sentimentales, comme une si grande partie de l’art victorien au Canada ou en Grande-Bretagne, ses œuvres tardives comprennent certains éléments qui n’entrent pas dans la catégorie du beau, telles les cheminées industrielles du nord de l’Angleterre. Sans être à l’avant-garde, Anne Langton, pour une femme qui travaillait dans la sphère privée, et souvent dans l’isolement, était remarquablement de son époque par le choix de ses sujets et sa façon de les traiter. Pendant ses dernières visites en Angleterre, dans les années 1870 et en 1880, elle acquit un style beaucoup plus personnel, comme en témoignent ses représentations dramatiques de lieux aussi souvent dépeints que la grotte de Clapham ou la falaise appelée Gordale Scar.

En 1879, Anne Langton écrivit The story of our family. Tirée à un nombre restreint d’exemplaires en 1881, en Angleterre, cette rétrospective est plus personnelle que la chronique qui devait paraître sous le titre A gentlewoman. À propos des premiers temps qui avaient suivi son installation au Canada, elle écrivait : « Jamais je n’oublierai combien je me suis sentie désespérée à cette époque [...] Cela semblait en effet une transition brutale pour un groupe pareil que de venir en un lieu pareil, mais nous faisions bien attention, en écrivant au pays, d’en dire le moins possible sur nos difficultés. » Elle rédigea ce livre dans la première maison de retraite des Langton, au 23, avenue Prince Arthur, qui devint par la suite le siège social de la Women’s Art Association of Canada.

Anne Langton mourut au 123, rue Beverley, dernier domicile des Langton, près de l’endroit où s’élève maintenant le Musée des beaux-arts de l’Ontario. Devenue trop vieille pour « vagabonder », elle s’adonna, dans ses dernières années, aux traditionnels ouvrages de dames – broderie et peinture sur porcelaine – et légua de délicats objets décoratifs à ses proches. Dans ses dessins, encore charmants, et ses chroniques vivantes, elle a laissé, au pinceau, au crayon et à la plume, un riche héritage pour les générations suivantes de ses descendants culturels des deux côtés de l’Atlantique. Pour faire écho à son propre commentaire lorsqu’elle vit les chutes Niagara pour la première fois, ses mots et ses images visuelles offrent des vues « partielles » mais jamais « obscures » qui, « séparément et ensemble, aident à l’expansion de l’imagination » du lecteur et du spectateur.

Barbara Williams

Les publications d’Anne Langton comprennent : The story of our family (Manchester, Angl., 1881), seule œuvre éditée de son vivant ; et A gentlewoman in Upper Canada ; the journals of Anne Langton, H. H. Langton, édit. (Toronto, 1950 ; réimpr., 1967). Les journaux et la plupart des lettres qui paraissent dans Langton records : journals and letters from Canada,1837–1846, [E. J. Philips, édit.] (Édimbourg, 1904), sont aussi de sa main. Un poème, Dreams sleeping and waking, est inclus dans William Langton, Sonnets, original and translations from the Italian (Manchester, 1897), 74–75. Un autoportrait en miniature ainsi qu’un paysage à l’aquarelle et plusieurs de ses dessins sont reproduits dans A gentlewoman ; The valley of the Trent, introd. D’E. C. Guillet, édit. (Toronto, 1957), est aussi illustré de ses œuvres.

Les établissements publics qui possèdent ses peintures et ses dessins sont : AO, MU 1692–1693 ; et Picture Coll. (cette dernière comprend un autoportrait et huit portraits à l’aquarelle de membres de la famille exposés dans le bureau de l’archiviste) ; MTRL, Hist. Picture Coll. ; AN, Division de l’art documentaire et de la photographie ; Univ. of Toronto Arch. (B65-0014 :0001, 0003, 0006–0007) ; et le Village of Fenelon Falls, Ontario (Anne Langton articles).

AO, MU 1690–1691 ; MU 2186, sér. B.— Univ. of Toronto Arch., B65-0014.— M. [S. Gapper] O’Brien, The journals of Mary O’Brien, 1828–1838, Audrey Saunders Miller, édit. (Toronto, 1968).— [L. E. Grey Lambton, comtesse de] Durham, Letters & diaries of Lady Durham, Patricia Godsell, édit. (Ottawa, 1979).— [H. G. Hamilton Blackwood, marquise de] Dufferin [et Ava], My Canadian journal, 1872–1878, Gladys Chantler Walker, édit. (Don Mills [Toronto], 1969).— Thomas Langton, Letters of Thomas Langton to Mrs. Thomas Hornby, 1815 to 1818 ; with portraits, and a notice of his life, [E. J. Philips, édit.] (Manchester, 1900 ; copies à la Bibliothèque nationale du Canada, Ottawa, et à la Univ. of Toronto Library).— Pioneer and gentlewomen of British North America, 1713–1867, Beth Light et Alison Prentice, édit. (Toronto, 1980).— Globe, 12–13 mai 1893.— Harper, Early painters and engravers.— Patricia Branca, « Image and reality : the myth of the idle Victorian woman », Clio’s consciousness raised : new perspectives on the history of women, M. S. Hartman et L. [W.] Banner, édit. (New York, 1974), 179–191.— Judy Chicago, The dinner party : a symbol of our heritage (Garden City, N.Y., 1979).— Germaine Greer, The obstacle race : the fortunes of women painters and their work (Londres, 1979).— A. J. Hammerton, Emigrant gentlewomen : genteel poverty and female emigration, 1830–1914 (Londres et Totowa, N.J., 1979).— Elsa Honig Fine, Women and art : a history of women painters and sculptors from the Renaissance to the 20th century (Montclair, N.J., 1978).— Barbara Williams [Wilson], Anne Langton : pioneer woman and artist (Peterborough, Ontario, 1986) ; « Strangers in a strange land » – literary use of Canadian landscape by five genteel settlers » (thèse de m.a., Univ. of Guelph, Ontario, 1973).

Bibliographie générale

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Barbara Williams, « LANGTON, ANNE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 19 mars 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/langton_anne_12F.html.

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Auteur de l'article:    Barbara Williams
Titre de l'article:    LANGTON, ANNE
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1990
Année de la révision:    1990
Date de consultation:    19 mars 2024