Titre original :  Portrait of John Penman, [after 1931], D.A. Smith Photograph Collection, 1999.9113.01, Paris Museum and Historical Society via OurOntario.ca.

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PENMAN, JOHN, fabricant de textile et de vêtements, et philanthrope, né le 17 ou le 19 mai 1845 ou 1846 à New York, fils de Daniel Penman et de Clementine (Clementina) Menzies ; le 9 septembre 1890, il épousa dans le canton de Brantford, Ontario, Martha McVicar (1862–1934), et ils n’eurent pas d’enfants ; décédé le 19 octobre 1931 à Paris, Ontario, et inhumé à Brooklyn (New York).

Le père de John Penman, Daniel, diplômé de la University of Glasgow, quitta l’Écosse pour la ville de New York, où il enseigna les mathématiques et la géographie. En 1843, il y épousa Clementine Menzies. Il s’installa avec sa famille à Woodstock, dans le Haut-Canada, en 1865, et mit sur pied une fabrique de lainages et une petite usine de bonneterie. John, scolarisé à la maison, assurait la gestion de cette dernière. Comme un manque d’énergie hydraulique freinait les possibilités d’expansion, Daniel acheta, trois ans plus tard, une scierie dans la ville voisine de Paris, à côté du barrage de la rivière Nith. John et l’immigrant anglais William E. Adams, expert en machines à tricoter industrielles fabriquées aux États-Unis, fondèrent une usine, qu’un incendie ravagea peu après. Leur partenariat prit fin, et Adams se joignit à James Henry Hackland afin de construire une autre manufacture. En 1870, les Penman bâtirent un grand établissement pour y produire des sous-vêtements et de la bonneterie, qui compta dès lors parmi les dix industries du genre au Canada. En novembre de cette année-là, Daniel écrivit à un ami que, malgré quelques revers, « rien ne [pouvait] intimider [son] fils, chaque malheur ne l’[avait] rendu que plus déterminé ».

En janvier 1882, neuf mois après la mort de son père, John Penman constitua la Penman Manufacturing Company Limited avec un capital de 250 000 $. À titre de président, et avec des actions évaluées à 16 700 $, il en était l’actionnaire majoritaire. Parmi les membres du conseil d’administration figuraient aussi David Morrice, commissionnaire de Montréal, et trois hommes de Hamilton : Charles Edmund Newberry et les frères Horace James et William Dubart Long. En 1883, Penman employait 400 des 750 travailleurs des principaux établissements de bonneterie de Paris. Quatre ans plus tard, il reprit la fabrique d’Adams et de Hackland, qu’il renomma la Penman’s No.2. Il acheta plusieurs terrains supplémentaires le long de la rivière Grand ; ainsi, il empêchait les concurrents de s’installer à Paris et pouvait étendre ses activités. En 1893, il procéda à une recapitalisation d’un million de dollars dans le but de dominer l’industrie des lainages au Canada. En fusionnant des exploitations, généralement au moyen d’un échange d’actions avec des propriétaires de petites fabriques, il éliminait le risque que ceux-ci réduisent leurs prix et contrôlait ainsi les ventes. Cette année-là, il acquit la Coaticook Knitting Company au Québec, la Peninsula Knitting Mills à Thorold, en Ontario, et la Norfolk Knitting Mills à Port Dover. Il obtiendrait, cinq ans plus tard, la Watson Manufacturing Company de St Catharines et ferait transporter sa machinerie à Paris. En 1903, il acheta d’autres entreprises à Dundas, localité voisine, et à Saint-Hyacinthe, au Québec. Les anciens propriétaires et directeurs continuaient souvent à administrer les exploitations qu’ils avaient vendues. Ces consolidations permettaient notamment d’augmenter le pouvoir de négociation dans l’achat de matières premières et de diversifier la gamme de produits que Morrice présentait aux détaillants. Quand la demande s’essoufflait, Penman fermait temporairement les fabriques en périphérie pour maintenir ses prix.

Penman avait épousé Martha McVicar en 1890. Il acquit, à peu près au même moment, le manoir en pierre construit par Hiram Capron, ferronnier et fondateur de Paris. Les Penman y ajoutèrent des éléments d’ornementation de style seigneurial écossais, dont une tourelle, et agrémentèrent les pièces de couleurs gaies. À Penmarvian, comme ils nommèrent la propriété, résidaient également des membres de la famille de Martha : ses parents, l’une de ses sœurs et son neveu Harold George Smith, dont la mère avait perdu la vie peu après sa naissance. Le garçon avait été élevé à Brantford par son père et ses grands-parents paternels. Les Penman, qui n’avaient pas d’enfants, l’adoptèrent officieusement après ses études secondaires et financèrent sa formation ultérieure. Harold George fit son apprentissage dans les fabriques de son oncle.

Malgré la sombre conjoncture économique des années 1890, la Penman Manufacturing Company Limited – désormais la première usine de lainage en importance au pays – rapportait des dividendes stables. Le processus de production consistait à carder et à filer la laine, souvent en incorporant du coton, puis à tricoter sous-vêtements, bonneterie, chandails et couvertures. L’entreprise était réputée surtout pour ses combinaisons (sous-vêtements d’hiver pour hommes, femmes et enfants), qu’on expédiait en grandes quantités par wagons couverts dans les camps de bûcherons. La Truro Knitting Mills Company Limited de Nouvelle-Écosse, dirigée par les frères John et Frank Stanfield, confectionnait la deuxième marque la plus populaire.

La Penman Manufacturing Company Limited n’avait pas de service des ventes. Contre une commission de 4 %, Morrice, représentant de presque tous les fabricants de textile canadiens, se chargeait de la mise en marché. Sa firme agissait à titre de cartel non officiel : elle surveillait la production et les prix, et vendait la marchandise aux grossistes qui, à leur tour, négociaient avec les détaillants. William Dubart Long administrait l’entreprise qui fournissait la laine brute, tandis qu’un autre directeur de Penman, l’Hamiltonien Peter Duncan Crerar de l’Imperial Cotton Company, assurait l’approvisionnement en coton. Tout au long de sa carrière, Penman voyagea aux États-Unis et en Europe pour suivre les tendances et les progrès en matière d’équipement. Il conçut des machines innovantes pour fabriquer des chandails et des chaussettes à motifs, et déposait fréquemment des brevets aux États-Unis et au Canada.

Penman employait un petit nombre d’hommes comme cardeurs et superviseurs, mais ses équipes se composaient en majorité de femmes, réputées plus habiles pour filer, tricoter et coudre, qu’on recrutait dans les fermes de la région. Une pénurie chronique de travailleuses à Paris limitait néanmoins la production. Pour pallier ce problème, Penman acheta l’American Plow Company en 1902. Il la réinstalla dans sa ville et y muta les 50 travailleurs de l’entreprise, qu’il renomma la Paris Plow Company ; il put ainsi embaucher les femmes de leurs familles dans ses usines. L’équipement agricole ne se vendait pas beaucoup, cependant, et l’endettement de la société mère croissait. Les deux compagnies firent faillite en 1906 et la Sovereign Bank of Canada les reprit. Un syndicat composé de plusieurs directeurs de la Dominion Textile Company Limited de Montréal, fondée par David Yuile* l’année précédente, acheta les fabriques, et on constitua la nouvelle firme sous le nom de Penmans Limited, dont la Watson Manufacturing Company devint une filiale. Penman demeura président de cette dernière et continua d’occuper un bureau à Paris. En novembre 1912, les directeurs montréalais lui demandèrent toutefois de démissionner.

L’année suivante, Penman et son neveu Harold George Smith établirent la Mercury Mills à Hamilton, plaque tournante ontarienne de l’industrie primaire du coton et du tricot. La compagnie, productrice de sous-vêtements et de bonneterie, prospéra grâce au sens du style de Penman et aux talents de gestionnaire de Smith. Une augmentation de la demande pendant la guerre leur permit de réaliser des profits ; ils les utilisèrent pour la construction, en 1916, d’une fabrique à la fine pointe de la technologie et alimentée à l’électricité, dont l’entrée arborait un relief en pierre calcaire de 30 pieds de hauteur à l’effigie de Mercure, dieu romain du commerce. Avec ses deux filiales, la Maitland Spinning Mills de Listowel et l’Oxford Knitting Company de Woodstock, la Mercury Mills comptait plus de 1 000 employés, recrutés en grand nombre en Angleterre. Durant les années 1920, la Mercury Mills ajouta des sous-vêtements en soie et en rayonne à sa gamme de produits, en plus de chandails et de tenues de sport.

Penman, que son petit-neveu Harold Penman Smith décrivit comme un homme « réservé », était toujours élégamment vêtu, même quand il séjournait à sa résidence d’été dans la région ontarienne de Muskoka. Fervent presbytérien, il lisait les Écritures à sa famille et à ses domestiques chaque matin, et dirigeait la prière. Pendant 26 ans, il servit à titre de conseiller presbytéral de son Église, à laquelle il versa de l’argent pour ses missions en Chine et en Inde. Entre 1897 et 1928, il siégea aux comités local, national et international de la Young Men’s Christian Association et finança la construction d’un établissement pour l’organisation à Hankou (Wuhan), en Chine. Penman se montra également généreux envers la ville de Paris. Il lui fit don d’un immeuble pour la Young Men’s Christian Association en 1905 et participa à la mise sur pied de la Central School en 1908. Pour soutenir ses employées et assumer les responsabilités de ses fabriques vis-à-vis de la communauté et des futures recrues, il soutint financièrement la Young Women’s Christian Association locale. Il lui arrivait également de payer la formation universitaire d’étudiants et d’offrir des paniers de nourriture aux personnes dans le besoin. Il fut aussi membre du conseil d’administration et du conseil universitaire du Knox College de Toronto. Ayant conservé sa citoyenneté américaine, il ne se porta jamais candidat à une charge publique.

Après la mort de John Penman, on transporta sa dépouille aux États-Unis afin de l’enterrer dans le lot familial. Il légua Penmarvian à l’Église presbytérienne du Canada pour qu’elle serve de résidence aux ministres du culte retraités, aux missionnaires, ainsi qu’à leurs épouses et à leurs veuves. Il laissa une partie de sa collection d’art à l’Art Gallery of Hamilton. Bibliothèque et Archives Canada conserve des échantillons du travail effectué dans les fabriques de Penman, dont des écheveaux de différentes couleurs et des motifs si denses que même des tricoteurs et tricoteuses d’expérience trouveraient difficiles à reproduire.

Barbara J. Austin

AO, F 181 (Penman family fonds).— BAC, R1351-0-6 (Dominion Textile Company fonds), sér. 16, vol. 19, dossier 3 ; sér. 17, vol. 19, dossier 5 et vol. 20, dossiers 1–2 ; sér. 18, vol. 21, dossiers 4–5.— Paris Museum & Hist. Soc., Ontario, Holdings on Penman Manufacturing Company and Penmans Ltd.— Paris Star, 28 mai 1986.— B. [J.] Austin, « Combinations », Assoc. des sciences administratives du Canada, Rapport ([Canada]), 23 (2002) : 1–10.— Fred Bemrose, « A history of Penmans », dans The read book (Paris, 1994), 20–23, 79.— Joy Parr, The gender of breadwinners : women, men, and change in two industrial towns, 1880–1950 (Toronto et Buffalo, N.Y., 1990).— D. A. Smith, At the forks of the Grand : volume II (Paris, 1982).— D. A. Smith et J. P. Pickell, At the forks of the Grand : 20 historical essays on Paris, Ontario ([Paris, 1956]).— Vanished Hamilton, Margaret Houghton, édit. (4 vol., Burlington, Ontario, 2005–2012), 4 : 103.

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Barbara J. Austin, « PENMAN, JOHN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 4 déc. 2025, https://www.biographi.ca/fr/bio/penman_john_16F.html.

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Auteur de l'article:    Barbara J. Austin
Titre de l'article:    PENMAN, JOHN
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2025
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Date de consultation:    4 déc. 2025